Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 2- Chambre 1
ARRET DU 9 NOVEMBRE 2010
(no 380, 4 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 08/ 21446
Décision déférée à la Cour : Jugement du 25 juin 2008- Tribunal de Grande Instance de PARIS-RG no 07/ 05526
APPELANTE
Société de droit belge ACE EQUIPEMENT LEASING agissant en la personne de ses représentants légaux 66, avenue de Broqueville WOLUWE-SAINT-LAMBERT (BELGIQUE) représentée par Me Chantal BODIN-CASALIS, avoué à la Cour assistée de Me Barbara ROSNAY-VEIL, avocat au barreau de PARIS, toque : P 394 SCP SIMON TAHAR et B. ROSNAY VEIL
INTIMES
Société COVEA RISKS pris en la personne de ses représentants légaux 19-21, allée de l'Europe 92110 CLICHY représentée par la SCP HARDOUIN, avoués à la Cour assistée de Me Lorraine LE GUISQUET, avocat au barreau de PARIS, toque : A 428 Me Denis TALON, avocat au barreau de PARIS
Maître Xavier X...... 75116 PARIS représenté par la SCP HARDOUIN, avoués à la Cour assisté de Me Lorraine LE GUISQUET, avocat au barreau de PARIS, toque : A 428 Me Denis TALON, avocat au barreau de PARIS
SCP X... ET ASSOCIES représentée par Maitre X...... 75116 PARIS représentée par la SCP HARDOUIN, avoués à la Cour assistée de Me Lorraine LE GUISQUET, avocat au barreau de PARIS, toque : A 428 Me Denis TALON, avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 6 septembre 2010, en audience publique, le rapport entendu conformément à l'article 785 du code de procédure civile, devant la Cour composée de :
Monsieur François GRANDPIERRE, Président de chambre Madame Brigitte HORBETTE, Conseiller Madame Dominique GUEGUEN, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier, lors des débats : Madame Noëlle KLEIN
ARRET :
- contradictoire-rendu publiquement par Madame Brigitte HORBETTE conseiller ayant délibéré en l'empêchement du Président,- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.- signé, en l'empêchement du Président, par Madame Brigitte HORBETTE conseiller ayant délibéré et par Mme Noëlle KLEIN greffier à qui la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.
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La Cour,
Considérant que, par contrat du 13 avril 1993, la société ACE Equipement leasing, société de droit belge, a donné en crédit-bail à la SPRL Monte-Carlo Invest deux véhicules automobiles de marque Lamborghini et Volkswagen contre le payement de redevances trimestrielles de 273. 534 francs belges ; que, par acte authentique du 16 avril 1993, Mme Raymonde Y... s'est portée caution hypothécaire de la SPRL Monte-Carlo Invest en garantie du payement de la totalité des redevances de location et qu'à cette occasion, elle lui a consenti une hypothèque sur différents biens immobiliers dont elle est propriétaire ... à Paris, le tout à hauteur de 1. 000. 000 francs (152. 449, 01 euros) ; Que, le 6 janvier 1994, la SPRL Monte-Carlo Invest a été déclarée en faillite ; que la créance de la société ACE Equipement leasing a été admise à hauteur d'une somme équivalente à 161. 387 euros ; Que, par jugement rendu le 15 juin 2000, le Tribunal de grande instance de Paris, chambre des saisies immobilières, a débouté la société ACE Equipement leasing de ses demandes aux motifs que le montant de la créance figurant sur le commandement de saisie immobilière signifié à Mme Y... mentionnait une somme insuffisante et incomplète qui, de surcroît, avait été réglée à l'occasion de la procédure de faillite, rendant ainsi nul le commandement ; Que la société ACE Equipement leasing, reprochant divers manquements et négligences à M. Xavier X..., avocat, et notamment de n'avoir pas renouvelé l'inscription d'hypothèque, l'a fait assigner devant le Tribunal de grande instance de Paris qui, par jugement du 25 juin 2008, a mis hors de cause les Mutuelles du Mans Assurances et reçu la société Covéa Risks en son intervention volontaire, débouté la société ACE Equipement leasing de ses demandes, dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile et condamné la société ACE Equipement leasing aux dépens ;
