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16/12/2010 | FRANCE | N°09/01978

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 11, 16 décembre 2010, 09/01978


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 11



ARRÊT DU 16 Décembre 2010

(n° 3 , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 09/01978 EG



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 02 Octobre 2008 par le conseil de prud'hommes de PARIS section Industrie RG n° 07/11693





APPELANT

Monsieur [D] [B]

[Adresse 5]

[Localité 7]

comparant en personne, assisté de Me Marie-Sophie ROZENBERG, avoc

at au barreau de PARIS, toque : L026





INTIMÉE

SAS [I] ORTHOPEDIE

[Adresse 3]

[Localité 6]

représentée par Me Véronique GIRARD, avocat au barreau de PARIS, toque : E 0264 su...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 11

ARRÊT DU 16 Décembre 2010

(n° 3 , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 09/01978 EG

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 02 Octobre 2008 par le conseil de prud'hommes de PARIS section Industrie RG n° 07/11693

APPELANT

Monsieur [D] [B]

[Adresse 5]

[Localité 7]

comparant en personne, assisté de Me Marie-Sophie ROZENBERG, avocat au barreau de PARIS, toque : L026

INTIMÉE

SAS [I] ORTHOPEDIE

[Adresse 3]

[Localité 6]

représentée par Me Véronique GIRARD, avocat au barreau de PARIS, toque : E 0264 substitué par Me Graziano PAFUNDI, avocat au barreau de PARIS, toque : E 264

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 Octobre 2010, en audience publique, les parties assistée et représentée ne s'y étant pas opposées, devant Madame Evelyne GIL, Conseillère , chargée d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Jean-Michel DEPOMMIER, Président

Madame Evelyne GIL, Conseillère

Madame Isabelle BROGLY, Conseillère

Greffier : Mademoiselle Séverine GUICHERD, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Jean-Michel DEPOMMIER, président et par Séverine GUICHERD, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Vu l'appel régulièrement formé par [D] [B] contre un jugement du conseil de prud'hommes de PARIS en date du 2 octobre 2008 ayant statué sur le litige qui l'oppose à son ancien employeur, la société [I] ORTHOPEDIE.

Vu le jugement déféré ayant :

- condamné la société [I] ORTHOPÉDIE à verser à [D] [B] les sommes de :

10'008 € au titre du remboursement de la rupture anticipée du préavis,

1 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- débouté [D] [B] du surplus de ses demandes et la société [I] ORTHOPÉDIE de sa demande reconventionnelle,

- condamné cette dernière aux dépens.

Vu les conclusions visées par le greffier et développées oralement à l'audience aux termes desquelles :

[D] [B], appelant, poursuit :

- la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il porte condamnation à paiement,

- son infirmation pour le surplus,

- la requalification en licenciement sans cause réelle et sérieuse de la rupture du contrat de travail,

- la condamnation de la société [I] ORTHOPÉDIE à lui payer les sommes de :

219'983,39 € à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires,

21'998,33 € à titre d'indemnité de congés payés sur les heures supplémentaires,

219'983,39 € à titre d'indemnité pour repos compensateur non pris,

21'998,33 € à titre d'indemnité de congés payés sur les repos compensateurs,

63'686,23 € à titre d'indemnité pour travail dissimulé,

10'008 € bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés afférents,

28'936,67 € à titre d'indemnité légale de licenciement,

135'288,36 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

20'300 € au titre du prorata de prime pour le second semestre 2007,

2 030 € au titre des congés payés y afférents,

10'000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

avec intérêts au taux légal et capitalisation des intérêts conformément à l'article 1154 du Code civil,

- la condamnation de la société [I] ORTHOPÉDIE aux dépens.

