RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 9
ARRÊT DU 26 Mai 2010
(n° , 9 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 08/10167
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 28 Février 2008 par le Conseil de Prud'hommes de PARIS - Section Commerce - RG n° 06/09507
APPELANTE
S.A. LA COQUE DE NACRE
[Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par la SELARL JOUY HUERRE PEREZ ET ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS, J109 substituée par Me Eddy ARNETON, avocat au barreau de PARIS
INTIMÉ
Monsieur [O] [F]
[Adresse 1]
[Localité 4]
comparant en personne, assisté de Me Emilie MERIDJEN, avocate au barreau de PARIS, P559
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 Avril 2010, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Anne DESMURE, Conseillère, chargée d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Geneviève LAMBLING, Présidente
Madame Anne DESMURE, Conseillère
Monsieur Benoît HOLLEAUX, Conseiller
GREFFIÈRE : Madame Corinne de SAINTE MARÉVILLE, lors des débats
ARRÊT :
- contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau code de procédure civile.
- signé par Madame Geneviève LAMBLING, Présidente et par Madame Corinne de SAINTE MARÉVILLE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
M. [F] a été engagé le 3 avril 1989 en qualité de chauffeur livreur par la société La Coque de nacre qui a pour activité la fabrication ainsi que l'importation et l'exportation de bijoux fantaisie.
La convention collective applicable est celle de la bijouterie, joaillerie, orfèvrerie et activités s'y rattachant.
Quatre avertissements ont été infligés à M. [F] entre le 27 juin et le 27 septembre 2006.
Le 6 octobre 2006, M. [F] a été convoqué à un entretien préalable à une éventuelle mesure de licenciement pour faute fixé au 18 octobre 2006 et mis à pied à titre conservatoire.
A la suite de l'entretien préalable et par lettre recommandée du 7 novembre 2006, l'employeur a notifié à M. [F] son licenciement pour faute grave.
Soutenant que ni les sanctions disciplinaires ni le licenciement n'étaient justifiés, et que son ancien employeur restait en outre redevable à son égard du paiement d'heures supplémentaires, d'une prime d'assiduité, d'une prime de bilan et d'un rappel de salaires, M. [F] a saisi le conseil de prud'hommes de Paris qui, par jugement du 28 février 2008, a :
- annulé les deux premiers avertissements,
- dit que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse et condamné la société La Coque de nacre à payer à M. [F]:
- 3 506 euros à titre d'indemnité de préavis,
- 350 euros u titre des congés payés afférents,
- 4 382 euros à titre d'indemnité de licenciement,
- condamné par ailleurs la société La Coque de nacre à payer à M. [F]:
- 15 072 euros au titre des heures supplémentaires,
- 1 507 eros de congés payés afférents,
- 1 250 euros au titre de la prime de bilan,
- 125 euros au titre des congés payés afférents,
- 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
La société La Coque de nacre a régulièrement interjeté appel.
Aux termes d'écritures déposées le 8 avril 2010 et soutenues oralement à l'audience du 12 avril 2010, auxquelles la Cour se réfère expressément en application de l'article 455 du code de procédure civile, elle demande à la Cour, au visa de l'article L.122-40 du code du travail et de l'article 1134 du code civil, de la recevoir en son appel, d'infirmer le jugement, de débouter M. [F] de l'intégralité de ses demandes et de le condamner à lui rembourser les sommes qu'il a perçues en exécution du jugement ainsi qu'à lui verser une indemnité de 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Intimé et appelant incident, M. [F] requiert la Cour, aux termes de conclusions déposées et soutenues oralement à l'audience du 12 avril 2010, auxquelles la Cour se réfère expressément en application de l'article 455 du code de procédure civile, de confirmer le jugement entrepris en ses condamnations, de l'infirmer en revanche en ce qu'il n'a pas fait droit à ses demandes et en conséquence, de :
- dire que le licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse et condamner la société La Coque de nacre à lui verser la somme de 30 000 euros de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- annuler les quatre sanctions disciplinaires et condamner la société La Coque de nacre à lui payer la somme de 5 000 euros pour sanctions injustifiées,
- condamner la société La Coque de nacre à lui payer la somme de 7 536 euros au titre des heures supplémentaires et celle de 753,60 euros de congés payés afférents, 17 080 euros à titre de rappel de salaires outre celle de 1 708 euros de congés payés afférents, la somme de 6 000 euros à titre de prime d'assiduité outre celle de 600 euros de congés payés afférents.
