RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 6
ARRET DU 03 Novembre 2010
(n° 14 , 6 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 09/04124-BVR
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 15 Décembre 2006 par le conseil de prud'hommes de AUXERRE section Commerce RG n° 06/00128
APPELANT
Monsieur [Z] [T]
[Adresse 1]
[Adresse 4]
[Localité 3]
représenté par Me Roger DENOULET, avocat au barreau de PARIS, toque : D0285 substitué par Me Sabrina CABRILO, avocat au barreau de PARIS,
INTIMÉE
OFFICE AUXERROIS DE L'HABITAT OPM HLM
[Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par Me Claude-Henri CHAMBAULT, avocat au barreau d'AUXERRE
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 Septembre 2010, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Bernadette VAN RUYMBEKE, Conseillère, chargée d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Patrice MORTUREUX DE FAUDOAS, Président
Madame Bernadette VAN RUYMBEKE, Conseillère
Madame Claudine ROYER, Conseillère
Greffier : Mademoiselle Séverine GUICHERD, lors des débats
ARRET :
- Contradictoire
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur Patrice MORTUREUX DE FAUDOAS, Président et par Evelyne MUDRY, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS DES PARTIES
Monsieur [Z] [T] a été engagé par l'OFFICE AUXERROIS de l'HABITAT OPM HLM en qualité de correspondant de nuit aux termes de deux contrats à durée déterminée successifs, l'un conclu du 17 juin au 31 août 2002, le second à compter du 1er septembre 2002 pour une durée de trois ans.
Par lettre du 29 août 2005, l'OFFICE AUXERROIS de l'HABITAT OPM HLM a informé le salarié du terme de son contrat et de la fin des relations salariées à compter du 31 août 2005.
Se prévalant de la requalification de ces contrats en contrats à durée indéterminée aux motifs qu'ils ne relevaient pas du dispositif des contrats 'adulte relais' et arguant du caractère abusif de la rupture, monsieur [T] a saisi le conseil de prud'hommes d'AUXERRE.
Par jugement du 15 décembre 2006 auquel la cour se réfère pour l'exposé des faits, de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, cette juridiction a:
-confirmé que les termes du contrat à durée déterminée signé entre les parties le 3 septembre 2002 ont bien été appliqués,
- en conséquence débouté monsieur [Z] [T] de ses demandes,
-débouté l'OFFICE AUXERROIS de l'HABITAT OPM HLM de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,
- condamné monsieur [T] à 1 euro au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
*******
Monsieur [T] a relevé appel de ce jugement par déclaration reçue au greffe de la cour le 2 janvier 2007.
Après radiation intervenue suivant ordonnance du 23 janvier 2008, l'affaire a été rétablie le 21 avril 2009.
Par conclusions régulièrement communiquées et oralement soutenues à l'audience du 22 septembre 2010, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé de ses moyens et arguments monsieur [Z] [T] demande à la cour de :
-infirmer le jugement,
-requalifier les contrats à durée déterminée conclus les 24 juin 2002 et 3 septembre 2002 en un contrat à durée indéterminée,
-dire que le licenciement intervenu est un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,
- condamner l'OFFICE AUXERROIS de l'HABITAT OPM HLM au paiement des sommes suivantes :
-1.344,64 euros :non respect de la procédure de licenciement,
-1.344,64 euros :indemnité de requalification
- 425,80 euros : indemnité de licenciement,
- 2.689,28 euros : indemnité compensatrice de préavis outre 268,93 euros pour congés payés afférents ,
-20.000 euros : indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 108,21 euros : retenu de frais téléphoniques sur les salaires de décembre 2004
-42,10 euros : retenue pour absence enfant malade sur les salaires de mai 2005
-80 euros : retenues pour titres restaurant : 30 euros sur le bulletin de paie d'avril 2004, 30 euros sur celui ce juin 2005 et 20 euros sur celui de juillet 2005,
-dire que les intérêts au taux légal sur ses sommes courront à compter du 15 mai 2006 avec capitalisation dans les termes de l'article 1154 du code civil,
- ordonner la remise sous astreinte de 50 euros par jour de retard des bulletins de salaires et d'une attestation ASSEDIC rectifiée
- lui octroyer 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
********
Suivant conclusions régulièrement communiquées et oralement soutenues à l'audience du 22 septembre 2010, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé de ses moyens et arguments , l'OFFICE AUXERROIS de l'HABITAT OPM HLM demande à la cour de :
- confirmer le jugement, les contrats conclus relevant du dispositif des contrats adulte relais
- débouter monsieur [Z] [T] de l'ensemble de ses demandes.
- le condamner à une indemnité de 1.200 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
MOTIFS
- Sur la requalification
Considérant que l'OFFICE AUXERROIS de l'HABITAT OPM HLM prétend que les deux contrats souscrits par le salarié relèvent du dispositif des contrats adulte relais prévu par les articles L.5134-100 à L.5134-107 du code du travail ;
Mais considérant que l'article L.5134-103 du code du travail dispose que le contrat adulte- relais est un contrat à durée déterminée conclu au titre du 1° de l'article L. 1242-3 du code du travail ;
Qu'à ce titre et conformément aux dispositions de l'article L. 1242-12 du même code ,il doit être établi par écrit et comporter la définition précise de son motif, à défaut de quoi il est réputé conclu pour une durée indéterminée ;
Et considérant en l'espèce qu'aucun des deux contrats à durée déterminée successivement conclus entre les parties, ne mentionne qu'il s'agit de contrats ' adulte relais ', ni ne fait référence aux dispositions légales relatives à ce type de contrat spécifique ce dont il résulte qu'il ne comporte pas la définition précise de son motif ;
Que c'est en vain que l'employeur se prévaut de la convention qu'il a passée avec le préfet de l'Yonne le 30 août 2002 pour la 'création d'un poste d'adulte relais', ce document au demeurant postérieur à la prise d'effet du 1er contrat à durée déterminée du 17 juin 2002 , et dont il n'est pas démontré qu'il se rapporte à l'embauche de M [T], ne pouvant suppléer au motif omis ;
Considérant que l'absence de motif dans les deux contrats à durée déterminée justifie, en application de l'article L.1245-1 du code du travail, la requalification de la relation contractuelle en durée indéterminée depuis le 17 juin 2002 ;
Que cette requalification ouvre droit pour le salariée à une indemnité correspondant à un mois de salaire soit 1.344,64 euros ;
- Sur la rupture
Considérant que l'employeur a notifié la rupture des relations contractuelles par lettre du 29 août 2005 en ces termes :
'Vous êtes embauché dans le cadre d'un contrat adulte relais en date du 1er septembre 2002.Ce contrat à durée déterminée de 3 ans arrivera à terme le 31 août 2005.
Vous cesserez donc vos fonctions à compter de cette date...'
Considérant que les contrats de travail à durée déterminée étant requalifiés en un contrat de travail à durée indéterminée, la rupture du contrat par la seule survenance de l'échéance du terme s'analyse en un licenciement abusif ;
Que le salarié peut donc prétendre à des dommages et intérêts qui compte tenu de son ancienneté et des éléments qu'il produit seront fixés à la somme de 8.500 euros, cette somme réparant à la fois l'irrégularité de procédure et l'illégitimité du licenciement ;que la preuve n'étant pas rapportée que le salarié a subi un préjudice distinct qui ne serait pas réparé par cette indemnisation, il sera débouté de son complément de demande ;
Qu'il a également droit à une indemnité compensatrice de préavis de 2.689,28 euros et les congés payés afférents ainsi qu'à une indemnité de licenciement de 425,80 euros correctement calculée ;
- Sur les autres demandes
- les retenues pour frais téléphoniques
Considérant que l'employeur ne justifie pas des factures correspondantes aux communications téléphoniques indues qu'il impute à monsieur [T] ; que celui-ci est donc fondé à obtenir le remboursement de la somme de 108,21 euros qui lui a été retenue sur ses salaires ;
-les retenues pour absence pour enfant malade
Considérant que l'employeur a retenu un jour de salaire pour absence injustifiée les 8 -9 mars 2005 estimant que le salarié ne justifiait pas des conditions pour bénéficier d'une journée pour enfant malade ;
Mais considérant que Monsieur [T] a bien fourni à l'employeur un certificat médical mentionnant sa présence indispensable à son domicile pour garder son enfant malade ces deux jours ; que ce justificatif était suffisant pour qu'il bénéficie de cette autorisation ;
Que la somme indûment retenue de 42,10 euros doit donc lui être remboursée ;
- les retenues au titre des tickets restaurant
Considérant que les bulletins de salaire des mois de juin et juillet 2005 portent des déductions au titre de tickets restaurant pour un montant de 30 euros en juin 2005 et 20 euros en juillet 2005 ;
Que le salarié indique que ces tickets ne lui ont pas été délivrés et demande le remboursement de ces sommes indûment retenues ;
Que si l'employeur conteste devoir ces restitutions aux motifs que ces tickets auraient été perdus, ses propos sont toutefois infirmés par son courrier du 9 septembre 2005, postérieur à la rupture du contrat de travail par lequel il demande à M [T] de venir précisément retirer ses tickets restaurant ;
Qu'est ainsi rapporté la preuve que le salarié n'a jamais perçu ses tickets restaurant pendant la relation travaillée ;
Qu'il sera donc indemnisé de leur montant soit 50 euros ;
Que s'agissant du mois d'avril 2004, aucun élément ne démontre qu'il n'a pas bénéficié des tickets restaurant mentionnés sur son bulletin de salaire à hauteur de 30 euros;
Considérant que le jugement sera donc infirmé en toutes ses dispositions ;
Considérant que les sommes auxquelles l'employeur est condamné porteront intérêt au taux légal à compter de la saisine du conseil de prud'hommes le 15 mai 2006 pour toutes les créances de nature salariale ; qu'en ce qui concerne les indemnités et dommages et intérêts ils porteront intérêts à compter du présent arrêt ;
Qu' il convient, en application des dispositions de l'article 1154 du code civil, d'ordonner la capitalisation des intérêts de droit échus sur ces sommes dans la mesure où il n'est pas démontré que le retard apporté au paiement de la créance ou le non-paiement de celle-ci soient dus à l'attitude fautive du salarié ;
Considérant que l'employeur doit remettre enfin les documents de fin de contrat, sans que toutefois ne soit assortie à cette demande l'astreinte sollicitée ;
Que l'équité commande enfin d'allouer à monsieur [T] une somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, l'employeur étant condamné aux dépens ;
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement et contradictoirement
Infirme le jugement,
Statuant à nouveau,
Condamne l'OFFICE AUXERROIS de l'HABITAT OPM HLM au paiement des sommes suivantes :
- 1.344,64 euros : indemnité de requalification
- 425,80 euros : indemnité de licenciement,
- 2.689,28 euros : indemnité compensatrice de préavis outre 268,93 euros pour congés payés afférents ,
-8.500 euros : indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 108,21 euros : retenu de frais téléphoniques sur les salaires de décembre 2004
- 42,10 euros : retenue pour absence enfant malade sur les salaires de mai 2005
-50 euros : retenues pour titres restaurant ,
Dit que les intérêts au taux légal sur ses sommes courront à compter du 15 mai 2006 pour les créances salariales , à compter du présent arrêt pour les sommes à caractère indemnitaire,avec capitalisation dans les termes de l'article 1154 du code civil,
Ordonne la remise des bulletins de salaires et d'une attestation ASSEDIC rectifiée
Alloue à monsieur [Z] [T] une somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
Met les dépens à la charge de l'OFFICE AUXERROIS de l'HABITAT OPM HLM.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,