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17/11/2010 | FRANCE | N°09/01739

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 6, 17 novembre 2010, 09/01739


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6



ARRET DU 17 Novembre 2010

(n° 14 , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 09/01739-CR



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 20 Novembre 2008 par le conseil de prud'hommes de PARIS section Encadrement RG n° 07/12902









APPELANTE

Madame [O] [H]

[Adresse 2]

[Localité 3]

comparant en personne, assistée de Me Em

manuelle LECHEVALIER, avocat au barreau de SEINE SAINT DENIS, toque : BOB187







INTIMÉE

Société LUNDBECK SAS

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Béatrice BRUGUES-REIX, avocat au ba...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6

ARRET DU 17 Novembre 2010

(n° 14 , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 09/01739-CR

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 20 Novembre 2008 par le conseil de prud'hommes de PARIS section Encadrement RG n° 07/12902

APPELANTE

Madame [O] [H]

[Adresse 2]

[Localité 3]

comparant en personne, assistée de Me Emmanuelle LECHEVALIER, avocat au barreau de SEINE SAINT DENIS, toque : BOB187

INTIMÉE

Société LUNDBECK SAS

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Béatrice BRUGUES-REIX, avocat au barreau de PARIS, toque : A0930

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 05 Octobre 2010, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Patrice MORTUREUX DE FAUDOAS, Président

Madame Bernadette VAN RUYMBEKE, Conseillère

Madame Claudine ROYER, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : Mme Evelyne MUDRY, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Patrice MORTUREUX DE FAUDOAS, Président et par Evelyne MUDRY, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

RAPPEL DES FAITS, PROCEDURE ET MOYENS DES PARTIES

Par jugement du 20 novembre 2008 auquel la Cour se réfère pour l'exposé des faits, de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, le conseil de prud'hommes de PARIS a :

débouté Madame [O] [H] de l'ensemble de ses demandes,

débouté la SAS LUNDBECK de ses demandes reconventionnelles et l'a condamnée aux dépens.

Madame [O] [H] a relevé appel de ce jugement par déclaration parvenue au greffe de la cour le 11 février 2009.

Vu les conclusions régulièrement communiquées et oralement soutenues à l'audience du 5 octobre 2010, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé de ses moyens et arguments aux termes desquelles Madame [O] [H] demande à la Cour de :

infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,

A titre principal,

dire et juger nul son licenciement économique en application de l'article L 1235-10 du code du travail,

en conséquence, ordonner sa réintégration dans son emploi ou dans un emploi équivalent, conformément aux dispositions de l'article L 1235-11 du code du travail,

assortir cette réintégration d'une astreinte de 5000 euros par jour de retard à compter du lendemain de la notification de l'arrêt à intervenir,

condamner en outre la Société LUNDBECK à lui verser la somme de 114395 euros sauf à parfaire, à titre de rappel de salaire à compter du 19 décembre 2007, terme du préavis, jusqu'au jour de sa réintégration effective,

condamner la société LUNDBECK à lui verser, mois après mois à compter de la notification de la décision à intervenir, un salaire mensuel de 3364,56 euros réactualisé en fonction de l'évolution des salaires selon la convention collective applicable,

A titre subsidiaire,

dire et juger son licenciement économique dépourvu de cause réelle et sérieuse,

en conséquence, condamner la société LUNDBECK à lui verser les sommes suivantes:

* 90000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 6729,12 euros à titre de dommages et intérêts pour défaut de proposition de convention de reclassement personnalisé,

* 3364,56 euros à titre de dommages et intérêts pour défaut d'information relative à la priorité de réembauchage,

en tout état de cause,

condamner la société LUNDBECK à lui verser les sommes de :

* 30000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice matériel et moral subi sur le fondement de l'article 1147 du code civil,

* 3500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

dire et juger que l'ensemble des condamnations portera intérêts au taux légal à compter du jour de l'introduction de la présente instance, à titre de réparation complémentaire, en application de l'article 1153-1 du code civil,

ordonner la capitalisation des intérêts en application de l'article 1145 du code civil,

condamner la Société LUNDBECK aux éventuels dépens.

Vu les conclusions régulièrement communiquées et oralement soutenues à l'audience du 5 octobre 2010, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé de ses moyens et arguments aux termes desquelles la SAS LUNDBECK demande à la Cour de :

dire et juger que le licenciement de Madame [H] était parfaitement légitime,

En conséquence,

confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

débouter Madame [H] de l'ensemble de ses demandes,

condamner Madame [H] à lui verser la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

condamner Madame [H] aux entiers dépens de l'instance.

