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16/06/2010 | FRANCE | N°09/00364

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 6, 16 juin 2010, 09/00364


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6



ARRET DU 16 Juin 2010

(n° 9 , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 09/00364-AML



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 15 Janvier 2007 par le conseil de prud'hommes de PARIS section Encadrement RG n° 05/12476





APPELANTE

Madame [L] [H]

[Adresse 1]

[Localité 3]

comparant en personne, assistée de Me Alexis LEPAGE, avocat au barrea

u de TOURS substitué par Me Stéphanie ROGER avocat au barreau de TOURS







INTIMÉE

EPIC LA REUNION DES MUSEES NATIONAUX

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Patrice...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6

ARRET DU 16 Juin 2010

(n° 9 , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 09/00364-AML

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 15 Janvier 2007 par le conseil de prud'hommes de PARIS section Encadrement RG n° 05/12476

APPELANTE

Madame [L] [H]

[Adresse 1]

[Localité 3]

comparant en personne, assistée de Me Alexis LEPAGE, avocat au barreau de TOURS substitué par Me Stéphanie ROGER avocat au barreau de TOURS

INTIMÉE

EPIC LA REUNION DES MUSEES NATIONAUX

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Patrice D'HERBOMEZ, avocat au barreau de PARIS, toque : C 517 substitué par Me Sylvie GAIN, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 avril 2010, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Anne-Marie LEMARINIER, Conseillère, chargée d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Alain CHAUVET, Président

Madame Anne-Marie LEMARINIER, Conseillère

Madame Claudine ROYER, Conseillère

Greffier : Mme Evelyne MUDRY, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Alain CHAUVET, Président et par Evelyne MUDRY, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCEDURE ET MOYENS DES PARTIES

Par jugement du 15 janvier 2007 auquel la cour se réfère pour l'exposé des faits, de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, le conseil de prud'hommes de Paris a :

Débouté Madame [L] [H] de l'ensemble de ses demandes.

Débouté la réunion des musées nationaux de sa demande reconventionnelle.

Vu les conclusions régulièrement communiquées et oralement soutenues à l'audience du 12 avril 2010, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé de ses moyens et arguments et par lesquelles Madame [L] [H] demande à la cour de :

La déclarer recevable et bien-fondée en son appel.

En conséquence, infirmer le jugement déféré et statuant à nouveau :

Dire et juger que la rupture des relations contractuelles est imputable à l'employeur.

Qu'elle a pris la forme d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

En conséquence,

Condamner l'EPIC RMN à lui payer les sommes de :

- 21091,72 euros à titre d'indemnité de préavis,

-2109,17 euros à titre d'indemnité de congés payés sur le préavis,

- 36857,78 euros à titre d'indemnité de licenciement,

- 126528 euros à titre de dommages-intérêts sur le fondement de l'article L. 1235-3 du code du travail,

- 15816 euros sur le fondement de l'article 1382 du code civil,

- 5000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Vu les conclusions régulièrement communiquées et oralement soutenues à l'audience du 12 avril 2010, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé de ses moyens et arguments et par lesquelles l'EPIC REUNION DES MUSEES NATIONAUX demande à la cour de :

Déclarer l'appel de Madame [H] irrecevable et mal fondé, l'en débouter et confirmer le jugement entrepris.

A titre subsidiaire, si la cour imputait à la RMN, la responsabilité de la rupture du contrat de travail, dire et juger que le comportement de la salariée aurait justifié son licenciement pour faute grave, et à tout le moins pour cause réelle et sérieuse.

Reconventionnellement, dire et juger la RMN recevable et bien fondée en son appel incident et condamner Madame [H] à lui payer la somme de 10450 euros à titre de dommages et intérêts outre 5000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS

Sur la rupture du contrat de travail

Considérant que Madame [L] [H] a été engagée initialement à compter du 17 octobre 1990 pour un an par l'EPIC RÉUNION DES MUSÉES NATIONAUX ( RMN) en qualité de responsable du mécénat, contrat auquel a succédé à compter du 1er janvier 1991 un contrat à durée indéterminée portant sur les mêmes fonctions.