La société [I] ORTHOPÉDIE, intimée et appelante incidente, conclut :

- à la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a débouté [D] [I] de ses demandes,

- à son infirmation en ce qu'il porte condamnation à paiement, rejet de la demande reconventionnelle et condamnation aux dépens,

- à la constatation du bien-fondé de l'interruption du préavis en raison du comportement fautif du salarié,

- à la condamnation de [D] [B] à lui restituer la somme de 14'430 € (charges sociales comprises) avec intérêts au taux légal à compter du 3 février 2009, date du paiement effectué en vertu de l'exécution provisoire attachée au jugement,

- à sa condamnation à lui payer les sommes de :

10'000 € à titre de dommages et intérêts en raison de son action abusive engagée dans l'intention de nuire à son employeur qu'il a volontairement quitté pour des motifs personnels,

10'000 € en vertu de l'article 700 du Code de procédure civile en sus des entiers dépens de première instance et d'appel.

FAITS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

La société [I] ORTHOPÉDIE qui déclarait occuper, lors des faits,

26 employés, a pour activité la fabrication de prothèses et d'orthèses pour des patients handicapés en exécutant les commandes qui lui sont adressées par ordonnances par des médecins libéraux ou hospitaliers ou attachés à des centres de soins hébergeant ces patients de façon temporaire ou permanente.

Pour remplir son objet, elle emploie des applicateurs dont la fonction spécifique consiste à prendre les mesures pour les besoins du travail de fabrication et, une fois l'appareillage fabriqué, à procéder aux essayages, réglages et éventuelles adaptations. Les applicateurs sont en contact direct et régulier avec les médecins prescripteurs et les autres auxiliaires médicaux intervenant sur place, notamment les kinésithérapeutes.

Suivant contrat de travail signé le 1er septembre 1988, la société [I] ORTHOPÉDIE a engagé [D] [B], à compter du 30 août 1988, en qualité d'applicateur en orthoprothèse moyennant une rémunération brute de 7'000 F par mois.

Le salarié a été promu ultérieurement applicateur responsable sans bénéficier toutefois du statut de cadre. En son dernier état, sa rémunération brute mensuelle de base s'élevait à

4 760 € augmentés d'une prime d'ancienneté de 147,71 €, heures supplémentaires non comprises.

Par lettre du 4 septembre 2007, le salarié a notifié sa démission au président de la société [I] ORTHOPÉDIE dans les termes suivants :

' Cela fait bientôt 19 ans que je suis au service de la Société [I] Orthopédie. Je me suis considérablement investi durant ces années, contribuant significativement à la prospérité et au renom de l'entreprise. Il y avait une relation de confiance et de respect mutuel, voire d'affection profonde et de dévouement entre [U] [I] et moi-même. Il n'y a jamais eu d'histoires d'argent ni de statut entre nous. L'affectif primait sur la hiérarchie.

Je n'ai pas compté mon temps, travaillant régulièrement 70 heures semaines.

Le 19 février 2007, mes employeurs, alors qu'ils m'avaient toujours promis que mes efforts seraient récompensé par, le moment venu, un statut d'associé, m'ont annoncé qu'ils partaient à la retraite et vous avaient vendu leur société. Bien entendu, à ce moment j'ai ressenti une très forte déception et un sentiment aigu de trahison : je suis mis devant le fait accompli, on m'explique que de toutes manières, je n'ai pas la capacité à gérer la société et enfin, on me demande de continuer à mettre toute mon énergie et ma compétence à votre service.

Comme vous me l'avez demandé, je vous ai communiqué le 12 mars 2007 un document où j'expliquais d'une part mes activités et mon importance en termes opérationnels et de chiffre d'affaires dans la société, et d'autre part mes souhaits en termes de statut, positionnement et rétribution dans la société.

J'ai reçu une fin de non-recevoir le 20 mars 2007 : vous m'avez expliqué que mon statut actuel correspond à la réalité et que vous ne voyez pas en quoi j'aurais contribué plus qu'un autre au succès de la Société.

Dans ces conditions, et comme je vous l'ai indiqué, je ne peux qu'accepter votre position mais rien ne justifie que de mon côté je continue à faire des cadeaux à la Société.

En effet j'effectue depuis plusieurs années maintenant une moyenne de 60-70 heures de travail hebdomadaires, du lundi matin au samedi 14h00, et je travaille en plus dès le dimanche à mon domicile afin de rectifier les appareillages pour qu'ils soient prêts à être traités le lundi par la Société REGNIER.

Or je suis payé sur la base de 38 heures hebdomadaires et mes heures supplémentaires ne m'ont jamais été payées !

Dès lors que comme vous me l'avez indiqué, mon statut et mes fonctions sont ceux d'un

$gt;, il n'y a aucune raison que je ne fasse pas valoir mes droits.

J'entends donc obtenir le règlement de ces heures supplémentaires qui représentent mon travail pendant de nombreuses années et qui ne m'ont jamais été réglées, et qui ne m'ont jamais donné droit à une quelconque contrepartie ou à une reconnaissance particulière de la part de la Société qui de son côté a largement bénéficié de mes efforts.

Au regard de cette situation, il est évident que je n'ai plus ma place au sein de votre Société au sein de laquelle je suis privé de toute perspective, et qui ne me rémunère pas mon travail ; je me vois contraint de vous signifier ma décision de quitter mon emploi en tant qu'applicateur responsable.

Cette décision est contrainte par les nombreuses difficultés que je rencontre pour exécuter mon contrat de travail, les promesses non tenues, et notamment par le fait que les heures réellement travaillées ne m'ont jamais été rémunérées.

Pour mémoire, depuis le mois de septembre 2002, j'ai effectué près de 4000 heures supplémentaires et j'ai calculé que la somme de 433'219 € m'est due de ce chef par votre société.'

Le 14 septembre 2007, la société [I] ORTHOPÉDIE a pris acte de la 'démission claire et non équivoque' de [D] [B] et lui a rappelé que, compte tenu de son préavis de 3 mois, il ne ferait plus partie des effectifs de la société à compter du

4 décembre 2007.

Le 10 octobre 2007, elle l'a convoqué à se présenter le 19 octobre 2007 à un entretien préalable à une sanction disciplinaire pouvant aller jusqu'à une interruption de préavis et donc une rupture immédiate de la relation de travail.

Le 22 octobre 2007, elle lui a notifié l'interruption de son préavis et la rupture immédiate de la relation de travail pour les motifs suivants :

- la remise tardive par ses soins des invitations aux 'Rencontres [I] ORTHOPÉDIE' du 5 octobre 2007 qui attestait d'un comportement volontaire et d'un manque de loyauté envers l'entreprise,

- l'absence de remise de l'ensemble des fichiers informatiques professionnels créés depuis que la société [I] ORTHOPÉDIE avait mis à sa disposition un ordinateur portable, soit depuis plus de 5 ans, qui traduisait un comportement déloyal.

C'est dans ces circonstances que [D] [B] a saisi le conseil de prud'hommes, le

26 octobre 2007, de ses demandes tendant à voir requalifier sa démission en licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamner son employeur à lui payer les indemnités consécutives à un tel licenciement ainsi que le solde de son préavis, les heures de travail supplémentaires effectuées et la prime du second semestre 2007.

Il fait valoir :

- qu'il a effectué, durant l'exécution de son contrat de travail, de nombreuses heures supplémentaires qui ne lui ont jamais été rémunérées,

- que son salaire était fixé sur la base de 151,67 heures de travail par mois, outre 3 heures complémentaires par semaine payées ou récupérées,

- que 18 témoignages émanant de ses anciens collègues et des médecins avec lesquels il a travaillé attestent de ses dépassements d'horaires,

- qu'il a relevé ceux-ci sur des décomptes établis à partir de son agenda tenu jour par jour depuis novembre 2002, de l'intégralité de ses feuilles de tournée remises quotidiennement à son employeur et des courriels relatifs notamment aux fichiers de fraisage adressés depuis son domicile,