Considérant qu'appelante de ce jugement, la société ACE Equipement leasing, qui conclut à sa confirmation en ce que le Tribunal a retenu l'existence de fautes imputables à M. Xavier X..., demande que la société Covéa Risks et M. Xavier X... soient « conjointement et solidairement » à lui verser la somme de 134. 705, 51 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 16 octobre 1999, date de l'engagement de M. Xavier X... de renouveler l'hypothèque, outre la capitalisation de ces intérêts ; Qu'à l'appui de son recours, l'appelante fait valoir que M. Xavier X... a manqué à son obligation de résultat en omettant de renouveler l'inscription d'hypothèque et à son devoir de conseil en rédigeant incorrectement le commandement aux fins de saisie immobilière, en la dissuadant d'interjeter appel du jugement du 15 juin 2000 et, à supposer impossible une nouvelle inscription d'hypothèque, en négligeant d'étudier la situation de façon approfondie ; Que, sur le préjudice, la société ACE Equipement leasing soutient qu'elle est en droit d'obtenir une indemnisation égale aux sommes qui lui sont contractuellement dues ; que, sur le montant, elle dit fournir les documents récapitulatifs faisant apparaître qu'il lui reste dû la somme de 134. 705, 51 euros ;
Considérant que la société Covéa Risks, M. Xavier X... et la S. C. P. X... et associés concluent à la confirmation du jugement aux motifs que, d'une part, il ne pouvait pas être procédé au renouvellement de l'hypothèque conventionnelle sans l'accord de Mme Y... qui, en l'occurrence, ne l'aurait pas donné, que, d'autre part, il n'est pas démontré que le commandement n'aurait pas été rédigé en conformité avec les documents remis par la société ACE Equipement leasing et que, d'autre part encore, il n'est pas prouvé qu'un éventuel appel du jugement du 15 juin 2000 aurait pu aboutir favorablement ; Que, s'agissant du préjudice, les intimés font valoir que la société ACE Equipement leasing ne justifie pas d'une déclaration de créance au passif de la SPRL Monte-Carlo Invest et que les décomptes qu'elle produit aux débats ne sont nullement probants ; Qu'à titre subsidiaire, la société Covéa Risks, M. Xavier X... et la S. C. P. X... et associés exposent que le préjudice allégué consiste en une perte de chance de sorte qu'il y a lieu, si la réalité d'une telle perte de chance est retenue, de réduire l'indemnité réclamée à de plus justes proportions ;
SUR CE :
Considérant que, comme l'ont énoncé les premiers juges en de plus amples motifs qu'il convient d'approuver, la clause du contrat de cautionnement en vertu de laquelle « le créancier ne pourra proroger ni modifier le contrat susvisé sans le consentement exprès et par écrit de la caution, sous peine de perdre tous recours et actions contre cette dernière » s'applique, non pas au contrat de cautionnement lui-même, mais au contrat de financement de des deux véhicules de sorte que, Mme Y... s'étant portée caution à hauteur de 1. 000. 000 francs (152. 449, 01 euros) en payement de la totalité des vingt redevances prévues par la convention de crédit-bail, l'échéance de l'inscription d'hypothèque, survenant le 16 avril 2000, n'avait pas pour effet de limiter la durée de l'engagement de caution ; Qu'en s'abstenant de procéder au renouvellement de l'hypothèque bénéficiant à la société ACE Equipement leasing, M. X... a commis une faute professionnelle ; Qu'en outre, la rédaction défectueuse du commandement délivré aux fins de saisie immobilière, imputable à l'avocat, est également constitutive d'une faute dont il doit répondre ;
Considérant qu'en cause d'appel, la société ACE Equipement leasing démontre que, par jugement du 30 septembre 1996, le tribunal de commerce de Bruxelles a admis la créance de la société Monte Carlo Invest à hauteur de 6. 510. 374 francs belges (161. 387, 96 euros) ; que la même juridiction a autorisé l'attribution du prix de vente des deux véhicules à la société ACE Equipement leasing dans la limite de 2. 176. 385 francs belges correspondant au montant de la partie privilégiée de la créance ; que ce jugement a été exécuté à hauteur de 1. 997. 876 francs belges ; que, toutefois, par arrêt du 26 octobre 2000, la Cour d'appel de Bruxelles l'a partiellement infirmé et condamné la société ACE Equipement leasing à restituer à la faillite le prix de vente des deux véhicule à concurrence de 605. 579 francs belges, outre les intérêts au taux légal à compter du 17 décembre 1993 ; que l'arrêt a été exécuté et la somme de 918. 838 francs belges restituée ; Qu'il ressort des correspondances échangées entre les avocats de la cause et des décomptes qui y sont annexés, ainsi que du rapport du curateur de la deuxième faillite de la société Monte Carlo Invest, que la créance de la société ACE Equipement leasing s'établit ainsi qu'il suit :- principal : 605. 579 francs belges-intérêts au taux légal du 17 décembre 1993 au 15 décembre 2000 : 313. 259 francs belges,- intérêts au taux légal du 16 décembre 2000 au 7 janvier 2001 : 2. 671 francs belges Soit, au total : 921. 509 francs belges (22. 843, 61 euros) ; Qu'en définitive, il reste donc dû à la société ACE Equipement leasing :- à titre chirographaire : 4. 333. 989 francs belges,- différence entre le montant privilégié et la somme nette reçue : 178. 509, 10 francs belges,- somme restituée en vertu de l'arrêt de la Cour d'appel de Bruxelles : 921. 509 francs belges, Soit, au total : 5. 434. 007, 10 francs belges (134. 705, 51 euros) ; Considérant que l'abstention fautive de M. X... a fait perdre à la société ACE Equipement leasing la chance de recouvrer sa créance en faisant procéder à la saisie immobilière des biens donnés en garantie par Mme Y... ; Que cette perte de chance sera indemnisée par l'allocation d'une somme de 120. 000 euros ; Considérant que, par voie de conséquence, il convient d'infirmer le jugement frappé d'appel et de condamner in solidum la société Covéa Risks et M. Xavier X... à payer à la société ACE Equipement leasing la somme de 120. 000 euros à titre de dommages et intérêts ;
Et considérant que chacune des parties sollicite une indemnité en invoquant les dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ; que, succombant en leurs prétentions et supportant les dépens, les intimés seront déboutés de leur réclamation ; qu'en revanche, ils seront condamnés à verser à la société ACE Equipement leasing les frais qui, non compris dans les dépens d'appel, seront arrêtés, en équité, à la somme de 3. 000 euros ;
PAR CES MOTIFS,
Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Infirme le jugement rendu le 25 juin 2008 par le Tribunal de grande instance de Paris ;
Faisant droit à nouveau :
Condamne in solidum la société Covéa Risks et M. Xavier X... à payer à la société ACE Equipement leasing la somme de 120. 000 euros à titre de dommages et intérêts ;
Déboute la société Covéa Risks, M. Xavier X... et la S. C. P. X... et associés de leur demande d'indemnité fondée sur les dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile et les condamne, par application de ce texte, à payer à la société ACE Equipement leasing la somme de 3. 000 euros ;
Condamne la société Covéa Risks, M. Xavier X... et la S. C. P. X... et associés aux dépens de première instance et d'appel et dit que les dépens d'appel seront recouvrés par Maître Bodin-Casalis, avoué de la société ACE Equipement leasing, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT.