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29/06/2010 | FRANCE | N°08/10292

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 3, 29 juin 2010, 08/10292


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 3



ARRÊT DU 29 juin 2010



(n° 7 , 7 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 08/10292



Décision déférée à la cour : jugement rendu le 25 juin 2008 par le conseil de prud'hommes de Melun section activités diverses RG n° 07/00201





APPELANTE



L'Association ADAPEI 77

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Me Hélène ROQUEFEUIL, a

vocat au barreau de MEAUX







INTIMÉE



Mme [D] [O]

[Adresse 5]

[Localité 3]

comparant en personne, assistée de Me Sandrine DOREL, avocat au barreau de PARIS, toque : G0661







COMPOSIT...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 3

ARRÊT DU 29 juin 2010

(n° 7 , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 08/10292

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 25 juin 2008 par le conseil de prud'hommes de Melun section activités diverses RG n° 07/00201

APPELANTE

L'Association ADAPEI 77

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Me Hélène ROQUEFEUIL, avocat au barreau de MEAUX

INTIMÉE

Mme [D] [O]

[Adresse 5]

[Localité 3]

comparant en personne, assistée de Me Sandrine DOREL, avocat au barreau de PARIS, toque : G0661

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 novembre 2009, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Michèle MARTINEZ, conseillère, chargée d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Mme Elisabeth PANTHOU-RENARD, président

Mme Michèle MARTINEZ, conseiller

M. Serge TRASSOUDAINE, conseiller

Greffier : Monsieur Eddy VITALIS, lors des débats

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Elisabeth PANTHOU-RENARD, présidente, et par M. Eddy VITALIS, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Faits et procédure

Mme [D] [O] a été embauchée par l'Association départementale des parents et amis de personnes handicapées mentales de Seine-et- Marne (l'ADAPEI 77) en qualité de candidate élève aide médico-psychologique au foyer [6] de [Localité 4] (77), d'abord par une série de contrats de travail à durée déterminée à compter du 7 janvier 2001 puis par contrat à durée indéterminée à partir du 7 mai 2007.

La convention collective des établissements et services pour personnes handicapées et inadaptées du 15 mars 1966 est applicable aux relations de travail.

Dans le cadre de ses fonctions d'aide médico-psychologique, Mme [O] est tenue d'assurer des permanences de nuit dans une 'chambre de veille' située dans l'établissement. Ces permanences sont rémunérées conformément au régime d'équivalence prévu par l'article 11 de l'annexe 3 de la convention collective du 15 mars 1966 applicable.

Le 16 mars 2007, Mme [O] a saisi le conseil de prud'hommes de Melun de demandes tendant en dernier lieu au paiement de dommages et intérêts pour dépassement du temps de travail effectif de 11 heures par 24 heures, des dommages et intérêts indemnisant les frais de garde supplémentaires de son enfant exposés en raison de ce dépassement, de dommages et intérêts pour préjudice moral et matériel, de dommages et intérêts pour la précarité résultant de la succession de contrats de travail à durée déterminée et pour préjudice de qualification, des intérêts au taux légal avec capitalisation et d'une allocation de procédure.

Par jugement du 25 juin  2008, le conseil de prud'hommes a condamné l'ADAPEI 77 à payer à Mme [O] 10 000 euros à titre de dommages et intérêts et 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

L'ADAPEI 77 a interjeté appel. Elle conclut à l'infirmation du jugement, à l'entier débouté de Mme [O] et sollicite 3 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Mme [O] demande à la cour d'infirmer partiellement le jugement et de condamner l'ADAPEI 77 à lui payer :

- 31 500 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect du temps de travail, de l'amplitude d'horaire et du temps de repos entre deux journées de travail,

- 24 500 euros à titre de dommages et intérêts pour les frais de garde supplémentaires pour son enfant,

- 35 000 euros à titre de dommages et intérêts pour son préjudice moral et familial,

- 10 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice lié à la précarité subie du fait de la succession de contrats de travail à durée déterminée et au préjudice de qualification,

- les intérêts au taux légal sur ces sommes à compter de la saisine du conseil de prud'hommes avec capitalisation,

- 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Pour plus ample exposé de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffier le 9 novembre 2009, reprises et complétées lors de l'audience.

Motifs de la décision

L'ADAPEI 77 fait application à son personnel éducatif effectuant des permanences de nuit en chambre 'de veille' de l'article 11 de l'annexe 3 de la convention collective des établissements et services pour personnes handicapées et inadaptées du 15 mars 1966 qui prévoit un système d'équivalence pour le décompte de ces heures de moindre activité.

Mme [O] soutient, qu'indépendamment de leur rémunération, toutes les heures de présence sur place qu'elle a assurées lors de ces permanences nocturnes auraient du être décomptées comme des heures de travail pour vérifier que les prescriptions minimales en vue de la protection de la sécurité et la santé des travailleurs édictées par la directive communautaire 93/104/CE du 23 novembre 1993, étaient respectées.

Elle fait valoir que tel n'a pas été le cas et qu'il ressort des plannings qu'elle verse aux débats que, depuis l'origine de la relation de travail, de nombreuses infractions, tant à la directive européenne qu'aux articles L.3131-1 du Code du travail et 20-5 de la convention collective ont été commises par l'employeur, en matière d'amplitude journalière de travail, de temps de travail quotidien et en matière de temps de repos entre deux journées de travail. Selon elle, en effet, ces plannings permettent de constater 78 infractions à ces textes en 2003, 71 infractions en 2004, 65 infractions en 2005, 73 infractions en 2006 et 42 infractions pour les six premiers mois de 2007.

Elle sollicite des dommages et intérêts en réparation des préjudices occasionnés par ces infractions.

L'ADAPEI 77 répond que :

- pour la période antérieure au décret du 29 janvier 2007, elle a appliqué les dispositions légales, réglementaires et conventionnelles en vigueur relatives à la durée du travail et au système d'équivalence et qu'elle n'était pas tenue de faire une application directe de la directive 93/104/CE du 23 novembre 1993 non transposée dans le droit national,

- pour la période postérieure au décret du 29 janvier 2007, comme elle l'avait annoncé antérieurement, elle a assuré le respect des dispositions relatives au temps de travail, soit 11 heures entre deux vacations et 48 heures par semaine,

- les plannings produits par la salariée et établis unilatéralement par elle pour démontrer les horaires anormaux qu'elle prétend avoir effectués ne peuvent constituer une preuve à son profit.

* * * * * *

L'article L.212-1 devenu L.3121-10 du Code du travail fixe à 35 heures par semaine civile la durée légale du travail effectif des salariés.

L'article L 212-4 alinéa 5 devenu 3121-9 du même code prévoit qu'une durée équivalente à la durée légale peut être instituée dans les professions et pour des emplois déterminés comportant des périodes d'inaction, soit par décret, pris après conclusion d'une convention ou d'un accord de branche, soit par décret en Conseil d'Etat, ces périodes étant rémunérées conformément aux usages ou aux conventions ou accords collectifs.

L'article 11 de l'annexe 3 de la convention collective des établissements et services pour personnes handicapées et inadaptées du 15 mars 1966, modifié par l'avenant 115 du 1er juin 1978 agréé par arrêté, prévoit, sous l'intitulé 'Surveillance de nuit', un système d'équivalence en ces termes :

Dans le cas où le personnel éducatif en internat est appelé à assumer en chambre 'de veille' la responsabilité de surveillance nocturne, ce service s'étend du coucher au lever des pensionnaires sans que sa durée puisse excéder douze heures.

Ce service fait l'objet d'une compensation dans les conditions suivantes :

- les neuf premières heures sont assimilées à trois heures de travail éducatif,

- entre 9 et 12 heures, chaque heure est assimilée à une demi-heure de travail éducatif'.

La cour de cassation ayant dit par arrêt du 29 juin 1999 que cette convention collective ne pouvait valablement prévoir un régime d'équivalence, un décret en conseil d'Etat n° 2001-1384 du 31 décembre 2001, pris pour l'application de l'article L 212-4 devenu 3121-9 du Code du travail et instituant une durée d'équivalence de la durée légale du travail dans les établissements sociaux et médico-sociaux gérés par des personnes privées à but non lucratif, a instauré un régime semblable à celui prévu par l'article 11 conventionnel précité.

Le décret n° 2004-1136 du 21 octobre 2004 relatif au Code de l'action sociale et des familles, a codifié les dispositions du décret du 31 décembre 2001. Il en résulte, sous l'intitulé 'durée du travail', les articles suivants du dit code reprenant les termes du décret codifié :

'Article R.314-201

Les dispositions du présent paragraphe sont applicables :

1° Aux établissements gérés par des personnes privées à but non lucratif comportement un hébergement qui sont mentionnés aux 1°, 2°, 4°, 6°, 7° et 8° du I de l'article L.312-1 .

2° Aux emplois à temps plein des personnels éducatifs, d'infirmiers ou d'aides-soignants ou de personnel de même niveau de qualification appelés à les remplacer dont les titulaires assurent en chambre de veille au sein de l'établissement la responsabilité d'une surveillance nocturne.

Article R.314-202

Pour le calcul de la durée légale du travail dans les établissements et pour les emplois mentionnés à l'article R.314-201, chacune des périodes de surveillance nocturne en chambre de veille est décomptée comme trois heures de travail effectif pour les neuf premières heures et comme une demi-heure pour chaque heure au-delà de neuf heures.

Article R.314-203

La période de présence en chambre de veille s'étend du coucher au lever des personnes accueillies tels qu'ils sont fixés par les tableaux de service, sans que sa durée puisse excéder douze heures'.

Dans un arrêt du 1er décembre 2005, la cour de Justice des Communautés européennes (CJCE), saisie sur question préjudicielle par le conseil d'Etat sur la question de savoir si le décret n°2001-1384 du 31 décembre 2001 était compatible avec la directive 93/104/CE du 23 novembre 1993, a dit que 'la directive 93/104/CE doit être interprétée en ce sens qu'elle s'oppose à la réglementation d'un Etat membre qui, s'agissant des services de garde que les travailleurs de certains établissements sociaux et médico-sociaux accomplissent selon le régime de la présence physique sur le lieu même du travail, prévoit, pour le décompte du temps de travail effectif, un système d'équivalence tel que celui en cause, lorsque le respect de l'intégralité des prescriptions minimales édictées par cette directive en vue de protéger de manière efficace la sécurité et la santé des travailleurs n'est pas assuré'.

Suivant la décision du juge européen, le conseil d'Etat, par arrêt du 28 avril 2006, a annulé le décret du 31 décembre 2001 en tant qu'il ne fixe pas les limites dans lesquelles doit être mis en oeuvre le régime d'équivalence qu'il définit pour garantir le respect des seuils et plafonds communautaires prévus par la directive 93/104/CE du 23 novembre 1993.

Selon cette décision, si la directive 93/104/CE ne fait pas obstacle à l'application de rapports d'équivalence aux durées maximales de travail fixées par le droit national, il ne peut en résulter une inobservation des seuils et plafonds communautaires destinés à protéger la santé et la sécurité des travailleurs, pour l'appréciation desquels les périodes de travail effectif doivent être comptabilisées dans leur intégralité sans possibilité de pondération et le décret en cause est entaché d'illégalité en ce qu'il ne prévoit pas les limites dans lesquelles devait s'exercer le régime d'équivalence créé pour garantir le respect des seuils et plafonds fixés par la directive.

C'est dans ces conditions qu'est intervenu le décret n° 2007-106 du 29 janvier 2007 relatif à la durée d'équivalence de la durée légale du travail dans les établissements sociaux et médico-sociaux gérés par des personnes privées à but non lucratif, lequel prévoit l'insertion sous l'article R.314-203 du Code de l'action sociale et des familles des articles suivants :

'Art. R.314-203-1. Le recours au régime d'équivalence prévu à l'article R 314-202 du code de l'action sociale et des familles ne peut avoir pour effet de porter :

1°) A plus de quarante huit heures la durée hebdomadaire moyenne de travail des salariés, décomptée heure pour heure, sur une période quelconque de 4 mois consécutifs,

2°) A plus de douze heures la durée de travail des travailleurs de nuit, décomptée heure pour heure, sur une période quelconque de vingt-quatre heures ; ces salariés bénéficient de périodes de repos d'une durée au moins équivalente au nombre d'heures qui sont effectuées au-delà de la huitième heure.

Pour l'appréciation de la qualité de travailleur de nuit selon les dispositions de l'article L.213-2 du Code du travail, le temps de travail des salariés soumis au régime d'équivalence de l'article R.314-202 est décompté heure pour heure.

'Art. R.314-203-2. Aucun salarié auquel est appliqué le régime d'équivalence prévu par l'article R 314-202 ne peut accomplir un temps de travail, décompté heure pour heure, excédant six heures consécutives, sans bénéficier d'un temps de pause d'une durée minimale de vingt minutes'.

* * * * * *

La directive communautaire 93/104/CE du 23 novembre 1993 concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail fixe des prescriptions minimales de sécurité et de santé en matière d'aménagement du temps de travail, qui s'appliquent en particulier aux périodes de repos journalier, de repos hebdomadaire et de congé annuel ainsi qu'aux temps de pause et à la durée maximale hebdomadaire de travail.

Son article 2 indique qu'on entend par :

- temps de travail, toute période durant laquelle le travailleur est au travail, à la disposition de l'employeur et dans l'exercice de son activité ou de ses fonctions conformément aux législations et/ou pratiques nationales,

- période de repos, toute période qui n'est pas du temps de travail.

La directive ne prévoit ainsi ni catégorie intermédiaire entre temps de travail et temps de repos, ni prise en compte de l'intensité du travail accompli ou des périodes d'inactivité ou de moindre activité.

Il s'ensuit que la notion de temps de travail au sens de la directive doit être appréhendée par opposition à celle de période de repos, ces deux notions étant exclusives l'une de l'autre, de sorte que, lorsqu'il s'agit de vérifier le respect de toutes les prescriptions minimales édictées par la directive, les heures de présence doivent être comptabilisées intégralement en tant qu'heures de travail indépendamment de toute pondération.

Les articles 3 à 8 de la directive édictent que les états membres prennent les mesures nécessaires pour que tout travailleur bénéficie :

- d'un repos journalier obligatoire de 11 heures consécutives au cours de chaque période de 24 heures,

- d'un temps de pause toutes les six heures de travail,

- d'un repos hebdomadaire minimal sans interruption de 24 heures incluant en principe le dimanche au cours de chaque période de 7 jours,

- d'une durée maximale hebdomadaire de travail moyenne de 48 heures y compris les heures supplémentaires,

- d'une durée du travail de nuit ne dépassant pas 8 heures en moyenne par période de 24 heures.

Selon l'article L.212-4 alinéa 1 devenu L.3121-1 du Code du travail, la durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et doit se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles.

En application de l'article L.220-1 devenu L.3131-1 du Code du travail, tout salarié bénéficie d'un repos quotidien d'une durée minimale de onze heures consécutives.

L'article 20.3 de la convention collective des établissements et services pour personnes handicapées et inadaptées relatif à la répartition de l'organisation de la durée du travail par cycle prévoit qu'il ne peut être accompli plus de 44 heures par semaine par un salarié travaillant de jour comme de nuit.

L'article 20.5 de ladite convention stipule que la durée quotidienne maximale du travail est fixée à 10 heures, de jour ou de nuit.

* * * * * *

Aux termes de l'article L.212-1-1 devenu L.3171-4 du Code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande.

La salariée verse aux débats des emplois du temps hebdomadaires pour les années 2003 à 2006 et pour le premier semestre 2007 établis sur des imprimés complétés à la main mentionnant pour chaque jour ses horaires de service et explique que ces plannings sont renseignés sur la base de l'agenda annuel fourni par l'employeur sur lequel, comme tous les salariés, elle reportait les horaires la concernant qui figuraient sur les tableaux de service affichés par l'employeur.

L'ADAPEI 77, qui conteste pour la première fois l'authenticité de ces plannings en cause d'appel, ne produit, en dépit de la mise en demeure qui lui a été adressée par son adversaire en cours de procédure, aucun des tableaux de service qu'elle était tenue d'établir et d'afficher dans l'entreprise en application des dispositions conventionnelles, en particulier de l'article 20-7 de la convention collective. Elle ne fournit aucun élément de nature à justifier les horaires de la salariée pour la période considérée.

Les plannings fournis par la salariée, qui sont cohérents et ne comportent aucun indice intrinsèque permettant mettre en doute leur authenticité et leur fiabilité, seront par conséquent retenus.

Le seuil communautaire, qui résulte de la directive 93/104/CE du Conseil du 31 décembre 1993, modifiée par la directive 2000/34/CE du parlement et du Conseil du 22 juin 2000, fixant à 11 heures consécutives la période minimale du repos journalier, se traduit en droit interne par l'interdiction de dépasser l'amplitude journalière de 13 heures, celle-ci étant définie comme le temps séparant la prise de poste de sa fin.

L'interprétation du droit national à la lumière du texte et de la finalité de la dite directive conduit à comptabiliser en tant que temps de travail effectif l'intégralité des heures de permanence nocturne en chambre de veille accomplies par la salariée.

L'examen des emplois du temps produits par Mme [O] révèle que l'employeur prend en compte un horaire pondéré dans les termes du décret du 31 décembre 2001 pour le calcul de la durée du travail pendant les heures de surveillance nocturne et que, si on comptabilise l'intégralité des heures accomplies, apparaissent de nombreux dépassements de la durée légale du travail en termes d'amplitude journalière, ayant une incidence sur le calcul des temps de travail et de repos quotidiens et hebdomadaires, tel ceux cités à titre d'exemple par la salariée dans ses écritures.

Ces dépassements ont nécessairement occasionné à Mme [O] un préjudice lié d'une part à la fatigue générée par l'insuffisance des repos pris et les risques en résultant pour sa santé et sa sécurité, d'autre part, aux frais supplémentaires qu'elle a dû engager pour assurer la garde de son enfant qu'elle élève seule et, enfin, à la désorganisation de sa vie personnelle et familiale engendrée par des services de nuit prolongés.

Compte tenu des pièces et des explications fournies, les premiers juges ont correctement apprécié l'indemnisation du préjudice subi par Mme [O], toutes causes confondues.

Le jugement sera par conséquent confirmé.

Conformément à l'article 1153-1 du Code civil, les dommages et intérêts alloués produiront intérêts au taux légal à compter du jugement et les intérêts seront capitalisés dans les termes de l'article 1154 du Code civil.

Mme [O] estime en outre avoir subi un préjudice du fait de la succession de contrats de travail à durée déterminée avant que lui soit consenti un contrat à durée indéterminée dans la mesure où elle a été ainsi maintenue dans une situation de précarité et où elle effectuait pendant cette période un travail d'éducatrice spécialisée sans en avoir le titre et le salaire.

Les premiers juges n'ont pas statué sur cette demande dont ils étaient cependant saisis. Il convient de réparer cette omission.

La salariée, qui ne remet pas en cause la validité des contrats de travail à durée déterminée ayant précédé le contrat à durée indéterminée dont elle bénéficie actuellement, ne verse aux débats aucune pièce pertinente permettant de caractériser une faute de l'employeur dans la conclusion des contrats à durée déterminée et de déterminer les conditions exactes dans lesquelles elle exerçait ses fonctions avant d'être embauchée à durée indéterminée.

Elle ne justifie par ailleurs d'aucun préjudice.

Sa demande à ce titre sera rejetée.

Les conditions d'application de l'article 700 du Code de procédure civile sont réunies en cause d'appel comme elles l'étaient en première instance. Il convient de confirmer le jugement de ce chef et d'allouer à Mme [O] en cause d'appel une somme supplémentaire de 3 000 euros à ce titre.

Par ces motifs

La cour

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Complétant et ajoutant,

Dit que les dommages et intérêts alloués par le jugement déféré produiront intérêts au taux légal à compter du 25 juin 2008 et que les intérêts seront capitalisés conformément à l'article 1154 du Code civil ;

Déboute Mme [O] de sa demande en paiement de dommages et intérêts relatifs à la précarité et à la qualification ;

Condame l'ADAPEI 77 à payer à Mme [O] en cause d'appel une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Condamne l'ADAPEI 77 aux dépens.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 08/10292
Date de la décision : 29/06/2010

Références :

Cour d'appel de Paris K3, arrêt n°08/10292 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-06-29;08.10292 ?
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