- que la société [I] ORTHOPÉDIE n'ayant pas tenu les promesses d'évolution de carrière qu'elle lui avait faites, il a réclamé le paiement de ses heures supplémentaires et tiré les conséquences du manquement grave de son employeur en prenant acte de la rupture du contrat de travail à ses torts aux termes d'une lettre dans laquelle il utilise le terme

'démission' de façon équivoque,

- que le défaut de paiement de sommes ayant le caractère de salaires constitue une faute grave qui fait produire à la rupture des effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- que cette rupture lui a causé un préjudice important,

- qu'au surplus, la société [I] ORTHOPÉDIE a, de façon injustifiée, mis fin à son préavis et a refusé de lui verser la prime exceptionnelle qu'elle lui réglait habituellement en juillet et en décembre de chaque année, étant précisé qu'il a reçu à ce titre 11'400 € en juillet 2006 et en juillet 2007 et 20'300 € en décembre 2006 et que sa rémunération de base était identique, soit 4 760 €.

La société [I] ORTHOPÉDIE soutient :

- que [D] [B] qui a créé une entreprise unipersonnelle, la société ESPACE ORTHO SCOLIOSE et parallèlement, en association avec un médecin prescripteur, la société civile immobilière KAFI BASTILLE, acquéreur des locaux dans lesquels il exerce son activité indépendante, n'avait nullement l'intention de continuer à travailler au service de son employeur,

- qu'il a manifesté un comportement déloyal d'une part, en ne distribuant que très tardivement les cartons d'invitation à la journée 'portes ouvertes' organisée le 5 octobre 2007 afin de permettre à la nouvelle direction et aux salariés de l'entreprise de rencontrer les prescripteurs et les praticiens concernés par l'activité de la société et d'autre part, en ne restituant pas immédiatement et intégralement l'ensemble des documents professionnels stockés sur le disque dur de l'ordinateur mis à sa disposition,

- que le décompte de ses heures supplémentaires n'était pas honnêtement établi,

- que les centres qu'il visitait ne fermaient pas à 19 ou 20 heures, mais autour de 16 heures,

- que n'étant pas prescripteur et bénéficiant de près de 20 ans d'expérience, il ne consacrait pas une demi-heure à chaque patient,

- que ses feuilles de liaison fournies pour tenter de justifier des heures supplémentaires correspondant à un travail à domicile sont sans aucun rapport avec ses feuilles de tournée dont certaines font apparaître le nom d'un applicateur autre que [D] [B],

- que son agenda n'existait pas et a été confectionné a posteriori,

- qu'il mentionne des temps de travail et des déplacements en période de congés ou au cours des périodes de fermeture de l'entreprise,

- que les incohérences sont révélées par la comparaison des différents documents,

- que dès lors, les plannings et décomptes de temps qui mélangent les types de documents ne sont pas de nature à étayer sa réclamation,

- qu'au surplus, il n'a pas pu effectuer en 2007 des heures supplémentaires à la demande et dans l'intérêt de son employeur, le nouveau président lui ayant expressément demandé de rationaliser son organisation et de déléguer des tâches à ses collègues,

- qu'il a remis aux secrétaires des feuilles de tournées réelles, annotées par ses soins, destinées à établir le planning de l'atelier, les devis et les factures ainsi que l'organisation des tournées suivantes,

- que ces feuilles font apparaître le nombre exact de patients dont il s'est occupé et le nombre d'appareils pour lesquels il a pris des mesures, fait un essayage, une livraison, des retouches un contrôle,

- qu'en appliquant un temps de travail réel par tâche et par centre, la société a analysé et recalculé le temps de travail de [D] [B] pour les années 2003, 2004 et 2005,

- qu'il ressort qu'il disposait en 2003 de 20 % de temps de travail libre affecté à des tâches commerciales et d'organisation et en 2004 et 2005, de 14 % de ce même temps de travail libre,

