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10/11/2010 | FRANCE | N°07/07726

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 6, 10 novembre 2010, 07/07726


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6



ARRET DU 10 Novembre 2010

(n° 2 , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 07/07726-BVR



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 26 Juin 2007 par le conseil de prud'hommes de PARIS section Encadrement RG n° 06/02847









APPELANTE

Madame [W] [D] épouse [K]

[Adresse 2]

[Localité 3]

comparant en personne, assistée

de Me Thierry MOUNICQ, avocat au barreau de PARIS, toque : P 22







INTIMÉE

SNC PRESTIGE & COLLECTIONS INTERNATIONAL

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Raymond PEROL-KHANNA, avocat ...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6

ARRET DU 10 Novembre 2010

(n° 2 , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 07/07726-BVR

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 26 Juin 2007 par le conseil de prud'hommes de PARIS section Encadrement RG n° 06/02847

APPELANTE

Madame [W] [D] épouse [K]

[Adresse 2]

[Localité 3]

comparant en personne, assistée de Me Thierry MOUNICQ, avocat au barreau de PARIS, toque : P 22

INTIMÉE

SNC PRESTIGE & COLLECTIONS INTERNATIONAL

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Raymond PEROL-KHANNA, avocat au barreau de PARIS, toque : P 312 substitué par Me Emmanuelle LEVET, avocat au barreau de PARIS,

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 28 Septembre 2010, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Patrice MORTUREUX DE FAUDOAS, Président

Madame Bernadette VAN RUYMBEKE, Conseillère

Madame Claudine ROYER, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : Mme Evelyne MUDRY, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Patrice MORTUREUX DE FAUDOAS, Président et par Evelyne MUDRY, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCEDURE ET MOYENS DES PARTIES

Engagée à compter du 1er novembre 2001 en qualité de secrétaire assistante spécialisée par la société PRESTIGE & COLLECTIONS INTERNATIONAL ayant pour activité la commercialisation des produits cosmétiques de marque Helena Rubinstein, madame [D] épouse [K] a été licenciée le 16 juin 2005 avec dispense d'exécution de son préavis pour refus de poursuivre son activité et refus d'accepter d'autres postes au sein du groupe.

Revendiquant la qualité de cadre, estimant avoir fait l'objet d'une discrimination statutaire et salariale et contestant enfin la légitimité du licenciement entrepris, Madame [D] épouse [K] a saisi le conseil de prud'hommes de PARIS de diverses demandes de rappels de salaires et dommages et intérêts.

Par jugement en date du 26 juin 2007 auquel la cour se réfère pour l'exposé des faits, de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, elle a été déboutée de toutes ses demandes .

Madame [K] a relevé appel de ce jugement par déclaration parvenue au greffe de la cour le 23 octobre 2007.

*******

Suivant conclusions régulièrement communiquées et oralement soutenues à l'audience du 28 septembre 2010,auxquelles il est renvoyé pour l'exposé de ses moyens et arguments , madame [K] demande à la cour de :

-infirmer le jugement.

-dire que ses fonctions relevaient du statut de cadre, qu'elle a été victime d'une discrimination statutaire, que l'employeur n'a pas exécuté de bonne foi le contrat de travail et que le licenciement , dont elle a fait l'objet, était dénué de cause réelle et sérieuse,

-en conséquence, condamner la société PRESTIGE & COLLECTIONS INTERNATIONAL à lui payer les sommes suivantes :

-20.843,67 euros : rappel de salaire outre.2.084 euros pour congés payés afférents

-3.646,86 euros : rappel d'indemnité de licenciement.

- 41.283 euros : dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse

-13.761 euros : dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat

-2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

-ordonner la remise par l'employeur d'une attestation ASSEDIC, des bulletins de paie et certificat de travail conformes sous astreinte de 500 euros par jour de retard et par document à compter de la notification du présent arrêt.

******

Par conclusions régulièrement communiquées et oralement soutenues à l'audience du 28 septembre 2010 auxquelles il est renvoyé pour l'exposé de ses moyens et arguments, la société PRESTIGE & COLLECTIONS INTERNATIONAL demande à la cour de :

-débouter Madame [D] épouse [K] de l'ensemble de ses demandes.

-confirmer purement et simplement le jugement déféré.

-condamner la salariée au paiement de la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

MOTIFS

Sur la reclassification professionnelle

Considérant que Madame [D] épouse [K] a été embauchée suivant contrat à effet du 9 avril 2001 par la société l'OREAL en qualité de secrétaire assistante, agent de maîtrise groupe IV coefficient 250 de la convention collective nationale des industries chimiques ;

Qu'à compter du 1er novembre 2001, elle a régularisé un nouveau contrat de travail avec la société PRESTIGE & COLLECTIONS INTERNATIONAL en qualité d'assistante spécialisée agent de maîtrise groupe IV coefficient 275 de la même convention collective nationale avec reprise d'ancienneté au 9 avril 2001, son salaire annuel étant fixé à la somme de 201.900 francs ;

Considérant que le 1er janvier 2003, elle était promue au coefficient 300 ce coefficient correspondant à l'agent assurant l'encadrement d'un groupe comportant plusieurs agents de maîtrise de classification inférieure et responsable de l'organisation et de la répartition du travail ;

Considérant que Madame [D] épouse [K] soutient qu'eu égard aux fonctions qu'elle a effectivement exercées au sein de la la société PRESTIGE & COLLECTIONS INTERNATIONAL, elle aurait du bénéficier du statut cadre, groupe V, coefficient 400 de la convention collective nationale des industries chimiques ;

Considérant que le statut cadre revendiqué par Madame [K] concerne, aux termes des dispositions conventionnelles :

' les ingénieurs et cadres assumant des fonctions pour lesquelles sont définies les politiques ou les objectifs généraux pour l'exercice de leur spécialité ou la gestion d'un ou plusieurs secteurs d'activité de l'entreprise.

Ces fonctions réclament des titulaires des compétences techniques et des aptitudes à participer à la gestion économique de leurs secteurs d'activité .... un esprit de créativité et d'innovation ... comportent une autonomie et l'obligation de prendre après recherche et analyse des informations les initiatives nécessaires pour faire face à des situations nouvelles par le choix des moyens et des méthodes à mettre en oeuvre....

Les connaissances à mettre en oeuvre dans l'exercice de ces fonctions correspondent au minimum à celles sanctionnées par ....: un diplôme du 2e cycle de l'enseignement supérieur délivré par les universités françaises ;

Que le coefficient 400 s'applique aux cadres :

...agissant à partir de directives dans le secteur d'activité qui leur est imparti ... qui animent et coordonnent l'activité des agents de maîtrise et techniciens placés sous leur autorité ...assistent les ingénieurs et cadres d'un niveau supérieur auxquels incombe la responsabilité d'ensemble du secteur... participent à la définition des objectifs de leur secteur ;

Et considérant que les pièces produites aux débats établissent que madame [D] épouse [K] titulaire d'un diplôme du 2e cycle de l'enseignement supérieur délivré par une université française au sens du statut revendiqué , peut prétendre ,à compter de janvier 2003 à la qualification sollicitée ;

Qu'en effet, il résulte notamment du bilan de compétences réalisé à la demande de l'employeur en février 2005, des évaluations, documents internes de 2003, 2004 et 2005, des entretiens de fin d'année ainsi que les échanges avec la direction, que Madame [K] avait la responsabilité de trois services lourds :

-le service consommateurs international on line et off line à savoir la gestion de la relations client , la mise en place de procédures à destination des filiales, la création d'outils , les statistiques et le reporting, mise en place de procédures de fonctionnement, coordination des services, supervision de la sécurité ...

-la gestion des sites internet : webmastering des sites internationaux en trois langues, avec une implication dans le contenu éditorial, l'organisation d'événements la coordination de services , maintenance mensuelle ...

- le service réclamations Monde et Qualité, avec une responsabilité dans la réalisation de la directive européenne pour la marque conseils aux filiales France et étranger;

Qu'assumant seule la charge de ces trois secteurs , elle n'animait pas d'équipe mais était en lien direct avec les cadres 'd'un niveau supérieur auxquels incombe la responsabilité d'ensemble du secteur' et leur rendait compte des questions relatives aux produits, retours clients, réclamations ;

Que pourvue de compétences techniques reconnues par sa hiérarchie qui dans son entretien fin 2003 la décrivait comme ' responsable , autonome, bien organisée' elle était animée , dans les missions qui lui ont été confiées, d'un esprit de créativité , d'innovation et d'initiative nécessaires pour s'adapter aux situations nouvelles comme le confirment les courriels produits et les rapports qu'elle a rédigés ( ex les propositions de développement du service consommateurs aux autres marques de la société ..) de sorte que l'employeur ne peut soutenir sérieusement que ses fonctions relevaient de celle d'une secrétaire assistante spécialisée ;

Que sa qualité de cadre est d'autant plus fondée qu'après son licenciement, madame [K] a été remplacée dans ses fonctions par deux salariées dont aucune n'a été qualifiée d' ' assistante spécialisée ;qu'en effet :

- ses fonctions de 'webmaster' ont été repris par Mme [O], jeune salariée recrutée qu'elle a elle même formée à ce poste, et qui dès son embauche, s'est vue conférer la qualité de chef de projet internet' et reconnaître le statut cadre coefficient 350;

- ses fonctions de Responsable Qualité et réclamations clients ont de la même façon, été confiées à Mme [L], 'Ingénieur' à la Direction du packaging , l'employeur restant toutefois curieusement muet sur la position statutaire de cette salariée ainsi que sur sa rémunération, malgré les sollicitations de Madame [K];

Considérant que l'ensemble de ces éléments établissent qu'à compter de janvier 2003, Mme [D] a effectivement exercé des fonctions relevant du groupe V statut cadre coefficient 400;

Que cette reclassification professionnelle lui ouvre droit à un rappel de salaire jusqu'au mois de septembre 2005, qui compte tenu du barème produit fixant la rémunération mensuelle brute affectée à un tel coefficient , s'élève à la somme de 13.626 euros à laquelle s'ajoute 1.362,60 euros pour congés payés afférents ;

Qu'elle entraîne également une révision de l'indemnité de licenciement qui sera portée à la somme de 3.646,86 euros ;

Qu'enfin le refus de l'employeur de reconnaître la situation statuaire de la salariée pendant près de trois années malgré les demandes répétées de cette dernière, doit être réparé compte tenu du préjudice subi par celle ci , par l'octroi d'une somme de 3.000 euros ;

Sur le licenciement

Considérant que Madame [D] épouse [K] a été licenciée pour le motif suivant :

Refus réitéré de votre part de poursuivre votre activité dans notre poste actuel et refus d'accepter d'autres postes au sein du groupe ;

Lors de nos entretiens des 15 avril et 17 mai 2005 vous avez clairement indiqué que vous ne souhaitiez quitter votre poste qui selon vous ne vous donnait plus la possibilité d'évoluer comme vous le désiriez ..

Nous avons ainsi pu vous proposer deux poste 'un à la direction technique de l'Oréal [Localité 4] à [Localité 3] et le second à la direction du personnel du Facility Service à Aulnay sous bois ;

Le 20 mai 2005, vous nous avez remis un courrier dans lequel vous nous confirmer refuser ces deux postes et réitérez votre refus de continuer dans le poste que vous occupez actuellement ...'

Considérant qu'il est établi, par les pièces versées, que le licenciement fait suite aux réclamations écrites de Madame [K]:

-sur l'alourdissement de sa charge de travail à savoir la gestion de trois services sans équipes pour la seconder alors qu'il n'est pas contredit que d'autres services comptabilisaient trois personnes pour remplir les tâches qu'elle accomplissait seule,

-sur ses inquiétudes quant au refus de lui reconnaître son véritable statut et lui verser la rémunération afférente,

-et enfin sur le retrait décidé par la direction de ses fonctions de webmastering confiées désormais à un cadre, Mme [O] qu'elle a dû former à ce poste ;

Considérant que les réclamations de Madame [K] étant légitimes, la société ne pouvait les ignorer et sanctionner ultérieurement le refus de la salariée de poursuivre ses fonctions sans revalorisation de son statut ; qu'elle ne pouvait davantage reprocher à la salariée de refuser de rejoindre l'un des deux postes proposés, au demeurant des postes de secrétaire sur d'autres sites , de telles propositions n'étant nullement justifiées et s'assimilant à une rétrogradation ;

Considérant en conséquence que le licenciement entrepris est dénué de toute cause réelle et sérieuse ;

Que licenciée abusivement, Madame [K] peut prétendre à l'indemnisation de son préjudice qui compte tenu de son ancienneté et des éléments qu'elle produit sur sa situation professionnelle , sera fixé à la somme de 35.000 euros ;

Considérant que l'employeur devra délivrer à la salariée des bulletins de salaires, une attestation Pôle Emploi et un certificat de travail conformes au présent arrêt, sans qu'il y ait lieu d'assortir cette mesure d'une astreinte.

Sur le remboursement des indemnités de chômage versées à la salariée

Considérant qu'il y a lieu à application de l'article L.1235-4 du code du travail.

Considérant qu'il convient d'ordonner le remboursement aux organismes sociaux concernés des indemnités de chômage versées au salarié dans la limite de six mois d'indemnités.

Considérant que la société PRESTIGE & COLLECTIONS INTERNATIONAL qui succombe supportera les dépens et indemnisera Madame [K] des frais exposés dans la cause à concurrence de la somme de 2.000 euros.

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement et contradictoirement ,

Infirme le jugement déféré et statuant à nouveau,

Condamne la société PRESTIGE & COLLECTIONS INTERNATIONAL à régler à Madame [D] épouse [K] les sommes suivantes :

-13.626 euros :rappel de salaire outre 1.362,60 euros pour congés payés afférents

-3.646,86 euros : rappel d'indemnité de licenciement.

- 35.000 euros : dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse

- 3.000 euros : dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat

Ordonne à la société PRESTIGE & COLLECTIONS INTERNATIONAL de remettre à Madame [K] des bulletins de salaires, une attestation Pôle Emploi et un certificat de travail conformes au présent arrêt,

Ordonne le remboursement aux organismes sociaux concernés des indemnités de chômage versées à la salariée dans la limite de six mois d'indemnités,

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

Condamne la société PRESTIGE & COLLECTIONS INTERNATIONAL à verser à Mme [K] une somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 07/07726
Date de la décision : 10/11/2010

Références :

Cour d'appel de Paris K6, arrêt n°07/07726 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-11-10;07.07726 ?
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