Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 2
ARRET DU 27 OCTOBRE 2010
(n° , 7 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 08/05282.
Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 Février 2008 - Tribunal de Grande Instance de PARIS 8ème Chambre 2ème Section - RG n° 05/16753.
APPELANT :
Monsieur [W] [Y]
demeurant [Adresse 3],
représenté par la SCP RIBAUT, avoués à la Cour,
assisté de Maître Marine PARMENTIER, avocat au barreau de PARIS, toque C 2141.
INTIMÉE :
SCI DE LA TOUR
prise en la personne de ses représentants légaux,
ayant son siège social [Adresse 2],
représentée par la SCP ROBLIN - CHAIX DE LAVARENE, avoués à la Cour
assistée de Maître Zineb KRIEM PARRONDO plaidant pour le Cabinet TOUBOUL, avocat au barreau de PARIS, toque L 41.
INTIMÉ :
Monsieur [S] [Z]
demeurant [Adresse 1],
représenté par la SCP HARDOUIN, avoués à la Cour,
assisté de Maître Roland CHADWICK, avocat au barreau de PARIS, toque A 621.
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 910 - 1er alinéa du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 29 juin 2010, en audience publique, devant Madame RAVANEL, conseiller chargé du rapport, les avocats ne s'y étant pas opposés.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur DUSSARD, président,
Madame RAVANEL, conseiller,
Madame BOULANGER, conseiller.
Greffier lors des débats : Monsieur MADANI.
ARRET :
Contradictoire,
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
- signé par Monsieur DUSSARD, président, et par Monsieur NGUYEN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Monsieur [Y] est propriétaire d'un appartement au 6ème étage de l'immeuble du [Adresse 3].
À l'étage au-dessus se trouvent vingt-cinq chambres de service.
Deux de celles-ci appartiennent à Monsieur [Y].
Le lot 25 est une chambre double (nos 11 et 11bis), acquise le 21 mai 1999 par la SCI de la Tour, de Mademoiselle [H].
Ce lot n'est pas directement au-dessus de l'appartement [Y].
Monsieur [Z] a, par acte de licitation du 7 décembre 2001, reçu l'usufruit de la chambre 13, constituant le lot 27 de la copropriété, dont son épouse Madame [F] a reçu la nue propriété. Cette chambre est située au-dessus de l'appartement de l'appelant (comme les chambres 14, 15, 16 et 17).
Se plaignant de cinq dégâts des eaux provoqués par l'engorgement des tuyauteries d'évacuation des chambres de service situées au-dessus de son appartement, Monsieur [Y] a fait, les 7, 9 et 15 novembre 2005, assigner la SCI de la Tour et Monsieur [Z] aux fins de voir ordonner le retrait des installations sanitaires de leurs chambres de service, de leur voir enjoindre de résilier leurs contrats de location, ainsi qu'en dommages et intérêts.
Par jugement du 14 février 2008, le Tribunal de grande instance de Paris a :
- déclaré irrecevable la demande à l'égard de Monsieur [Z], en l'absence d'assignation de la nue propriétaire,
- débouté Monsieur [Y] de l'intégralité de ses demandes,
- condamné Monsieur [Y] à payer à Monsieur [Z] la somme de 1.500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et la même somme à la SCI de la Tour, sur ce fondement.
La Cour est saisie de l'appel contre cette décision.
Vu la déclaration d'appel du 12 mars 2008,
Vu les conclusions :
- de Monsieur [Z] du 10 juin 2010,
- de Monsieur [Y] du 25 juin 2010,
- de la SCI de la Tour du 29 juin 2010.
SUR CE, LA COUR,
Monsieur [Y] soutient que la SCI de la Tour et Monsieur [Z] ont effectué des violations du règlement de copropriété et notamment de son article 7.
Ses demandes portent :
- sur le constatation de cette violation,
- sur la constatation d'un changement d'affectation prohibé des chambres de service,
- sur la constatation de l'absence d'autorisation de l'assemblée générale 'du changement d'affectation et des installations sanitaires et raccordements effectués',
- sur l'existence d'atteintes à ses droits par le changement prohibé et les troubles anormaux de voisinage consécutifs à 'l'occupation illicite' des chambres ayant entraîné des dégâts des eaux et des nuisances sonores,
- sur la cessation 'du changement d'usage prohibé des chambres',
- sur le retrait par la SCI de la Tour des installations sanitaires, sous astreinte,
- sur le suppression de toutes les installations non autorisées par une assemblée générale,
- sur la remise en état initial par Monsieur [Z] de la chambre de service 13 sous astreinte,
- sur la résiliation des contrats de location et conventions de mise à dispositions conclus sur les chambres de service 11, 11 bis et 13 et leur interdiction pour l'avenir,
- sur la constatation par huissier des remises en état, aux frais de la SCI de la Tour et de Monsieur [Z] et la communication du constat,
- sur la condamnation 'solidairement' de la SCI de la Tour et de Monsieur [Z] à lui payer 15.000 € au titre du préjudice subi pour troubles anormaux de voisinage.
Subsidiairement, il conclut pour la première fois en appel à une demande d'expertise.
Monsieur [Z] n'est pas propriétaire de la chambre de service n° 13 dont il est usufruitier.
Les demandes de remise en état antérieur des installations sanitaires de cette chambre, sont irrecevables à son égard.
L'article 70 du règlement de copropriété dispose que chaque copropriétaire peut jouir des parties 'privées' lui appartenant sous réserve de ne pas nuire aux droits des propriétaires, qu'il ne pourra modifier la disposition intérieure de son appartement, même si ces modifications ne portent pas sur les parties communes de l'immeuble, qu'après approbation par l'architecte de l'immeuble des travaux projetés.
Le même article dispose que les appartements ne pourront être occupés que bourgeoisement par des personnes de bonne vie et m'urs que la tranquillité de l'immeuble ne devra pas être troublée par les occupants et que 'La transformation des appartements et des chambres de bonnes en chambres meublées pour être louées à des personnes distinctes est interdites, mais les locations en meublé par appartements entiers sont autorisées'.
Monsieur [Z], usufruitier et son épouse, nue propriétaire, ne possèdent aucun autre lot dans l'immeuble que la chambre de service n° 13, et les premiers juges ont justement considéré que cette chambre n'étant pas annexée à un appartement la disposition précitée de l'article 7 ne pouvait s'appliquer.
S'agissant de l'occupation de la chambre appartenant à la SCI, celle-ci indique, sans être contredite que cette double chambre de bonne a servi jusqu'au mois d'avril 2007 au logement de la nurse de la fille de Monsieur et Madame [N], associés de la SCI de la Tour et est à nouveau occupée depuis le mois de septembre 2009 par la nouvelle nurse des arrière petits enfants de Madame [N], copropriétaire.
Il n'apparaît donc pas que cette chambre soit louée.
S'agissant de la demande d'interdiction de convention de mise à disposition formée par Monsieur [Y], elle vise à enjoindre aux propriétaires de laisser inoccupées les chambres 11, 11 bis et 13, solution certes confortable pour l'appelant mais qui ne saurait être admise.
Plus généralement, les dispositions de l'article 7 trouvent leur justification dans la destination de l'immeuble.
Ainsi dans cet immeuble d'habitation bourgeoise qu'est l'immeuble du [Adresse 3], l'activité de loueur professionnel des chambres de service à la journée, à la semaine ou au mois ne semble pas pouvoir être autorisée au vu du standing de l'immeuble.
Toutefois, la location en meublé n'est pas en elle même contraire à la destination de l'immeuble, dès lors que des nuisances particulières et répétées ne sont pas démontrées.
En l'espèce, si Monsieur [Y] a bien subi des dégâts des eaux l'un d'entre eux est dû à une fenêtre restée ouverte, une nuit d'orage, dans les parties communes du 7ème étage.
Les autres dégâts des eaux, s'ils proviennent de l'étage supérieur, ne sont pas identifiables quant à leur origine. Il sera à cet égard observé que les propriétaires des chambres 12, 14, 15 et 16 n'ont pas été appelés en cause par Monsieur [Y], alors même qu'il ressort des constatations de la SCP AGNUS et [J], huissier, dont le constat du 6 décembre 2005 est produit pas Monsieur [Z] que la chambre de service n° 13 était en parfait état d'habitabilité et ne présentait aucune trace d'infiltration ni aucune trace d'humidité.
Si Monsieur [Y] verse un procès-verbal de constat de Maître [I], huissier, du 26 mai 2006, faisant état de peinture écaillée et de coulures marron sous une poutre de son séjour et si l'huissier s'est rendu ensuite au 7ème étage à la chambre de service n° 12 et y a constaté 'une forte odeur d'humidité et de putrescence', avec des traces jaunâtres d'humidité au sol, il sera constaté que cette pièce est totalement inopérante, la propriétaire de cette chambre n'étant pas dans la cause.
Ce procès-verbal est à lire accompagné du procès-verbal de l'assemblée générale spéciale de la copropriété du 7 novembre 2006.
Une troisième résolution a été prise :
'L'assemblée générale, après en avoir délibéré, constate que les propriétaires de chambres de service concernées par les fuites à savoir, les propriétaires des chambre 11/12/13/14/15/16 et 17, constituent un collectif pour faire procéder avec l'assistance du syndic, aux études précisant les travaux indispensables à faire sur les évacuations des eaux usées, à leurs frais exclusifs dans un délai fixé au plus tard au 30 janvier 2007 et avec une réalisation au plus tard le 30 mars 2007".
Des travaux ont été réalisés puisqu'il ressort d'une facture du 30 novembre 2007 établie au nom du syndicat des copropriétaires qu'a été effectué le remplacement et le renforcement du collecteur d'évacuation des eaux usées des chambres de service.
Les travaux concernaient les chambres 13, 14, 15, 16.
Monsieur [Y] n'a pas subi d'infiltrations depuis ces travaux.
Le principe de la réalisation de travaux a été voté lors de l'assemblée générale du 7 novembre 2006 et n'a pas été contesté par Monsieur [Y].
La réalisation des travaux rend utopiste la demande d'expertise, qu'il n'y a pas lieu d'ordonner.
Il sera considéré que Monsieur [Y] n'a pas rapporté la preuve qui lui incombait de l'imputabilité des dégâts des eaux aux chambres [Z] et SCI de la Tour.
En ce qui concerne les nuisances phoniques alléguées, Monsieur [Y] produit les attestations d'un couple d'amis ayant entendu des bruits secs et forts au-dessus de son appartement le 2 juillet 2007, celle d'un autre ami ayant entendu le 7 février 2010 un bruit sourd provenant d'un appartement de l'étage supérieur à 1heures 52 et un autre à 2 heures 05.
L'appelant a fait constater par huissier le 26 janvier 2010 le niveau sonore d'une pompe de relevage située dans la chambre de service n° 11.
L'huissier a constaté à 7 heures 21 du matin au centre de la cuisine de Monsieur [Y] un son ambiant de 26,3 db, passé à 25,6 à 7 heures 35 puis à 36,7 db à 7 heures 45 lorsque ce qu'il indique être la pompe située au-dessus s'est mise en marche.
Il déclare que, dans le cabinet d'aisances, situé au droit du WC commun dans lequel l'écoulement des eaux usées de la chambre de service n° 11 est raccordé à la colonne de l'immeuble, le volume sonore passe de 25,2 db à 45,3 db lorsque la pompe est en fonctionnement.
L'huissier a indiqué que dans le salon on entendait clairement le bruit d'un appareil électrique en fonctionnement et dans le WC le bruit d'un écoulement d'eau.
L'existence d'une gêne ressort de ce procès-verbal.
Compte tenu du temps normalement limité passé dans les cabinets d'aisance et du fait que l'usage de la pompe de relevage située au-dessus ne peut correspondre que très exceptionnellement au temps passé dans la pièce susvisée, l'émergence même importante de bruit ne peut constituer un trouble anormal de voisinage.
D'autre part, le bruit d'eau entendu par l'huissier peut provenir de tout usager du WC commun et il n'est pas établi qu'il provienne de la chambre 11, au surplus non située directement au-dessus de l'appartement de l'appelant.
Par ailleurs, Monsieur [Y] ne produit pas d'éléments justifiant du caractère excessif des émergences relevées au regard de la réglementation, et ne démontre pas que les bruits relevés, par leur fréquence et leur intensité, excèdent les inconvénients normaux de voisinage, la Cour ayant relevé l'absence de caractère illicite de l'occupation des chambres de la SCI et des consorts [Z].
Les demandes de Monsieur [Y] seront en leur entier rejetées et le jugement confirmé en toutes ses dispositions.
Il apparaît inéquitable de laisser aux intimés la charge de la totalité de leurs frais irrépétibles et Monsieur [Y] sera condamné à payer à chacun d'entre eux la somme de 1.500 €.
PAR CES MOTIFS et ceux des premiers juges,
Confirme le jugement en toutes ses dispositions.
Y ajoutant,
Condamne Monsieur [Y] à payer 1.500 € à Monsieur [Z] et 1.500 € à la SCI de la Tour, sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
Le condamne aux dépens d'appel.
Dit qu'ils seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
Le greffier,Le Président,