- que l'ensemble de ses demandes fondées sur l'existence d'heures de travail supplémentaires non rémunérées, y compris la requalification de sa démission, doit donc être rejeté,

- qu'en effet, les faits et leur chronologie montrent que la démission du 4 septembre 2007 est la conséquence de la création des entreprises du salarié les 4 septembre 2007 et 2 février 2008 et non la cause ou le fait générateur de cette création,

- que la rupture du contrat de travail pendant le préavis est justifiée par la remise tardive des invitations aux rencontres du 5 septembre 2007 et par la non restitution des données professionnelles appartenant à son employeur en même temps que la restitution de l'ordinateur portable,

- que dans de telles circonstances, l'employeur était bien-fondé à ne pas lui régler la prime exceptionnelle versée en raison de l'esprit d'équipe et du dynamisme du salarié.

SUR CE

- Sur la demande en paiement du solde de l'indemnité de préavis (10'008 € bruts)

À la suite de la lettre de [D] [B] du 4 septembre 2007, son contrat de travail aurait dû se poursuivre jusqu'au 3 décembre 2007, terme de la période de préavis de 3 mois.

La société [I] ORTHOPÉDIE y a mis fin le 24 octobre 2007, à l'issue d'une procédure de sanction disciplinaire engagée le 10 octobre 2007 en raison du comportement déloyal du salarié et aux motifs d'une part, qu'il a volontairement remis tardivement aux professionnels de son secteur les invitations aux Rencontres [I] ORTHOPÉDIE du 5 octobre 2007 qu'il devait leur distribuer, de sorte qu'un seul visiteur de son secteur s'est présenté, d'autre part, qu'il a restitué l'ordinateur qui lui avait été confié, vidé de ses données, ayant intentionnellement retiré les données professionnelles et l'ensemble des fichiers informatiques appartenant à l'employeur.

Il résulte des attestations de plusieurs professionnels travaillant avec [D] [B] que celui-ci leur a bien remis des invitations aux Rencontres du 5 octobre 2007 mais qu'ils n'ont pu s'y rendre en raison notamment de la tenue, le même jour, du congrès SOMFER, du salon de la rééducation à [Localité 9] et du congrès national de médecine physique et de la réadaptation à [Localité 8].

Par ailleurs, la société [I] ORTHOPÉDIE ne justifie pas qu'elle a fourni au salarié, avec son ordinateur portable, des logiciels professionnels qu'il ne lui a pas restitués et qu'il a intégralement vidé cet ordinateur de ses données alors qu'il est fait état de 3 dossiers comportant des fichiers incomplets sans précision ni justification des éléments manquants.

Dans ces conditions, la rupture anticipée du préavis ne paraît pas justifiée et c'est à raison que le conseil de prud'hommes a alloué à ce titre à [D] [B] la somme de 10'008 €, congés payés compris. La société [I] ORTHOPÉDIE sera en conséquence déboutée de sa demande en restitution de cette somme et des charges sociales payées en sus.

- Sur la demande en paiement de la prime exceptionnelle du 2e semestre 2007 et des congés payés afférents (20'300 € + 2 030 €)

Le contrat de travail de [D] [B] ne fixe que la rémunération brute mensuelle sans prévoir le versement de primes. Toutefois, l'examen des bulletins de paie du salarié montre qu'une prime exceptionnelle lui a été versée 2 fois par an, en juillet et en décembre de chaque année, régulièrement depuis au moins l'année 1990. Aucun avenant n'en précise les conditions d'attribution et les objectifs 2007 signés par [D] [B] à une date non précisée n'en font pas état.

Cette prime s'est élevée à 11'400 € en juillet 2006, 20'300 € en décembre 2006 et 11'400 € en juillet 2007. L'appelant en sollicite le paiement pour la période de juillet à novembre 2007.

