RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 4
ARRET DU 28 Septembre 2010
(n° , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 08/12392
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 18 Novembre 2008 par le conseil de prud'hommes de CRETEIL section commerce RG n° 06/01644
APPELANT
Monsieur [X] [N]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représenté par Me Emmanuelle RAM, avocat au barreau D'ESSONNE
INTIMEE
S.A. [G] ET CIE
[Adresse 2]
[Localité 5]
représentée par Me Philippe BOUDIAS, avocat au barreau de PARIS, toque : P475
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 28 Juin 2010, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Charlotte DINTILHAC, Présidente, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Charlotte DINTILHAC, Présidente
Madame Anne-Marie DEKINDER, Conseillère
Madame Denise JAFFUEL, Conseillère
Greffier : Mademoiselle Sandrine CAYRE, lors des débats
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par Madame Charlotte DINTILHAC, Présidente
- signé par Madame Charlotte DINTILHAC, président et par Mademoiselle Sandrine CAYRE, greffier présent lors du prononcé.
La cour est saisie de l'appel interjeté par M. [N] des jugements du Conseil de Prud'hommes de Crétail section Commerce du 18 novembre 2008 qui l'a débouté de ses demandes en heures supplémentaires et heures de nuit et du 9 [Date naissance 4] 2009 en formation de départage qui l'a débouté de ses autres demandes et l'a condamné à payer la somme de 800 € de frais irrépétibles.
FAITS ET DEMANDES DES PARTIES
M. [N] né en [Date naissance 4] 1947 a été engagé le 18 mars 1975 en qualité de négociant en dernier lieu au pavillon de la marée au Min de [Localité 5], à raison d'un salaire fixe de 447.42€ en dernier lieu et de 2% du chiffre d'affaires.
De mai 2002 à décembre 2003, la société a exercé dans des établissements provisoires pendant la rénovation du pavillon de la Marée ;
Le 1er juin 2002 [C] [G] succède à son père [O] [G] à la direction de l'entreprise ;
Le 30 mai 2005 M. [N] crée une société Automatic ;
M. [N] a saisi le 28 [Date naissance 4] 2006 le conseil des Prud'hommes en résiliation judiciaire du contrat de travail ;
Le 20 juin 2007 il a pris acte de la rupture de son contrat de travail et a demandé le 2 [Date naissance 4] 2007 la liquidation de sa retraite à la Cnav et le 19 octobre 2007 à la société [G] à bénéficier d'une prime de départ en retraite ;
L'entreprise est soumise à la convention collective de la poissonnerie ;
M. [N] demande d'infirmer les jugements, de condamner la société [G] et Cie à payer les sommes de 4 309.12 € pour préavis et 430.91 € de congés payés afférents, 19 976.94 € d'indemnité conventionnelle de licenciement, 78 000 € de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 20 721.93 € pour majoration d'heures de nuit et 2 072.19 € de congés payés afférents, 83 281.16 € pour heures supplémentaires et les congés payés afférents, 61 190 € pour préjudice financier, 30 000 € pour préjudice moral et 3500 € pour frais irrépétibles.
La société [G] et Cie demande de confirmer les jugements et de condamner M. [N] à payer la somme de 4 200 € de dommages-intérêts pour préavis et 3 500 € pour frais irrépétibles.
SUR CE
Il est expressément fait référence aux explications et conclusions des parties visées à l'audience ;
Sur les heures supplémentaires et majoration de nuit sur la période de juin 2001 à juin 2007
La société [G] et Cie oppose un horaire de 35H par semaine de 1H30 à 8H30 sur 5 jours incluant le passage des commandes de 6H à 8H30 et qui n'était pas respecté par M. [N] qui était présent de 1H30/2H à 6H ;
M. [N] soutient qu'il a accompli 2H30 supplémentaires par jour calculées uniformément sur 21.5 jours par mois, pendant la tranche horaire de 1H à 9H30 jusqu'en mai 2002, de 1H à 9H de mai 2002 à novembre 2003, de 1H à 6H45 de décembre 2003 à novembre 2006 et de 23H45/0H30 à 6/7H depuis novembre 2006 outre des temps de travail accomplis à son domicile pour passer des commandes le matin jusqu'à midi et en soirée et revendique une majoration pour les heures de nuit accomplies dans la tranche horaire allant jusqu'à 5H du matin sur la base de 86H66 par mois, soit 4H par nuit travaillée.
M. [N] produit les attestations de MM. [R], [P], professionnels, selon lesquels il est nécessaire à tout vendeur de passer des communications en matinée et soirée, particulièrement pour la coquille Saint Jacques ; MM. [M], [Z], [W], professionnels, attestent de telles communications passées régulièrement avec M. [N], ce qui est confirmé par les relevés téléphoniques produits ;
MM. [V] et [F], vendeurs salariés, ont fait une attestation commune selon laquelle il n'y avait pas de marchandise ni de m² réservés, les ventes se font de 2H à 6H et les ordres d'achat de 6H à 8h30 sur une durée globale maximum d'une heure et que M. [N] s'est désinvesti de son métier ;
Mme [U], consultante, a confirmé le refus de celui-ci d'adhérer à une formation en avril 2005 et qu'elle l'a entendu critiquer l'entreprise, ses produits et ses clients le 21 avril 2005 ;
Mme [E] salariée depuis 1998, M. [B], salarié, ont attesté que M. [N] partait depuis plusieurs années entre 5H30 et 6 H et Mme [T], salariée dans la holding, qu'elle ne le voyait pas aux points hebdomadaires du jeudi à 6H30, MM. [D] et [A], salariés, ont attesté d'un travail entre 1H30 et 5h30, depuis 7 ou 8 ans en ce qui concerne le premier ;
La demande d'heures supplémentaires de M. [N] n'est pas suffisamment étayée dans la mesure où il forme une demande uniforme alors qu'il fait état lui-même d'horaires très différents accomplis selon les périodes, que les horaires contresignés par M. [Y] directeur général sur un cahier de fin 2006 à début 2007, selon des plages horaires différentes de celles pratiquées auparavant, établissent sur cette période un temps de présence de 6H à 7 H quotidiennes à partir de minuit environ contrairement à sa revendication et qu'il est attesté par les autres salariés une présence moindre habituelle sur les années antérieures qui laissait un temps disponible à l'intérieur des 35H hebdomadaires pour passer les communications téléphoniques d'ordre d'achat ;
La majoration de 20% pour heure de nuit a été étendue le 2 décembre 2002 et la suppression du 12 janvier 2006 non étendue n'est pas applicable ; Sur la période à considérer depuis le 2 décembre 2002, la demande ne peut être prise en compte qu'autant que la rémunération variable mensuelle versée est inférieure à la rémunération minimale conventionnelle et selon le taux horaire minimum applicable pour le coefficient 220 : c'est le cas pour les mois de mai 2007, février, avril, mai, juillet et septembre 2006, mai, juin et septembre 2005, juillet 2004 ;
Il est dû à ce titre la somme de 1 732 € ;
Sur la prise d'acte de rupture
M. [N] fait état du mauvais emplacement réduit qui lui est alloué avec retrait de l'aide d'un manutentionnaire depuis juillet 2004 avec tentative de modification du montant de sa commission, le non-paiement des heures supplémentaires, la pression exercée depuis la saisine du conseil par l'envoi de lettres recommandées injustifiées, la concurrence de vente sur ses produits, l'exigence temporaire d'un cahier de présence pour lui seul, le défaut de majoration des heures de nuit, à l'origine de baisse de rémunération et de préjudice moral ;
M. [N] produit des attestations selon lesquelles :
il avait avant 2002 une surface de vente de 10 mètre de long sur 6 mètre de profondeur, (M. [K], salarié entre 1989 et 2001, M. [S] salarié entre 1985 et 2001 et resté présent sur [Localité 5] ensuite),
réduit à 15M² pendant les travaux, à une à deux palettes en bordure d'allée ensuite et 5 palettes depuis novembre 2006 (M. [L] professionnel, Mme [J], salariée entre octobre 2002 et août 2005, M. [I] salarié d'août 2003 à mars 2005), les deux derniers ajoutant que c'est contrairement aux autres vendeurs bénéficiaires d'emplacements plus grands et en avant,
il a été porté atteinte à la vente exclusive sur certains produits par [C] [G] à compter de 1997/1998 (MM. [K], [L], [S],) et sur d'autres produits par d'autres vendeurs (M. [L], [J], [I])
il avait un manutentionnaire à son service (MM. [K], [S]), mais plus depuis juin ou juillet 2004, (MM. [L], [J], [I]) ;
M. [N] a fait l'objet de demandes de la société les 11, 20 octobre, 24 novembre et 14 décembre 2006 de mettre fin aux horaires de 2H à 6 H observés depuis plusieurs années, au lieu de 1H30 à 8H30 avec ré-investissement dans ses fonctions, avec signature d'arrivée et départ à compter du 24 novembre 2006, de lettres des 22 octobre 2004 et 9 mars 2007 de respecter la marge bénéficiaire de 12%, d'avertissement le 29 novembre 2006 pour vente sur les parties communes à l'origine de contravention, immédiatement contestées par le salarié ;
Les griefs suivants ne sont pas établis pour être contredits sur l'application habituelle d'un taux bénéficiaire de 12% qui résulte des relevés de ventes et alors que M. [N] s'est toujours vu appliquer un commissionnement de 2% sur le chiffre d'affaires réalisé et M. [N] n'établit pas le droit qu'il revendique à un monopole de vente sur certains produits dans la société au-delà de la spécialisation des vendeurs ainsi qu'attesté par ceux-ci et que le pointage des horaires accomplis a été faite sans abus au regard des demandes d'heures supplémentaires faites devant le Conseil ;
Par contre, il est établi une baisse des commissions de M. [N] qui étaient annuellement de plus de 30 000 € avant 2001, puis arrondies de 22000 € en 2002, 20200 € en 2003, 14500 € en 2005 et 12 500 € en 2006 ;
La baisse très importante du chiffre d'affaires de M. [N], qui s'est notablement aggravée après le ré-aménagement dans les locaux définitifs est en lien avec la discrimination sur l'emplacement déprécié alloué à M. [N] par rapport aux autres vendeurs et la perte de l'aide d'un manutentionnaire telles que relevées par d'anciens salariés et professionnels extérieurs, dans des conditions qui ont fait l'objet de doléances vaines dès juin 2006 et alors que le désinvestissement dont l'employeur fait maintenant état n'est pas établi comme n'ayant pas fait l'objet d'observations avant la saisine du conseil par le salarié ;
M. [N], non indemnisé des heures de nuit lorsque son salaire était inférieur au minimum mensuel conventionnel et qui a subi des conditions désavantageuses de travail est donc fondé en sa prise d'acte de rupture aux torts de l'employeur ; le fait que M. [N] a par la suite décidé de prendre sa retraite à l'âge de 60 ans est sans influence sur la cause de la rupture du contrat de travail imputable à l'employeur ;
Il lui sera alloué la somme de 20 000 € au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse en considération de l'ancienneté du salarié et du préjudice subi du fait de la prise de retraite dès [Date naissance 4] 2006 ;
Les indemnités de préavis et conventionnelle de licenciement sont justifiées ;
Il sera alloué la somme de 20 000 € de dommages-intérêts pour le préjudice financier en lien avec la baisse du chiffre d'affaire imputable à l'entreprise ;
Il n'y a pas lieu à préjudice moral ;
PAR CES MOTIFS
Infirme les jugements et statuant à nouveau :
Condamne la société [G] et Cie à payer à M. [N] les sommes de
4 309.12 € pour préavis et 430.91 € de congés payés afférents, 19 976.94 € d'indemnité conventionnelle de licenciement, 20 000 € de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 1 732 € pour majoration d'heures de nuit et 173.20 € de congés payés afférents, 20 000 € pour préjudice financier et 2000 € pour frais irrépétibles.
Rejette les autres demandes ;
Condamne la société [G] et Cie aux entiers dépens.
LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT,