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29/06/2010 | FRANCE | N°09/07150

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 4, 29 juin 2010, 09/07150


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4



ARRET DU 29 Juin 2010

(n° , 5 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : S 09/07150



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 11 Mai 2009 par le conseil de prud'hommes de PARIS RG n° 07/04152





APPELANTE



SARL BOUCHERON

[Adresse 3]

[Localité 4]

représentée par Me Julien BOUZERAND, avocat au barreau de PARIS, toque : P570
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INTIME



Monsieur [E] [D]

[Adresse 2]

[Localité 5]

comparant en personne, assisté de Me Thierry CHAMON, avocat au barreau de VAL DE MARNE





COMPOSITION DE LA COUR :



En applicatio...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4

ARRET DU 29 Juin 2010

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 09/07150

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 11 Mai 2009 par le conseil de prud'hommes de PARIS RG n° 07/04152

APPELANTE

SARL BOUCHERON

[Adresse 3]

[Localité 4]

représentée par Me Julien BOUZERAND, avocat au barreau de PARIS, toque : P570

INTIME

Monsieur [E] [D]

[Adresse 2]

[Localité 5]

comparant en personne, assisté de Me Thierry CHAMON, avocat au barreau de VAL DE MARNE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 02 Juin 2010, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Denise JAFFUEL, Conseillère, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Charlotte DINTILHAC, Présidente

Madame Anne-Marie DEKINDER, Conseillère

Madame Denise JAFFUEL, Conseillère

Greffier : Mademoiselle Sandrine CAYRE, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par Madame Charlotte DINTILHAC, Présidente

- signé par Madame Charlotte DINTILHAC, Présidente et par Mademoiselle Sandrine CAYRE, greffier présent lors du prononcé.

La Cour est saisie de l'appel interjeté par La Sarl BOUCHERON du jugement du Conseil des Prud'hommes de PARIS, section Industrie -chambre 1- rendu le 11 Mai 2009 qui l'a condamnée à payer à Monsieur [D] avec intérêts légaux à compter de la date de réception par la partie défenderesse de la convocation devant le bureau de conciliation les sommes de :

720.40 € à titre de rappel de salaire plus congés payés afférents soit 72.04 €

3226.92 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis plus 322.69 € pour congés payés afférents

645.38 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement

et ordonné l'exécution provisoire des condamnations ci-dessus dans la limite de neuf mois en fixant la moyenne des trois derniers salaires à la somme de 1613.46 €

outre la somme de 10 000 € pour licenciement sans cause réelle et sérieuse avec intérêts légaux à compter du jugement et 1000 € en application de l'article 700 du Code de procédure Civile.

FAITS ET DEMANDES DES PARTIES

Monsieur [Y] [U] né le [Date naissance 1] 1984 a été engagé en qualité d'apprenti monteur climaticien par contrat d'apprentissage pour une durée de 24 mois à compter du 17 Juillet 2003 par la Sarl BOUCHERON ;

Á ce contrat a succédé un CNE dont la rémunération mensuelle a été fixée à 1205.78 € pour 151.67 heures à compter du 1er septembre 2005.

Le gérant de la société, Monsieur [B] [W], a été absent de son entreprise pour raison de maladie jusqu' au mois de Septembre 2006 ; La Sarl BOUCHERON expose que son gérant s'étonnant à son retour de ne pas avoir reçu le paiement de travaux exécutés chez Monsieur [N], il a contacté le client qui lui a appris que le 7 Juillet 2006 au cours de l'installation d'un appareil de climatisation, une rixe avait éclaté chez lui entre Monsieur [D] et un intérimaire, Monsieur [A] [C], et que l'installation n'avait pas été terminée ;

Suite à cette découverte, La Sarl BOUCHERON indique avoir convoqué Monsieur [D] à un entretien préalable le 13 Novembre 2006 pour le 23 Novembre suivant en vue d'un licenciement pour faute grave avec mise à pied conservatoire.

Le 29 Novembre 2006 Monsieur [D] a été licencié pour faute grave.

Monsieur [D] a contesté les faits motivant son licenciement dans un long courrier adressé à son employeur le 8 Décembre 2006 et a saisi le Conseil des Prud'hommes.

La convention collective applicable est celle du bâtiment de la région parisienne.

La Sarl BOUCHERON demande à la Cour d' Appel de constater que le CNE était régi par une ordonnance du 2 Août 2005 qui instituait la rupture du contrat de travail sans procédure spécifique;

Subsidiairement, constater que Monsieur [W], gérant de la société n'a eu connaissance des violences exercées chez le client Monsieur [N] que le 13 Novembre 2006 ;

En conséquence : dire que les faits objet du licenciement prononcé le 29 Novembre 2006 n'étaient pas prescrits, que Monsieur [D] n'a jamais fait état d'une rixe en Juillet 2006 et a sciemment omis d'indiquer que le chantier n'était pas terminé ;

Constater qu'il a reconnu les actes de violence au cours de l' entretien préalable, constater que la mesure conservatoire a été prise dès connaissance des faits de sorte que la mise à pied conservatoire et le licenciement pour faute grave sont justifiés et rejeter l'ensemble des demandes de Monsieur [D] y compris celle concernant le harcèlement moral.

Très subsidiairement, constater que le préjudice de Monsieur [D] n'est que de 2190.09 €, dire le licenciement causé et limiter à de plus justes proportions les dommages intérêts alloués et le condamner à lui payer la somme de 2000 € en application de l'article 700 du Code de procédure Civile

Monsieur [D] sollicite la confirmation du jugement déféré en ce qu' il a considéré que les faits étaient prescrits et lui a alloué le rappel de salaire sur mise à pied conservatoire et congés payés afférents, l'indemnité de préavis et les congés payés afférents ainsi que l'indemnité conventionnelle de licenciement outre les intérêts légaux à compter de la saisine du Conseil des Prud'hommes et 1000€ en application de l'article 700 du Code de procédure Civile ;

Pour le surplus, il sollicite l'infirmation du jugement et demande de condamner La Sarl BOUCHERON à lui payer les sommes de 2000€ au titre des frais irrépétibles et 20 000 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et en raison du caractère vexatoire lié aux conditions de la rupture.

SUR CE

Il est expressément fait référence aux explications et conclusions des parties visées à l'audience et soutenues oralement à la barre.

Le CNE a été abrogé par la Loi du 25 Juin 2008 qui a précisé en son article 9-II que les contrats en cours au 26 Juin 2008 étaient requalifiés en contrats à durée indéterminée de droit commun ; l'ordonnance ayant institué ce type de contrat est contraire aux dispositions de la convention n° 158 de l'OIT et par voie de conséquence, la rupture du contrat de travail reste soumise aux règles d'ordre public du code du travail concernant notamment la durée du préavis, la procédure de licenciement et ses conséquences.

Les conditions de la rupture des relations contractuelles sera donc examinée au regard des règles applicables au contrat à durée indéterminée en droit du travail et de la convention collective.

La lettre de licenciement qui fixe les limites du litige est rédigé en ces termes :

« (...) Je vous informe de ma décision de vous licencier pour faute grave pour le motif suivant que vous n'avez d'ailleurs pas contesté : Vous vous êtes battu sur un chantier avec votre collègue intérimaire ; celui-ci est rentré dans l'entreprise avec des hématomes sur le visage et sa chemise ensanglantée. Cet événement s'est produit chez un client qui s'est plaint par courrier de ces incidents ( il évoque également l'incorrection tant vis à vis de lui-même que des autres artisans) , mettant consécutivement en doute la qualité de l'installation et demandant l'achèvement des travaux par une autre équipe ( travaux que vous aviez déclaré terminés (...)»

