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30/06/2010 | FRANCE | N°08/10772

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 5, 30 juin 2010, 08/10772


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 4 - Chambre 5



ARRET DU 30 JUIN 2010



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 08/10772



Décision déférée à la Cour : Jugement du 20 Mai 2008 -Tribunal de Commerce de CRETEIL 1ère chambre (Monsieur HAUVETTE Président)- RG n° 2006F01140





APPELANTS



S.A.S SOCATEB ET CIE

prise en la personne de son reprÃ

©sentant légal

ayant son siège [Adresse 2]

représentée par la SCP NARRAT - PEYTAVI, avoués à la Cour

assistée de Maître GLIOTT NAOURI (pour Maître BOHBOT) avocat au barreau du Val de Marn...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 5

ARRET DU 30 JUIN 2010

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 08/10772

Décision déférée à la Cour : Jugement du 20 Mai 2008 -Tribunal de Commerce de CRETEIL 1ère chambre (Monsieur HAUVETTE Président)- RG n° 2006F01140

APPELANTS

S.A.S SOCATEB ET CIE

prise en la personne de son représentant légal

ayant son siège [Adresse 2]

représentée par la SCP NARRAT - PEYTAVI, avoués à la Cour

assistée de Maître GLIOTT NAOURI (pour Maître BOHBOT) avocat au barreau du Val de Marne

INTERVENANTS VOLONTAIRES

Monsieur [C] [M]

demeurant [Adresse 5]

Madame [Y] [M] née [J]

demeurant [Adresse 5]

Monsieur [H] [M]

demeurant [Adresse 4]

Monsieur [E] [M]

demeurant [Adresse 3]

représentés par la SCP NARRAT - PEYTAVI, avoués à la Cour

assistés de Maître GLIOTT NAOURI (pour Maître BOHBOT) avocat au barreau du Val de Marne

INTIMEE

SARL ILEX

prise en la personne de son représentant légal

ayant son siège [Adresse 1]

représentée par la SCP HARDOUIN, avoués à la Cour

assistée de Maître VIALA (VIALA MIALET) avocat au barreau de l'Essonne

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 11 mai 2010, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Michel ZAVARO, président

Madame Marie-José THEVENOT, conseillère

Madame Dominique BEAUSSIER, conseillère

qui en ont délibéré.

rapport oral de Madame THEVENOT conseillère conformément aux dispositions de l'article 785 du code de procédure civile

Greffier, lors des débats : Madame Marie-Hélène ROULLET

ARRET :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile.

- signé par Monsieur ZAVARO, président et par Madame ROULLET, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire

La société SOCATEB a commandé à la société ILEX la fourniture et la pose d'un appareil élévateur pour personnes à mobilité réduite, puis a demandé sa transformation en ascenseur.

Elle a refusé le paiement du solde de facture au motif que l'appareil ne pouvait être réceptionné en raison de sa non-conformité aux normes européennes, que les réserves n'avaient pas été levées, que l'appareil était inutilisable.

La société ILEX l'a assignée en paiement d'une somme principale de 22444,80€.

Par jugement du 20 mai 2008 le tribunal de commerce de Créteil a condamné la société SOCATEB au paiement de cette somme, outre intérêts capitalisés, et au paiement d'une somme de 2000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La société SOCATEB a fait appel.

Dans ses dernières conclusions elle demande à la cour de dire que la société ILEX n'a pas respecté à son égard son obligation d'information et de conseil et a livré un bien non conforme à sa destination et son usage, de débouter la société ILEX de ses demandes, subsidiairement de limiter la condamnation de SOCATEB à la somme de 16476,76€, subsidiairement de condamner la société ILEX à lui régler la somme de 22444,80€ à titre de dommages et intérêts, ou 5958,04€, de constater que l'appareil n'est toujours pas conforme à la norme CE et est inutilisable, faute pour ILEX d'avoir levé les réserves émises par le bureau VERITAS

Compte tenu des demandes formées par les époux [M], elle demande de condamner ILEX à lui payer 15000€ au titre du préjudice né du retard de livraison, et de la livraison non conforme, en tout état de cause de donner injonction à la société ILEX d'apposer en machinerie la notice de dépannage et d'instruction, qui conditionne l'obtention du marquage CE.

Elle sollicite, à titre subsidiaire à la demande des consorts [M], de condamner ILEX à lui payer la somme de 39162,75€ coût d'un ascenseur conforme, au titre du préjudice résultant d'une perte de chance de pouvoir bénéficier d'une assurance décennale,

Elle demande la compensation des créances et la condamnation de ILEX à payer les frais d'expertise et d'huissier et une somme de 6000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Les consorts [M] sont intervenus volontairement à la procédure d'appel en qualité d'occupants de l'immeuble, pour les époux [C] [M], et de propriétaires du bien immobilier pour [E] et [H] [M].

Dans leurs dernières conclusions ils demandent de constater que l'appareil est non conforme est inutilisable, faute pour ILEX d'avoir levé les réserves émises par VERITAS.

Les époux [C] [M] invoquent subir depuis son installation un trouble de jouissance et ils réclament condamnation de ILEX à leur payer 15000€ à ce titre.

Ils demandent qu'il soit fait injonction à ILEX d'apposer en machinerie la notice de dépannage et les instructions d'utilisation, sous astreinte.

[H] et [E] [M] demandent la condamnation de ILEX à leur payer la somme de 39162,75€ au titre du préjudice résultant d'une perte de chance de bénéficier d'une assurance garantie décennale.

Tous réclament une somme de 3000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions la société ILEX demande la confirmation du jugement et la condamnation de SOCATEB à lui payer 3000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Considérant que le devis initial du 22 octobre 2002 prévoyait l'installation d'un 'élévateur pour personnes à mobilité réduite' pour un montant de 26969,80€ ;

Considérant qu'aucun élément ne démontre que l'appareil initialement commandé ne pouvait répondre aux besoins de la famille [M] ou aux caractéristiques de l'immeuble ; Que la société SOCATEB et les consorts [M] ne peuvent raisonnablement soutenir qu'ils n'ont pas reçu les informations suffisantes lors de leur commande et avaient cru commander un ascenseur, alors que les mentions de cette commande portent bien sur un élévateur, qu'une demande écrite préalable de leur part, faite par l'intermédiaire de leur conducteur de travaux, portait également sur un 'monte-handicapés', avec un descriptif précis, qu'aucune référence à un ascenseur classique n'avait jamais été faite, que le devis est détaillé, et que la société SOCATEB, qui est selon son extrait KBIS une entreprise de bâtiment tous corps d'état présidée par [H] [M] ne pouvait ignorer les différences entre un élévateur et un ascenseur, même si son activité principale se rapporte à la maçonnerie ;

Considérant qu'aucun manquement de l'entreprise à son devoir d'information ne sera donc retenu;

Considérant que la société SOCATEB ne conteste pas que l'appareil n'avait pas pu être encore installé en raison de l'absence de finition de l'immeuble lorsqu'elle a demandé fin 2003 sa modification ;

Considérant qu'un second devis a été établi le 5 janvier 2004 portant sur des travaux modificatifs et additifs sur demande expresse du propriétaire pour un montant de 11936,08€ ; qu'il a été accepté ;

Considérant que ce devis destiné à réaliser un appareil de type ascenseur mentionnait que serait assurée la mise en conformité de l'installation avec la norme imposée ; qu'il s'agit là d'une obligation légale dont l'entreprise ne peut s'exonérer qu'avec une décharge expresse du client; Que le simple fait pour la société ILEX d'avoir envoyé une lettre de décharge est insuffisant à cet égard, car la société SOCATEB n'y a pas répondu ; que la réception de cette lettre par la société SOCATEB est de plus contestée par celle-ci, et n'est pas établie par la société ILEX qui produit un seul accusé de réception du 6 janvier 2004 pour deux envois, celui du devis et celui de la lettre;

Considérant qu'en définitive, du fait des modifications intervenues, l'installation n'était au jour de l'achèvement revendiqué par la société ILEX soit le 25 mai 2004, ni conforme aux normes de la directive européenne machine pour les élévateurs, ni suffisante à assurer le respect des normes CE applicables aux ascenseurs, comme l'a indiqué l'expert judiciaire; qu'aucune réception n'a été acceptée par la société SOCATEB au vu de l'avis défavorable à la mise en service de l'appareil émis par l'organisme de contrôle QUALICONSULT qu'elle avait consulté;

Considérant que l'expert a encore indiqué que l'appareil fonctionnait toutefois correctement et que, les réglementations ayant été modifiées en cours d'expertise, l'appareil pourrait recevoir son certificat de conformité lorsque les réserves émises lors d'un contrôle par le bureau VERITAS le 22 mars 2006 seraient levées; que ces réserves se rapportaient à l'adaptation d'une serrure, à l'installation d'un bloc d'éclairage de secours en machinerie, à la mise à disposition d'une prise téléphonique en machinerie, à la réfection de l'éclairage en gaine, à la pose des instructions de dépannage manuel en local machinerie, à la mise en place de la plaque d'identification réglementaire en cabine, et à l'inclusion dans la notice d'instructions de l'interdiction d'évacuer la cabine entre deux étages;

Considérant que la société ILEX a accepté de lever ces réserves mais a émis une facture de 474,06€ pour l'installation d'un bloc d'éclairage de secours dans la machinerie; que la société SOCATEB a refusé de prendre en charge ce surcoût tout en en avançant le paiement ;

Considérant qu'un 'marquage CE' a été effectivement effectué le 22 mars 2006 par le bureau de contrôle VERITAS, que ce bureau de contrôle a délivré une attestation de conformité le 17 octobre 2007;

Considérant que selon l'annexe 10 du contrat de mission du bureau de contrôle, la remise de cette attestation permet au responsable de la mise sur le marché d'effectuer, pour les points liés au respect des exigences essentielles de sécurité, le marquage CE en cabine et l'établissement de la déclaration CE de conformité, qu'en présence d'anomalies liées à l'état de réglage ou de finition de l'appareil mentionnées sur l'attestation de conformité, il appartient au responsable de la mise sur le marché de s'assurer de la prise en compte de ces anomalies préalablement à l'établissement de la déclaration CE de conformité et à l'apposition du marquage CE 0062 en cabine;

Considérant qu'en l'espèce de telles anomalies ont été mentionnées dès 2006 comme décrit plus haut ; que le bureau de contrôle a le 15 octobre 2008 indiqué que subsistaient encore certains points, à savoir le manque d'apposition en machinerie de la notice de dépannage manuel et le défaut d'insertion dans la notice d'instructions de l'interdiction d'évacuation entre deux étages et de l'avis qu'il était déconseillé d'utiliser l'ascenseur si l'on se trouvait seul dans la maison;

Considérant qu'ainsi il doit être retenu que l'installation est depuis le 17 octobre 2007 conforme en ce qui concerne les éléments essentiels de sécurité mais que le marquage CE en cabine et la déclaration de conformité ne pourront être effectués qu'après levée des dernières réserves indiquées; que la société ILEX ne justifie pas les avoir levées;

Considérant que ces réserves n'empêchent cependant pas l'utilisation de l'ascenseur, qui respecte les exigences essentielles de sécurité ainsi que l'a attesté le bureau VERITAS, et qui est destiné à un usage privatif; que cette utilisation nécessite simplement des précautions supplémentaires à la charge des propriétaires et utilisateurs pour garantir la parfaite information des usagers;

Considérant qu'en conséquence de ces éléments il sera retenu:

-que le coût afférent à la modification de l'appareil en cours de chantier doit être laissé à la charge de la société SOCATEB qui a fait le choix de cette modification sans faute de la société ILEX à ce stade;

-que la demande de la société ILEX en paiement d'un solde de 22444,80€ TTC correspondant au solde du marché initial (16.476,76€) et à la moitié (5968,04€) des travaux supplémentaires est justifiée,

-que le coût de 474,06€ exposé par la société SOCATEB pour la reprise d'une partie de l'ouvrage doit être laissé à la charge de la société ILEX, que le solde dû est donc de 21970,74€,

- que la somme n'était exigible qu'à compter du 17 octobre 2007 date de l'attestation de conformité établie pour ce qui concerne les éléments essentiels de sécurité par le bureau de contrôle VERITAS et qui correspond à la date à laquelle les ouvrages étaient en état d'être reçus; que les intérêts ne courront donc qu'à compter de cette date;

Considérant que la totalité des réserves n'a pas été levée; que la société SOCATEB et les consorts [M] propriétaires de l'ouvrage sont fondés à en exiger la levée en nature; qu'il sera fait injonction à la société ILEX de les lever sous astreinte;

Considérant que la société SOCATEB et les consorts [M] soutiennent que l'ascenseur ne peut être utilisé du fait du défaut d'apposition en machinerie de la notice de dépannage manuel ce qui les empêcherait de souscrire le contrat de maintenance obligatoire;

Considérant que toutefois le dossier des ouvrages exécutés, comprenant les instructions de dépannage leur a été transmis, et ils ne justifient d'aucun refus d'une quelconque société de maintenance; qu'en conséquence ils ne justifient que d'un préjudice correspondant au retard de livraison de l'appareil entre le 25 mai 2004 date de la tentative de livraison par la société ILEX et le 17 octobre 2007 date de la délivrance de l'attestation de conformité pour la société SOCATEB, outre, pour ce qui concerne les époux [C] [M], d'un préjudice né des contraintes d'utilisation imposées par la défaillance de la société ILEX dans ses obligations d'apposition des notices et avertissements; que ce préjudice sera réparé par une indemnité de 1500€ en ce qui concerne la société SOCATEB et de 5000€ en ce qui concerne les époux [M] occupants de l'immeuble et usagers potentiels de l'ascenseur;

Considérant que la société SOCATEB et les consorts [M] ont sollicité une indemnisation en raison de la perte d'une chance de pouvoir bénéficier d'une assurance décennale de nature à garantir les désordres pouvant survenir sur l'appareil;

Considérant cependant que la société ILEX a transmis en cours de procédure une attestation datée du 23 novembre 2009, émanant de la société SESAME ASSURANCES et visant la garantie de sa responsabilité décennale pour le 'monte-handicapé sis [Adresse 5],'lieu de l'installation litigieuse; qu'en conséquence en l'état il n'existe aucun motif de supposer une absence de garantie d'assurances; que les demandes à ce titre seront rejetées;

Considérant que les dépens, comprenant les frais d'expertise doivent être mis à la charge de la société ILEX, de même qu'une somme de 3500€ comprenant les frais d'huissier et de conseil qu'il y a lieu d'allouer à la société SOCATEB au titre de l'article 700 du code de procédure civile et une somme de 1500€ qu'il y a lieu d'allouer sur le même fondement aux époux [C] [M];

Considérant que la compensation est de droit entre les créances réciproques;

Par ces motifs, la cour,

-infirme le jugement et statuant à nouveau,

-condamne la société SOCATEB à payer à la société ILEX la somme de 21970,74€ avec intérêts au taux légal à compter du 17 octobre 2007 et capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 du code civil;

-condamne la société ILEX à payer à la société SOCATEB une somme de 1500€ au titre du préjudice subi;

-dit que ces créances se compensent de plein droit;

-condamne la société ILEX à payer aux époux [C] et [Y] [M] une somme de 5000€ au titre du préjudice subi ;

-ordonne à la société ILEX d'apposer en machinerie la notice de dépannage manuel et d'insérer dans la notice d'instructions qu'il est formellement interdit d'évacuer entre deux étages et qu'il est formellement déconseillé d'utiliser l'ascenseur si l'on se trouve seul dans la maison;

-dit que la société ILEX devra exécuter cette injonction dans les deux mois du présent arrêt et qu'à défaut, passé ce délai, elle y sera contrainte sous astreinte de 100€ par jour de retard pendant un délai de trois mois à l'issue duquel il sera à nouveau fait droit;

-déboute les parties de leurs autres demandes;

-condamne la société ILEX aux dépens comprenant les frais d'expertise et au paiement des sommes de 3500€ à la société SOCATEB et de 1500€ aux époux [C] et [Y] [M] au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

-autorise le recouvrement des dépens par les avoués de la cause dans les conditions prévues par l'article 699 du code de procédure civile;

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 08/10772
Date de la décision : 30/06/2010

Références :

Cour d'appel de Paris G5, arrêt n°08/10772 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-06-30;08.10772 ?
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