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20/10/2010 | FRANCE | N°09/01061

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 1, 20 octobre 2010, 09/01061


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 1



ARRÊT DU 20 OCTOBRE 2010



(n° 232, 05 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 09/01061



Décision déférée à la Cour : Jugement du 21 Novembre 2008 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 01/05843





APPELANTE



La société GETTY IMAGES, SAS

Es qualité de successeur en droit de la SA AGEN

CE [B] FEARURES et de la Société THE IMAGE BANK FRANCE

Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux

ayant son siège social [Adresse 2]

[Localité 3]



représentée par la SCP...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 1

ARRÊT DU 20 OCTOBRE 2010

(n° 232, 05 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 09/01061

Décision déférée à la Cour : Jugement du 21 Novembre 2008 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 01/05843

APPELANTE

La société GETTY IMAGES, SAS

Es qualité de successeur en droit de la SA AGENCE [B] FEARURES et de la Société THE IMAGE BANK FRANCE

Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux

ayant son siège social [Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par la SCP MENARD - SCELLE-MILLET, avoués à la Cour

assistée de Me Christine SEVERE , avocat au barreau de Paris, Toque P372

plaidant pour la SCP SALANS & ASSOCIES

INTIMÉ

Monsieur [O] [B]

demeurant [Adresse 1]

[Localité 4]

représenté par la SCP DUBOSCQ - PELLERIN, avoués à la Cour

assisté de Me Valérie LEDOUX, avocat au barreau de Paris, Toque L301

plaidant pour la SELARL RACINE

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 01 Septembre 2010, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Didier PIMOULLE, Président

Madame Brigitte CHOKRON, Conseillère

Madame Anne-Marie GABER, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mademoiselle Aurélie GESLIN

ARRÊT :- Contradictoire

- rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Didier PIMOULLE, président et par Monsieur NGUYEN, greffier à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

***

LA COUR,

Vu l'appel relevé par la s.a.s. getty images du jugement du tribunal de grande instance de Paris (3ème chambre, 2ème section, n° de RG : 01/05843), rendu le 21 novembre 2008 ;

Vu les dernières conclusions de l'appelante (18 février 2010) ;

Vu les dernières conclusions (3 mars 2010) de M. [O] [B], intimé ;

Vu l'ordonnance de clôture prononcée le15 juin 2010 ;

* *

SUR QUOI,

Considérant que M. [O] [B], photographe indépendant, par contrat du 1er janvier 1993 venu à expiration le 31 décembre 1999, a donné mandat exclusif à la société agence [B] features (ci-après : aef), dont il était alors l'actionnaire majoritaire, de commercialiser ses photographies ; que la société aef a été absorbée le 22 novembre 2001 par la société the image bank france (ci-après : tib france), laquelle a été elle-même absorbée le 27 février 2002 par la société getty images ;que, reprochant à la société aef, non seulement divers manquements dans l'exécution de son mandat, mais encore d'avoir poursuivi sans autorisation, après l'expiration du contrat, l'exploitation de ses photographies, M. [B] a assigné cette société et la société tib france pour obtenir, outre le prononcé de diverses mesures d'interdiction d'exploitation et de restitution de ses photographies, le paiement d'une indemnité provisionnelle et la désignation d'un expert ;

Considérant que le tribunal, par jugement devenu définitif du 14 juin 2002, a :

« - Dit que la société aef a manqué à ses obligations de mandataire du photographe [O] [B], telles que fixées par le contrat du 1er janvier 1993 ;

- Dit qu'en poursuivant l'exploitation des photographies remises après l'expiration du contrat la société aef a engagé sa responsabilité délictuelle ;

- Dit qu'en disposant des droits de reproduction sur certaines photographies remises par [O] [B] à aef, la société image bank france a engagé sa responsabilité délictuelle ;»

et, avant dire droit sur la fixation du montant des dommages-intérêts dus à M. [B], ordonné une mesure d'instruction et désigné M. [V] [P] en qualité d'expert ;

Considérant que, l'expert ayant déposé son rapport, le tribunal, par le jugement dont appel, a condamné la société getty images à payer, au titre des divers éléments constituant le préjudice subi par M. [B], un total de 1.050.581 euros de dommages-intérêts et l'a déboutée de sa demande reconventionnelle en dommages-intérêts ;

Considérant que la société getty images articule sa critique du jugement en trois points qui seront examinés successivement, soit :

1. la responsabilité contractuelle de la société aef,

2. la responsabilité délictuelle de la société aef,

3. la responsabilité délictuelle de la société tib france ;

1. Sur la responsabilité contractuelle de la société aef :

Considérant que la société getty images, soutient que le jugement du 14 juin

2002, dont le dispositif se borne à poser le principe de la responsabilité contractuelle de la société aef, sans reprendre le détail des différents manquements à l'exécution du contrat examinés dans les motifs, n'a pas autorité de chose jugée sur ces différents points, ce qui l'autoriserait à rouvrir le débat sur la réalité des différentes fautes contractuelles ayant causé le préjudice dont l'évaluation est en cause devant la cour ;

Mais considérant qu'il résulte des motifs du jugement éclairant la portée du  dispositif, que le tribunal, dans sa décision du 14 juin 2002, a jugé que la société aef a:

- violé l'article I-1 du contrat en utilisant les photographies de M. [B], sans l'accord de l'auteur, pour servir à la publicité des sociétés Toshiba, Peugeot, Air France, Navfco et Zoldalex (point 1),

- violé l'article IV-1 du contrat, relatif au droit moral de l'auteur, en omettant de veiller à ce que figure la mention complète « [O] [B]/Agence [B] Features » à côté des reproductions publicitaires toshiba, peugeot, air france, navfco, et à côté des photographies reproduites dans le magazine « Capital » (point 2),

- violé l'article I, 1, a, du contrat en utilisant les photographies de M. [B], sans son autorisation, sous forme de cartes postales (point 3),

- porté atteinte au droit moral de l'auteur en reproduisant les photographies publicitaires de M. [B] dans le cadre d'un photomontage (point 4),

- violé les termes du mandat exclusif dont elle bénéficiait en confiant à la société the image bank le soin de commercialiser à sa place certaines photographies (point 8),

Que le tribunal a, par ailleurs, demandé à l'expert :

- de lui fournir tout élément permettant d'apprécier la qualité des prestations de classement, de diffusion et de retour des photographies assurées par la société aef (point 5),

- de prendre connaissance des justificatifs de parution, et relever si des défaillances ont pu être commises par la société aef (point 6),

- de lui fournir tout élément, notamment sur les conditions dans lesquelles certaines ristournes ont été consenties, permettant de faire les comptes entre les parties (point 7),

Considérant que l'expert a indiqué ne pas être en mesure de fournir les éléments demandés s'agissant de la qualité des prestations de la société aef et des justificatifs de parution ; que le tribunal a débouté M. [B] de ses demandes de ces chefs ; que ces demandes ne sont pas reprises en cause d'appel par l'intimé qui conclut à la confirmation du jugement ;

Que seules sont donc soumises à la cour, dans le cadre de la responsabilité contractuelle de la société aef, les condamnations à dommages-intérêts prononcées contre la société getty images au titre :

- de l'utilisation non autorisée à des fins publicitaires des photographies de M. [B],

- de la publication des photographies de M. [B] sans signature ou avec une signature erronée,

- du retraitement de certaines photographies de M. [B],

- de l'utilisation des photographies de M. [B] sur des supports non autorisés (cartes postales)

1.1. Sur les dommages-intérêts au titre de l'utilisation non autorisée à des fins publicitaires :

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société getty images fait inutilement valoir que M. [B] aurait donné son accord verbal à l'utilisation de ses photographies dans le cadre des actions publicitaires qu'il dénonce ou qu'un tel accord était en toute hypothèse superflu ; que ces arguments, qui tendent à remettre en cause l'existence de la violation de l'obligation contractuelle correspondante, définitivement établie par le jugement du 14 juin 2002, sont inopérants ;

Considérant que le tribunal, entérinant la démarche de l'expert, a justement évalué le préjudice de M. [B] à ce titre en tenant compte des sommes encaissées par la société aef grâce à l'exploitation publicitaire de 1032 photographies, de la différence entre ces sommes et celles perçues par M. [B], qui correspondaient au tarif prévu pour une utilisation dans le secteur de l'édition et de la presse et en estimant, sans qu'il y ait lieu de se référer à un taux de marge comme le soutient l'appelante, que M. [B] était de surcroît fondé à invoquer, outre son manque à gagner, une certaine banalisation de ses 'uvres ; que l'évaluation de ce chef de préjudice à 457.057 euros sera confirmée ;

1.2. Sur les dommages-intérêts au titre de la publication des photographies sans signature ou avec une signature erronée :

Considérant qu'il a été définitivement jugé par le jugement du 14 juin 2002 que la société aef avait manqué à son obligation contractuelle, prévue par l'article IV, 1, du contrat, de veiller, conformément aux usages professionnels en la matière, à la présence de la mention « [O] [B]/ Agence [B] » sur les photographies exploitées ;

Considérant que la société getty images verse inutilement au débat une attestation de son dirigeant à l'époque des faits affirmant que cette obligation a été scrupuleusement respectée ; qu'elle dénature le jugement en soutenant que le tribunal n'a pu, sans se contredire, retenir ce manquement et rejeter la demande de M. [B] fondée sur le défaut de présentation des justificatifs de parution ; que c'est en effet précisément parce que ces justificatifs ne sont pas produits, soit parce qu'elle n'a pas exigé de ses clients ces documents avec une constance suffisante, soit parce qu'elle n'estime pas à propos de les communiquer, que la société getty images se met dans l'impossibilité de prouver qu'elle s'est acquittée de son obligation avec une application suffisante ;

Considérant que l'expert, par une méthode d'extrapolation non critiquée par la société getty images, estime que 62, 10 % des factures de cession ne présentaient pas de mention demandant que soit indiqué le crédit photographique et conclut que 1.454 photographies ne portaient pas la mention requise  ;

Considérant que la société getty images, qui propose subsidiairement une indemnité de 25 euros par photographie non conforme en expliquant que la personnalité de l'auteur est un élément minime dans la valorisation d'une photographie de stock, ne soumet à la cour aucun motif pertinent conduisant à réduire l'évalution du préjudice retenue par le tribunal à raison de 100 euros par photographie ; que le jugement sera confirmé de ce chef ;

1.3. Sur les dommages-intérêts au titre du retraitement de certaines photographies :

Considérant qu'il résulte du jugement du 14 juin 2002 que la société aef a porté atteinte au droit moral d'auteur de M. [B] par le retraitement apporté à deux de ses photographies utilisées pour un photomontage ; que la société getty images ne peut être admise à discuter le principe de sa responsabilité de ce chef ; que l'appelante, qui propose subsidiairement de réduire l'indemnisation de M. [B] à 50 euros, soit 25 euros par photographies, ne démontre pas que le tribunal aurait surévalué l'indemnité de 3.000 euros allouée à ce titre, justifiée par la réputation de M. [B] de ne pas retoucher ses prises de vues ; que le jugement sera confirmé sur ce point ;

1.4. Sur les dommages-intérêts au titre de l'utilisation des photographies de M. [B] sur des supports non autorisés :

Considérant que la société getty images conteste inutilement le principe de sa responsabilité, définitivement constaté par le jugement du 14 juin 2002, pour l'édition de quatre photographies de M. [B] sous forme de cartres postales, support non prévu par le contrat ; qu'il n' y a pas lieu de s'arrêter à la proposition subsidiaire et dérisoire de la société getty images d'abandonner à M. [B] 25 euros par photographie, soit 100 euros au total, ni de réformer le jugement entrepris en ce qu'il a alloué de ce chef à M. [B] une indemnité justement évaluée à 4.000 euros ;

2. Sur la responsabilité délictuelle de la société aef :

Considérant que c'est par des motifs exacts, suffisants et pertinents que la cour fait siens que le tribunal, ayant relevé que la société aef, alors que le mandat qui lui avait été confié était venu à expiration le 31 décembre 1999, a exploité à partir de janvier 2000 141 photographies de M. [B] sans autorisation de l'auteur, portant ainsi atteinte à ses droits et lui causant un préjudice justement évalué à 13.591 euros par référence au chiffre d'affaires réalisé ;

3. Sur la responsabilité délictuelle de la société tib france :

Considérant que le principe de la responsabilité de la société tib france au titre de l'exploitation sans autorisation des photographies de M. [B] a été définitivement jugé par le jugement du 14 juin 2002 ; que la question soumise au tribunal après expertise se limitait à évaluer l'indemnité à allouer à M. [B] en fonction des éléments constatés par l'expert dans le cadre de sa mission consistant à donner son avis sur l'étendue réelle de cette exploitation ;

Considérant que le tribunal a exactement rappelé les constatations de l'expert relatives au chiffre d'affaires global réalisé par la société tib france grâce aux cessions non autorisées des droits de reproduction des photographies de M. [B] ; qu' il en a déduit à juste titre, compte tenu des sommes perçues par M. [B] et des frais de gestion, qu'il devait lui revenir à ce titre une somme de 271.738 euros ;

Considérant que c'est par ailleurs après une exacte analyse du rapport de l'expert que le tribunal a pris en compte la réduction de l'assiette des droits de M. [B] par suite de l'exploitation non autorisée de ses photographies par le réseau image bank dans des conditions assurant la rémunération d'intermédiaires et le prélèvement de frais administratifs ;

Considérant, en synthèse, que le jugement entrepris sera confirmé en toutes ses dispositions ;

* *

PAR CES MOTIFS :

CONFIRME le jugement entrepris,

CONDAMNE la société getty images aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du nouveau code de procédure civile et à payer à M. [O] [B] 20.000 € par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 09/01061
Date de la décision : 20/10/2010

Références :

Cour d'appel de Paris I1, arrêt n°09/01061 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-10-20;09.01061 ?
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