MOTIFS

Suivant contrat de travail à durée déterminée du 22 juin 2004, transformé en contrat à durée indéterminée par avenant du 1er juin 2005, Madame [O] [H] a été engagée par la SAS LUNDBECK, laboratoires spécialisés dans la commercialisation de médicaments destinés à soigner les maladies du système nerveux central, en qualité de responsable du parc automobile et téléphonie mobile (groupe 6 niveau B de la convention collective nationale de l'industrie pharmaceutique).

Convoquée par lettre du 28 août 2007 a un entretien préalable fixé au 12 septembre 2009, Madame [H] a été licenciée par lettre du 17 septembre 2007 en ces termes :

« Nous faisons suite à l'entretien auquel vous étiez convoquée, en application de l'article L 122-14 du code du travail et qui s'est déroulé le 12 septembre 2009 en présence de [V] [G], Responsable Achats et Services Généraux.

Vous étiez assistée pendant cet entretien par Monsieur [J] [T].

Vous avez été embauchée le 28 juin 2004, et votre contrat faisait état, à une demande de votre part, d'une clause spécifique précisant :  « A titre exceptionnel, vous pourrez être amenée à exercer votre activité à votre domicile, sous réserve de l'autorisation préalable de votre hiérarchie ».

Compte tenu des impératifs de votre poste, une présence au siège est impérative 5 jours sur 5. La société a donc jugé bon, plutôt que de refuser systématiquement vos demandes de travail à domicile, de vous informer par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 7 juin 2007 que cette clause spécifique prendrait fin le 31 août 2007.

Vous avez refusé, par courrier recommandé du 8 août 2007, la suppression de cette clause au prétexte qu'elle impliquerait un déménagement. Ce refus nous a contraint à vous convoquer et à vous demander, lors de cet entretien, si vous souhaitiez maintenir votre position.

Lors de l'entretien du 12 septembre 2007, vous avez réitéré votre refus de continuer à travailler aux conditions normales et initiales de votre contrat de travail, à savoir au siège de notre entreprise du lundi matin au vendredi inclus.

Nous vous avons rappelé qu'il ne vous avait été demandé à aucun moment, de déménager.

En effet, la société a toujours eu connaissance de votre adresse à [Localité 3]; votre salaire mensuel tenait d'ailleurs compte d'une participation de l'entreprise à vos coûts de déplacement. Ce que vous avez reconnu. Cette mesure prise à votre seul avantage était également tout à fait exceptionnelle. Elle avait été acceptée à la demande du Directeur de Département. Nous avons également rappelé que vous étiez présente certains lundi et vendredi, en conformité avec votre contrat de travail, et ce, sans avoir déménagé.

Vous avez évoqué un accord, discuté selon vos dires avec le Directeur de Département auquel était rattaché votre responsable hiérarchique, au moment de votre embauche.

Cet accord, non écrit, aurait porté sur une autorisation de travail de 4 jours sur 5 dont un à votre domicile et du 5ème jour consacré aux transports. Cet accord ne se justifie en aucune manière, car vous étiez sur un contrat à temps plein comme en témoigne votre rémunération mensuelle.

En tout état de cause, l'accord que vous citez n'a été, en aucune manière, porté à la connaissance de la DRH, ni de votre hiérarchie directe de 2004, ni de votre supérieur hiérarchique actuel, votre contrat, que vous avez d'ailleurs accepté, n'y fait d'ailleurs pas référence.

Bien que la modification d'une clause de vos conditions de travail ne porte que sur un élément non permanent, à savoir une demande exceptionnelle de votre part, pouvant être refusée à tout moment par votre hiérarchie, nous acceptons de prendre en considération votre refus de poursuivre normalement l'activité pour laquelle vous êtes missionnée dans le cadre de votre contrat de travail.

Nous vous notifions donc par la présente votre licenciement à compter du 19 septembre 2007, date à laquelle démarrera votre préavis de trois mois que nous vous dispensons d'effectuer et qui vous sera néanmoins payé aux échéances habituelles jusqu'à la date de votre sortie des effectifs le 18 décembre 2007 au soir. »

Contestant ce licenciement Madame [H] a saisi le conseil de prud'hommes de Paris le 6 décembre 2007 qui a rendu le 20 novembre 2008 la décision déférée.

Sur la nullité du licenciement

Madame [H] soutient à titre principal que son licenciement, qualifié à tort de licenciement pour motif personnel était en réalité un licenciement économique et aurait dû à ce titre faire l'objet d'un plan de sauvegarde de l'emploi adressé aux représentant du personnel en application des articles L 1233-61 et L 1233-62 du code du travail; que cette formalité n'ayant pas été observée, la procédure de licenciement est nulle et de nul effet .

Pour avoir une cause économique, le licenciement doit, ainsi que le dispose l'article L 1233-3 du code du travail, être prononcé pour un motif non inhérent à la personne du salarié et être consécutif soit à des difficultés économiques, soit à des mutations technologiques, soit à une réorganisation de l'entreprise, soit à une cessation d'activités.

Il ne résulte nullement des pièces versées aux débats que la SAS LUNDBECK avait des difficultés économiques, ou devait faire face à des mutations technologiques. Il n'est pas établi non plus par la salariée que l'entreprise était en pleine réorganisation ou prévoyait des cessations d'activités, ni que des suppressions de poste ou d'emplois étaient envisagées. Les procès-verbaux de réunion du comité d'entreprise de 2006 et 2007 versés aux débats ne font état d'aucune difficulté de ce genre ou de départs suspects au sein de l'entreprise, et font au contraire état d'effectifs stables, les départs étant compensés par des embauches.

La SAS LUNDBECK établit d'ailleurs que le poste de Madame [H] a été pourvu après son licenciement par une nouvelle embauche.

Le licenciement en cause n'ayant pas une cause économique mais étant sans aucun doute fondé sur un motif personnel, la demande de Madame [H] tendant à voir déclarer son licenciement nul pour absence d'un plan de sauvegarde pour l'emploi sera donc rejetée.

Sur le bien fondé du licenciement

Le contrat de travail de Madame [H] comportait un point 3 intitulé « Lieu de travail » dont le premier alinéa était ainsi libellé :

« Vous exercerez vos fonctions à notre siège. A titre exceptionnel, vous pourrez être amenée à exercer votre activité à notre domicile, sous réserve de l'autorisation préalable de votre hiérarchie. »

Par lettre du 7 juin 2007 puis du 13 juillet 2007, Madame [H] a été avertie par sa hiérarchie que sa présence au siège pendant 5 jours, du lundi au vendredi, était nécessaire et que la possibilité de travailler à domicile serait supprimée à partir du 1er septembre 2007. Son accord lui était demandé pour accepter la modification proposée avant le 11 août 2007 la lettre précisant qu'à défaut de réponse dans le délai, elle serait réputée avoir accepté la modification proposée qui ferait l'objet d'un avenant à son contrat de travail.

Madame [H], qui a clairement manifesté son refus d'accepter cette modification par lettre du août 2007, prétend que le fait de lui avoir imposé d'exécuter son travail au siège de la société alors que dès la conclusion du contrat de travail, il était prévu une exécution en tout ou partie à son domicile, constitue une modification de son contrat de travail. Elle considère que son employeur, en se plaçant clairement sur le terrain de la modification du contrat de travail, a appliqué la procédure prévue à l'article 1222-6 du code du travail.

La SAS LUNDBECK fait à juste titre observer que le contrat de travail de Madame LUNDBECK prévoyait clairement que son lieu de travail était fixé au siège de la société et qu'à titre exceptionnel, et sous réserve d'avoir obtenu l'accord de sa hiérarchie, elle pourrait travailler à son domicile.

Bien que l'exceptionnel soit devenu une habitude pendant un certain temps et que Madame [H] ait usé largement de la faculté de travailler à son domicile, elle n'avait aucunement acquis le droit de travailler à temps partiel à son domicile, et son refus d'accepter la suppression de la clause exceptionnelle ne change rien au fait que son lieu de travail était par principe fixé au siège de la société à [Localité 4]. Le refus de Madame [H] exprimé dans sa lettre du 8 août 2007 ne peut avoir pour conséquence de lui supprimer un élément essentiel de son contrat de travail, mais seulement de contraindre l'employeur à lui refuser systématiquement cette possibilité au cas par cas.

Or en l'espèce, la SAS LUNDBECK établit par les pièces versées aux débats (courriers électroniques notamment) à quel point le travail à domicile de Madame [H] et son absence du siège était source de difficultés dans la gestion du parc automobile dont elle avait la charge et à quel point sa présence était nécessaire au siège au quotidien. Dès lors, en tirant les conséquences du refus de la salariée de revenir à un mode d'exécution normal du contrat, la SAS LUNBECK a justifié d'un motif réel et sérieux de licenciement.

Le jugement de première instance sera donc confirmé en toutes ses dispositions et Madame [H] sera déboutée de l'intégralité de ses demandes.

Bien que la SAS LUNDBECK ait triomphé en ses demandes, il n'apparaît pas inéquitable de lui laisser la charge de ses frais irrépétibles exposés en appel.

Madame [H] qui succombe supportera les entiers dépens

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement et contradictoirement,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Déboute les parties de leurs demandes plus amples et contraires,

Condamne Madame [O] [H] aux entiers dépens.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 09/01739
Date de la décision : 17/11/2010

Références :

Cour d'appel de Paris K6, arrêt n°09/01739 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-11-17;09.01739 ?
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