La société [I] ORTHOPÉDIE ne conteste pas la pratique suivie dans l'entreprise de verser une prime exceptionnelle aux salariés récompensant leur esprit d'équipe et leur dynamisme.

Cette pratique constante, générale et fixe, a acquis la valeur contraignante de l'usage.

Jusqu'au 10 octobre 2007, l'employeur n'a adressé aucun reproche au salarié. Les conditions d'attribution de la prime ont donc été remplies du fait de son activité jusqu'au mois d'octobre 2007, de sorte que, sur la base du montant réglé à ce titre en décembre 2006, la société intimée lui est redevable de 13'533 € outre 1 353 € au titre des congés payés.

- Sur les réclamations liées à la demande en paiement d'heures de travail supplémentaires

Au vu des bulletins de paie de [D] [B], il apparaît que, de novembre 2002 à janvier 2004, des heures de travail supplémentaires ont été rémunérées sous forme de primes.

Les différents plannings, décomptes et autres documents produits par les parties comportant des renseignements contradictoires, la cour estime devoir recourir à une mesure d'instruction afin de déterminer la réalité et, s'il y a lieu, l'étendue du travail supplémentaire effectué et non rémunéré.

Il convient en conséquence de surseoir à statuer sur le surplus de l'appel et des demandes.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Confirme le jugement déféré en ce qu'il porte condamnation au paiement du préavis et des congés payés afférents ;

L'infirme en ce qu'il déboute [D] [B] de sa demande en paiement de la prime exceptionnelle du second semestre 2007 ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne la société [I] ORTHOPÉDIE SAS à payer à [D] [B] les sommes de :

13'533 € au titre de la prime exceptionnelle du second semestre 2007,

1 353,30 € au titre des congés payés afférents ;

Dit que les sommes allouées par le jugement du 2 octobre 2008 et par le présent arrêt porteront intérêts au taux légal et que lesdits intérêts seront capitalisés dans les conditions de l'article 1154 du Code civil ;

Déboute la société [I] ORTHOPÉDIE de sa demande en restitution de la somme versée en exécution du jugement entrepris, au titre de la rupture anticipée du préavis;

Sursoit à statuer sur le surplus de l'appel et des demandes ;

Avant dire droit sur la demande de [D] [B] en paiement des heures de travail supplémentaires,

Désigne monsieur [S], demeurant : Monsieur [S] [Adresse 4] (tél : [XXXXXXXX01] - Portable : [XXXXXXXX02])

en qualité de constatant, avec mission de :

- entendre les parties et tout sachant,

- se faire communiquer et prendre connaissance de tous documents utiles à la solution du litige,

- rechercher si [D] [B] a effectué du 26 octobre 2002 au 24 octobre 2007 des heures de travail complémentaires et supplémentaires qui ne lui ont pas été rémunérées,

- dans l'affirmative, en dresser le compte en précisant les évaluations retenues et en déterminant les repos compensateurs,

- plus généralement, fournir tous éléments utiles à la solution du litige,

- du tout, dresser procès-verbal ;

Dit que le constatant devra déposer son procès-verbal au greffe du pôle social de la cour d'appel (pôle VI-11) en deux exemplaires et aux parties ou à leur conseil en un exemplaire avant le 30 juin 2011 ;

Dit que [D] [B] devra faire l'avance d'une provision de 2 000 € à valoir sur les frais de constat qui devra être versée au constatant avant le 31 janvier 2011 ;

Renvoie l'affaire à l'audience de procédure du 22 février 2011 à 9 heures ;

Dit que la notification du présent arrêt par lettre recommandée avec avis de réception par les soins du greffe vaudra convocation des parties pour cette audience ;

Réserve les dépens.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 11
Numéro d'arrêt : 09/01978
Date de la décision : 16/12/2010

Références :

Cour d'appel de Paris L2, arrêt n°09/01978 : Autre décision avant dire droit


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-12-16;09.01978 ?
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