Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 2 - Chambre 1
ARRET DU 13 AVRIL 2010
(n° 162, 4 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 08/11794
Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Mai 2008 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 07/00548
APPELANTS
Monsieur [H] [W] [S]
[Adresse 2]
[Localité 4]
représenté par la SCP GRAPPOTTE BENETREAU JUMEL, avoués à la Cour
assisté de Me Franck FISCHER, avocat au barreau de PARIS, toque : G 750
Monsieur [J] [K] [S]
[Adresse 2]
[Localité 4]
représenté par la SCP GRAPPOTTE BENETREAU JUMEL, avoués à la Cour
assisté de Me Franck FISCHER, avocat au barreau de PARIS, toque : G 750
Mademoiselle [U] [O] [S]
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée par la SCP GRAPPOTTE BENETREAU JUMEL, avoués à la Cour
assistée de Me Franck FISCHER, avocat au barreau de PARIS, toque : G 750
INTIMEE
SCP VIE & POLLACI
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par la SCP ARNAUDY - BAECHLIN, avoués à la Cour
assistée de Me Christiane ROBERTO, avocat au barreau de PARIS, toque : P 499
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 17 février 2010, en audience publique, le rapport entendu conformément à l'article 785 du code de procédure civile, devant la Cour composée de :
Monsieur François GRANDPIERRE, Président de chambre
Mme Brigitte HORBETTE, Conseiller
Madame Dominique GUEGUEN, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier, lors des débats : Mme Noëlle KLEIN
ARRET :
- contradictoire
- rendu publiquement
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur François GRANDPIERRE, Président et par Madame Noëlle KLEIN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
******************
Le 29 juin 1995, Maître [N], ancien notaire associé de la Scp Gastaldi-Vie et Pollaci, a reçu l'acte de donation de M. [R] [S] et de Mme [X] [F], son épouse, à leurs trois enfants, [H], [J] et [U] [S], de divers biens dont la nue-propriété des parts sociales des sociétés civiles immobilières Petit Chambord 63, Thomas Couture et Jemmapes.
Les consorts [S], donataires, reprochant au notaire de ne pas avoir publié l'acte ni à la conservation des hypothèques ni aux greffes des tribunaux de commerce auprès desquels sont immatriculées les sociétés civiles immobilières, de sorte que postérieurement divers créanciers de leur père ont pu inscrire à partir du mois de septembre 2001 des nantissements sur les parts sociales, ce qui a eu pour effet de vider l'acte de donation partage de sa substance, ont recherché devant le tribunal de grande instance de Paris la responsabilité civile professionnelle du notaire rédacteur d'acte en demandant sa condamnation à leur payer la somme de 1 400 000 € représentant la valeur des deux immeubles dont la propriété leur échappe du fait desdits nantissements inscrits, ainsi qu'une somme de 5000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement en date du 28 mai 2008, le tribunal a débouté les consorts [S] de toutes leurs demandes et les a condamnés à payer à la Scp notariale Vie et Pollaci la somme de 2000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à payer les dépens.
CELA ETANT EXPOSE, la COUR :
Vu l'appel interjeté le 16 juin 2008 par les consorts [S],
Vu les conclusions déposées le 29 janvier 2010 par les appelants qui demandent l'infirmation du jugement, au constat du manquement du notaire à ses devoirs d'information et de conseil tant à leur égard qu'à celui des gérants des sociétés civiles immobilières concernées pour ne pas les avoir informés de l'obligation de régulariser les statuts et de procéder aux formalités auprès du registre du commerce et des sociétés, lesquelles n'ont pas été effectuées, la condamnation de la Scp notariale à leur payer la somme de 1 400 000 €, la somme de 5000 € par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à payer tous les frais et dépens,
Vu les conclusions déposées le 23 décembre 2009 par l'intimé qui demande la confirmation du jugement en toutes ses dispositions, la condamnation des consorts [S] à lui payer chacun la somme de 3000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et leur condamnation in solidum à payer les entiers dépens.
SUR CE :
Considérant que les appelants font grief au notaire, tenu en tant que rédacteur d'acte, d'assurer l'efficacité des actes qu'il dresse, de ne pas avoir procédé aux publicités indispensables à l'opposabilité aux tiers de l'acte notarié du 29 juin 1995 signé en son étude et de ne pas avoir informé ses clients de leurs obligations pour conférer audit acte un effet à l'égard des tiers et notamment des différents créanciers du donateur, en particulier de l'obligation de régulariser les statuts et de faire procéder à l'enregistrement de ces actes ; qu'ils n'ont découvert que leurs droits n'étaient pas protégés que par leur avocat et des années plus tard, à l'occasion de saisies engagées par les deux sociétés Soft Communication et La Bourride à Colette, créancières du donateur ainsi que de l'action paulienne entreprise par le Trésor Public de Sceaux pour voir dire de nul effet la donation leur bénéficiant, ces actions correspondant à des créances très largement postérieures à l'acte de donation partage ; qu'ils soutiennent que le notaire, non fondé à prétendre qu'il n'avait pas été chargé de telles formalités, et au titre en tout état d'un manquement à son devoir de conseil, a engagé sa responsabilité et que leur préjudice, en raison des procédures mettant leurs droits en danger, est équivalent à la valeur de deux sociétés civiles immobilières le Petit Chambord et Thomas Couture ;
Considérant que le notaire fait valoir qu'il est constant que l'acte de donation partage, enregistré le 13 juillet 1995 à [Localité 5], n'a pas fait l'objet d'une publication à la conservation des hypothèques ; que sur ce premier reproche, il soutient qu'il est sans fondement, dès lors que l'acte n'avait pas à faire l'objet d'une telle publication, le bien immobilier n'appartenant pas aux associés de la société civile immobilière mais à la société civile immobilière elle-même, restée, malgré la donation-partage effectuée, seule propriétaire du bien ; que sur l'absence de publication aux greffes des Tribunaux de Commerce auprès desquels sont immatriculées les deux sociétés civiles immobilières, il ne la conteste pas dans sa matérialité, mais fait valoir que cette formalité n'entrait pas dans sa mission, qu'il n'en avait pas été chargé, contrairement aux dires des appelants et qu'elle ne pouvait être effectuée qu'après modification des statuts, ce qui relève de la responsabilité du gérant de la société civile immobilière et des associés et qui ressort très clairement des termes mêmes de l'acte de donation partage ; qu'il conteste la faute reprochée et fait observer l'absence au surplus de toute démonstration par les appelants d'un préjudice né, actuel et certain en relation directe avec l'absence de publication et qui serait indemnisable ;
Considérant que par des motifs pertinents que la cour fait siens les premiers juges ont retenu que le notaire n'avait pas manqué en l'espèce à son devoir de conseil ni à son obligation d'assurer l'efficacité de l'acte par lui dressé ; que le premier reproche est mal fondé car sans objet dès lors qu'il est constant que l'acte n'avait pas à être publié à la conservation des hypothèques, les sociétés civiles immobilières restant seules propriétaires des immeubles, sans que la donation partage de parts sociales n'ait d'incidence ; que sur le second reproche, il est également mal fondé au motif que les appelants n'établissent nullement avoir donné mandat au notaire d'établir les statuts modifiés des trois sociétés en cause puis de veiller à leur publicité subséquente au registre du commerce et des sociétés, d'autant qu'il est de la responsabilité du gérant et des associés de sociétés civiles immobilières d'y procéder ; que d'ailleurs, en l'espèce, les circonstances rappelées par les appelants dans leurs écritures confirment qu'il a été procédé de cette manière, d'autant que les gérants des sociétés civiles immobilières sont intervenus à l'acte et ont déclaré modifier les statuts desdites sociétés ; qu'en effet, à la suite de l'acte de donation, une assemblée générale extraordinaire en date du 17 juillet 1995 a pris acte de la démission de M. [L] [S] en sa qualité de gérant et de la nomination en qualité de nouveaux gérants de MM [H] et [J] [S] ; qu'il a été prévu à cette date la modification des statuts, pour tenir compte de la donation partage et de la nouvelle répartition entre les nouveaux associés des parts sociales des sociétés civiles immobilières ; que dans ces conditions aucune faute du notaire ne saurait être retenue et que le jugement déféré sera confirmé en toutes ses dispositions ;
Considérant que les appelants, qui succombent en leurs prétentions, supporteront, in solidum, les dépens d'appel et que l'équité commande de les condamner à payer à l'intimé pour ses frais irrépétibles en cause d'appel chacun la somme de 2000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS :
Confirme le jugement en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Condamne M. [H] [S], M. [J] [S] et Mlle [U] [S] à payer à la Scp notariale à Paris Patrice Vie et Laurent [D] chacun la somme de 2000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne in solidum M. [H] [S], M. [J] [S] et Mlle [U] [S] à payer les dépens d'appel, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT