Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 3
ARRET DU 16 DECEMBRE 2010
(n° , 7 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 09/02818
Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 Décembre 2008 -Tribunal d'Instance de PARIS 05ème arrondissement - RG n° 11-08-000097
APPELANT :
- Monsieur [S] [L]
demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Bruno NUT, avoué à la Cour
assisté de Me Serge BEYNET, avocat au barreau de PARIS, toque : C 482
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2009/008694 du 13/03/2009 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)
INTIMÉS :
- SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DU [Adresse 1], pris en la personne de ses représentants légaux
ayant son siège [Adresse 2]
représenté par la SCP Pascale NABOUDET-VOGEL - Caroline HATET-SAUVAL, avoués à la Cour
assisté de Me Wolfgang LENERZ, avocat plaidant pour la SCP PAULET-LENERZ, avocat au barreau de HAUTS DE SEINE, toque : PN 718
- Mademoiselle [C] [V] [O]
demeurant [Adresse 1]
non comparante non représentée
(Assignation devant la Cour d'appel de PARIS en date du 12/06/2009 - déposée à l'Etude d'Huissiers de justice conformément aux articles 656 et 658 du Code de procédure civile)
(Dénonciation extra judiciaire en date 21 mai 2010 - remise à sa personne)
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 04 Novembre 2010, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Nicole PAPAZIAN, présidente
Madame Isabelle REGHI, conseillère, entendue en son rapport
Madame Michèle TIMBERT, conseillère
qui en ont délibéré
Greffier
lors des débats et du prononcé : Mademoiselle Béatrice PIERRE-GABRIEL
ARRÊT : PAR DÉFAUT
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Nicole PAPAZIAN, présidente et par Mademoiselle Béatrice PIERRE-GABRIEL, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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EXPOSÉ DES FAITS DE LA PROCÉDURE
Par acte sous-seing privé du 10 mai 1978, M. [N], aux droits de qui est venu le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1], a donné en location à M. [L] et Mme [V] [O] un appartement situé [Adresse 1].
Par acte du 17 novembre 2005, le syndicat des copropriétaires a délivré un congé, motivé par la nécessité de loger la gardienne dans les lieux.
Par acte du 12 mars 2008, le syndicat des copropriétaires a fait assigner M. [L] et Mme [V] [O] en validation de congé et en expulsion devant le tribunal d'instance du 5ème arrondissement de Paris qui, par jugement du 18 décembre 2008, a :
- validé le congé, en retardant ses effets au 24 juin 2007,
- ordonné l'expulsion de M. [L] et Mme [V] [O],
- fixé le montant de l'indemnité d'occupation mensuelle due par M. [L] et Mme [V] [O] à 1 000 €,
- condamné M. [L] et Mme [V] [O] au paiement de 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Par déclaration du 10 février 2009, M. [L] a fait appel du jugement.
Dans ses dernières conclusions, signifiées le 11 octobre 2010, M. [L] demande :
- l'infirmation du jugement,
- de dire que le bail est régi par les dispositions générales de la loi du 1er septembre 1948,
- le débouté des demandes du syndicat des copropriétaires,
subsidiairement :
- la nullité du congé,
plus subsidiairement :
- la fixation d'une indemnité d'occupation mensuelle au montant du loyer contractuel en principal à compter du jugement,
reconventionnellement :
- la condamnation du syndicat des copropriétaires au paiement de 10 000 € à titre de dommages et intérêts,
- sa condamnation à la remise des quittances de loyer depuis 2006, sous astreinte de 100 € par jour de retard à compter de l'arrêt,
- sa condamnation à payer 3 000 € au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Dans ses dernières conclusions, signifiées le 21 octobre 2010, le syndicat des copropriétaires demande :
- de dire irrecevable la demande de dommages et intérêts de M. [L],
- la confirmation du jugement,
- l'expulsion de M. [L] et Mme [V] [O], faute pour eux d'avoir quitté les lieux dans les 30 jours de la signification de l'arrêt,
- la fixation d'une indemnité d'occupation mensuelle due solidairement par M. [L] et Mme [V] [O] à la somme de 1 387,20 € à compter du prononcé du jugement et, à tout le moins, une indemnité de 23 582,40 € pour la période du 18 décembre 2008 au 18 mai 2010,
y ajoutant :
- au cas où M. [L] et Mme [V] [O] ne seraient pas condamnés à l'indemnité d'occupation de 1 387,20 €, de les condamner solidairement au paiement de la somme de 17 246,57 € à titre d'indemnités d'occupation en application de la clause résolutoire du bail initial, compte arrêté au 30 mai 2010,
- le débouté des demandes de M. [L] et Mme [V] [O],
- leur condamnation solidaire à payer 5 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens, qui pourront être recouvrés par la SCP Naboudet Hatet, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Mme [V] [O], assignée par acte du 12 juin 2009 à l'étude de l'huissier de justice, n'a pas constitué avoué.
La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du 21 octobre 2010.
CELA EXPOSE, LA COUR,
Considérant que M. [L] fait valoir l'autorité de chose jugée de l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 27 novembre 1987 confirmant les jugements du Tribunal d'instance du 5ème arrondissement de Paris des 20 septembre 1984 et 2 mai 1985 qui ont, notamment, dit que le bail du 10 mai 1978, conclu au visa de l'article 3 quinquies de la loi du 1er septembre 1948, n'a pu prendre effet, que les rapports entre les parties sont régis par les dispositions générales de la loi du 1er septembre 1948 et fixé le montant du loyer légal ;
Considérant que le syndicat des copropriétaires réplique que l'autorité de chose jugée ne peut lui être opposée, les procédures n'ayant ni le même objet, ni la même cause, ni les mêmes parties ; qu'à supposer que les dispositions de la loi du 1er septembre 1948 s'appliquent au contrat de location, la législation ayant changé depuis l'arrêt, les lois postérieures ont exclu du champ d'application de la loi du 1er septembre 1948 certaines catégories de locaux, notamment ceux de la catégorie II B et II C, auxquelles appartiennent les lieux loués ; que le contrat de location s'est donc trouvé soumis aux dispositions de la loi de 1986 puis de l'actuelle loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 ;
Considérant, en premier lieu, que c'est à raison que M. [L] soulève l'autorité de chose jugée des décisions judiciaires susvisées devenues définitives, s'agissant du même contrat de location et de sa nature juridique et les parties étant les mêmes, le syndicat des copropriétaires étant venu aux droits du bailleur initial ;
Considérant, en deuxième lieu, que, dans la mesure où la Cour d'appel a confirmé le jugement qui a écarté l'application du bail dérogatoire conclu au visa de l'article 3 quinquies de la loi du 1er septembre 1948, aucune des dispositions de la loi du 23 décembre 1986 prévoyant le sort de tels baux à la date de leur expiration n'était applicable ;
Considérant, en troisième lieu, que si le législateur a prévu des dispositifs dits de sortie de la loi du 1er septembre 1948, il en a fixé précisément les conditions ; qu'en l'espèce, que les lieux soient classés dans la catégorie II C comme l'a motivé le premier juge dans son jugement du 2 mai 1985 ou dans la catégorie II B comme l'estime un rapport d'expertise daté de janvier 2010, ils n'étaient pas vacants lors de l'entrée en vigueur de la loi n°86-1290 du 23 décembre 1986 comme l'exige l'article 25 de la loi qui n'a donc pu trouver à s'appliquer et aucun bail de sortie répondant aux conditions visées aux articles 28 à 33 de cette même loi n'a été conclu ; que, dès lors, la loi du 1er septembre 1948 n'a pas cessé de régir les rapports des parties ; qu'ainsi, contrairement à ce que le syndicat des copropriétaires soutient, les dispositions transitoires des lois de 1982, 1986 et 1989 étaient sans incidence sur un bail soumis au régime de la loi du 1er septembre 1948 ; qu'il importe peu, au regard des dispositions d'ordre public de cette loi, qu'une décision de l'assemblée générale ait transformé en parties communes les lots loués par M. [L] ; que le congé délivré le 17 novembre 2005 ne répond à aucune des conditions posées par la loi du 1er septembre 1948 ; que sa nullité est donc encourue ;
Considérant que le syndicat des copropriétaires, qui n'a pas délivré à M. [L] de congé visant les articles 10-2 et 10-3 de la loi du 1er septembre 1948, n'est pas fondé à demander la résiliation judiciaire du bail sur ces fondements ;
Considérant que le syndicat des copropriétaires demande alors la constatation de l'acquisition de la clause résolutoire, faute du règlement des loyers d'octobre et novembre 2005 ;
que, cependant, outre que le syndicat des copropriétaires n'a pas adressé de commandement de payer à M. [L], il résulte des décomptes produits que le syndicat des copropriétaires ne justifie pas, au mois de novembre 2005, de la créance qu'il allègue ; qu'il ne produit par ailleurs aucun décompte établissant que M. [L] resterait devoir de quelconques sommes au titre des loyers ou des charges ; que ses demandes en paiement et en résiliation pour défaut de paiement doivent donc être rejetées ;
Considérant enfin que le syndicat des copropriétaires demande le prononcé de la résiliation du bail pour manquement du locataire à son obligation de jouissance paisible ; qu'il verse des attestations d'occupants de l'immeuble évoquant le comportement agressif de M. [L] ;
Considérant toutefois que, dans les circonstances de l'espèce, soit la contestation du caractère légitime de l'occupation par M. [L] des lieux qu'il louait et la décision de l'assemblée générale des copropriétaires de procéder à la transformation des lots en parties communes, le comportement du locataire qui ne consisterait, à le supposer établi, qu'en répliques plus ou moins vives à l'égard de certains occupants, n'est pas de nature à justifier la résiliation du bail ;
Considérant enfin que s'agissant d'un bail soumis aux dispositions de la loi du 1er septembre 1948, et dont le loyer a été fixé, par jugement définitif, selon la catégorie II C, le syndicat des copropriétaires n'est pas fondé à réclamer des majorations d'indemnités d'occupation ;
Considérant que M. [L] demande l'allocation de dommages et intérêts, compte tenu du harcèlement judiciaire dont il a été l'objet de la part du syndicat des copropriétaires et compte tenu également que, depuis mai 2009, des travaux de ravalement, engagés par le syndicat des copropriétaires, ont endommagé une conduite le privant de gaz ;
Considérant que le syndicat des copropriétaires fait valoir qu'une telle demande est sans lien avec les demandes principales ;
Considérant que la demande de dommages et intérêts formée par M. [L] fondée à la fois sur le harcèlement qu'il invoque à l'encontre du syndicat des copropriétaires et dont il serait victime et sur l'absence de réparation de l'installation de gaz se rattache suffisamment à la demande de validation de congé, au sens de l'article 70 du code de procédure civile, dans la mesure où il s'agit des conditions d'exécution du contrat de location ;
Considérant toutefois que si M. [L] établit, par la production d'un rapport de l'électricité de France du 28 mai 2009, que la réparation de l'installation incombe au bailleur, il ne justifie pas avoir mis le syndicat des copropriétaires en demeure de procéder à cette réparation ; qu'il ne saurait ainsi prétendre à des dommages et intérêts pour manquement du bailleur à son obligation ; qu'en revanche, le syndicat des copropriétaires, en votant lors d'une assemblée générale du 28 juin 2007, la transformation des lots 6 et 7, loués par M. [L], en parties communes, alors qu'aucune procédure en validation de congé n'était encore engagée, a causé à M. [L] un préjudice dont il sera fait une exacte appréciation en condamnant le syndicat des copropriétaires à verser à M. [L] la somme de 1 500 € ;
Considérant que M. [L] demande la délivrance sous astreinte de quittances depuis 2006 ; qu'il sera fait droit à sa demande jusqu'au mois échu à la date des conclusions, soit septembre 2010, selon les modalités précisées au dispositif ;
Considérant qu'il y a lieu de condamner le syndicat des copropriétaires au paiement de 800 € au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
Considérant que le syndicat des copropriétaires doit être condamné aux dépens de première instance et d'appel
PAR CES MOTIFS
Infirme le jugement ;
Statuant à nouveau et y ajoutant :
Annule le congé délivré le 17 novembre 2005 ;
Déboute le syndicat des copropriétaires de toutes ses demandes ;
Condamne le syndicat des copropriétaires à payer à M. [L] la somme de 1 500 € à titre de dommages et intérêts ;
Condamne le syndicat des copropriétaires à délivrer à M. [L] les quittances de loyer depuis le 1er janvier 2006 jusqu'au mois de septembre 2010 inclus, sous astreinte de 10 € par jour de retard, deux mois après la signification de la présente décision ;
Déboute M. [L] du surplus de ses demandes ;
Condamne le syndicat des copropriétaires à payer à M. [L] la somme de 800 € au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
Condamne le syndicat des copropriétaires aux dépens de première instance et d'appel, avec droit de recouvrement direct au profit des avoués en cause, conformément aux dispositions relatives à l'aide juridictionnelle.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE