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02/06/2010 | FRANCE | N°08/20561

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 1, 02 juin 2010, 08/20561


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 1



ARRÊT DU 02 JUIN 2010



(n° , 09 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 08/20561



Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 Octobre 2008 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 06/16090





APPELANTS



EARL CHAMPAGNE [J] [U]

agissant poursuites et diligences en la personne de ses représe

ntants légaux

ayant son siège [Adresse 2]

[Localité 8]



Monsieur [K] [U]

demeurant [Adresse 4]

[Localité 8]



S.A.R.L. [K] [U]

agissant poursuites et diligences en la personne de ses ...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 1

ARRÊT DU 02 JUIN 2010

(n° , 09 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 08/20561

Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 Octobre 2008 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 06/16090

APPELANTS

EARL CHAMPAGNE [J] [U]

agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux

ayant son siège [Adresse 2]

[Localité 8]

Monsieur [K] [U]

demeurant [Adresse 4]

[Localité 8]

S.A.R.L. [K] [U]

agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux

ayant son siège [Adresse 4]

[Localité 8]

représentés par la SCP BERNABE - CHARDIN - CHEVILLER, avoués à la Cour

assistés de Me Claude COUTURIER, avocat au barreau de Troyes

plaidant pour la SCP COUTURIER - PLOTTOIX - VANGUEESRAELE

INTIMÉES

La SOCIÉTÉ CHAMPAGNE [U]

Prise en la personne de son représentant légal

ayant son siège [Adresse 5]

[Localité 3]

représentée par la SCP ROBLIN - CHAIX DE LAVARENE, avoués à la Cour

assistée de Me Christian HOLLIER-LAROUSSE, avocat au barreau de Paris, toque P 362

plaidant pour la société d'avocats HOLLIER - LAROUSSE & ASSOCIÉS

La SOCIETE MASAI

Prise en la personne de son représentant légal

ayant son siège [Adresse 1]

LUXEMBOURG (GRANDE DUCHE DU LUXEMBOURG)

dont le domicile est élu en l'étude SCP ROBLIN - CHAIX DE LAVARENE, avoués à la Cour

assistée de Me Christian HOLLIER-LAROUSSE, avocat au barreau de Paris, toque P 362

plaidant pour la société d'avocats HOLLIER - LAROUSSE & ASSOCIÉS

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 17 Mars 2010, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Didier PIMOULLE, Président

Madame Brigitte CHOKRON, Conseillère

Madame Anne-Marie GABER, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Melle Aurélie GESLIN

ARRÊT :- Contradictoire

- rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Didier PIMOULLE, président et par Mademoiselle Aurélie GESLIN, greffière à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

***

Vu l'appel interjeté le 29 octobre 2008 par l'EARL CHAMPAGNE [J] [U], [K] [U], la société [K] [U] (SARL), du jugement rendu le 3 octobre 2008 par le tribunal de grande instance de Paris dans le litige les opposant à la société CHAMPAGNE [U] (SAS) et à la société de droit luxembourgeois MASAI ;

Vu les dernières conclusions des appelants, signifiées le 27 février 2009 ;

Vu les ultimes écritures des sociétés intimées, signifiées le 26 mai 2009 ;

Vu l'ordonnance de clôture prononcée le 23 février 2010 ;

SUR CE, LA COUR,

Considérant qu'il est expressément renvoyé pour un plus ample exposé des faits de la cause et de la procédure au jugement déféré et aux écritures des parties ; qu'il suffit de rappeler que :

- la société CHAMPAGNE [U], qui précise venir aux droits de la maison de champagne [U], fondée en 1808, commercialise du vin de champagne sous le nom commercial [U] et sous la marque notoire [U],

- la société MASAI est titulaire, pour désigner notamment du vin de champagne, des marques suivantes, exploitées par la société CHAMPAGNE [U] :

* française semi-figurative n° 1 548 526 '[U] SOUVERAIN' déposée le 31 mai 1988 et renouvelée le 29 mai 1998,

*internationale semi-figurative n° 583 863 'CHAMPAGNE [U] REIMS' déposée le 21 février 1992,

* internationale semi-figurative n° 583 866 'BRUT MILLESIME CHAMPAGNE [U] REIMS' déposée le 21 février 1992,

- à l'appui de constats d'huissier de justice respectivement établis le 23 février 2004, les 7 et 10 mai 2004, le 6 juin 2006, les sociétés CHAMPAGNE [U] et MASAI font griefs à l'EARL CHAMPAGNE [J] [U], à [K] [U] et à la société [K] [U] de porter atteinte à leurs droits de marque, de nom commercial et de dénomination sociale en utilisant les dénominations 'CHAMPAGNE [J] [U]', 'CHAMPAGNE [U] [J]', 'CHAMPAGNE [K] [U]', '[K] [U]' pour commercialiser des vins de champagne, blancs de blanc, crémants de bourgogne et en réservant le nom de domaine www.[06].fr,

- c'est dans ces circonstances qu'elles ont introduit devant le tribunal de grande instance de Paris la présente instance en contrefaçon de marques, concurrence déloyale et parasitaire,

- les premiers juges ont rejeté la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée, dit qu'en commercialisant du champagne, des vins crémants ou blancs de blanc sous les dénominations '[J] [U]', '[K] [U]', 'CHAMPAGNE [J] [U]', 'CHAMPAGNE [K] [U]', en adoptant leurs dénominations sociales actuelles, en réservant, s'agissant la société CHAMPAGNE [J] [U], le nom de domaine www.[06].fr, les sociétés CHAMPAGNE [J] [U] et [K] [U] ont porté atteinte à la marque notoire '[U]' dont la société CHAMPAGNE [U] est titulaire, condamné en conséquence chacune de ces sociétés à payer la somme de 15 000 euros à titre de dommages-intérêts à la société CHAMPAGNE [U], interdit sous astreinte la poursuite des agissements illicites, rejeté le surplus des demandes,

- c'est le jugement déféré ;

Sur la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée,

Considérant que les appelants maintiennent devant la cour la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée attachée au jugement rendu par le tribunal de grande instance de Troyes le 22 août 2001, confirmé par arrêt de la cour d'appel de Reims du 7 avril 2003, par lequel la société LES VIGNOBLES [U] (dénommée à partir de 2002 la société CHAMPAGNE [U] ) a été déboutée de ses demandes en contrefaçon et en concurrence déloyale et parasitaire dirigées, suivant assignation du 26 décembre 1996, à l'encontre de [J] [U] et de [K] [U] ;

Qu'ils font à cet égard valoir que c'est pour échapper aux juridictions champenoises ayant déjà eu à se prononcer sur le litige, que les sociétés demanderesses ont créé artificiellement, en faisant établir les constats d'huissier de justice sur le réseau Internet, un lien de rattachement à la juridiction parisienne motif pris du lieu de production du dommage ;

Qu'ils estiment en outre qu'est indifférente la circonstance selon laquelle les frères [J] [U] et [K] [U], parties à la précédente instance en qualité de producteurs-récoltants de vins de champagne exercent désormais leur activité sous couvert respectivement de l'EARL CHAMPAGNE [J] [U] et de la société [K] [U] (SARL) au sein desquelles ils assument toutes les fonctions de contrôle et de direction ;

Mais considérant que la question de la compétence territoriale du tribunal de grande instance de Paris est sans utilité à ce stade de la procédure dès lors que le juge de la mise en état, saisi dans le cadre des attributions qui lui sont conférées à titre exclusif par l'article 771 du Code de procédure civile de l'exception soulevée de ce chef, l'a rejetée par ordonnance du 6 juillet 2007 ;

Qu'en ce qui concerne l'autorité de la chose jugée, elle n'opère, selon les dispositions de l'article 1351 du Code civil, qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement ; il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties et formées par elles et contre elles en la même qualité ;

Que force est de relever en l'espèce, que s'il apparaît, certes, que le tribunal de grande instance a été saisi de demandes en contrefaçon et en concurrence déloyale et parasitaire à raison de l'usage par les défendeurs de la dénomination '[U]'pour commercialiser des vins de champagne, la présente instance oppose des parties étrangères au litige tranché par cette juridiction en l'occurrence, la société MASAI d'une part, l'EARL CHAMPAGNE [J] [U] et la société [K] [U], personnalités juridiques distinctes des personnes physiques qui les animent, d'autre part, de sorte que, par confirmation du jugement entrepris, la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de chose jugée ne saurait prospérer ;

Sur le fond,

Sur l'atteinte à la marque notoire '[U]',

Considérant que la société CHAMPAGNE [U] soutient que l'usage par l'EARL CHAMPAGNE [J] [U] de la dénomination 'CHAMPAGNE [J] [U]', à titre de dénomination sociale, nom commercial, nom de domaine et marque ; ainsi que l'usage par [K] [U] et la société [K] [U] des dénominations 'CHAMPAGNE [K] [U]' et '[K] [U]' à titre de dénomination sociale, nom commercial et marque, pour commercialiser des vins de champagne, portent atteinte à la marque notoire '[U]' dont elle est propriétaire ;

Considérant en droit qu'il est disposé à l'article L. 713-5 du Code de la propriété intellectuelle que l'emploi d'une marque renommée pour des produits ou services non similaires à ceux désignés dans l'enregistrement engage la responsabilité de son auteur s'il est de nature à porter préjudice au propriétaire de la marque ou si cet emploi constitue une exploitation injustifiée de cette dernière .

Les dispositions de l'alinéa précédent sont applicables à l'emploi d'une marque notoirement connue au sens de l'article 6 bis de la convention de [Localité 7] pour la protection de la propriété industrielle ;

Qu'il est constant qu'en application de ce texte, une marque qui est connue d'une partie significative du public concerné par les produits et services qu'elle désigne, bénéficie d'une protection contre tout usage préjudiciable au propriétaire de la marque ou constitutif d'une exploitation injustifiée de cette dernière, que les produits ou services désignés par le signe second peuvent être indifféremment identiques, similaires, non similaires à ceux couverts par la marque invoquée ;

Que force est de relever toutefois que la société CHAMPAGNE [U] se borne à se prévaloir de la renommée de sa marque sans aucunement caractériser le préjudice que l'usage reproché aux appelants est susceptible de lui causer ni développer en quoi cet usage constitue une exploitation injustifiée de la marque ;

Que les appelants, pour leur part, ne contestent pas la notoriété de la marque, ne démentent pas davantage faire usage des signes querellés dans le commerce des vins de champagne, crémants de Bourgogne et blancs de blanc qu'ils produisent en tant que propriétaires -récoltants à [Localité 8] dans l'Aube mais soutiennent utiliser de bonne foi leur nom patronymique et prendre les précautions nécessaires pour éviter tout risque de confusion dans l'esprit de la clientèle ;

Qu'ils invoquent à leur bénéfice l'article L.713-6 du Code de la propriété intellectuelle aux termes duquel L'enregistrement d'une marque ne fait pas obstacle à l'utilisation du même signe ou d'un signe similaire comme dénomination sociale, nom commercial ou enseigne, lorsque cette utilisation est soit antérieure à l'enregistrement soit le fait d'un tiers de bonne foi employant son nom patronymique ...Toutefois, si cette utilisation porte atteinte à ses droits, le titulaire de l'enregistrement peut demander qu'elle soit limitée ou interdite ;

Considérant, ceci étant exposé, que la cour observe que l'EARL CHAMPAGNE [J] [U] est immatriculée sous cette dénomination depuis le 14 juin 1995 et la société [K] [U] depuis le 11 juin 2001, que [J] [U] et [K] [U] y exercent respectivement, en qualité de gérant, des fonctions de contrôle et de direction de sorte que, la mise en exergue de leur patronyme dans la dénomination sociale et dans le nom commercial de l'entreprise à laquelle ils s'identifient n'est pas critiquable sous réserve toutefois qu'elle soit exempte de tout risque de confusion au préjudice du propriétaire de la marque renommée '[U]' ;

Qu'elle relève à cet égard que les homonymies sont fréquentes en Champagne viticole aussi bien chez les producteurs-récoltants que chez les négociants et qu'il est d'usage, de manière à opérer une distinction entre des dénominations sociales, des noms commerciaux ou encore des enseignes recourant à des patronymes communs, de faire appel à des moyens tels l'adjonction du prénom du producteur et l'indication de la localisation géographique de la production ;

Qu'elle constate à l'examen des procès-verbaux versés aux débats que le nom de domaine www.[06].fr donne accès à des pages internet comportant la mention 'CHAMPAGNE [J] [U] 4, chem Chemineau 10110 POLISOT' et exposant des bouteilles revêtues d' étiquettes donnant à voir en caractères parfaitement apparents l'ensemble dénominatif '[J] [U]' au sein duquel les deux éléments sont inscrits dans la même police de caractères ; que le nom de domaine www.gourmetwarehouse.co.uk ouvre sur des pages internet comportant les mentions '[K] [U]' et que la seule page sur laquelle figure la dénomination 'R.[U]' est illustrée d'une bouteille habillée d'une étiquette 'CHAMPAGNE [K] [U]' ; que la saisie des termes 'CHAMPAGNE [U]' sur le moteur de recherche google donne à lire en premier lieu 'CHAMPAGNE [U], maison familiale à [Localité 9] depuis 1808 (...) " , et en second lieu 'CHAMPAGNE [J] [U] viticulteur à [Localité 8]...choisissez un vin de qualité élaboré par [J] [U]' ; que les étiquettes recouvrant les bouteilles de vin de champagne 'CHAMPAGNE [J] [U]' et 'CHAMPAGNE [K] [U]' portent l'indication 'propriétaire récoltant' et l'information 'élaboré par [J] [U] (ou [K] [U]) à [Localité 8] ;

Considérant qu'il résulte de ces éléments que l'emploi par les appelants du patronyme [U] est toujours assorti du prénom '[J]' ou '[K]' , dans le cadre d'une communication commerciale qui précise leur qualité de viticulteur ou de propriétaire récoltant, indique le lieu de la production et se contente de promettre un vin de qualité qu'aucun consommateur normalement avisé et averti ne saurait confondre avec les prestigieuses cuvées commercialisées par la maison rémoise de sorte que, n'est pas caractérisé un risque de confusion sur l'origine des produits concernés ou encore une captation parasitaire de la renommée de la marque '[U]', que n'est pas davantage établie, ni même alléguée, une quelconque circonstance de nature à avilir la marque ou à affaiblir son pouvoir distinctif ;

Que par voie de conséquence et par infirmation du jugement déféré, la demande tendant à voir interdire l'emploi du patronyme [U] motif pris de l'atteinte portée à la renommée de la marque '[U]' est dénuée de fondement ;

Sur la contrefaçon des marques appartenant à la société MASAI,

Considérant que la société MASAI soutient que l'usage par l'EARL CHAMPAGNE [J] [U] de la dénomination 'CHAMPAGNE [J] [U]', à titre de dénomination sociale, nom commercial, nom de domaine et marque, ainsi que l'usage par [K] [U] et la société [K] [U] des dénominations 'CHAMPAGNE [K] [U]' et '[K] [U]' à titre de dénomination sociale, nom commercial et marque, pour commercialiser des vins de champagne, constituent une contrefaçon des trois marques, précédemment citées, dont elle est propriétaire ;

Considérant qu'il s'infère des développements qui précèdent que la société MASAI n'est pas fondée, au regard des dispositions de l'article L.713-6, à faire grief aux appelants, en l'absence de toute mauvaise foi de leur part, de faire usage du patronyme '[U]' à titre de dénomination sociale et de nom commercial ;

Considérant que la société MASAI critique par ailleurs l'usage à titre de marque de ces dénominations ainsi que du signe semi-figuratif illustrant l'étiquette sous laquelle sont commercialisées les bouteilles 'CHAMPAGNE [J] [U]' ;

Considérant que ce dernier signe est représenté comme suit :

tandis que les trois marques invoquées se présentent respectivement comme suit :

* française semi-figurative n° 1 548 526 '[U] SOUVERAIN' :

*internationale semi-figurative n° 583 863 'CHAMPAGNE [U] REIMS':

* internationale semi-figurative n° 583 866 'BRUT MILLESIME CHAMPAGNE [U] REIMS' :

Considérant que les signes contestés n'étant pas la reproduction à l'identique de la marque première faute de la reproduire sans modification ni ajout en tous les éléments la composant, il convient, par application des dispositions de l'article L 713-3 du Code de la propriété intellectuelle, de rechercher s'il existe entre les signes un risque de confusion, au terme d'une appréciation globale de tous les facteurs pertinents du cas d'espèce fondée, eu égard à la similitude visuelle, phonétique et conceptuelle, sur l'impression d'ensemble produite par ces signes en tenant compte des éléments distinctifs et dominants ;

Or considérant que les signes verbaux 'CHAMPAGNE [J] [U]', 'CHAMPAGNE [K] [U]', '[K] [U]' diffèrent, au plan visuel, des marques semi-figuratives opposées caractérisées par la présence de quatre éléments figuratifs dominants constitués, de haut en bas, de la collerette, de l'emblème héraldique de part et d'autre de la lettre H, des volutes, du socle rectangulaire et d'un élément verbal dominant, pour être inscrit en gros caractères, représenté par le terme '[U]' ;

Qu'en effet les signes seconds sont à l'évidence dénués de tout élément figuratif ;

Que par ailleurs, la circonstance selon laquelle l'élément verbal '[U]' est précédé des prénoms [J] ou [K] suffit à distinguer les signes seconds, tant au plan visuel, qu'au plan auditif et au plan conceptuel des marques invoquées ;

Considérant qu'en ce qui concerne le signe semi-figuratif querellé 'CHAMPAGNE [J] [U]', ornant les étiquettes des bouteilles commercialisées par l'EARL CHAMPAGNE [J] [U], force est de relever que l'on n'y retrouve pas la collerette, l'emblème héraldique et le socle caractéristiques des marques premières, que les volutes y sont différentes, beaucoup plus épaisses que dans les marques opposées où elles sont très aériennes, que les éléments verbaux '[J]' et ' [U]' y sont inscrits côte à côte, dans une police identique, dans des conditions qui excluent toute prépondérance de l'élément verbal commun '[U]' ;

Qu'il s'infère de ces développements que le consommateur d'attention moyenne, normalement informé et raisonnablement avisé de la catégorie de produits concernés, ne serait pas fondé à confondre les signes en cause ou à les associer en regardant les signes seconds comme des déclinaisons des marques premières ;

Sur la concurrence déloyale et parasitaire,

Considérant qu'il résulte des développements qui précèdent que la société CHAMPAGNE [U] échoue à rapporter la preuve d'une mauvaise foi des appelants dans l'emploi de leur patronyme à titre de dénomination sociale, de nom commercial ou d'enseigne ; que par voie de conséquence, la prétendue atteinte au nom commercial et à la dénomination sociale '[U]' n'est pas caractérisée ;

Considérant qu'au soutien de sa demande en concurrence déloyale et parasitaire, la société CHAMPAGNE [U] incrimine en particulier l'étiquette précédemment évoquée sous laquelle sont commercialisées les bouteilles de vin de champagne 'CHAMPAGNE [J] [U]' ;

Or considérant qu'il a été relevé que le signe illustrant l'étiquette en cause est exempte de tout risque de confusion avec les trois marques précédemment invoquées sous lesquelles sont commercialisées les cuvées '[U]' dès lors qu'elle est très différente au plan figuratif et qu'elle est dotée de l'ensemble verbal '[J] [U]', où les deux éléments sont inscrits dans la même police, sous lequel sont portées les mentions 'propriétaire récoltant - élaboré par [J] [U] [Localité 8] [Localité 8]-FRANCE' ;

Qu'il importe à cet égard de rappeler que dans un courrier en date 20 février 1995, la société CHAMPAGNE [U] qui reprochait aux responsables de l'hypermarché LECLERC d'Aubenas (07) de mentionner sur un prospectus publicitaire 'Champagne [U] brut 49,90 Francs', faisait valoir que 's'il n'y a pas de ressemblance entre les deux bouteilles, en revanche la publicité de votre prospectus sur un produit d'appel est litigieuse et représente un grave préjudice pour notre image, créant une confusion d'identité dans l'esprit de notre clientèle traditionnelle . Elle aurait dû spécifier 'CHAMPAGNE [K] [U]' ;

Qu'il en ressort que la société CHAMPAGNE [U] reconnaissait l'absence de confusion entre les étiquettes respectives et que l'adjonction du prénom [K] au patronyme [U] suffisait à permettre de distinguer entre les produits concernés ;

Qu'elle est en conséquence mal venue d'invoquer un risque de confusion dès lors qu'il est constant que les parties n'ont pas modifié depuis le conditionnement de leurs produits et qu'il a déjà été relevé que les appelants prennent la précaution d'adjoindre systématiquement leur prénom au patronyme '[U]', d'indique leur qualité de propriétaire récoltant et de préciser le lieu de la production ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble des développements qui précèdent que le grief de concurrence déloyale et parasitaire n'est pas fondé ;

Sur la demande reconventionnelle en procédure abusive,

Considérant que le droit d'ester en justice n'est susceptible de dégénérer en abus ouvrant droit à réparation que s'il est exercé de mauvaise foi, par intention de nuire ou par légèreté blâmable équipollente au dol, toutes circonstances qui ne sont pas établies à la charge des sociétés CHAMPAGNE [U] et MASAI qui ont pu légitimement se méprendre sur l'étendue de leurs droits ; que la demande en dommages-intérêts formée de ce chef par les appelants doit être rejetée ;

PAR CES MOTIFS,

Infirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a écarté l'abus de procédure,

Statuant à nouveau,

Déboute les sociétés CHAMPAGNE [U] et MASAI de toutes leurs demandes,

Les condamne aux dépens de l'instance qui seront recouvrés, s'agissant de ceux afférents à la procédure d'appel, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile ainsi qu'à payer à chacun des appelants une indemnité de 5000 euros au titre des frais irrépétibles .

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 08/20561
Date de la décision : 02/06/2010

Références :

Cour d'appel de Paris I1, arrêt n°08/20561 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-06-02;08.20561 ?
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