Considérant qu'en juillet 2003 une première réorganisation du service est intervenue sur la portée de laquelle les parties divergent.

Considérant qu'en août 2005, la RMN a crée une direction de la communication des relations publiques et du mécénat par le regroupement de différents départements qui a donné lieu à une information du C.E. et que Madame [Z] a été nommée le 1er septembre suivant au poste ainsi regroupé de directrice de la communication, des relations publiques et du mécénat.

Considérant que par lettre des 22 et 23 septembre 2005 Madame [H] a écrit au DRH et à l'administrateur général pour faire part de son désaccord sur la nouvelle organisation qu'elle analyse comme constituant une modification substantielle de son contrat de travail par création d'un degré hiérarchique supplémentaire, suppression de ses attributions et responsabilités, dégradation de ses conditions matérielles de travail et que le 6 octobre 2005 elle a pris acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de l'employeur.

Considérant que 14 octobre 2005 la salariée a été convoquée à un entretien préalable fixé au 25 suivant en raison de son abandon de poste auquel elle ne s'est pas présentée et que le 3 novembre une commission des délégués du personnel a été réunie portant sur un éventuel licenciement pour faute grave de Madame [H] auquel il n'a pas été donné suite, la commission ayant invité les parties à rechercher un accord.

Considérant que la prise d'acte de la rupture par le salarié en raison de faits qu'il reproche à son employeur entraîne la cessation immédiate du contrat de travail.

Considérant que dans un tel cas il appartient au juge de se prononcer sur la prise d'acte en prenant en considération les faits invoqués par le salarié, étant précisé que ceux ci doivent constituer des manquements suffisamment graves aux obligations de l'employeur pour justifier la rupture aux torts de ce dernier, et qu'à défaut la rupture s'analyse en une démission.

Considérant que contrairement à ce que soutient la RMN, il résulte des échanges de correspondances échangées avec [Y] [M] et [N] [E], qui ont successivement occupé le poste d'administrateur général, ou encore madame [F], que la salariée entretenait des relations directes et régulières, et non seulement ponctuelles à l'occasion de vacances d'emplois ou d'intérim, avec l'administrateur général ce qui découle de la nature des fonctions et de la qualification de 'chef de département responsable du mécénat' portée sur les bulletins de salaire de Madame [H] qui jusqu'à l'arrivée de madame [Z] ne relevait d'aucune autre autorité et se trouvait donc directement rattachée au directeur général de la RMN.

Considérant que la modification de l'organigramme consistant en la création d'une direction de la communication des relations publiques et du mécénat au prétexte de regrouper toutes les activités de communication et de relations publiques qui étaient jusqu'alors éclatées entre différentes directions et donc l'instauration d'un degré hiérarchique entre l'administrateur général, Monsieur [E] et le département mécénat ( cf. l'organigramme du service en septembre 2005) qui indépendamment du fait que le comité d'entreprise qui en avait été informé n'ait pas formulé d'observation particulière, a bien eu des conséquences sur l'emploi et les responsabilités de madame [H]

Considérant qu'à compter de sa nomination, les échanges de mails entre madame [Z], ses services et la salariée démontrent que les missions et attributions que cette dernière exerçait auparavant seule, soit requéraient dorénavant l'aval de madame [Z], soit lui étaient purement et simplement retirées au profit de celle-ci, qu'il en était ainsi de la négociation du budget de son service et plus encore, de la recherche et des contacts avec les mécènes qui constituaient l'intérêt et l'essentiel de ses fonctions.

Considérant en effet que la salariée prouve par la production de copies de ses correspondances avec les mécènes, tels le président du directoire de [I] et [J], le délégué général d'EDF, le représentant de ERNEST & YOUNG... qu'elle négociait et signait elle-même les conventions de mécénat et qu'elle était jusque là la personne qualifiée au sein de la RMN en ce domaine où elle avait acquis un renom et une légitimité certaine eu égard aux concours très importants qu'elle parvenait à obtenir.

Considérant que non seulement les correspondances internes attestent de la dégradation du statut de madame [H] mais encore celles de personnalités extérieures au service ainsi, [O] [A], conservateur général du musée de l'homme 'j'ai été choqué de tes nouvelles conditions de travail, dans un cadre qui me paraît contre performant pour remplir tes objectifs : convaincre des partenaires prestigieux de participer aux grandes opérations culturelles menées par les musées nationaux', ou encore [C] [K], directeur du musée d'[Localité 4], 'J'apprends avec surprise la création d'une Direction du mécénat remettant en cause votre position de responsable du mécénat de la RMN' et qui déclare '[L] [H], était dans un bureau à la RMN où elle s'occupait brillamment depuis quinze ans de trouver du mécénat pour nos expositions. A la suite d'une nouvelle direction de la RMN, et d'un remaniement qui lui ôtait l'essence de son action, elle en est partie.'

Considérant qu'à la modification de son degré hiérarchique et du périmètre de ses attributions s'est ajoutée une détérioration de ses conditions matérielles de travail dans la mesure où le bureau où la salariée recevait les mécènes et personnalités, comme précédemment relaté, lui a été retiré de façon autoritaire et vexatoire pour être reléguée du jour au lendemain dans un bureau étriqué et encombré que la seule proximité avec les services de la directrice ne saurait expliquer et justifier.

Que de même son secrétariat propre lui a été retiré sans motif.

Considérant que si l'employeur tient de son pouvoir général de direction de l'entreprise le droit de procéder à des modifications des conditions de travail dans l'intérêt du service, il n'en demeure pas moins que le contrat de travail ne peut être unilatéralement modifié par lui tant en ses éléments essentiels qu'en ses dispositions qui, dans l'intention des parties, ont constitué un élément déterminant de l'engagement du salarié.

Considérant qu'en l'état de ces constatations, la modification unilatérale par l'employeur d'un élément essentiel du contrat de travail de la salariée par suppression des responsabilités et attributions qui étaient les siennes et ses conditions de mise en oeuvre, constituent de la part de l'employeur un manquement suffisamment grave à ses obligations pour lui rendre imputable la rupture du contrat laquelle produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et ouvre droit pour la salariée à indemnisation.

Considérant que le jugement mérite infirmation.

Sur les demandes à caractère financier

- indemnité compensatrice de préavis, congés payés afférents et indemnité conventionnelle de licenciement

Considérant que les sommes réclamées à ce titre par la salariée, ne sont pas contestées dans leur montant par l'EPIC REUNION DES MUSEES NATIONAUX et sont conformes aux textes applicables et aux droits de la salariée.

Qu'il sera en conséquence fait droit aux demandes de ce chef formulées par Madame [H] et que la décision des premiers juges sera en conséquence infirmée.

- Dommages-intérêts en réparation de la rupture

Considérant qu'il y a lieu à application des dispositions de l'article L.1235-3 du Code du travail,

Considérant qu'eu égard à l'ancienneté de la salariée(15 ans), à son âge, aux circonstances particulières de la rupture et aux justificatifs produits, la somme de 50 000 euros réparera justement le préjudice qu'elle a subi, en ce inclus l'indemnisation du préjudice moral lié aux conditions vexatoires de la rupture.

Considérant en revanche et compte tenu de ce qui précède, que la RMN ne peut qu'être déboutée de sa demande de dommages et intérêts.

Considérant que la décision des premiers juges sera modifiée en ce sens.

Considérant que l'EPIC REUNION DES MUSEES NATIONAUX qui succombe sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts, supportera les dépens et indemnisera Madame [H] des frais exposés dans l'instance à hauteur de la somme de 2 000 euros.

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement et par décision contradictoire,

Infirme le jugement déféré.

Condamne l'EPIC REUNION DES MUSEES NATIONAUX à payer à Madame [L] [H] les sommes suivantes :

- 21 091,72 euros à titre d'indemnité de préavis,

-2 109,17 euros à titre d'indemnité de congés payés sur le préavis,

- 36 857,78 euros à titre d'indemnité de licenciement,

- 50 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de la rupture,

- 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne l'EPIC REUNION DES MUSEES NATIONAUX aux dépens.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 09/00364
Date de la décision : 16/06/2010

Références :

Cour d'appel de Paris K6, arrêt n°09/00364 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-06-16;09.00364 ?
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