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03/06/2010 | FRANCE | N°09/22247

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 1, 03 juin 2010, 09/22247


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 1 - Chambre 1



ARRET DU 03 JUIN 2010



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 09/22247



RECOURS EN ANNULATION d'une sentence arbitrale (CCI 15483/EC/ND)

rendue le 14 août 2009 à Paris par la Cour Internationale d'Arbitrage de la Chambre de Commerce Internationale, sous la signature de M. [H] [N], arbitre unique

Sentence rendue exécuto

ire par ordonnance de M. le Président

du T.G.I. de Paris en date du 28 septembre 2009





DEMANDERESSE AU RECOURS EN ANNULATION :





SOCIETE CHAUDRONNERIE...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 1

ARRET DU 03 JUIN 2010

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 09/22247

RECOURS EN ANNULATION d'une sentence arbitrale (CCI 15483/EC/ND)

rendue le 14 août 2009 à Paris par la Cour Internationale d'Arbitrage de la Chambre de Commerce Internationale, sous la signature de M. [H] [N], arbitre unique

Sentence rendue exécutoire par ordonnance de M. le Président

du T.G.I. de Paris en date du 28 septembre 2009

DEMANDERESSE AU RECOURS EN ANNULATION :

SOCIETE CHAUDRONNERIE MECANIQUE ARIEGOISE CMA

SA

ayant son siège : [Adresse 3]

[Localité 1]

prise en la personne de ses représentants légaux

représentée par la SCP BERNABE - CHARDIN - CHEVILLER,

avoués à la Cour

assistée de Me Hubert MOREAU,

avocat au barreau de Paris - Toque P 73

DEFENDERESSE AU RECOURS EN ANNULATION :

La SOCIETE ADJOR SOFAL NEMONEH PARS

société de droit iranien

ayant son siège : [Adresse 2]

[Localité 4] IRAN

représentée par son président directeur général, M. [B] [R]

représentée par la SCP FISSELIER - CHILOUX - BOULAY,

avoués à la Cour

assistée de Me Marie-Pia HUTIN,

avocat au barreau de Paris - Toque 0813

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 6 mai 2010,en audience publique

le rapport entendu, devant la Cour composée de :

Monsieur PÉRIÉ, président

Madame BADIE, conseiller

Madame GUIHAL, conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme FALIGAND

Ministère public :

représenté lors des débats par Madame ROUCHEREAU, avocat général,

ARRÊT :

- Contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Jean-François PERIE, président et par Mme Raymonde FALIGAND, greffier présent lors du prononcé.

Par contrat du 24 novembre 2000 la société de droit français CHAUDRONNERIE MÉCANIQUE ARIÈGEOISE (CMA) s'est engagée envers la société de droit iranien ADJOR SOFAL NEMONEH PARS (ASNP) pour l'étude, la conception, la fabrication, la mise au point technique et l'assemblage des machines pour l'équipement en Iran d'une usine de production de briques et de tuiles selon un procédé SBF.

Alléguant des difficultés de mise en service de cette chaîne de fabrication, ASNP a saisi la Cour internationale d'arbitrage conformément à la clause compromissoire prévue au contrat.

Par sentence à Paris du 14 août 2009, l'arbitre unique, [H] [N], a prononcé la résiliation du contrat du 24 novembre 2000 au torts de la défenderesses, CMA, et l'a condamnée à payer à la demanderesse, ASNP, 2.111.925,74€ à parfaire à compter de la date de notification de la sentence et jusqu'à paiement complet selon les intérêts légaux au taux en vigueur en France à la date de notification de la sentence, outre 96.541,33€ pour participation aux frais et honoraires d'avocat et 57.000USD en remboursement de l'avance sur la provision pour les frais d'arbitrage.

La société CMA a introduit un recours en annulation contre cette sentence. Elle fait valoir deux moyens : l'arbitre unique a statué sans se conformer à la mission qui lui avait été conférée (article 1502 3° du CPC) et le principe de la contradiction n'a pas été respecté (article 1502 4° du CPC).

Elle prie la cour, par conclusions du 26 février 2010, d'annuler la sentence, d'annuler l'ordonnance d'exequatur de cette décision et, statuant à nouveau, de débouter la société ASNP de ses demandes et de la condamner à lui payer diverses sommes en réparation de ses préjudices, ainsi que 5.000€ au titre de l'article 700 du CPC.

Par conclusions du 15 mars 2010, la société ASNP demande à la cour de rejeter le recours en annulation, de déclarer l'appel irrecevable et de condamner ASNP à lui payer en raison de son comportement dilatoire 38.621€ au titre d'un préjudice financier et 100.000€ de dommages-intérêts, outre 15.000€ par application de l'article 700 du CPC.

SUR QUOI,

Sur le premier moyen d'annulation : l'arbitre unique a statué sans se conformer à la mission qui lui avait été conférée (article 1502 3° du CPC) :

La société CMA dit que l'arbitre avait pour mission de déterminer si les parties avaient respecté les obligations mises à leur charge par le contrat ; qu'il ne lui appartenait pas, alors que les machines fonctionnaient parfaitement et que la concluante avait dès lors satisfait à ses obligations, de se prononcer sur la conformité du procédé de fabrication SBF dont il n'était pas le promoteur et qui avait été choisi par la seule société ASNP ; qu'en application de l'article 19 du règlement de la CCI, l'arbitre ne pouvait étendre sa mission à l'examen de ce procédé que si une requête avait été déposée à cette fin et avec l'accord des deux parties ; qu'en outre il a fondé sa position sur une conviction, sans référence à une norme et sans ordonner d'expertise et n'a donc pas motivé sa décision qui au total néglige de répondre aux questions fondamentales de l'acte de mission, à savoir si les parties avaient respecté leurs obligations contractuelles.

Considérant que la mission de l'arbitre définie par la convention d'arbitrage est délimitée principalement par l'objet du litige tel qu'il est déterminé par les prétentions des parties ; qu'il n'est pas contesté qu'à ce titre il appartenait à l'arbitre, notamment, de déterminer si la société CMA avait exécuté ses obligations en livrant des machines propres à produire la quantité et la qualité requises de tuiles et de briques ;

Considérant que l'arbitre rappelant (§283) 'que l'obligation contractuelle principale et essentielle de CMA était la livraison d'une usine équipée de machines permettant d'utiliser le procédé SBF pour la fabrication de briques et de tuiles en quantité et qualité définies par le crédit documentaire (Articles 1.1 et 7 du Contrat)' a nécessairement été amené à se prononcer d'une part, sur la quantité produite, d'autre part, sur la qualité de cette production et partant sur la viabilité du procédé SBF ; qu'il a pu établir, sans avoir à recourir à une mesure d'instruction dont au demeurant il n'est pas établi qu'elle aurait été demandée, après avoir procédé à l'audition de plusieurs témoins et notamment de M. [D] qui a développé le procédé SBF, que cette technique n'a jamais été maîtrisée ; qu'enfin, constatant que la société CMA s'est portée garante du procédé SBF et s'est engagée à livrer une usine de briqueterie fonctionnant selon ce procédé, ce que M. [X], PDG de la société CMA, n'a pas contesté (§305 et 306), il a pu, sans méconnaître le périmètre de sa mission, conclure que la société CMA avait failli à ses obligations contractuelles au titre desquelles elle garantissait la fiabilité du dit procédé;

Qu'en réalité la société CMA, en soutenant ce premier moyen qui manque en fait, invite la cour a examiner la pertinence des motifs de la sentence ce qui est interdit au juge de l'annulation ;

Que le premier moyen est donc rejeté ;

Sur le second moyen d'annulation: le principe de la contradiction n'a pas été respecté (article 1502 4° du CPC):

La société CMA reproche à l'arbitre d'avoir écarté son mémoire en réplique au mémoire final de la société ASNP, alors que la clôture des débats n'était pas encore intervenue, et d'avoir entendu les témoins en audioconférence et non comme prévu en vidéoconférence, ce qui n'aurait pas permis de s'assurer de leur identité. Elle dit encore que le traducteur fourni par la société ASNP n'était pas à la hauteur de sa tâche et s'est contenté de faire un résumé 'à sa façon', que le constat effectué par le Bureau Véritas sur place en Iran n'a pas été contradictoire et qu'elle n'a jamais été invitée à assister au procès-verbal d'état des équipements livrés alors que le contrat prévoyait la présence des parties.

Considérant qu'il ressort du rappel dans la sentence de la procédure suivie, rappel non contesté par les parties, que (§202)le 5 mars 2009 l'arbitre et les parties ont tenu une conférence téléphonique au cours de laquelle les parties ont convenu de déposer une seule écriture, que (§203) par courrier du même jour l'arbitre a signifié aux parties un calendrier prévisionnel n°4, que (§205) par courriel du 20 mars 2009 les parties ont requis une extension de délai d'une semaine pour déposer leurs mémoires finaux, que (§209) l'arbitre a étendu au 1er avril 2009 le délai pour le dépôt des écritures finales, que (§210) les parties ont signifié à cette date leurs mémoires finaux à l'arbitre qui en a accusé réception le 7 avril 2009 en indiquant qu'à défaut d'objection des parties les pièces complémentaires versées jusqu'au 15 avril 2009 seraient reconnues comme valablement versées aux débats (§211), que par courrier du 21 avril 2009 la défenderesse (CMA) a soumis des observations suite au mémoire final de la demanderesse (§213), que le 27 avril 2009 l'arbitre a tenu une conférence téléphonique entre les parties durant laquelle la demanderesse s'est opposée au dépôt des ces observations (§214), que celle-ci par courriel du 28 avril 2009 a complété ses objections (§215) et que par courrier du même jour l'arbitre a pris acte de l'opposition de la demanderesse et conclu que 'faute d'accord des Parties sur la possibilité de répliquer au Mémoire Final de l'autre partie et afin d'assurer l'efficacité et le contrôle de la procédure, l'Arbitre Unique décide qu'il ne sera pas tenu compte de cette écriture complémentaire de la Défenderesse du 21 avril 2009"(§216);

Qu'aucune réplique aux mémoires finaux n'étant prévue par le calendrier prévisionnel largement discuté et amendé à la demande des parties, à défaut d'accord entre elles sur une telle réplique et alors qu'elles avaient déjà longuement débattu, l'arbitre unique à qui il appartient de contrôler la procédure, ainsi que le souligne la société ASNP, a, sans méconnaître le principe de la contradiction, mis fin aux débats qu'il estimait complets ;

Considérant, par ailleurs, que tout grief invoqué à l'encontre d'une sentence au titre de l'article 1502 du CPC doit, pour être recevable devant le juge de l'annulation, avoir été soulevé, autant qu'il est possible, devant le tribunal arbitral lui-même ;

Qu'en l'espèce si pour des raisons techniques l'audition des témoins a été conduite selon un procédé d'audioconférence et non de vidéoconférence, la société ASNP relève qu'à la fin de l'audience à la question posée par l'arbitre d'éventuels griefs à formuler le conseil de la société CMA s'est borné à répondre 'on ne fera des griefs qu'après la sentence'; qu'ainsi faute d'avoir protesté quant au déroulement de l'audition des témoins, que ce soit en raison de l'abandon de la vidéoconférence ou du manque de compétence du traducteur, d'ailleurs nullement démontrée, la société CMA est irrecevable à soulever ces griefs devant le juge du contrôle ;

Considérant en ce qui concerne le rapport d'inspection du Bureau Véritas qu'il n'est pas contesté que la société CMA bien que parfaitement informée des date et heure des opérations n'était pas représentée ; que cette absence lui est imputable, la seule circonstance qu'elle invoque d'un retard de son mandataire n'étant pas de nature à l'exonérer des conséquences de cette négligence qui lui incombe ; qu'au demeurant elle n'a pas fait au cours de la procédure d'arbitrage valoir de critiques sur le contenu de ce constat ;

Qu'enfin, s'agissant de la livraison des équipements, elle invoque ici vainement l'absence de procès-verbal contradictoire dès lors que ces livraisons sont bien antérieures à l'ouverture de la procédure arbitrale ;

Qu'ainsi le second moyen d'annulation est rejeté, comme le recours;

Sur la demande d'annulation de l'ordonnance d'exequatur:

Considérant que cette demande est sans objet dès lors qu'en application des articles 1507 et 1490 du CPC le rejet du recours en annulation confère l'exequatur à la sentence arbitrale ;

Sur les demandes de la société ASNP :

Considérant que la société ASNP ne démontre pas que la société CMA ait fait dégénérer en abus son droit d'agir en justice; qu'en conséquence sa demande en paiement de 38.621€ en réparation d'un préjudice financier causé par l'attitude dilatoire dont elle excipe et de 100.000€ de dommages-intérêts en réparation des préjudices divers découlant de cet abus prétendu d'agir en justice sont rejetés ;

Sur les demandes au titre de l'article 700 du CPC :

Considérant que la société CMA qui succombe et dont la demande à ce titre est rejeté paie à la société ASNP 15.000€ et supporte les dépens ;

PAR CES MOTIFS:

REJETTE le recours en annulation ;

CONDAMNE la société CHAUDRONNERIE MÉCANIQUE ARIÈGEOISE à payer à la société ADJOR SOFAL NEMONEH PARS 15.000€ en application de l'article 700 du CPC ;

REJETTE toute autre demande;

CONDAMNE la société CHAUDRONNERIE MÉCANIQUE ARIÈGEOISE aux dépens et admet la SCP Fisselier Chiloux Boulay, avoué, au bénéfice de l'article 699 du CPC.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT

R. FALIGAND J.F. PERIE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 09/22247
Date de la décision : 03/06/2010

Références :

Cour d'appel de Paris A1, arrêt n°09/22247 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-06-03;09.22247 ?
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