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19/05/2010 | FRANCE | N°08/12300

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 4, 19 mai 2010, 08/12300


Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 4



ARRET DU 19 MAI 2010



(n° 124 , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 08/12300



Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 Mai 2008

Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2006085498





APPELANTE



S.A. CHRISTIAN DIOR COUTURE

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux

[Adresse 2]

[Localité 5]



représentée par la SCP HARDOUIN, avoués à la Cour

assistée de Me ESCANDE Michel-Paul, avocat au barreau de PARIS - toque R 266

plaidant pour la SELARL MP ESCANDE, a...

Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 4

ARRET DU 19 MAI 2010

(n° 124 , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 08/12300

Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 Mai 2008

Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2006085498

APPELANTE

S.A. CHRISTIAN DIOR COUTURE

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux

[Adresse 2]

[Localité 5]

représentée par la SCP HARDOUIN, avoués à la Cour

assistée de Me ESCANDE Michel-Paul, avocat au barreau de PARIS - toque R 266

plaidant pour la SELARL MP ESCANDE, avocat

INTIMEES

Société de droit italien CLARA IDEE IN ARGENTO DI CASTELLUCCI CLARA

agissant poursuites et diligences de son représentant légal

[Adresse 8]

[Adresse 8]

[Localité 3] - ITALIE

représentée par la SCP ROBLIN - CHAIX DE LAVARENE, avoués à la Cour

assistée de Me DAVENE Jean-François, avocat au barreau de PARIS - toque P314

plaidant pour la SCP WENNER, avocat

S.A.R.L. AMBROSIA

agissant poursuites et diligences de son représentant légal

[Adresse 6]

[Localité 4]

représentée par la SCP BOMMART-FORSTER - FROMANTIN, avoués à la Cour

assistée de Me BENEZRA Philippe, avocat au barreau de PARIS - toque C380

plaidant pour la société SCP BENEZRA Philippe, avocat

S.A.R.L. TERENGA exerçant sous l'enseigne SENSO

agissant poursuites et diligences de son représentant légal

[Adresse 1]

[Localité 7]

représentée par la SCP BASKAL - CHALUT-NATAL, avoués à la Cour

assistée de Me HOFFMAN Emmanuelle, avocat au barreau de PARIS - toque C 610

plaidant pour la SELARL HOFFMAN, avocat

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 6 avril 2010, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur LEFEVRE Président et Monsieur ROCHE, conseiller.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. LE FEVRE, président

M. ROCHE, conseiller

M.VERT, conseiller

Greffier lors des débats : Mme CHOLLET

ARRET

- contradictoire

- prononcé publiquement par M. LE FEVRE, président

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. LE FEVRE, président et Mme CHOLLET, greffier.

LA COUR,

Vu le jugement du Tribunal de Commerce de PARIS du 22 mai 2008 qui a débouté la SA CHRISTIAN DIOR COUTURE de ses demandes, notamment de dommages-intérêts, formulées à l'encontre de la SARL TERENGA, exploitant une boutique de bijouterie à SAINT TROPEZ sous l'enseigne SENSO et de ses fournisseurs la SARL AMBROSIA et la société de droit italien CLARA IDEE IN ARGENTO DI CASTELLUCCI CLARA, ci-après CLARA, auxquelles elle reprochait des actes de concurrence déloyale et parasitisme, a débouté les défendeurs de leurs demandes de dommages-intérêts, leur a accordé à chacune 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile et ordonné l'exécution provisoire ;

Vu l'appel de la SA CHRISTIAN DIOR COUTURE et ses conclusions du 8 mars 2010 par lesquelles elle demande notamment à la Cour d'infirmer le jugement ; interdire sous astreinte à la société TERENGA et à ses fournisseurs les sociétés AMBROSIA et CLARA de fabriquer, d'offrir à la vente ou de vendre tout bijou reproduisant les caractéristiques des lignes de bijoux 'GWENDOLINE', 'CERISE', 'MINI MILLY', 'GRI GRI' et 'COEUR LEGER'; ordonner la confiscation aux fins de destruction des bijoux litigieux en possession des intimées ; condamner ces dernières à lui payer la somme de 100 000 € de dommages-intérêts à titre provisionnel et désigner un expert pour évaluer son préjudice commercial ;

ordonner la publication de l'arrêt dans cinq journaux ou revues, et réclame 15 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Vu les conclusions du 16 mars 2010 de la société TERENGA qui demande à la Cour de prononcer la nullité des opérations de constat diligentées par la société CHRISTIAN DIOR; débouter cette dernière ; la condamner à lui payer 10 000 € pour procédure abusive et

15 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ; ordonner l'insertion de l'arrêt dans deux journaux ; 'en tout état de cause', - en fait subsidiairement - dire que les sociétés CLARA et AMBROSIA devront la garantir ;

Vu les conclusions du 30 décembre 2009 de la société AMBROSIA qui demande à la Cour de débouter la société CHRISTIAN DIOR COUTURE de toutes ses demandes ; la condamner à lui payer 15 000 € de dommages-intérêts et 5 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Considérant que la société TERENGA demande la nullité des opérations de constat au motif qu'elles ont été ordonnées par le président du Tribunal de Grande Instance de DRAGUIGNAN alors qu'elles auraient prétendument dû l'être par le président du Tribunal de Commerce de SAINT TROPEZ ;

Mais considérant que l'article 812 du Code de procédure civile donne une compétence générale au président du Tribunal de Grande Instance, en matière d'ordonnance sur requête; que la société TERENGA rappelle elle-même que l'ordonnance du 28 juillet 2006 ayant autorisé les opérations de constat dans sa boutique à l'enseigne SENSO a été rendue au visa de l'article 145 du Code de procédure civile et donc 'avant tout procès' ; qu'aucun juge n'était saisi d'un quelconque procès et qu'il se pouvait très bien à ce stade qu'il n'y ait jamais de procès ; que la compétence du président du Tribunal de Grande Instance agissant en application des articles 812 et 145 du Code de procédure civile ne saurait être limitée par la compétence du juge du fond dans le cadre d'un procès futur et éventuel ; que ceci ne résulte ni d'un texte, ni de la logique procédurale, ceci d'autant moins que des divergences peuvent apparaître dans le cadre du procès futur sur la question de la compétence ; que dès lors que le président du Tribunal de Grande Instance est compétent ratione loci quant au lieu d'exécution des mesures d'instruction, il ne convient pas de traiter de manière non contradictoire de problèmes de compétence ; qu'il n'est donc pas pertinent de lier la compétence avant tout procès à celle d'un supposé futur juge du fond ; que la société TERENGA sera déboutée de sa demande d'annulation des opérations de constat ;

Considérant sur le fond que CHRISTIAN DIOR soutient que la commercialisation en France par la société TERENGA et ses fournisseurs AMBROSIA et CLARA de bijoux 'imitant' ses 'lignes' de bijoux créées et commercialisées à grand renfort de publicité 'constitue des actes de parasitisme' ;

Mais considérant qu'elle ne prétend pas que les prétendues 'imitations' soient des contrefaçons ; que les thèmes de ses lignes de bijoux tels que la rose, symbole aussi antique qu'universel, le muguet, la cerise, sont utilisés par de nombreux joailliers ainsi que cela résulte notamment des tableaux photographiques comparatifs versés aux débats par TERENGA ; que CHRISTIAN DIOR n'invoque que le parasitisme résultant de l'imitation de ses bijoux ou du fait que des bijoux de la boutique SENSO s'en inspireraient ou reproduiraient leurs caractéristiques essentielles ; qu'elle ne conteste pas la constatation du Tribunal selon laquelle l'examen des pièces 'en deux dimensions', en fait des photographies, fait ressortir des différences qui ne peuvent entraîner un risque de confusion mais se réfère à une définition, ne résultant ni d'un texte ni de la jurisprudence mais de l'opinion d'un professeur selon laquelle 'quiconque à titre lucratif et de façon injustifiée s'inspire sensiblement ou copie sans nécessité absolue une valeur économique d'autrui,

individualisée et procurant un avantage concurrentiel, fruit d'un effort intellectuel et d'investissements commet un agissement parasitaire fautif car cet acte, contraire aux usages du commerce, notamment en ce qu'il rompt l'égalité entre les divers intervenants, même non concurrents et sans risque de confusion, fausse le jeu normal et provoque ainsi un trouble commercial' ;

Mais considérant que la Cour, qui doit statuer in concreto en considération des éléments du litige et qui en outre, ne peut adopter des motifs qui se contredisent, ne saurait se satisfaire de telles abstractions et contradictions ; que la société CHRISTIAN DIOR ne dit pas comment il pourrait y avoir rupture d'une 'égalité', - sans qu'on sache l'égalité devant quoi - entre les divers 'intervenants' et un 'avantage concurrentiel' dès lors que lesdits intervenants ne sont pas concurrents et qu'il n'y a pas de risque de confusion, pas plus qu'elle ne dit quel 'jeu normal' serait faussé - puisqu'il ne s'agit pas de concurrence - ni quelle pourrait être la nature du 'trouble commercial' ainsi généré ;

Considérant que tout parasite, commercial ou non vit au détriment de celui qu'il parasite et lui cause donc nécessairement un dommage ; que le dommage est un élément constitutif de tout type de parasitisme ; que cela résulte d'ailleurs de l'avis de la Cour de cassation cité par l'appelante elle-même selon lequel la 'captation parasitaire' doit résulter d'une 'imitation fautive et dommageable' ; que toute indemnisation sur le fondement de l'article 1382 du code civil invoqué par l'appelante suppose d'ailleurs non seulement une faute mais un préjudice en lien de causalité avec celle-ci ;

Considérant que la société CHRISTIAN DIOR soutient, en ne fournissant d'ailleurs à l'appui de son affirmation que l'attestation d'une de ses salariés, que la vente des bagues MILLY LA FORET/CERISE lui a permis de réaliser, de 2001 à 2006, un chiffre d'affaires de 89 000 € en France et 175 000 € dans le monde, ces chiffres étant respectivement de

419 000 € et 1 222 000 € pour les bijoux GRI GRI, MUGUET, 945 000 € et 2 608 000 € pour les bijoux GWENDOLINE, 553 000 € et 1 337 000 € pour les bijoux COEUR LEGER; mais qu'elle ne prouve ni même n'allègue que ce 'succès commercial' ait été en quoi que ce soit affecté par des actes de TERENGA ; que celle-ci fait valoir qu'il ressort des opérations de constat que chaque bijou litigieux était présent en un, deux ou trois exemplaires ; que ladite boutique est de taille réduite, ouverte seulement les mois d'été ; qu'elle propose des milliers de références et se contente généralement de commander un ou deux exemplaires de chacun des modèles acquis auprès de ses fournisseurs ; qu'AMBROSIA fait valoir que les prix de vente ne sont pas comparables ; que la société CHRISTIAN DIOR reconnaît l'absence de détournement de clientèle faute de rapport de concurrence mais déclare, de manière inexacte et contraire aux règles de la responsabilité civile que la 'valeur économique' générée par ses investissements suffit à justifier la 'sanction'de l'atteinte 'susceptible de lui être portée' ; qu'elle fait ainsi l'aveu judiciaire du caractère éventuel et donc non indemnisable de son prétendu préjudice ;

Considérant que la volonté de se placer dans le 'sillage'du parasité est aussi un élément constitutif du parasitisme économique ; qu'une telle volonté n'est pas démontrée en l'espèce, TERENGA faisant valoir qu'elle n'a pas présenté les bijoux litigieux les uns à côté des autres, mais au sein d'une gamme très large de bijoux ne présentant aucune similarité avec ceux-ci ;

Considérant que les mesures de confiscation aux fins de destructions demandées, portant une atteinte directe aux droits de propriété et à la liberté de commerce, ne peuvent être justifiées, sauf texte spécial, qu'en cas d'illicité de la possession ou de la fabrication telle que celle résultant de la contrefaçon, non invoquée en l'espèce ; que l'appelante sera déboutée de ce chef ;

Considérant que la Cour se réfère pour le surplus aux motifs non contraires du Tribunal ;

qu'il y a lieu en définitive de confirmer entièrement le jugement ;

Considérant qu'il n'est pas établi que les intimées aient subi du fait de la procédure un préjudice distinct de l'engagement de frais irrépétibles ; qu'il est équitable de leur accorder ce qu'elles demandent à ce dernier titre ;

Considérant que la Cour estime qu'il n'est pas utile d'ordonner la publication du présent arrêt ;

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement entrepris.

Condamne la SA CHRISTIAN DIOR COUTURE à payer, en application de l'article 700 du Code de procédure civile, les sommes supplémentaires de 15 000 € à la SARL TERENGA et de 5 000 € à la SARL AMBROSIA.

Déboute les parties de leurs autres demandes.

Met à la charge de l'appelante les dépens d'appel qui seront recouvrés selon les dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 08/12300
Date de la décision : 19/05/2010

Références :

Cour d'appel de Paris I4, arrêt n°08/12300 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-05-19;08.12300 ?
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