RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 10
ARRET DU 26 Octobre 2010
(n° 16 , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 09/05130
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 02 Novembre 2007 par le conseil de prud'hommes de BOBIGNY section encadrement RG n° 03/04516
APPELANTE
Madame [T] [K]
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Me Dominique CRIVELLI, avocat au barreau de PARIS, toque : E1245
INTIMEE
SA ARMATIS
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 2]
représentée par Me Michel DAUNOIS, avocat au barreau de PARIS, toque : D 1542
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 28 Juin 2010, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Philippe LABREGERE, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Brigitte BOITAUD, président
Monsieur Philippe LABREGERE, Conseiller
Madame Florence BRUGIDOU, Conseiller
Greffier : Mme Anne-Marie CHEVTZOFF, lors des débats
ARRET :
- contradictoire
- prononcé publiquement par Madame Brigitte BOITAUD, président
- signé par Madame Brigitte BOITAUD, Présidente et par Mme Corinne DE SAINTE MAREVILLE, Greffière présente lors du prononcé.
LA COUR,
Statuant sur l'appel formé par [T] [K] d'un jugement contradictoire du Conseil de Prud'hommes de Bobigny en formation de départage en date du 2 novembre 2007 ayant condamné la société ARMATIS à lui verser
36000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
1300 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
et débouté la salariée du surplus de sa demande ;
Vu les dernières écritures et observations orales à la barre en date du 28 juin 2010 de [T] [K] appelante, qui sollicite de la Cour la réformation du jugement entrepris et la condamnation de la société ARMANTIS intimée à lui verser
135871,02 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires
13587,10 euros au titre des congés payés
1358,71 euros à titre de rappel de prime de vacances
55032,60 euros au titre de l'indemnité de repos compensateur
5503,26 euros au titre des congés payés afférents
9455,70 euros à titre d'indemnisation RTT
945,57 euros au titre des congés payés
94,55 euros à titre de prime de vacances
1026,29 euros au titre du bonus sur l'exercice 2000
102,62 euros au titre des congés payés
10,26 euros au titre de la prime de vacances
3354 euros au titre du bonus sur l'exercice 2002
335,40 euros au titre des congés payés
33,54 euros au titre de la prime de vacances
27077,70 euros sur le fondement de l'article L8223-1 du code du travail
36000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Vu les dernières écritures et observations orales à la barre en date du 28 juin 2010 de la société ARMATIS intimée qui sollicite de la Cour l'infirmation du jugement entrepris et la condamnation de l'appelante à lui restituer la somme versée dans le cadre de l'exécution provisoire et à lui payer 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
SUR CE, LA COUR
Considérant qu'il est constant que [T] [H] épouse [K] a été embauchée par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 16 novembre 1992 en qualité de contrôleur de gestion par la société MATRIXX MARKETING devenue ultérieurement CONVERGYS CUSTOMER MANAGEMENT puis CONVERCALL ; qu'à la date de son licenciement elle occupait l'emploi de directeur financier adjoint, percevait une rémunération mensuelle brute de moyenne de 4512,95 euros et était assujettie à la convention collective SYNTEC ; que l'entreprise employait de façon habituelle au moins onze salariés ;
Que l'appelante a été convoquée par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 10 juin 2003 puis le 30 juin 2003 à un entretien le 18 juin puis le 8 juillet 2003 en vue de son licenciement pour cause économique ; qu'à l'issue de cet entretien, son licenciement lui a été notifié par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 18 juillet 2003 ;
Que les motifs du licenciement tels qu'énoncés dans la lettre sont la réorganisation de l'entreprise en vue d'assurer sa survie par une transmission universelle de son patrimoine au profit de la société ARMATIS ;
Que l'appelante a saisi le Conseil de Prud'hommes le 15 octobre 2003 en vue de contester la légitimité du licenciement ;
Considérant que [T] [K] expose que le licenciement est nul ; qu'il a été signé par la directrice des ressources humaines ; que les motifs économiques ne sont pas caractérisés ; que les difficultés économiques ne sont pas démontrées ; que la société a tenté de détourner les dispositions légales en matière de transfert du contrat de travail à l'occasion de l'opération d'absorption ; que le licenciement était destiné à réduire les charges de structure préalablement à l'absorption ; que la société a violé son obligation de reclassement ; qu'aucune recherche effective et individualisée n'a eu lieu ; que l'appelante n'était soumise à aucune convention de forfait ; qu'elle a effectué de multiples heures supplémentaires avec des pics à l'époque de la clôture des comptes ; que la société ne s'est jamais opposée à l'exécution d'heures supplémentaires ; que l'appelante a effectué du travail dissimulé ; qu'elle n'a pas accepté le plafonnement de son bonus pour l'année 2000 ; qu'elle pouvait prétendre à un bonus pour l'année 2002 ;