Sur la prescription

Monsieur [D] invoque la prescription des faits qui lui sont reprochés dans la lettre de licenciement ;

Il résulte de l'ensemble des pièces versées aux débats les faits non contestés que Monsieur [D] est intervenu au début du mois de Juillet 2006 avec un intérimaire ( Monsieur [C] [A] engagé par La Sarl BOUCHERON du 26 juin 2006 au 7 Juillet 2006 selon facture de la société « Le cercle intérimaire 12 » adressée à La Sarl BOUCHERON le 16 Juillet 2006) , chez Monsieur [N] à [Localité 6] pour le chauffage et la climatisation de deux pièces de son appartement qui avait versé un acompte de 4000 € sur un total de travaux de 10 331.36 € ;

Que le 13 novembre 2006, Monsieur [N] a adressé un courrier à La Sarl  BOUCHERON signalant le non achèvement des travaux et la mauvaise entente de l'équipe qui était intervenue, les deux techniciens en étant venus aux mains ;

Monsieur [G] [H] qui a assisté Monsieur [D] au cours de l' entretien préalable au licenciement atteste que ce dernier n'a pas nié s'être battu avec son collègue intérimaire sur le lieu de travail chez le client Monsieur [N] [V], Monsieur [D] ayant simplement affirmé que c'était l'autre qui l'avait provoqué et avait commencé.

Il est par ailleurs établi tant par les certificats médicaux d'hospitalisation et les arrêts de travail que Monsieur [W] a été malade du 24 janvier 2006 jusqu'au 1er Juillet 2006 et qu'il n'a repris son travail dans sa société à temps partiel qu'au mois de septembre 2006 après ses vacances (attestation conforme aux dispositions du Nouveau Code de Procédure Civile de Madame [P] [T], secrétaire administrative de la société).

Monsieur [D] ne communique aucun certificat médical justifiant de blessures résultant des faits qu'il dit lui -même dans sa lettre de contestation de la mesure de licenciement, s'être produits le 7 Juillet 2006, l'incident ayant été neutralisé par un peintre présent sur le chantier qui s'est interposé ; il indique s'être défendu.

L'article L 1332-4 du Code du Travail dispose « Aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales ».

En l'espèce, la Cour estime établi que contrairement à ce qu'affirme Monsieur [D] dans sa lettre du 11 décembre 2006, il n'a pas pu informer des faits Monsieur [W], le jour de l'incident et qu'au contraire, ce dernier n'a eu connaissance de la rixe sur le chantier de Monsieur [N] que par la lettre du client de sorte que la procédure de licenciement a été mise en 'uvre dans le délai de deux mois à compter du jour de la connaissance des faits par l'employeur et que la prescription ne peut être opposée à La Sarl BOUCHERON ;

Le fait que Monsieur [W] ait délégué à Monsieur [L] la gestion au quotidien des équipes d'ouvriers n'implique pas en l'absence de justification concernant l'étendue de cette délégation, le pouvoir de prendre des mesures disciplinaires contrairement à ce que soutient Monsieur [D].

Sur la qualification du licenciement

Si la lettre de licenciement fait état de blessures sur la personne de l'intérimaire, aucun justificatif n'est versé aux débats ; la réalité de la rixe est cependant certaine puisque reconnue par Monsieur [D] qui ne conteste pas avoir porté des coups prétendant seulement s'être défendu alors que rien ne permet de considérer qu'il a été la victime de l'agression et n'aurait fait qu'esquiver les coups alors même qu'il indique qu'un peintre présent dans l'appartement du client Monsieur [N] a dû s'interposer ;

La Cour a donc les éléments suffisants pour retenir que des actes de violences physiques sont établis à l'encontre de Monsieur [D] sur un autre salarié au temps et au lieu du travail ce qui est constitutif d'une faute grave, privative des indemnités de rupture.

Monsieur [D] sera débouté de l'ensemble de ses demandes et conservera à sa charge ses frais irrépétibles étant relevé qu'aucune demande n'a été développée concernant un harcèlement moral et que la demande de La Sarl BOUCHERON tendant à voir dire que Monsieur [D] n'a jamais subi de harcèlement moral est sans objet ;

De même le caractère vexatoire du licenciement invoqué par Monsieur [D] n'est pas établi compte tenu de la gravité des faits l'ayant motivé.

Aucune considération ne justifie l'octroi du bénéfice de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile au profit de La Sarl BOUCHERON.

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement dans toutes ses dispositions.

Rejette toutes autres demandes des parties.

Condamne Monsieur [D] aux entiers dépens.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 09/07150
Date de la décision : 29/06/2010

Références :

Cour d'appel de Paris K4, arrêt n°09/07150 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-06-29;09.07150 ?
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