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15/09/2010 | FRANCE | N°07/03372

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 9, 15 septembre 2010, 07/03372


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 9



ARRÊT DU 15 Septembre 2010



(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 07/03372



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 07 Décembre 2006 par le Conseil de Prud'hommes de PARIS - Section Encadrement - RG n° 04/16770





APPELANTE

Me [G] [P] ès-qualités de Mandataire liquidateur de la S.A.R.L. ALPHABET

[Adresse 4]

[Localité 5]


représenté par la SCP LAFARGE, avocats au barreau de PARIS, T 10 substitué par Me Isabelle TOLEDANO, avocate au barreau de PARIS





INTIMÉES

Madame [K] [E]

[Adresse 1]

[Localité ...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 9

ARRÊT DU 15 Septembre 2010

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 07/03372

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 07 Décembre 2006 par le Conseil de Prud'hommes de PARIS - Section Encadrement - RG n° 04/16770

APPELANTE

Me [G] [P] ès-qualités de Mandataire liquidateur de la S.A.R.L. ALPHABET

[Adresse 4]

[Localité 5]

représenté par la SCP LAFARGE, avocats au barreau de PARIS, T 10 substitué par Me Isabelle TOLEDANO, avocate au barreau de PARIS

INTIMÉES

Madame [K] [E]

[Adresse 1]

[Localité 8]

comparante en personne, assistée de Me Léon COHEN, avocat au barreau de PARIS, C 645 substitué par Me Véronique AUVINET-RATEAU, avocate au barreau de PARIS,

S.A.S. SOCIÉTÉ CIRCULAR FRANCE venant aux droits de la Société CIRCULAR FIELD

[Adresse 3]

[Localité 7]

représentée par Me Gaëlle LEBRETON, avocate au barreau de PARIS, J014

PARTIE INTERVENANTE :

CGEA ILE DE FRANCE OUEST

[Adresse 2]

[Localité 6],

représenté par la SCP LAFARGE, avocats au barreau de PARIS, T 10 substitué par Me Isabelle TOLEDANO, avocate au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 31 Mai 2010, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Anne DESMURE, Conseillère, chargée d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Geneviève LAMBLING, Présidente

Madame Anne DESMURE, Conseillère

Monsieur Benoît HOLLEAUX, Conseiller

GREFFIÈRE : Madame Corinne de SAINTE MARÉVILLE, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau code de procédure civile.

- signé par Madame Geneviève LAMBLING, Présidente et par Madame Corinne de SAINTE MARÉVILLE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Mme [E] est entrée au service de la société Alphabet le 1er décembre 2000 en qualité de Responsable Marketing, moyennant un salaire de 3 048,98 euros par mois.

La société Alphabet était liée à la société Monoprix par un contrat au terme duquel elle mettait à la disposition de Monoprix des esthéticiennes chargées de conseiller les acheteuses de produits cosmétiques.

Le 11 juillet 2003, la société Alphabet a notifié à Mme [E] son licenciement économique au motif que son poste était supprimé en raison de la dénonciation du contrat par la société Monoprix et de la réduction du budget de marketing qui en découlait.

Par une correspondance du 30 octobre 2003, la société Alphabet a proposé à Mme [E] de prolonger sa période de préavis de trois mois et d'en fixer le terme au 6 février 2004 'du fait de la position de Monoprix qui reprend le personnel Alphabet et de la situation de notre société qui doit terminer cette activité'.

Mme [E] a accepté cette proposition.

Arrivé à son terme le 31 décembre 2003, le contrat qui liait la société Alphabet à la société Monoprix a été repris par la société Circular Field, désormais la société Circular France (ci-après Circular).

Mme [E] a travaillé pour le compte de la société Circular jusqu'au 6 février 2004, date d'expiration de son préavis, aux conditions qu'elle avait au sein de la société Alphabet.

Mme [E] a ensuite été engagée par la société Circular à compter du 16 février 2004 en qualité de chargée de mission dans le cadre d'un contrat à durée déterminée.

Depuis le 23 août 2004, elle bénéficie au sein de cette société d'un contrat à durée indéterminée en qualité de responsable de projets qui lui assure une rémunération mensuelle de 2 600 euros.

La société Alphabet a été placée en redressement judiciaire le 10 février 2004 et Me [P] a été désignée en qualité de représentant des créanciers.

Le plan de continuation adopté le 30 mars 2005 a été résolu et la liquidation judiciaire de la société a été prononcée le 3 janvier 2008, Me [P] étant désignée en qualité de liquidateur.

Saisi par Mme [E] d'une contestation de son licenciement et de demandes indemnitaires dirigées contre Me [P] es qualités et/ou la société Circular, en la présence forcée de l'AGS, le conseil de prud'hommes de Paris a, par jugement du 7 décembre 2006, mis hors de cause la société Circular, fixé la créance de Mme [E] au passif de la société Alphabet à la somme de 1 681,59 euros au titre de l'indemnité de licenciement et à la somme de 19 000 euros à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse et déclaré les créances opposables à l'AGS.

Appelant, Me [P], es qualités de liquidateur de la société Alphabet, demande à la Cour, aux termes d'écritures déposées et soutenues à l'audience du 31 mai 2010, d'infirmer le jugement entrepris et, statuant à nouveau au visa des articles L.1224-1 et L.1235-3 du code du travail, de :

- dire et juger nul et de nul effet le licenciement notifié à Mme [E],

- condamner en conséquence Mme [E] à restituer la somme de 2 150,35 euros reçue à titre d'indemnité de congés payés et celle de 536 euros reçue à titre d'indemnité de licenciement,

- à défaut, condamner la société Circular à lui verser ces mêmes sommes,

- subsidiairement dire que le licenciement de Mme [E] repose sur une cause économique réelle et sérieuse,

- débouter en tout état de cause Mme [E] de sa demande de dommages-intérêts faute de justifier de son préjudice.

Au terme de conclusions déposées et soutenues oralement le 31 mai 2010, Mme [E] requiert la Cour de confirmer le jugement entrepris en son principe, de l'infirmer sur le montant des condamnations et, statuant à nouveau de ce chef, de fixer sa créance à la procédure collective de la société Alphabet ou le cas échéant condamner solidairement la société Circular, à lui verser la somme de 1 681,59 euros au titre de l'indemnité de licenciement et la somme de 50 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse outre la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Intimée, la société Circular France prie la Cour, au terme de ses conclusions déposées et soutenues oralement le 31 mai 2010, de confirmer le jugement déféré en ce qu'il l'a mise hors de cause et de condamner Mme [E] à lui verser la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

L'AGS a déposé des écritures qu'elle a soutenues oralement à l'audience du 31 mai 2010 par lesquelles elle reprend à son compte les prétentions de Me [P], y ajoutant les règles définissant les limites de sa garantie.

MOTIFS

Considérant qu'au soutien de son appel, pour combattre la demande de Mme [E] et prétendre lui réclamer le remboursement des indemnités de rupture versées, Me [P], es qualités de liquidateur, fait en substance valoir que le licenciement est nul et de nul effet dés lors que l'activité à laquelle Mme [E] était affectée a été transférée à la société Circular quasiment concomitamment à la notification du licenciement et que c'est en toute bonne foi, dans l'ignorance du sort des contrats de travail de ses salariés, que la société Alphabet lui a notifié son licenciement; qu'il soutient subsidiairement que le licenciement de Mme [E] était justifié par les difficultés économiques que la société rencontrait;

Considérant cependant que le licenciement d'un salarié prononcé à l'occasion du transfert d'une entité économique qui poursuit son activité est privé d'effet, ce dont il suit que le salarié peut agir en paiement de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse contre l'auteur du licenciement pour lui demander réparation du préjudice causé par la perte de son emploi ;

Et considérant en l'espèce que Me [P] ne peut dans le même temps soutenir que le transfert d'activité a été concomitant à la notification du licenciement et que la société Alphabet ignorait alors quel serait le sort des contrats de travail de ses salariés; qu'en vérité, le licenciement de Mme [E] est intervenu plusieurs mois avant que le contrat qui liait la société Alphabet à la société Monoprix ne prenne fin, puisque Mme [E] a été licenciée le 11 juillet 2003 et que le contrat unissant les sociétés Alphabet et Monoprix a expiré le 31 décembre suivant; que le poste de Mme [E] n'était ainsi pas supprimé à la date à laquelle elle a été licenciée et qu'il ne l'a pas davantage été dans les mois qui ont suivi ; qu'en atteste la proposition ensuite formulée par l'employeur le 30 octobre 2003 de prolonger de trois mois supplémentaires la période de préavis de trois mois que sa salariée venait d'effectuer ; qu'il s'ensuit que le licenciement prononcé dans ces conditions pour 'suppression de poste' est sans cause réelle et sérieuse; que la rupture du contrat de travail étant le fait de la société Alphabet, Mme [E] est fondée à agir en réparation à l'encontre de Me [P] es qualités et à demander la fixation au passif des sommes dues au titre de la rupture;

Considérant que Mme [E] demande la confirmation du jugement en ce qu'il a chiffré à la somme de 1 681,59 euros l'indemnité de licenciement due à Mme [E], et aucune discussion n'oppose les parties sur le montant de cette indemnité née alors que Mme [E] était encore au service de la société Alphabet, à une date antérieure à la date d'ouverture de la procédure collective, de sorte qu'elle est couverte par l'assurance de garantie des salaires ;

Que le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a fixé cette créance au passif de la société Alphabet et dit que l'AGS devait sa garantie ;

Considérant, sur la demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, qu'il est constant, et non discuté au demeurant, qu'à compter du 1er janvier 2004, le contrat de travail de Mme [E] a été transféré à la société Circular qui ne discute pas le transfert de l'activité et l'application des dispositions d'ordre public de l'article L.1224 du code du travail; que pour prétendre à sa 'mise hors de cause', cette dernière soutient en substance qu'elle a repris l'exécution du contrat de travail de Mme [E] dans le strict cadre de l'exécution de la fin de son préavis, que ce dernier s'est achevé le 6 février 2004 et que Mme [E] n'a pas sollicité la poursuite de son contrat de travail initial ;

Mais considérant que la conclusion d'un nouveau contrat de travail, en contrepartie d'une rémunération inférieure à celle dont Mme [E] bénéficiait jusque là, témoigne de ce que la société Circular s'est refusée à poursuivre le contrat de travail de Mme [E] et de ce qu'elle a ainsi contribué au préjudice né de la rupture; qu'il s'ensuit que Mme [E] demande légitimement la condamnation solidaire de la société Circular à l'indemniser du préjudice résultant pour elle du licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Considérant qu'eu égard à son âge (33 ans) et à son ancienneté (trois ans et deux mois) à la date de la rupture, au fait que la société Alphabet employait habituellement plus de dix salariés, à la perte de rémunération qu'elle justifie avoir subie, le préjudice résultant pour Mme [E] du licenciement sans cause réelle et sérieuse mérite d'être chiffré à la somme de 30 000 euros ;

Considérant que l'équité dicte que Mme [E] seule soit indemnisée de ses frais irrépétibles par l'allocation de la somme de 2 500 euros ;

PAR CES MOTIFS

CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il a fixé la créance de Mme [E] au passif de la société Alphabet à la somme de 1 681,59 euros au titre de l'indemnité de licenciement avec intérêts au taux légal à compter de la date de réception par les défenderesses de la convocation devant le bureau de conciliation et jusqu'au jugement prononçant le redressement judiciaire, et en ce qu'il a déclaré les créances opposables aux AGS CGEA dans les limites des articles L.143-11-1 et suivants du code du travail, en ce qu'il a dit que les dépens seraient inscrits au titre des créances privilégiées,

L'INFIRMANT pour le surplus, statuant à nouveau et y ajoutant :

FIXE la créance de Mme [E] au passif de la Sarl Alphabet et condamne solidairement la société Circular France à payer à Mme [E] la somme de 30 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, ainsi qu'une indemnité de 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens d'appel.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 9
Numéro d'arrêt : 07/03372
Date de la décision : 15/09/2010

Références :

Cour d'appel de Paris K9, arrêt n°07/03372 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-09-15;07.03372 ?
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