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09/11/2010 | FRANCE | N°09/242727

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 1, 09 novembre 2010, 09/242727


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 2- Chambre 1
ARRET DU 9 NOVEMBRE 2010
(no 386, 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 09/ 24272
Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 octobre 2009- Tribunal de Grande Instance de PARIS-RG no 08/ 14926

APPELANTES

ASSOCIATION DE PREVOYANCE DU GROUPE MORNAY EUROPE APGME agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux 5/ 9 rue Van Gogh 75591 PARIS CEDEX 12 représentée par la SCP Pascale NABOUDET-V

OGEL-Caroline HATET-SAUVAL, avoués à la Cour assistée de Me CHAIGNE, avocat au barreau de PARIS,...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 2- Chambre 1
ARRET DU 9 NOVEMBRE 2010
(no 386, 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 09/ 24272
Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 octobre 2009- Tribunal de Grande Instance de PARIS-RG no 08/ 14926

APPELANTES

ASSOCIATION DE PREVOYANCE DU GROUPE MORNAY EUROPE APGME agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux 5/ 9 rue Van Gogh 75591 PARIS CEDEX 12 représentée par la SCP Pascale NABOUDET-VOGEL-Caroline HATET-SAUVAL, avoués à la Cour assistée de Me CHAIGNE, avocat au barreau de PARIS, toque : P 278 SCP CHAIGNE ET ASSOCIES

ASSOCIATION DE RETRAITE DES CADRES DU GROUPE MORNAY EUROPE ACGME agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux 5/ 9 rue Van Gogh 75591 PARIS CEDEX 12 représentée par la SCP Pascale NABOUDET-VOGEL-Caroline HATET-SAUVAL, avoués à la Cour assistée de Me CHAIGNE, avocat au barreau de PARIS, toque : P 278 SCP CHAIGNE ET ASSOCIES

INTIMEE

Maître Maÿlis X...... 75013 PARIS représentée par la SCP BOMMART-FORSTER-FROMANTIN, avoués à la Cour assistée de Me Jean-Pierre CHIFFAUT MOLIARD, avocat au barreau de PARIS, toque : C1600

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 31 août 2010, en audience publique, le rapport entendu conformément à l'article 785 du code de procédure civile, devant la Cour composée de :
Monsieur François GRANDPIERRE, Président de chambre Madame Brigitte HORBETTE, Conseiller Madame Dominique GUEGUEN, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Madame Noëlle KLEIN

ARRET :

- contradictoire-rendu publiquement par Madame Brigitte HORBETTE conseiller ayant délibéré en l'empêchement du Président,- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.- signé, en l'empêchement du Président, par Madame Brigitte HORBETTE conseiller ayant délibéré et par Mme Noëlle KLEIN greffier à qui la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

******************

La Cour,

Considérant que l'Association de retraite des cadres du Groupe Mornay Europe, dite A. C. G. M. E., et l'Association de prévoyance du Groupe Mornay Europe, dite A. P. G. M. E., ont confié à Mme Maÿlis X..., avocat, la défense de leurs intérêts à l'occasion de la procédure engagée contre Gilbert Y... à la suite d'escroqueries commises à leur préjudice ; Que, par jugement rendu le 30 mai 2002 et devenu définitif, le Tribunal correctionnel de Paris a condamné Gilbert Y... pénalement et, sur l'action civile, l'a condamné à payer à l'A. C. G. M. E. la somme de 3. 200. 000 euros à titre de dommages et intérêts et à la somme de 100. 000 euros en vertu des dispositions de l'article 475-1 du Code de procédure pénale et à l'A. P. G. M. E. la somme de 130. 000 euros à titre de dommage et intérêts et la somme de 1. 000 euros en vertu des dispositions de l'article 475-1 du Code de procédure pénale ; Que, chargée du recouvrement de ces sommes, Mme X... a obtenu une inscription d'hypothèque provisoire sur les biens immobiliers sis Quartier Saint-Turquois à Suze-la-Rousse (Drôme) pour sûreté d'une somme de 10. 000. 000 francs avec effet au 31 mars 2002 et une inscription d'hypothèque provisoire puis définitive sur les biens immobiliers sis 23-25, rue Octave Mirbeau à Mitry-Mory (Seine-et-Marne) pour sûreté d'une somme de 274. 408, 23 euros jusqu'au 9 juillet 2012 ; Que, reprochant à Mme X... d'avoir omis de renouveler l'inscription d'hypothèque provisoire prise sur les biens immobiliers sis Quartier Saint-Turquois à Suze-la-Rousse (Drôme), qui ont été vendus, ainsi que le mobilier pour les sommes de 594. 551, 16 euros et de 91. 469, 41 euros, l'A. C. G. M. E. et l'A. P. G. M. E. ont saisi le Tribunal de grande instance de Paris qui, par jugement du 28 octobre 2009, les a déboutées de leurs demandes ;

Considérant qu'appelantes de ce jugement, l'A. C. G. M. E. et l'A. P. G. M. E. demandent que Mme X... soit condamnée à leur payer la somme de 478. 594, 86 euros à titre de dommages et intérêts ;
Qu'à cette fin, les deux associations font valoir qu'en ne procédant pas à la préservation de la sûreté publiée à la Conservation des hypothèques de Valence et affectant les biens immobiliers sis Quartier Saint-Turquois à Suze-la-Rousse (Drôme), soit par le renouvellement de l'inscription provisoire, soit par une inscription définitive, permettant de conserver le rang de l'hypothèque provisoire, Mme X... a commis une faute dès lors que, disposant d'un mandat général, elle n'avait pas été déchargée de sa mission et que l'acte de vente du 14 janvier 2002 réservait expressément la procédure de distribution en fonction du maintien du bénéfice de la sûreté ; qu'elles en déduisent que Mme X... a engagé sa responsabilité contractuelle et que le préjudice causé est égal au montant de la partie du prix de vente de l'immeuble qui a été distribuée au créancier de rang suivant et ce, à hauteur de 478. 594, 86 euros ;
Considérant que Mme X... conclut à la confirmation du jugement au motif qu'au moment de la vente de l'immeuble litigieux, intervenue avant l'expiration du délai imparti pour renouveler l'inscription d'hypothèque provisoire, l'A. C. G. M. E. et l'A. P. G. M. E., qui ne lui avaient jamais donné mission de renouveler l'inscription, étaient informées de leurs droits et qu'elles avaient directement pris les initiatives jugées utiles à la défense de leurs intérêts en convenant des modalités de distribution du prix de sorte qu'elle, Mme X..., était déchargée de sa mission ; Que, subsidiairement, l'intimée fait valoir que l'obligation de renouveler l'inscription d'hypothèque provisoire sur le bien sis à Suze-la-Rousse était inutile dès lors qu'elle a produit son effet légal après la vente du bien grevé ; Qu'encore plus subsidiairement, Mme X... soutient que la réalité du préjudice n'est pas démontré dès lors que l'A. C. G. M. E. et l'A. P. G. M. E. ne démontrent pas qu'elles n'ont pas recouvré leurs créances et qu'en outre, un tel préjudice, s'il existe, ne consiste qu'en une perte de chance ;

Sur l'incident de signification de conclusions et de communication de pièces :
Considérant que Mme X... demande que l'affaire soit renvoyée devant le magistrat chargé de la mise en état ou, subsidiairement, que soient écartées des débats les conclusions signifiées le 27 août 2010 et les pièces numérotées 24, 25 et 26 communiquées les 27 et 30 août 2010 par l'A. C. G. M. E. et l'A. P. G. M. E. ; Qu'à l'appui de sa demande, Mme X... fait valoir que ces significations et communication sont tardives alors qu'elles appellent une réponse de sa part ; Considérant que l'A. C. G. M. E. et l'A. P. G. M. E. répondent qu'elles n'ont pas agi avec déloyauté, que les pièces communiquées sont très récentes et qu'au fond, elles n'invoquent, ni fait, ni moyen nouveaux ; Considérant que les conclusions signifiées le 27 août 2010 par les deux associations, qui répondent aux conclusions signifiées le 17 juin 2010 par Mme X..., ne contiennent ni moyens nouveaux, ni demandes nouvelles par rapport à leurs conclusions antérieures ; Considérant que les correspondances échangées entre Maître Chaîne, avocat, et Maître Z..., notaire, fussent-elles récentes et « confirmatives » de faits déjà allégués par les deux associations, et communiquées les 27 et 30 août 2010 doivent être écartées des débats comme n'ayant pas été produites en temps utile au sens de l'article 15 du Code de procédure civile ; Qu'il convient, en conséquence, d'écarter des débats les pièces numérotées 24, 25 et 26 communiquées les 27 et 30 août 2010 par l'A. C. G. M. E. et l'A. P. G. M. E. ;

Au fond :
Considérant qu'en vertu du mandat général reçu, Mme X..., qui était en charge de la procédure pénale dirigée contre Gilbert Y..., avait également mission de préserver la créance de l'A. C. G. M. E. et de l'A. P. G. M. E. et, en particulier, d'inscrire une hypothèque sur le bien immobilier sis à Suze-la-Rousse, ce qu'elle a fait pour que ladite hypothèque prenne effet le 31 mars 1999 ; Qu'à cet égard, il y a lieu de souligner que, s'agissant de l'hypothèque inscrite sur les biens immobiliers sis 23-25, rue Octave Mirbeau à Mitry-Mory (Seine-et-Marne), Mme X... a procédé aux formalités d'inscription définitive ; Qu'en outre, lorsqu'a été envisagée la vente de l'immeuble situé à à Suze-la-Rousse, Mme X... était en relation épistolaire, non seulement avec les dirigeants du Groupe Mornay, mais également avec Maître Z..., notaire, puisqu'elle a transmis à Mme A..., chef du service juridique du Groupe, le projet d'acte de vente en lui demandant notamment, le 19 décembre 2001, le nom du signataire du mandat qui, donné par les deux associations et destiné au notaire, portait notamment sur « l'acceptation, en renonçant au droit de suite, à ce que le prix soit partagé, eu égard au rang des inscriptions et selon les règles habituelles » ; Qu'il suit de ce qui précède qu'il entrait dans le mandat de Mme X... de renouveler l'inscription d'hypothèque prise sur le bien immobilier sis à Suze-la-Rousse et, en tous cas, de donner à ses clientes tous conseils utiles à cet égard ;

Considérant que l'acte de vente en date du 14 janvier 2002 stipule, sous la rubrique « Prix de vente immobilière », 3o) « L'inscription d'hypothèque prise par le Groupe Mornay primant celle du Trésor Public, mais n'étant à ce jour que provisoire en attente d'une ordonnance selon instance actuellement pendante, et non définitive, de convention expresse entre le Groupe Mornay et le Trésor Public, la suite de l'ordre ne sera établi entre les deux créanciers qu'à l'issue de la décision de justice attendue. Jusqu'à cette date la partie du prix de vente restant à distribuer sera consignée » ; qu'il entrait notamment dans la mission du séquestre « de régler les créanciers à due concurrence de leur créance respective, selon le rang de leurs inscriptions, tel qu'il résulte de l'ordre consensuel établi » ; que, selon une autre clause de l'acte de vente, page 16, « tant le Groupe Mornay, que le Trésor Public, promettent dès à présent de consentir à la mainlevée et à la radiation des inscriptions leur profitant, et ce, dès que l'ordre des rangs hypothécaires leur profitant aura été définitivement réglé entre eux, par décision de justice » ; Qu'en conséquence des clauses qui précède, il était indispensable, après la conclusion de la vente et pour conserver le rang de l'hypothèque provisoire qui, prise sur l'immeuble sis à Suze-la-Rousse, n'avait plus d'effet après le 31 mars 2002, de renouveler cette inscription ou d'inscrire une hypothèque définitive ; Que, sur ce point, il sera noté que l'inscription définitive du titre, tel qu'il résulte du jugement correctionnel du 30 mai 2002, ne pouvait qu'être prise sans que le rang ne rétroagisse au 31 mars 1999, date de l'inscription d'hypothèque provisoire, dès lors que ladite inscription définitive est faite après la date de validité de l'hypothèque provisoire de sorte que, le 4 septembre 2003, Maître Z... a pu écrire au trésorier de Saint-Paul-Trois-Châteaux (Drôme) : « Maître X..., représentant le Groupe Mornay, m'a indiqué avoir déposé le 27 juin 2002 un bordereau d'inscription d'hypothèque judiciaire définitive qui lui a été refusé par le bureau des hypothèques, faute du renouvellement en temps utile de l'inscription » ; Considérant qu'en s'abstenant d'inscrire un renouvellement de l'hypothèque provisoire ou d'inscrire une hypothèque définitive avant le 31 mars 2002 de façon à ce que soit maintenu le rang profitant aux deux associations, Mme X... a commis une faute professionnelle dont elle doit réparation ;

Considérant qu'il ressort notamment d'une lettre du Trésorier-payeur général de Drôme en date du 11 mars 2004 que le solde disponible sur le prix de vente de l'immeuble, à savoir : la somme de 478. 594, 86 euros, a profité à la trésorerie de Saint-Paul-Trois-Châteaux ; que, si l'inscription d'hypothèque provisoire avait été renouvelée et son rang conservé, la créance des deux associations aurait été préservée en sorte que, malgré l'instance pendante et relative à l'ordre des rangs hypothécaires, elles auraient eu une très forte chance de percevoir la somme susdite ; Qu'il y a donc lieu d'arrêter le montant de l'indemnisation revenant aux associations à la somme de 460. 000 euros ; Qu'en conséquence, il convient d'infirmer le jugement frappé d'appel et de condamner Mme X... à payer à l'A. C. G. M. E. et à l'A. P. G. M. E. la somme de 460. 000 euros à titre de dommages et intérêts ; Que, par application des dispositions de l'article 1153-1, alinéa 2, dernière phrase, du Code civil, cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 21 octobre 2008, date de l'assignation introductive d'instance ; que ces intérêts seront capitalisés dans les conditions de l'article 1154 du même code pourvu qu'ils soient dus au moins pour une année entière et ce, à compter du 30 août 2010, date de la première demande formée par conclusions signifiées devant la Cour ;

Et considérant que chacune des parties sollicite une indemnité en invoquant les dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ; que, succombant en ses prétentions et supportant les dépens, Mme X... sera déboutée de sa demande ; qu'en revanche, elle sera condamnée à payer à l'A. C. G. M. E. et à l'A. P. G. M. E. les frais qui, non compris dans les dépens, seront arrêtés, en équité, à la somme de 6. 000 euros ;
PAR CES MOTIFS,
Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Infirme le jugement rendu le 28 octobre 2009 par le Tribunal de grande instance de Paris ;
Faisant droit à nouveau :
Condamne Mme Maÿlis X... à payer à l'Association de retraite des cadres du Groupe Mornay Europe, dite A. C. G. M. E., et à l'Association de prévoyance du Groupe Mornay Europe, dite A. P. G. M. E. la somme de 460. 000 euros à titre de dommages et intérêts ;
Dit que cette somme portera intérêt au taux légal à compter du 21 octobre 2008 ;
Dit que les intérêts seront capitalisés à compter du 30 août 2010 dans les conditions fixées par l'article 1154 du Code civil ;
Déboute Mme X... de sa demande d'indemnité fondée sur les dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile et la condamne, par application de ce texte, à payer à l'A. C. G. M. E. et à l'A. P. G. M. E. la somme de 6. 000 euros ;
Condamne Mme X... aux entiers dépens de première instance et d'appel et dit que les dépens d'appel seront recouvrés par la S. C. P. Naboudet-Hatet, avoué de l'A. C. G. M. E. et de l'A. P. G. M. E., conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER/ LE PRÉSIDENT.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 09/242727
Date de la décision : 09/11/2010
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

ARRET du 22 mars 2012, Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 22 mars 2012, 11-11.081, Publié au bulletin

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2010-11-09;09.242727 ?
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