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06/10/2010 | FRANCE | N°08/06689

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 4, 06 octobre 2010, 08/06689


Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 4



ARRET DU 6 OCTOBRE 2010



(n° 194 , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 08/06689



Décision déférée à la Cour : Jugement du 27 Février 2008

Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2006041413





APPELANTE



Société de droit maltais CYKA LIMITED

agissant poursuite et diligences de ses représenta

nts légaux

[Adresse 3]

[Adresse 3]

MALTE



représentée par la SCP DUBOSCQ - PELLERIN, avoués à la Cour

assistée de Me DORIDOU François, avocat au barreau de PARIS - toque T03, substituan...

Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 4

ARRET DU 6 OCTOBRE 2010

(n° 194 , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 08/06689

Décision déférée à la Cour : Jugement du 27 Février 2008

Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2006041413

APPELANTE

Société de droit maltais CYKA LIMITED

agissant poursuite et diligences de ses représentants légaux

[Adresse 3]

[Adresse 3]

MALTE

représentée par la SCP DUBOSCQ - PELLERIN, avoués à la Cour

assistée de Me DORIDOU François, avocat au barreau de PARIS - toque T03, substituant Me BEAUMONT Sylvain, avocat

INTIMEES

SA ETAM

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par la SCP FANET - SERRA, avoués à la Cour

assistée de Me VINCENT Anne-Laure, avocat au barreau de PARIS - toque J001

plaidant pour la SCP JONES DAY, avocats, substituant Me MARTINET Laurent, avocat

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 7 septembre 2010 en audience publique, après qu'il en ait été fait rapport par M.ROCHE, président, conformément aux dispositions de l'article 785 du Code de procédure civile, devant la Cour composée de :

Monsieur LE FEVRE, président de chambre, président

Monsieur ROCHE, président de chambre

Monsieur VERT, conseiller

qui ont délibéré

Greffier lors des débats Madame CHOLLET

ARRET

- contradictoire

- prononcé publiquement par Monsieur LE FEVRE, président

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur LE FEVRE, président et Madame CHOLLET, greffier.

LA COUR,

Vu le jugement du 27 février 2008 par lequel le Tribunal de Commerce de PARIS a condamné la société ETAM SA à verser à la société CYKA la somme de 153 230 €, outre les intérêts au taux légal à compter du 6 mars 2006, en réparation du préjudice subi par cette dernière à la suite de la rupture brutale du contrat de franchise les liant en date du 6 janvier 2003 ainsi que celle de 15 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Vu l'appel interjeté par la société CYKA et ses conclusions du 2 septembre 2010 tendant à faire :

- dire, à titre principal, que la société ETAM a engagé sa responsabilité contractuelle sur le fondement de l'article 1147 du code civil en rompant unilatéralement le contrat les liant six ans avant son terme,

- dire que le préjudice subi résultant du gain manqué s'élève à la somme de 1 296 000 € et celui provenant de la perte d'investissement à celle de 230 367 € ;

- condamner en conséquence la société ETAM à lui verser, compte tenu de la condamnation déjà prononcée en première instance et qui devra être déduite, la somme de 1 349 175,35€,

- dire, à titre subsidiaire, que la société ETAM a rompu brutalement et abusivement leurs relations commerciales,

- fixer le préjudice subi de ce chef à la somme de 69 012 €, outre les intérêts à compter du 6 mars 2006, ainsi qu'à celle de 230 367 € du fait de la perte d'investissement occasionnée par la rupture,

- condamner la société ETAM à lui verser la somme de 122 187,23 € compte tenu de la condamnation déjà prononcée en première instance et qui sera déduite du total,

- condamner, en tout état de cause, la société ETAM à lui verser 35 000 € au titre des frais hors dépens ;

Vu les conclusions de la société ETAM du 26 août 2010 et tendant à faire:

- infirmer le jugement en toutes ses dispositions,

- débouter la société CYKA de l'intégralité de ses demandes,

à titre subsidiaire,

- dire que le préjudice subi par la société CYKA est limité à sa marge brute pendant la durée du préavis qui aurait dû lui être accordé, à savoir trois mois,

- débouter la société CYKA de ses demandes d'indemnisation sur le fondement du gain manqué et de la perte d'investissements,

- condamner, en tout état de cause, la société CYKA à lui verser 25 000 € à titre de dommages-intérêts ainsi que 15 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Considérant que, par acte du 6 janvier 2003, la société ETAM a conclu avec la société CYKA un contrat de franchise soumis au droit français et concédant à cette dernière l'exclusivité de la distribution des articles de la marque TAMMY sur le territoire de la République de Malte ; que ladite marque, enregistrée auprès de l'INPI, faisait l'objet d'une protection internationale et les droits y afférents étaient détenus par le franchiseur ; que ce contrat a été conclu pour une période initiale de 8 ans, ultérieurement tacitement renouvelable par période de deux ans ; que, toutefois, le 8 avril 2005 le directeur général de la société ETAM informait tous ses 'partenaires TAMMY' de la cession de la société ETAM PLC, laquelle était l'entité britannique du groupe ETAM commercialisant la marque TAMMY au Royaume-Uni et chargée du lancement et de la coordination des points de vente distribuant cette marque, au groupe anglais dénommé ARCADIA ; que par suite et par courriel du 26 mai 2005, la société BHS, filiale du groupe ARCADIA informait la société CYKA de son intention de poursuivre la commercialisation de la marque 'TAMMY' par l'intermédiaire d'un autre distributeur ; qu'aucune solution amiable n'ayant pu être trouvée entre les sociétés ETAM et CYKA sur le devenir du contrat de franchise les liant , cette dernière a, par acte du 8 juin 2006, assigné son franchiseur en réparation du préjudice généré par la cessation du contrat en cause ; que par ailleurs, et par acte du 9 février 2007, la société ETAM a assigné les sociétés ARCADIA et MATTE, de droit anglais, afin qu'elles la relèvent et garantissent de toute condamnation résultant de la procédure engagée par la société CYKA ; que c'est dans ces conditions qu'est intervenu le jugement susvisé présentement entrepris ; que, par déclaration déposée le 2 avril 2008, la société CYKA a interjeté appel dudit jugement à l'encontre de la seule société ETAM ; que, par acte délivré le 13 octobre 2008, la société ETAM a, pour sa part, assigné les sociétés ARCADIA et MATTE en appel provoqué devant la Cour de céans ; que, par arrêt du 1er juillet 2009, celle-ci a confirmé l'ordonnance sur incident du 24 mars 2009 par laquelle le magistrat de la mise en état avait déclaré irrecevable l'appel ainsi provoqué ;

en ce qui concerne les prétentions de la société CYKA

sur la responsabilité

Considérant qu'aux termes de l'article 1134 du code civil : ' Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites...Elles doivent être exécutées de bonne foi' ; qu'aux termes de l'article 1147 du même code : 'Le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au payement de dommages-intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part';

Considérant qu'en l'espèce, et ainsi qu'il a été ci-dessus rappelé, le contrat litigieux a été conclu le 6 janvier 2003 pour une durée initiale de 8 ans ; que son article 4 alinéa 2 stipulait que cette durée pourrait être écourtée avec un préavis de 6 mois dans le cas où les objectifs préalablement fixés ne seraient pas atteints sous réserve de l'envoi par le franchiseur d'un courrier recommandé avec accusé de réception ;

Considérant qu'il n'est pas établi ni même allégué que la société CYKA n'eût pas respecté ledit accord ou que la société ETAM lu eût fait une quelconque remarque quant à la non-obtention des objectifs assignés ; qu'en permettant, courant avril 2005, le transfert de la marque TAMMY, élément essentiel de la franchise considérée, à une tierce société , la société ETAM doit être regardée comme ayant mis fin audit contrat en empêchant toute poursuite utile de celui-ci ; que cette résiliation est intervenue sans articulation d'aucun reproche vis-à-vis du franchisé et sans que la procédure de l'envoi d'un courrier recommandé, également prévue par l'article 4 précité, eût été respectée ; que la société ETAM a ainsi commis une faute de nature à engager sa responsabilité contractuelle ;

Considérant que si l'intimée, pour s'en exonérer, soutient que le contrat en cause aurait été en réalité d'ores et déjà transféré au groupe ARCADIA en même temps que la société ETAM PLC a été elle-même cédée à ce groupe et si elle excipe à cet effet de la lettre conventionnelle du 7 avril 2005 signée entre elle-même et le groupe ARCADIA relative aux 'franchise agreements' ainsi que de l'acte de cession à la société ETAM PLC de la marque TAMMY, il convient, tout d'abord, de relever qu'aucun des deux documents concernés ne

comporte une quelconque mention visant expressément une telle cession ; qu'au contraire, la lettre du 7 avril 2005 fait apparaître que la cession des contrats de franchise listés en son annexe 1 (dont celui objet du présent litige) n'était qu'une éventualité subordonnée à la décision du groupe ARCADIA suite à un audit de l'ensemble de ces engagements ; que ce courrier précisait en effet : 'Arcadia devra, pendant six mois, faire toutes diligences possibles afin de s'assurer qu'Etam, Arcadia et leurs ayants droits quant à la marque TAMMY, continuent à fournir les franchisés dans les mêmes conditions que celles mises en place par Etam avant la vente à Arcadia.

Durant cette période de six mois, Arcadia procédera à l'analyse des accords existants et ETAM SA fournira toute l'assistance requise par Arcadia. Arcadia, à la suite de ladite analyse et en tout état de cause avant la fin de cette période de six mois, devra prendre une décision pour chaque franchisé sur le fait de savoir si elle souhaite procéder à la novation ou à la cession du contrat ou conclure un nouveau contrat ou résilier le contrat. Dans le cas où Arcadia déciderait la résiliation des contrat ou si tout franchisé résilie tout contrat de franchise, et ce, à tout moment avant la fin de la période des six mois, le coût de ladite résiliation sera supporté par Etam SA' ;

Considérant, dès lors, que si ce courrier révèle que la cession des contrats de franchise conclus par la société ETAM était effectivement une possibilité parmi d'autres, il n'avait cependant ni pour objet ni pour effet d'opérer un tel transfert ; qu'en revanche ce document démontre qu'en cas de résiliation de contrat, le coût de celle-ci devait être assumé par la seule société ETAM, dont il est ainsi établi qu'elle avait toujours conservé sa qualité de partie à l'engagement litigieux avec les droits et obligations y afférents ;

sur le préjudice

Considérant qu'à la suite de la rupture anticipée susanalysée du contrat de franchise conclu avec la société ETAM l'appelante est en droit de solliciter l'indemnisation de la perte de la chance d'obtention des bénéfices escomptés pendant la durée initialement prévue de l'engagement dont s'agit, étant observé qu'aucune stipulation contractuelle ne prévoyait une résiliation avant terme du contrat de la part du franchiseur en l'absence de faute du franchisé ; qu'en l'occurrence, au regard du chiffre d'affaires annuel envisagé, de celui effectivement réalisé pendant la durée d'exécution du contrat, de la marge brute habituellement dégagée dans le secteur d'activité considéré et des six années supplémentaires pendant lesquelles les parties auraient dû rester liées, la Cour dispose des éléments d'appréciation suffisants pour évaluer à 400 000 € le montant du dommage subi par la société CYKA et à mettre à la charge de la société ETAM ;

Considérant, en revanche, que du fait même de l'indemnisation ainsi allouée compensant le caractère prématuré de la rupture intervenue et donc le raccourcissement de la période d'amortissement, et d'utilisation des investissements, l'appelante n'est pas fondée à réclamer en outre celle des divers investissements liés à sa franchise et engagés pour le lancement et le développement de la marque TAMMY ;

en ce qui concerne la demande indemnitaire de la société ETAM

Considérant que si cette dernière justifie sa prétention susvisée par le caractère 'abusif'de l'action engagée à son encontre par la société CYKA, il échet de relever que celle-ci n'a fait qu'user des voies de droit à sa disposition et il a été, au demeurant, fait partiellement droit à ses demandes ; que par suite, la société ETAM ne peut qu'être déboutée de sa réclamation indemnitaire, laquelle est dépourvue de tout fondement ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède qu'il y lieu de confirmer le jugement sauf à substituer aux motifs retenus par les Premiers Juges ceux ci-dessus exposés et à porter le montant de la condamnation mise à la charge de la société ETAM de la somme susmentionnée de 153 203 €, outre les intérêts au taux légal à compter du 6 mars 2006, à celle de 400 000€, les parties étant déboutées du surplus de leurs demandes respectives ;

sur l'application de l'article de l'article 700 du Code de procédure civile

Considérant que l'équité commande, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la société ETAM à verser à CYKA la somme de 3 000 € sur le fondement susvisé ;

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement, sauf quant au montant de la condamnation de la société ETAM au profit de la société CYKA.

Porte ce montant à 400 000 €.

Déboute les parties du surplus de leurs demandes respectives.

Condamne la société ETAM aux dépens d'appel avec recouvrement aux dispositions de l'article les dépens d'appel qui seront recouvrés selon les dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

La condamne aussi à verser à la société CYKA la somme de 3 000 € au titre des frais hors dépens.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 08/06689
Date de la décision : 06/10/2010

Références :

Cour d'appel de Paris I4, arrêt n°08/06689 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-10-06;08.06689 ?
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