M. [F] demande également à la Cour d'ordonner à son ancien employeur de lui remettre, sous peine d'une astreinte de 50 euros par jour de retard, une attestation Pôle emploi et un certificat de travail conformes.
Il sollicite enfin la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
SUR CE, LA COUR
Sur les avertissements
Considérant qu'il résulte des pièces du débat que :
- M. [F] s'est vu infliger un premier avertissement le 27 juin 2006 à la suite d'un courrier de mécontentement d'un client, pour avoir tardé à établir la déclaration en douane et pour avoir commis des erreurs dans l'expédition des marchandises destinées à ce client,
- M. [F] a été sanctionné par un deuxième avertissement le 13 juillet 2006 pour avoir soutenu le 6 juillet précédent que Mme [L], directrice générale, était jalouse qu'il soit devenu 'patron' et pour l'avoir menacé de lui faire 'payer très cher l'envoi d'un avertissement',
- après avoir protesté, le 1er juillet 2006, en raison de ce que le bénéfice de la prime de bilan du 1er semestre 2006 lui était supprimé, M. [F] a, par lettre du 17 juillet suivant, contesté avoir commis les erreurs qui lui étaient imputées dans la lettre d'avertissement du 27 juin 2006, indiqué qu'il procédait aux expéditions 'pour satisfaire le PDG' et ajouté qu'il ferait désormais ce qui relevait de son contrat de travail,
- la société La Coque de nacre a notifié le 21 juillet un troisième avertissement à M. [F] et lui a intimé l'ordre de 'procéder à l'intégralité de vos tâches', 'que vous exécutez depuis des années sans aucune restriction' 'dans le cadre de l'exécution de votre contrat de travail', à savoir :
'[Localité 7] & [Localité 6] à l'import & à l'export (enlever et déposer les colis),
Export : mise en place des marchandises dans les colis avec vérifications par rapport aux factures et bons de livraisons, puis remplissage des documents administratifs,
Porter les colis à la Douane et/ou à la Poste,
Les livraisons clients (demandées par la Direction Commerciale et/ou le service préparation des commandes,
Toutes les courses demandées par les différents services de la société',
- la société La Coque de nacre a signifié le 27 septembre 2006 un quatrième avertissement à M. [F] pour 'accomplissement défectueux de vos tâches prévues à votre contrat de travail' en raison du refus réitéré de M. [F] d'effectuer l'intégralité des tâches qui 'vous sont confiées depuis plusieurs années' ;
Considérant ainsi que la société La Coque de nacre a infligé un premier avertissement à un salarié ayant une ancienneté dans l'entreprise de dix huit années qui n'étaient émaillées d'aucun incident à la suite d'un courrier de mécontentement d'un client se plaignant d'erreurs dans le traitement de sa commande lui ayant occasionné un coût de 1 415,13 euros, sans estimer devoir préalablement recueillir les observations de ce salarié, lequel a au demeurant contesté point par point avoir commis les erreurs qui lui étaient reprochées aux termes d'une correspondance datée du 17 juillet 2006 à laquelle la société La Coque de nacre n'a pas apporté de réponse, fût-ce au cours de l'instance judiciaire ;
Considérant également que les erreurs imputées à M. [F] concernent d'une part l'établissement de la déclaration en douane, d'autre part le contenu de l'expédition d'une commande; que M. [F], qui a été engagé en qualité de chauffeur livreur, fait valoir sans être contredit qu'il a toujours été rémunéré au titre de cette seule activité de chauffeur livreur; que tant l'activité de déclarant en douane que celle relevant de l'expédition excèdent très largement la 'charge de livrer des marchandises aux clients et, éventuellement, d'en encaisser le montant', correspondant à la définition du poste de chauffeur livreur par la convention collective ; que la société La Coque de nacre ne répond par ailleurs pas à M. [F] lorsque ce dernier fait valoir que la circonstance qu'il a rendu service en effectuant, en sus de ses fonctions de chauffeur livreur et sans rémunération complémentaire, des tâches de déclarant en douane jusqu'en juin 2004, puis ensuite en aidant le service des expéditions à compter de février 2005, n'a pas emporté modification de son contrat de travail; qu'elle n'allègue aucun élément dont pourrait être déduite la volonté non équivoque de M. [F] d'y consentir ; qu'elle ne pouvait dés lors intimer l'ordre à son salarié de continuer à effectuer des tâches qui n'étaient pas comprises dans son contrat de travail, pour lesquelles il n'était d'ailleurs pas rémunéré, et répondre à son refus par une sanction; que les deux avertissements des 21 juillet et 27 septembre 2006 sont donc illicites ;
Et considérant qu'à supposer établie et pour être regrettable, la menace, proférée hors la présence de tout témoin, dans un contexte de tension importante déclenchée par un avertissement brutal et injustifié joint à la suppression concomitante d'une prime, à l'encontre de la directrice générale, de 'lui faire payer cher l'avertissement' qu'elle venait de lui infliger, ne pouvait justifier un nouvel avertissement ;
Considérant que de ce qui précède, il résulte que M. [F] demande légitimement l'annulation des quatre avertissements que la société La Coque de nacre lui a infligés; que le jugement sera infirmé en ce qu'il a rejeté la demande d'annulation de deux derniers avertissements ;
Considérant qu'en multipliant les sanctions disciplinaires infondées à l'encontre de M. [F], la société La Coque de nacre a commis une faute justifiant sa condamnation à réparer le préjudice moral qu'elle lui a infligé; que la demande de M. [F] sera accueillie à hauteur de la somme de 1 200 euros ;
Sur la rupture
Considérant que la lettre de licenciement énonce quatre griefs ;
Considérant que l'employeur reproche d'abord à son salarié de refuser 'systématiquement', 'depuis de nombreux mois', ' d'exécuter les tâches qui (lui) ont été confiées par la Direction' et qu'il effectuait 'depuis de nombreuses années', d'avoir persisté dans ces agissements malgré deux lettres d'avertissement en date des 21 juillet et 27 septembre 2006 et d'avoir ainsi fait montre d'un 'comportement d'insubordination' ;
Mais considérant qu'en l'absence d'accord exprès du salarié à une modification du contrat de travail, ainsi qu'il a été précédemment jugé, la société La Coque de nacre ne saurait imputer à faute à M. [F] l'inexécution de tâches n'entrant pas dans ses fonctions de chauffeur livreur ;
Et considérant que la société La Coque de nacre ne fait état d'aucun incident susceptible d'illustrer un refus persistant de M. [F] d'effectuer ses tâches de chauffeur livreur et n'indique au demeurant pas même les tâches qu'elle reproche à M. [F] d'avoir refusé d'exécuter ;
Considérant que ce grief n'est donc pas justifié ;
Considérant que la société La Coque de nacre reproche en second lieu à M. [F] 'un comportement agressif et menaçant non seulement à l'encontre de votre hiérarchie, de vos collègues, mais également à l'égard de certains clients de la société' ; qu'elle indique que l'agressivité à l'égard de la directrice générale s'est poursuivie, que plusieurs salariées de la société se sont récemment plaintes de son comportement menaçant et ont peur de lui, qu'un client l'a averti de menaces téléphoniques reçues de lui dans l'hypothèse où il attesterait au profit de la société ;
Mais considérant que la société La Coque de nacre, qui a la charge de la preuve du comportement fautif qu'elle impute à M. [F], se prévaut en tout et pour tout d'une pièce adverse, à savoir la lettre adressée le 28 septembre 2006, à la suite du quatrième avertissement, par M. [F] à Mme [L] ;
Que la société La Coque de nacre allègue ainsi sans en justifier aucunement d'un comportement menaçant dont se seraient plaints des collègues de travail de M. [F], ou encore de ce que M. [F] aurait menacé téléphoniquement un client; que M. [F] verse en revanche au débat des attestations de collègues de travail ou de relations professionnelles témoignant de leurs bonnes relations avec lui ;
Qu'en s'exprimant en ces termes : 'Je vous signale qu'il n'y a aucune tension entre collègues, c'est vous qui êtes sous tension, car vous n'êtes pas correcte avec vos employés. Je m'entends bien avec tout le monde et je ne vois pas le problème!', M. [F] n'a pas fait montre d'agressivité et n'a fait que tenter de se défendre, en des termes certes maladroits, de l'accusation portée contre lui d'avoir de mauvaises relations avec ses collègues de travail ;
Que ce grief n'est ainsi pas non plus établi ;
Considérant que la société La Coque de nacre reproche ensuite à M. [F] un acte de concurrence déloyale; qu'elle fait valoir à cet effet que M. [F] a démarché un de ses clients pour lui demander de lui fournir des lots de bagues pour l'activité d'import/export en Algérie de la société qu'il exploite avec son épouse; qu'elle fait en outre grief à M. [F] d'avoir demandé au service 'préparation des commandes' de la société des duplicata de bons de livraison, ajoutant ne pas comprendre pour quelle raison et dans quel intérêt cette demande a été faite ;
Considérant que la société La Coque de nacre verse au débat deux témoignages ;
Considérant que Mlle [V] [M] atteste que, à la suite du problème d'expédition rencontré avec le client 'Tropical souvenir', M. [F] lui a demandé de 'lui rééditer les bons de livraison concernant ce client'; qu'elle ajoute avoir été étonnée par cette demande puisque M. [F] 'pour son travail d'expédition, n'a jamais vocation à avoir ce type de document en sa possession' ;
Considérant que la société La Coque de nacre n'est pas même en mesure d'expliciter le manquement fautif qu'elle impute ici à M. [F] puisqu'elle fait même l'aveu qu'elle ne comprend pas 'pour quelle raison et dans quel intérêt M. [F] a demandé les bons de livraison ;
Considérant que la société La Coque de nacre appuie le grief de concurrence déloyale sur le second témoignage, qui émane de M. [W], gérant de la Sarl SBM Bijoux, lequel a attesté le 5 octobre 2006 que 'M. [O] de la Bijouterie de [Localité 5].., client de la Sarl depuis le 26 novembre 2004, m'a rendu visite début septembre 2006 pour me demander de bien vouloir le contacter dans l'hypothèse de la réception de lots de bagues en plaqué or pour son activité d'import export avec l'Algérie' ;
Considérant cependant que M. [O] [F] conteste exercer une activité d'import export avec l'Algérie; qu'il verse au débat l'extrait Kbis de la société Bijouterie de [Localité 5], exploitée par son épouse, dont il résulte que ce fonds a pour activité le 'commerce de détail d'horlogerie, bijouterie, joaillerie et bijoux fantaisie en magasin; vente de bijoux fantaisie, vêtements, maroquinerie, montres et accessoires de ces articles en ambulant ; commerce de gros des articles vendus en ambulant' et fait valoir sans être contredit que l'activité de la société La Coque de nacre est celle d'un fabricant grossiste et importateur; que les pièces du débat, et plus particulièrement les factures et bons de livraison de marchandises commandées par la Bijouterie de [Localité 5] auprès de la société la Coque de nacre, établissent par ailleurs que la société La Coque de nacre était le fournisseur de la bijouterie de [Localité 5]; que M. [F] ajoute que le chiffre d'affaires de son ancien employeur avoisine les vingt millions d'euros tandis que dans le même temps, le chiffre d'affaires dégagé par la Bijouterie de [Localité 5] s'élevait à 10 534 euros en 2005 et à 16 715 euros en 2006 ; que la société La Coque de nacre ne dément pas le chiffre d'affaire que lui prête son ancien salarié ;
Considérant dés lors que la seule attestation de M. [W], lequel ne témoigne au demeurant pas d'une activité d'import export exercée par M. [F] qu'il aurait personnellement constatée, et n'est par ailleurs pas conforme aux exigences de l'article 202 du code de procédure civile puisqu'aucun document justifiant de l'identité de son auteur n'y est annexé, n'établit pas le fait de concurrence déloyale que la société reproche à son ancien salarié ;
Considérant que l'existence d'un manquement fautif n'est ainsi pas non plus établi ;
Considérant que dans la lettre de licenciement, l'employeur fait enfin grief à M. [F] d'avoir 'demandé à des membres du personnel étranger rentré dans l'entreprise depuis peu, des attestations en votre faveur alors que, comme vous le savez, ceux-ci ne maîtrisent pas la langue française' et d'avoir par son attitude créé une ambiance détestable dans l'entreprise ;
Que la société La Coque de nacre, sur laquelle pèse la charge de la preuve, verse au débat une attestation de Mme [U] née [T], écrite en langue chinoise et traduite par M. [G] [B] expert près la cour d'appel de Paris, libellée en ces termes 'Avant de quitter la société, M. [F] a demandé à moi et aux collègues de signer un courrier sans nous expliquer le contenu du courrier mais nous ne comprenons pas très bien le français. Ce n'est qu'après avoir signé le courrier que nous avons découvert que ce courrier a été rédigé dans son intérêt personnel et qu'en réalité, nous avons signé le courrier sans avoir compris le contenu du courrier' ainsi que l'attestation de Mlle [M] attestant qu'au mois d'octobre , plusieurs préparatrices de commande d'origine étrangère sont venues me voir affolées pour me demander le sens exact du document qu'elles avaient signé' ;
Mais considérant que la Cour constate que pour être d'origine étrangère, Mme [T] épouse [U] a néanmoins la nationalité française, ainsi que l'établit la photocopie du recto de sa carte d'identité jointe à son attestation; que la circonstance qu'elle maîtrise la langue chinoise ne signifie pas nécessairement qu'elle ne maîtrise pas la langue du pays dont elle a acquis la nationalité à une date qui reste ignorée de la Cour puisque le verso de sa carte d'identité n'est pas produit ;
Que l'inquiétude manifestée auprès de Mlle [M] par 'plusieurs préparatrices d'origine étrangère' n'a pas conduit les intéressées à revenir sur les termes de l'attestation signée par elles en faveur de M. [F] ;
Considérant que du tout, et observation faite que la société la Coque de nacre ne qualifie pas même la faute professionnelle qu'elle tire de ce que M. [F] a sollicité des attestations de bonne relation avec ses collègues, il résulte que l'existence d'un manquement fautif n'est en rien établi ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la société La Coque de nacre ne justifie d'aucun des quatre manquements fautifs imputés à M. [F] ; que, par suite, le licenciement de M. [F] ne procède pas d'une cause réelle et sérieuse ;
Que M. [F] sera donc accueilli en son appel incident et le jugement entrepris de ce chef infirmé ;
Considérant que le montant de l'indemnité compensatrice de préavis, de l'indemnité de congés payés afférents et de l'indemnité de licenciement allouées par le premier juge ne suscite pas de débat entre les parties ;
Que le jugement déféré sera donc ici confirmé ;
Considérant que M. [F] porte à la somme de 30 000 euros la demande d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse qu'il avait présentée devant le premier juge; que la société La Coque de nacre oppose sans pertinence l'irrecevabilité de cette prétention qu'elle qualifie de nouvelle en cause d'appel ;
Considérant que M. [F] avait une ancienneté de dix huit ans dans l'entreprise lors de son licenciement et était âgé de 41 ans; que sa rémunération mensuelle brute s'élevait à 1 753,16 euros; qu'il a bénéficié des allocations de chômage pendant deux années puis a travaillé au service de la bijouterie [Localité 5] ; que le préjudice matériel qui est résulté pour lui de la rupture de son contrat de travail joint à la brutalité dont a alors fait montre la société La Coque de nacre en le mettant à pied à titre conservatoire justifient que son préjudice soit indemnisé par l'allocation de la somme de 18 000 euros sur le fondement de l'article L.1235-3 du code du travail puisque la société la Coque de nacre employait habituellement plus de dix salariés lors du licenciement ;
Considérant qu'il convient d'ordonner le remboursement par les organismes concernés, parties au litige par l'effet de la loi, des indemnités de chômage qu'ils ont versés dans la limite de 6 mois ;
Considérant que M. [F] demande également à bon droit la remise d'une attestation pôle emploi et d'un certificat de travail conformes au présent arrêt; qu'il n'y a en revanche pas lieu d'assortir cette injonction d'une mesure d'astreinte ;
Sur les heures supplémentaires
Considérant que M. [F], qui a saisi le conseil de prud'hommes le 21 août 2006, s'est prévalu pour la première fois le 12 décembre 2006 de ce qu'il avait effectué des heures supplémentaires qui n'avaient pas été rémunérées et a réclamé à ce titre la condamnation de la société la Coque de nacre au paiement d'une somme de 15 072 euros ; que le conseil de prud'hommes a fait droit à cette prétention; que M. [F] demande la confirmation de cette condamnation tout en expliquant que son salaire horaire était de 12,56 euros et que son ancien employeur est redevable à ce titre de la somme de 7 536 euros outre 753,60 euros de congés payés afférents, et en demandant sa condamnation au paiement de ces sommes ;
Considérant que M. [F], auquel incombe la charge d'étayer sa prétention, se prévaut des attestations de deux de ses anciens collègues lesquels témoignent, pour le premier, de ce que 'M. [F] pendant un certain nombre d'années a procédé à l'ouverture du magasin sans aucun incident' et le second 'être témoin depuis plus de cinq ans du seul employé présent tous les jours dans le magasin juste avant mon arrivée, autrement dit M. [F], entre 7 h et 7h 30" ;
Mais considérant qu'en cela, ces attestations n'étayent pas l'allégation d'heures supplémentaires effectuées par M. [F] ;
Considérant que la demande de M. [F] sera donc rejetée et le jugement déféré sera infirmé de ce chef ;
Sur la prime de bilan
Considérant que M. [F] réclame à ce titre le paiement de la somme de 1 250 euros, outre celle de 125 euros de congés payés afférents ;
Que, pour s'opposer à cette demande, la société La Coque de nacre invoque de nombreuses absences de M. [F] au cours du premier semestre 2006 ainsi que ses erreurs dans la gestion du dossier de la société Tropical souvenirs et excipe de ce que cette prime présente un caractère exceptionnel;
Mais considérant que M. [F] justifie de ce que, nonobstant des arrêts de travail pour maladie, il a néanmoins perçu sa prime de bilan les années précédentes et l'inspection du travail rappelait à la société La Coque de nacre, par lettres des 3 août et 28 septembre 2006, les dispositions de l'article L.13331-2 du code du travail prohibant les sanctions pécuniaires ;
Qu'en conséquence de ce qui précède, et en l'absence de discussion sur le quantum de la demande, la demande de M. [F] sera accueillie et le jugement confirmé en ce qu'il a accueilli cette prétention ;
Sur la prime d'assiduité
Considérant que M. [F] réclame le paiement à ce titre de la somme de 6 000 euros outre celle de 600 euros de congés payés afférents ;
Qu'en défense, la société La Coque de nacre fait valoir que le service de M. [F] ne bénéficie pas d'une telle prime et produit à cet effet au débat une attestation de la société d'expertise comptable ;
Que M.[F] ne fait pas la preuve contraire ;
Que sa demande sera par conséquent rejetée et le jugement confirmé de ce chef ;
Sur le rappel de salaires
Considérant qu'au soutien de sa demande, M. [F] fait valoir qu'en sus de ses fonctions de chauffeur livreur, il a accompli les fonctions de déclarant en douane d'août 2001 à juin 2004, qu'aux termes de l'avertissement du 27 juin 2006, il lui a été reproché d'avoir tardé à établir une déclaration en douane, qu'il faisait toujours partie du service douanes en 2006, qu'il occupait ainsi les mêmes fonctions que M. [S], qu'il réclame donc légitimement un rappel de salaire sur le fondement du principe 'à travail égal, salaire égal', soit la somme de 17 080 euros nets , correspondant à 488 euros nets par mois pendant 35 mois, outre la somme de 1 708 euros à titre de congés payés afférents ;
Que pour combattre cette demande, la société la Coque de nacre répond en substance que M. [F] ne peut 'raisonnablement' soutenir avoir effectué les mêmes fonctions que M. [S], qui a reçu une formation spécifique à cet effet ;
Mais considérant qu'il résulte des plannings établis par la société que M. [F] a fait partie du service douanes, aux côtés de M. [K], ce dont il suit que l'employeur ne saurait opposer une différence de formation pour justifier d'une différence de traitement de M. [F] par rapport à un autre salarié qui exerçait les mêmes fonctions ;
Considérant en conséquence que M. [F] prétend légitiment, sur le fondement de l'adage 'à travail égal salaire égal', au paiement d'une rémunération d'un montant correspondant à celle de M. [S] ;
Considérant que la demande de rappel de salaires sera donc accueillie et le jugement déféré infirmé en ce qu'il a rejeté ce chef de demande ;
Sur l'article 700 du code de procédure civile
Considérant que le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a condamné la société La Coque de nacre à payer à M. [F] la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile; que M. [F] sera indemnisé de ses frais irrépétibles en cause d'appel par l'allocation de la somme de 1 500 euros et la société La Coque de nacre déboutée de sa prétention sur le même fondement juridique.
PAR CES MOTIFS
CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il a annulé les deux avertissements infligés à M. [F] les 27 juin et 13 juillet 2006, en ce qu'il a condamné la société La Coque de nacre à lui verser la somme de 3 506 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre celle de 350 euros au titre des congés payés afférents, la somme de 4 382 euros à titre d'indemnité de licenciement, celle de 1 250 euros au titre de la prime de bilan outre celle de 125 euros de congés payés afférents, et la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et en ce qu'il a rejeté la demande en paiement de la prime d'assiduité et la demande formulée au titre des congés payés afférents,
L'INFIRMANT pour le surplus, statuant à nouveau et y ajoutant :
DIT que le licenciement de M. [F] ne procède pas d'une cause réelle et sérieuse,
CONDAMNE en conséquence la SAS La Coque de nacre à payer à M. [F] la somme de 18 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, la somme de 17 080 euros à titre de rappel de salaire et celle de 1 708 euros de congés payés afférents, celle enfin de 1 500 euros en indemnisation de ses frais irrépétibles en cause d'appel,
ORDONNE le remboursement par la SAS La Coque de Nacre des indemnités de chômage versées à M. [F] dans la limite de 6 mois,
DÉBOUTE M. [F] de sa demande en paiement d'heures supplémentaires,
DÉBOUTE la SAS La Coque de nacre de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE la SAS La Coque de nacre aux dépens d'appel.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE