RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 9
ARRÊT DU 14 Avril 2010
(n° , 4 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 08/09479
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 07 Mai 2008 par le Conseil de Prud'hommes de CRETEIL - RG n° 06/01485
APPELANTE
SOCIÉTÉ LAMY VENANT AUX DROITS ET OBLIGATIONS DE LA SOCIÉTÉ GESTRIM
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Me André JOULIN, avocat au barreau de PARIS, E1135 substitué par Me Jean-Christophe LESAGE-BLONDELET, avocat au barreau de PARIS, E1135
INTIMÉE
Madame [O] [B]
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée par Me Laurent MEILLET, avocat au barreau de PARIS, G847 substitué par Me Anne PONCY D'HERBES, avocate au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 08 Mars 2010, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Benoît HOLLEAUX, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Geneviève LAMBLING, Présidente
Madame Anne DESMURE, Conseillère
Monsieur Benoît HOLLEAUX, Conseiller
GREFFIÈRE : Madame Corinne de SAINTE MARÉVILLE, lors des débats
ARRÊT :
- contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau code de procédure civile.
- signé par Madame Geneviève LAMBLING, Présidente et par Madame Corinne de SAINTE MARÉVILLE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Vu le jugement du Conseil de prud'hommes de CRETEIL rendu en formation de départage le 11 avril 2008 ayant condamné la SA GESTRIM à payer à Mme [O] [B] les sommes de 20 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 1000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.
Vu la déclaration d'appel de LA SA LAMY, venant aux droits de la SA GESTRIM, reçue au greffe de la Cour le 21 juillet 2008.
Vu les écritures régulièrement communiquées et oralement soutenues à l'audience du 8 mars 2010, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens de la SA LAMY qui demande à la Cour d'infirmer le jugement entrepris et de débouter Mme [O] [B] de toutes ses demandes.
Vu les écritures régulièrement communiquées et oralement soutenues à l'audience du 8 mars 2010, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens de Mme [O] [B] qui demande à la Cour de confirmer la décision déférée et de condamner la SA LAMY à lui régler la somme de 2000 euros pour appel abusif ainsi que celle de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA COUR
Mme [O] [B] a été recrutée par la SNC CABINET [G] en contrat de travail à durée indéterminée à temps plein du 1er mars 1993, en qualité d'hôtesse standardiste / Niveau II ' Coefficient 225 de la Convention Collective Nationale de l'immobilier, moyennant une rémunération brute mensuelle de 8 666,67 francs (1 323,15 euros) et le bénéfice d'un 13ème mois.
Dans le dernier état de la relation contractuelle de travail, Mme [O] [B] percevait une rémunération brute mensuelle de 1 807,87 euros.
Par lettre du 28 avril 2006, la SA GESTRIM a convoqué Mme [O] [B] à un entretien préalable prévu le 10 mai suivant, avant de lui notifier le 22 mai 2006 son licenciement pour faute reposant sur les motifs suivants :
' « refus répété depuis le 27 mars 2006 de rejoindre (son) nouveau lieu de travail ' à' [Localité 5] » ;
' « (son refus) d'exécuter certaines tâches essentielles entrant dans (ses) attributions » en invoquant « un prétendu harcèlement ».
Sur la demande indemnitaire au titre du licenciement
La SA LAMY considère que Mme [O] [B] a retrouvé ses fonctions de secrétaire de copropriété à l'issue de son congé maladie fin janvier 2006, que le fait de ne plus être rattachée à sa collègue Mme [H] (gestionnaire de copropriété) ne peut s'analyser en une modification de ses attributions que, contrairement à ce que prétend Mme [O] [B], il n'y a eu aucune tentative de sa part de la muter disciplinairement de [Localité 6] à [Localité 5] puisque ce simple changement d'affectation avait pour seule finalité de mettre un terme au conflit l'opposant à Mme [H] qu'elle accusait de harcèlement moral à son égard, qu'en sa qualité d'employeur, cette décision s'imposait en application de l'article L.1152-4 du code du travail étant indiqué que l'agence de [Localité 5] est distante de 4 kilomètres de celle de [Localité 6], que le refus réitéré de Mme [O] [B] de rejoindre sa nouvelle affectation était fautif (même poste de travail, tâches et rémunération inchangées), et que pareille attitude de la salariée ne pouvait que conduire à son licenciement pour faute pleinement justifié.
Mme [O] [B] répond que sa mutation à [Localité 5] constituait bien, au sens des dispositions de l'article L.1331-1 du code du travail, une sanction disciplinaire illicite en raison du non respect par l'employeur de la procédure légale, que dans les faits la SA GESTRIM a choisi de l'éloigner de Mme [H] en la sanctionnant par un changement d'affectation de [Localité 6] à [Localité 5] qui équivalait à une « mise au placard », qu'en réalité elle n'avait pas retrouvé à son retour de congé maladie fin janvier 2006 l'intégralité de ses attributions, et que pareille mutation présentait un caractère discriminatoire dans la mesure où l'employeur devait faire cesser les agissements de harcèlement moral de Mme [H].
La lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige , vise deux griefs distincts : le premier lié au refus réitéré de Mme [O] [B] de rejoindre sa nouvelle affectation à [Localité 5], et le deuxième portant plus généralement sur son refus d'exécuter les tâches essentielles entrant dans ses attributions de secrétaire de copropriétés (« Vous avez ainsi cessé de répondre au téléphone vous coupant de tout contact avec notre clientèle . Cette situation a entrainéun grave dysfonctionnement au sein de notre cabinet puisque ne connaissant plus les problèmes existants au sein des résidences, vous étiez dans l'impossibilité de passer les ordres de service nécessaires »).
L'article L.1331-1 du code du travail dispose que « constitue une sanction toute mesure, autre que les observations verbales, prise par l'employeur à la suite d'un agissement du salarié considéré par l'employeur comme fautif, que cette mesure soit de nature à affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l'entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération ».
Après son retour de congé maladie fin janvier 2006, Mme [O] [B] a adressé à son employeur deux courriers datés des 15 et 16 février 2006 dans lesquels elle faisait part des difficultés relationnelles rencontrées avec Mme [H], sa supérieure hiérarchique directe (organigramme de l'entreprise, Mmes [H] et [B] affectées au service copropriété, situé au siège social à [Localité 6]).
Dans une lettre du 20 mars 2006, la SA GESTRIM a répondu à Mme [O] [B] en ces termes : « afin de mettre un terme aux difficultés que vous rencontrez avec Madame [H] , votre supérieur hiérarchique , nous vous informons que nous avons décidé de vous affecter, à compter du 1er avril 2006, sur notre site sis à [Localité 5] ».
La décision de muter Mme [O] [B] (de [Localité 6] à [Localité 5]) ne constituait donc pas une mesure disciplinaire, la SA GESTRIM s'étant exclusivement déterminée dans l'intérêt du service pour mettre un terme à une situation conflictuelle préjudiciable au bon fonctionnement de l'entreprise, ce qu'elle pouvait et même devait faire dans le cadre de son pouvoir de direction en application des dispositions de l'article L.1152-4 du code du travail et, plus généralement, en vertu de son obligation de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité de ses salariés.
Cette nouvelle affectation se faisait sur un poste identique à celui jusque-là occupé par l'intimée : mêmes attributions, niveau de responsabilité inchangé, rémunération similaire pour une qualification professionnelle de secrétaire de copropriétés.
La salariée ne pouvait pas ainsi refuser cette mutation géographique, dans l'intérêt du service, à [Localité 5], commune distante de seulement quelques kilomètres de [Localité 6], ce qu'elle indiquait pourtant à la SA GESTRIM par courrier du 27 mars 2006 (« je suis au regret de vous informer que je n'accepte pas cette mutation sanction qui constitue une mesure discriminatoire »), malgré l'ultime réponse de cette dernière le 7 avril 2006 : « nous tenons à vous rappeler que cette affectation ne constitue en aucune manière une modification de votre contrat de travail ni une mutation sanction ainsi que vous l'affirmez ».
Au surplus, Mme [O] [B] ne conteste pas le 2ème grief plus général relatif à son refus « d'exécuter certaines tâches essentielles entrant dans (ses) attributions ».
Le licenciement pour faute de Mme [O] [B] était donc pleinement justifié.
La décision déférée sera en conséquence infirmée en ce qu'elle a jugé sans cause réelle et sérieuse le licenciement pour faute de Mme [O] [B] par la SA GESTRIM, aux droits de laquelle se trouve la SA LAMY.
Mme [O] [B] sera en conséquence déboutée de ses demandes indemnitaires pour licenciement injustifié, appel abusif et application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. Les dépens de première instance et d'appel seront laissés à sa charge.
PAR CES MOTIFS
La Cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire et mis à disposition au greffe.
Infirme le jugement entrepris,
Statuant à nouveau :
DIT et juge que repose sur une cause réelle et sérieuse le licenciement pour faute de Mme [O] [B] par la SA GESTRIM , aux droits de laquelle se trouve la SA LAMY ;
En conséquence,
DÉBOUTE Mme [O] [B] de ses demandes de ce chef.
Y ajoutant,
REJETTE les réclamations indemnitaires de Mme [O] [B] pour appel abusif et au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
CONDAMNE Mme [O] [B] aux dépens de première instance et d'appel.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE