RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 6
ARRET DU 20 Octobre 2010
(n° 11 , 4 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 09/07767-PMDF
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 15 Octobre 2007 par le conseil de prud'hommes de PARIS section Encadrement RG n° 05/14192
APPELANTE
Madame [X] [U]
[Adresse 1]
[Localité 4]
représentée par Me Coralie-alexandra GOUTAIL, avocat au barreau de PARIS, toque : A0201
INTIMÉE
SA SOFIAP
[Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par Me Martine ASSIÉ-SEYDOUX, avocat au barreau de PARIS, toque : D0938
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 06 Septembre 2010, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Patrice MORTUREUX DE FAUDOAS, Président, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Patrice MORTUREUX DE FAUDOAS, Président
Madame Bernadette VAN RUYMBEKE, Conseillère
Madame Claudine ROYER, Conseillère
Greffier : Mme Evelyne MUDRY, lors des débats
ARRET :
- contradictoire
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur Patrice MORTUREUX DE FAUDOAS, Président et par Evelyne MUDRY, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCÉDURE :
Par jugement en date du 17 octobre 2007, du conseil des prud hommes de Paris a dit que le licenciement de Madame [U] a été considéré fondé sur une cause réelle et sérieuse et elle a été déboutée de l'ensemble de ses demandes.
Par conclusions en date du 11 septembre 2009, Madame [U] a sollicité le rétablissement de son affaire qui avait fait l'objet d'une radiation à l'audience du 2 septembre 2009, et elle sollicite de la Cour que son licenciement soit considéré comme sans cause réelle et sérieuse et qu'il lui soit alloué en conséquence les sommes de :
- 58 792,78 euros à titre de dommages et intérêts
- 21 511,70 euros au titre des heures supplémentaires.
- 2 151,17 euros au titre d'indemnité compensatrice de congés payés.
- 25 779, 72 euros au titre du travail dissimulé.
- 3000 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Le 26 août 2010, la société SOFIAP a conclu à la confirmation du jugement intervenu et à la condamnation de Madame [U] à la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Les parties ont été entendues en leurs explications conformes aux conclusions qu'elles ont approuvées.
Sur le licenciement :
Madame [U] qui exerçait les fonctions d'adjointe au directeur financier chargée des services de titrisation, de trésorerie et des emprunts.
Elle percevait un salaire de 4.846,93 euros mensuels.
Le 6 septembre 2005 les attribution de Madame [U] ont été modifiées, elle s'est vue retirer le service titrisation et emprunts, et ce à compter du 12 septembre 2005.
Le 19 septembre 2005, un nouvel organigramme a été mis en place, et il lui a été retiré la supervision des services trésorerie, titrisation et emprunts, et il lui a été confié la responsabilité du service gestion actif et passif et étude financière.
Elle soutient en conséquence sur la base des pièces qu'elle verse aux débats qu'il s'agit d'une modification unilatérale du contrat de travail par l'employeur, qui ne lui a adressé l'avenant au contrat de travail que le 30 septembre 2005, en précisant qu'il s'agissait d'une régularisation, alors qu'elle avait refusé cette modification, ce qui entraîne une absence de cause réelle et sérieuse du licenciement.
Elle indique que sur le fondement des dispositions de l'article L 1235-1 du code du travail, la procédure relative à la modification du contrat de travail prévue aux dispositions de l'article L 1222-6 du code du travail n'a pas été respectée.
En réponse la société SOFIAD soutient que cette réorganisations n'a pas changée la rémunération de Madame [U] qu'elle a conservée son titre, comme l'atteste l'examen des bulletins de salaires, et que cette réorganisation relève du pouvoir souverain de l'employeur, qu'il ne s'agit que d'un recentrage des activités de Madame [U] vers une expertise, ce qui explique qu'elle ait pu être déchargée du service titrisation, emprunts et trésorerie, pour se consacrer exclusivement à cette activité stratégique pour la SOFIAD, que s'agissant d'une modification du contrat de travail, la SOFIAD a légitimement adressé le 30 septembre 2005, un avenant au contrat de travail à Madame [U].
Elle explique en outre cette modifications par les difficultés rencontrées par Madame [U] dans la gestion du personnel, et qu'elle a en conséquence préférée résoudre ces dernières par une réorganisation du service, que par la voie disciplinaire, en lui proposant un autre poste, opportunité que Madame [U] n'a pas voulu saisir.
Il reste que si l'employeur dispose du pouvoir de réorganiser ses services afin d'assurer une meilleure efficacité du fonctionnement de son entité, ces réorganisations doivent être réalisées dans l'intérêt effectif de l'entité, et être réalisées sans qu'elle ne constitue une sanction déguisée.
Or les conditions de réalisation de cette réorganisation démontrent d'une part qu'elle a été publique dés le mois de septembre 2005, par la publication d'un organigramme démontrant le retrait par la société de compétences attribués à Madame [U] par son contrat de travail, et que ce n'est que le 12 septembre lors d'un entretien qu'elle a appris cette modification qui n'a été confirmé par courrier que le 30 septembre 2005.
Le 30 septembre 2005, l'employeur conscient que cette modification entraînait une modification unilatérale du contrat de travail, puisque Madame [U] n'avait plus la responsabilité de trois branches d'activité, n'encadrait plus quatre salariés, et se trouvait effectivement seule responsable de l'activité qui lui avait été confiée, lui a adressé une avenant à son contrat de travail qu'elle a refusée ce qui a entraîné le licenciement.
Dés lors la procédure prévue aux dispositions de l'article L 1222-6 du code du travail aurait du être respectée.
Le refus de cette modification par le salarié, et il appartient aux juges d'apprécier le caractère réel et sérieux du motif invoqué et ce conformément aux dispositions de l'article L 1235-1 du code du travail.
Sans qu'il soit besoin d'examiner plus avant les motifs de la réorganisation, il est constant que le poste et les attributions de Madame [U] ont été confiés à une autre personne Madame de Paris, qu'elle a été écartée de son poste au profit de cette dernière, et que pour procéder ainsi, il a été allégué des besoins de réorganisation du service qui ne sont pas démontrés.
Les motifs allégués dans la lettre de licenciement constituent des motifs disciplinaires, et ses relations avec ses salariés doivent être appréciés au regard des évaluations qui ont été faites de son activité présentée comme délicate, en raison de la réorganisation du service en 2003, du personnel sortant d'une période difficile.
Dés lors le licenciement doit être considéré comme sans cause réelle et sérieuse.
Sur le préjudice :
Sur le fondement des dispositions de l'article L 1253-3 du code du travail Madame [U] est fondée à solliciter la somme de 29 081,58 euros correspondant à ses six derniers mois de salaires.
Le préjudice moral distinct de celui indemnisé ne peut être suffisamment apprécie, les arrêts de travail produits sont effectivement intervenus dans le cadre du conflit déjà justement indemnisé.
La perte de revenus liée à son licenciement et le fait qu'elle n'a pu assumer ses charges postérieurement à ce dernier, alors qu'elle était âgée de 48 ans et qu'elle avait trois enfants à charge doit également être pris en compte et évalué à la somme de 10 000 euros.
Sur les heures supplémentaires et le travail dissimulé :
Les dispositions de l'article L 3171-4 du code du travail font obligation à l'employeur de produire les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisées par le salarié, mais il appartient au salarié de fournir préalablement des éléments de nature à étayer sa demande.
L'emploi de cadre supérieur occupé par Madame [U] lui donnait totalement la liberté d'organiser son travail, et lorsqu'elle a demandé à son employeur la récupération de 9 jours en 2004, la société lui a accordé ses récupérations.
Force est de constater qu'aucune demande n'a été déposée depuis lors, et qu'aucune preuve de l'existence d'heures supplémentaires depuis cette date n'est produite de nature à étayer la demande.
Dés lors en l'absence de tout élément de preuve relatif a ces horaires réalisés, et de la preuve du caractère volontaire de cette éventuelle dissimulation il ne pourra être fait droit à la demande au titre du travail dissimulé.
Sur l'article 700 du nouveau code de procédure civile :
Il serait inéquitable de laisser en totalité à la charge de Madame [U] les honoraires qu'elle a du acquitter pour se faire représenter devant le conseil des prud hommes, puis devant le juge départiteur, et devant la cour d'Appel de Paris alors que son affaire a été engagée depuis 2005 et il convient de lui allouer de ce chef la somme de 2000 euros.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Après en avoir délibéré,
Dit que le licenciement est intervenu sans cause réelle et sérieuse et condamne en conséquence la SOFIAD à verser à madame [U] la somme de 29.081,58 euros.
Condamne la société SOFIAD à payer à madame [U] la somme de 10 000 euros, en réparation de son préjudice moral.
Dit que cette somme sera productive d'intérêts de droit à compter du 28 novembre 2005.
Déboute Madame [U] de toutes ses autres demandes.
Ordonne l'exécution provisoire de la présente décision.
Condamne la SOFIAD à payer à Madame [U] la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Condamne la SA SOFIAD aux dépens d'appel.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,