Considérant que la société ARMATIS substituée aux droits de la société CONVERCALL soutient que le licenciement n'est pas nul ; que la directrice des ressources humaines bénéficiait d'une délégation de pouvoirs ; qu'il est fondé sur une cause économique ; que de très fortes pertes étaient enregistrées par la société CONVERCALL ; que le projet de restructuration était indispensable ; que l'appelante a reçu des propositions de reclassement avant son licenciement ; qu'elles concernaient l'ensemble des postes disponibles dans les entreprises du groupe ; que le poste occupé par l'appelante a été supprimé ; que la société CONVERCALL qui faisait partie du groupe avant le licenciement économique ne pouvait éluder les dispositions de l'article L122-12 du code du travail s'il était applicable ; que l'appelante était soumise à une convention de forfait ; que le règlement intérieur subordonnait l'exécution d'heures supplémentaires à une demande expresse de la direction ou du responsable ; que le versement de l'intégralité du bonus au titre de l'année 2000 était subordonné à l'atteinte par la société d'objectifs qui n'ont pas été réalisés ; qu'aucun membre du personnel n'a perçu de bonus pour l'exercice 2002 ;
Considérant en application de l'article L1233-4 du code du travail que les propositions de reclassement offertes par la société figurent en annexe au courrier en date du 23 mai 2003 ; qu'elles consistent en un tableau comprenant dix neuf postes dont quinze sont des emplois de téléconseillers ; que les autres emplois correspondent à des postes d'assistante de ressources humaines, de techniciens informatique et télécom ; que de telles propositions ne présentent aucun caractère sérieux compte tenu des fonctions de directeur financier occupées par l'appelante et n'ont pas été individualisées ; qu'en outre alors que le licenciement de cette dernière était envisagé, la société ne lui a pas proposé l'emploi de directeur conseil de la société ARMATIS, pourvu le 10 juin 2003 par recrutement extérieur ; que le contrat de travail versé aux débats ne fait nullement état d'une définition précise des fonctions conforme à la fiche de poste produite qui, en outre, n'est pas contemporaine du contrat de travail ; qu'à la demande d'information de l'appelante sur un tel recrutement, la société lui a répondu par un courrier en date du 17 juin 2003 que le poste pourvu était celui d'un consultant ; qu'enfin l'intimée ne fournit aucune explication sur le recrutement par la société ARMATIS d'une directrice des ressources humaines dès 4 août 2003 ; que compte tenu de la date de recrutement, elle avait nécessairement connaissance d'une vacance de ce poste à l'époque où le licenciement a été envisagé ; qu'en conséquence la société a bien manqué à son obligation de recherche de reclassement ; qu'il s'ensuit que le licenciement de l'appelante est bien dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
Considérant que l'appelante était âgée de trente huit ans et bénéficiait d'une ancienneté de plus de dix années au sein de l'entreprise à la date de son licenciement ; que les premiers juges ont exactement évalué le préjudice subi par l'appelante sur le fondement de l'article L1235-3 du code du travail ;
Considérant en application des articles L3121-38 , L3121-40 et L32121-41 du code du travail que bien que la convention collective SYNTEC stipule que les appointements des ingénieurs et cadres présentaient un caractère forfaitaire, la société était tenue de conclure par écrit avec l'appelante une convention de forfait définissant précisément les modalités de cet accord ; que le seul renvoi aux dispositions de la convention collective par l' article 12 du contrat de travail ne pouvait dispenser l'employeur d'une telle formalité ;
Considérant toutefois en application des articles L3121-22 et L3171-4 du code du travail qu'aux termes de l'article 4 alinéa 3 du règlement intérieur il était expressément stipulé que les heures supplémentaires ne pouvaient être effectuées sans une demande expresse de la direction de l'entreprise ou du responsable ; qu'aucune des pièces versées aux débats ne démontre que l'appelante a exécuté les heures supplémentaires qu'elle revendique sur demande expresse de sa hiérarchie ou même avec l'accord implicite de celle-ci ; qu'au demeurant les tableaux récapitulatifs d'heures supplémentaires ne présentent aucune caractère contradictoire ; qu'il n'est pas établi de rapport direct entre les notes de frais, les fiches de taxi et les horaires de travail de l'appelante ; que de même les feuilles de remboursement des frais de déplacement produites ne comportent aucun élément précis de nature à étayer la demande de cette dernière ;
Considérant en application de l'article L1221-1 du code du travail qu'il résulte des termes de la note du 19 juin 2000 que le bonus pour l'année 2000 auquel pouvait prétendre l'appelante, sous réserve de la réalisation des conditions définies, s'élevait à la somme de 15 000 francs ; que la société n'a pas reçu l'accord de la salariée de plafonner ce bonus à 127,40 % et donc de ne pas percevoir le reliquat correspondant à 1026,29 € ; qu'elle n'établit pas par ailleurs que le défaut de réalisation des conditions définies dans la note était à l'origine de ce plafonnement ; qu'en revanche il apparaît que le défaut de versement du bonus au titre de l'année 2002 est justifié par les résultats de l'entreprise comme le démontre le courrier en date du 6 février 2003 ; qu'en conséquence la société est redevable de la somme de 1026,29 € , de 102,62 € au titre des congés payés et de 10,26 € au titre de la prime de vacances ;
Considérant qu'il ne serait pas équitable de laisser à la charge de l'appelante les frais qu'elle a dû exposer en cause d'appel, et qui ne sont pas compris dans les dépens ; qu'il convient de lui allouer une somme de 1700 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS
REFORME le jugement entrepris ;
CONDAMNE la société ARMATIS à verser à [T] [K]
1026,29 euros au titre du bonus sur l'exercice 2000
102,62 euros au titre des congés payés
10,26 euros au titre de la prime de vacances
CONFIRME pour le surplus le jugement entrepris ;
Y AJOUTANT
CONDAMNE la société ARMATIS à verser à [T] [K] 1700 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
LA CONDAMNE aux dépens.
LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE