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08/04/2010 | FRANCE | N°07/08668

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 7, 08 avril 2010, 07/08668


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 7



ARRET DU 08 Avril 2010

(n° , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 07/08668



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 26 Octobre 2007 par le conseil de prud'hommes de PARIS - section encadrement - RG n° 05/11353





APPELANT



Monsieur [Y] [J]

[Adresse 6]

[Localité 4]

comparant en personne, assisté de Me Sylvie VUILLAUME-COLOS,

avocat au barreau de LYON







INTIMEE



SAS BAYER CROPSCIENCE

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Alain RIBET, avocat au barreau de PARIS, toque : A0033 substitué par Me...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 7

ARRET DU 08 Avril 2010

(n° , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 07/08668

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 26 Octobre 2007 par le conseil de prud'hommes de PARIS - section encadrement - RG n° 05/11353

APPELANT

Monsieur [Y] [J]

[Adresse 6]

[Localité 4]

comparant en personne, assisté de Me Sylvie VUILLAUME-COLOS, avocat au barreau de LYON

INTIMEE

SAS BAYER CROPSCIENCE

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Alain RIBET, avocat au barreau de PARIS, toque : A0033 substitué par Me Olivier CAVE, avocat au barreau de PARIS, toque : A 0033

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 05 Mars 2010, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Michèle BRONGNIART, Président, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Michèle BRONGNIART, Président

Monsieur Thierry PERROT, Conseiller

Monsieur Bruno BLANC, Conseiller

Greffier : Madame Nadine LAVILLE, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

- signé par Madame Michèle BRONGNIART, Président et par Mme Nadine LAVILLE, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA COUR,

Le 1er mai 1976, M. [J] a été engagé par la société Hoechst aux conditions générales de la convention collective des industries chimiques.

Le 1er septembre 1989, son contrat a été transféré à la société Roussel Uclaf. M. [J] relevait de la classification cadre groupe V coefficient K 660.

Par avenant du 20 août 1998 à effet au 1er précédant, M. [J] a été détaché de Hoechst Schering AgrEvo SA France chez Hoechst Schering AgrEvo GmbH, pour exercer des fonctions de 'product safety manager', avec la possibilité d'effectuer son travail en alternance une semaine à Francfort et une semaine à son domicile à Paris. Ce détachement qui intervenait dans le cadre d'un plan social de Hoechst Schering AgrEvo SA était prévu pour une durée de deux ans à savoir jusqu'au 31 juillet 2000.

Par courrier du 11 avril 2000, M. [J] a été informé qu'en application de l'article L 122-12 du code du travail, son contrat de travail avait été transféré, depuis le 1er avril 2000, dans la société Aventis CropScience SA née de la fusion des sociétés Agrevo et Rhône Poulenc Agro.

Courant juin 2000, un plan social a été mis en place.

M. [J] a exercé des fonctions de délégué syndical jusqu'au 29 mars 2001.

Le 1er octobre 2001, M. [J] a été convoqué à un entretien préalable à son licenciement pour motif économique, entretien fixé au 8 octobre 2001.

Par courrier du 18 janvier 2002, Aventis CropScience a demandé à l'Inspection du travail, l'autorisation de procéder au licenciement de M. [J].

Le 14 mars 2002, l'Inspecteur du travail a donné son autorisation.

 

Par courrier du 29 mars 2002, Aventis CropScience a 'procéd(é) à la résiliation du contrat de travail (de M. [J]) dans le cadre d'une procédure de licenciement collectif pour motif économique'.

Par courrier du même jour, Aventis CropScience a précisé à M. [J] que la rupture de son contrat de travail intervenant moins de 4 ans avant son départ à la retraite (relevé CNAV faisant état d'un départ au 1er janvier 2006), il ne rentrait pas dans les conditions définies au Plan social pour bénéficier de la préretraite rente.

Le 2 juillet 2002, M. [J] n'a plus fait partie des effectifs de la société Aventis CropScience SA devenue Bayer CropScience SA.

La cour statue sur l'appel interjeté le 23 novembre 2007 par M. [J] du jugement rendu par le Conseil des prud'hommes de Paris le 26 octobre 2007 par lettre datée du 2 novembre 2007 qui l'a débouté de l'ensemble de ses demandes notamment en dommages et intérêts pour perte d'une mesure spécifique liée à l'âge prévue au plan social de juin 2000, pour attitude discriminatoire, en rappel de salaires conventionnels, complément d'indemnité de licenciement, en le condamnant aux entiers dépens et en déboutant Aventis CropScience de sa demande reconventionnelle au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Vu les conclusions du 5 mars 2010 au soutien de ses observations orales par lesquelles M. [J] demande à la cour de

- réformer en toutes ses dispositions le jugement dont appel,

et statuant à nouveau, de

- constater que Bayer CropScience a gravement manqué à son obligation de loyauté à son égard,

- constater que Bayer CropScience a commis des actes discriminatoires à son encontre tels que relevés par l'Inspection du travail,

en conséquence

- condamner Bayer CropScience à lui verser

. 72642,65 € à titre de dommages et intérêts au titre de la perte d'une mesure liée à l'âge,

. 90000 € à titre de dommages et intérêts pour le préjudice subi en raison de l'attitude discriminatoire à l'encontre du salarié délégué syndical,

. 24064,38 € à titre de rappel de salaire conventionnel et 2406,43 € au titre des congés payés afférents,

. 12000 € à titre d'indemnité de véhicule,

. 61879,68 € à titre de complément d'indemnité de licenciement,

. 2000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Bayer CropScience aux entiers dépens.

Vu les conclusions du 5 mars 2010 au soutien de ses observations orales par lesquelles Bayer CropScience demande à la cour de

- confirmer, en toutes ses dispositions, le jugement entrepris,

- débouter M. [J] de l'ensemble de ses demandes,

- condamner M. [J] à lui verser la somme de 3500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

SUR CE,

Sur la demande relative à la mesure d'âge prévue au plan social

Considérant que M. [J] reproche à Aventis CropScience d'avoir tardé à procéder à son licenciement pour éluder l'application du plan social en ses mesures favorables et d'avoir persisté dans cette malveillance lors que ses droits avaient changé ; que Bayer CropScience réplique que M. [J] ne peut pas lui reprocher l'écoulement d'un délai qu'il estime aujourd'hui trop long alors qu'elle lui proposait des postes de reclassement et qu'elle prenait la peine de répondre à ses courriers ;

. sur la mesure d'âge

Considérant que pour débouter M. [J] de sa 'demande de dommages et intérêts au titre de la perte de mesures liées à l'âge', les premiers juges ont retenu sans analyser la chronologie des faits que 'le plan social fixait un délai de carence de quatre années', 'le dit plan prévoyant expressément que le système de préretraite interviendrait à l'issue de la période de quatre ans après la rupture du contrat de travail' et que le licenciement intervenu le 29 mars 2002 avec une sortie des effectifs en juillet 2002 lui avait garanti une rémunération à taux plein jusqu'à cette date, situation plus avantageuse que celle qui lui aurait permis d'avoir une garantie de 70% de son salaire ;

Que M. [J] en demandant la réformation de la décision déférée en toutes ses dispositions critique le bien fondé de ce motif alors que Bayer CropScience en demandant la confirmation du jugement le fait sien ;

Considérant que les mesures spécifiques liées à l'âge pour les salariés de 57 ans et plus étaient prévues au paragraphe 4 de la 6ème partie du plan social libellé comme suit :

'Après information et consultation des Instances représentatives concernées, Aventis CropScience sollicitera des pouvoirs publics, la conclusion d'une convention ASFNE (préretraite totale).

Dans la mesure où aucune convention ASFNE ne serait conclue avec les pouvoirs publics, le système de préretraite rente serait étendu aux salariés concernés de 57 ans à 61 ans (exclus) et dont l'âge de départ en retraite interviendrait plus de quatre ans après la rupture du contrat de travail.

Ce système interviendrait à l'issue de cette période et garantirait aux salariés concernés un taux global de préretraite rente de 70% (y compris les prestations actuelles des ASSEDIC) (accord d'amélioration du projet de plan social- article 19).

Par ailleurs, si la convention ASFNE est conclue, cette dernière consistera à proposer entre le 1er juillet 2000 et le 1er juillet 2002, aux salariés de 57 ans et plus un revenu de remplacement jusqu'à l'âge où ils pourront liquider leur retraite à taux plein...' ;

Qu'aucune convention ASFNE n'a été conclue avec les pouvoirs publics ;

Que le plan social avait pour objectif d'assurer aux salariés de 57 ans à 61 ans qui étaient exclus du bénéfice de la préretraite rente prévue au paragraphe 3 pour les salariés âgés de 55 ans à 56 ans et 11 mois au 1er juillet 2002, une garantie de revenus sous forme d'une préretraite totale par la conclusion avec les pouvoirs publics d'une convention ASFNE ; que le plan social initial n'envisageait pas l'hypothèse d'un échec des négociations avec les pouvoirs publics ; que dans le cadre de l'accord d'amélioration du projet de plan social, il a été décidé qu'en l'absence de conclusion d'une telle convention, les salariés de 57 ans à 61 ans percevraient une préretraite rente au taux global de 70% (incluant les prestations ASSEDIC) jusqu'à l'âge de la retraite (taux plein ou 65 ans) ;

Qu'interpréter la proposition 'ce système interviendrait à l'issue de cette période' comme prévoyant un délai de carence de quatre ans à compter de la rupture du contrat de travail vide de sens la clause du plan d'amélioration tendant à faire bénéficier les salariés de 57 ans à 61 ans du système de la préretraite rente dès lors qu'un tel délai de carence en prive totalement les salariés de 61 ans ; qu'en réalité les partenaires sociaux ont seulement convenu que le système de préretraite rente pour ces salariés n'interviendrait qu'à l'issue de la période nécessaire pour l'information et la consultation des Instances représentatives concernées et la négociation avec les pouvoirs publics d'une convention ASFNE ;

Qu'en conséquence, il convient de dire que le bénéfice de la préretraite rente prévue au paragraphe 4 de la 6ème partie du plan social était dû sans application d'aucun délai de carence dès lors que le salarié était âgé de plus de 57 ans et que l'âge de son départ en retraite interviendrait plus de quatre ans après la rupture du contrat de travail ;

. sur le délai pris pour procéder au licenciement

Considérant qu'à titre liminaire, il sera relevé que dans l'autorisation de licencier du 14 mars 2002, l'Inspecteur du travail, après avoir retenu 'l'absence de lien entre les motifs invoqués et le mandat exercé', a estimé nécessaire de '...précis(er) que cette appréciation ne port(ait) que sur la demande maintenant présentée mais pas sur le retard pris par l'entreprise à (la) présenter' ;

Que le présent débat en ce qu'il porte sur le délai pris par Aventis CropScience pour procéder au licenciement de M. [J], est sans lien avec l'autorisation donnée par l'Inspection du travail ;  

Considérant qu'au moment de la fusion des sociétés Agrevo et Rhone Poulenc Agro en avril 2000 et de l'élaboration du plan social en juin 2000, M. [J] était détaché en Allemagne jusqu'au 31 juillet 2000, dans le cadre d'un précédent plan social de 1997 ; qu'il emplissait déjà des fonctions de délégué syndical ;

Que ce n'est que par courrier du 5 septembre 2000, que répondant à un courrier du 18 juillet 2000 de M. [J] sur sa situation à la fin du détachement, qu'Aventis CropScience lui a proposé un poste de 'spécialiste documentation' à [Localité 5] en renvoyant pour les modalités de cette mutation au plan social de juin 2000 et en lui demandant d'adresser sa décision par écrit en raison de son statut de représentant du personnel ('...qu'en raison de votre statut de représentant du personnel, cette dernière devra nécessairement nous parvenir par écrit', souligné dans le texte) ;

Qu'en conséquence, la date de la fin du détachement de M. [J] en Allemagne étant déterminée depuis plusieurs années, rien ne justifie le délai de plus d'un mois pris par l'employeur entre le 31 juillet et le 5 septembre 2000, pour formuler une proposition de poste ;

Considérant qu'il ressort des procès verbaux des réunions du comité d'établissement du 21 septembre et 31 octobre 2000, que M. [J], alors âgé de 57 ans révolus pour être né le [Date naissance 2] 1943, avait été placé sur la liste des personnes 'en mesure d'âge' visées par le plan social de juin 2000 ;

Qu'à la suite du refus formulé le 9 novembre 2000 par M. [J] d'accepter le poste proposé le 5 septembre 2000, Aventis CropScience, par courrier du 16 novembre 2000, le 'pla(çait) en congé afin d'être dans la meilleure situation possible pour retrouver un emploi' externe en rappelant les garanties accordées par le plan social à savoir notamment le maintien du contrat de travail 'au plus tard jusqu'au 1er juin 2001, date de notification de (son) licenciement' et en insérant, en fin de correspondance, le paragraphe suivant : 'enfin nous vous précisions que si votre départ en retraite intervient plus de quatre ans après votre sortie juridique de notre entreprise, vous aurez également la possibilité de bénéficier de notre système de préretraite rente explicité dans le plan social' ;

Que par courrier du 17 novembre 2000, Aventis CropScience a informé M. [J] que cette dispense de toute activité professionnelle prendrait effet 'à compter de la date de la première présentation du courrier du 16 novembre 2000 envoyé en recommandé avec réception' ;

Mais considérant qu'aux termes du plan social de juin 2000, pris en sa 2ème partie relative aux mesures de nature à faciliter les reclassements externes, paragraphe 5.1, la dispense pour recherche d'emploi est d'une durée limitée à 6 mois avec un début de congé au 1er septembre 2000 et le bénéfice de ce congé n'est pas applicable aux personnes susceptibles, comme M. [J], de bénéficier d'une mesure d'âge ;

Que Bayer CropScience oppose vainement à M. [J] l'information relative au système de préretraite rente incluse dans le courrier du 16 novembre 2000 dès lors qu'aux termes de ce courrier, la sortie juridique de l'entreprise devait intervenir au plus tard au 1er juin 2001, date à laquelle M. [J] remplissait les conditions pour bénéficier de ce système ; qu'en effet au 1er juin 2001, M. [J] aurait été âgé de 57 ans et son départ en retraite serait intervenu plus de 4 ans après la sortie des effectifs (relevé détaillé établi le 16 mai 2001 par la CNAV mentionnant un départ au 1er janvier 2006) ;

Que l'absence de réaction de M. [J] à ce placement en dispense pour recherche d'emploi ne permet pas à l'employeur d'en tirer des conséquences quant une acceptation tacite d'autant que, dans la lettre de licenciement du 29 mars 2002, Aventis CropScience reconnaît avoir placé M. [J] en congé rémunéré pour recherche d'emploi ('En outre, le 16 novembre 2000, nous vous avons placé en congé...'), ce qui implique que la mesure a été imposée au salarié ;

Que Aventis CropScience qui n'a pas appliqué loyalement le plan social est mal fondée à reprocher à M. [J] de ne pas avoir manifesté dès novembre 2000, son intérêt pour une mesure d'âge ou de ne pas s'être positionné en faveur d'une telle mesure avant le 5 février 2002, date à laquelle il a transmis le relevé CNAV daté du 16 mai 2001 ;

Qu'en conséquence, le délai consécutif à la décision irrégulière de placer M. [J] en dispense pour recherche d'emploi est imputable à Aventis CropScience  ;

Considérant qu'à la fin du congé de dispense pour recherche d'emploi, soit au 1er juin 2001, devant le silence de son employeur, M. [J] qui était toujours dans sa 57ème année, l'a interrogé par courrier du 29 juin 2001, sur sa situation  ; que par courrier du 16 juillet 2001, Aventis CropScience a informé M. [J] que 'conformément aux dispositions du plan social actuellement en vigueur, (son) congé pour recherche d'emploi étant arrivé à son terme, (elle) allait procéder notamment à une demande d'autorisation de licenciement auprès de l'Inspection du travail concerné' ;

Que l'entretien préalable au licenciement n'aura lieu que le 8 octobre 2001, soit un délai supplémentaire de deux mois et demi ;

Que pour justifier ce délai, Bayer CropScience invoque vainement la proposition d'un poste à [Localité 5] en tant que 'Global Regulatory Manager' au sein de la CPPM, faite le 8 février 2001 dès lors que le 27 avril 2001, soit antérieurement au terme du congé pour recherche d'emploi, les parties n'étaient pas parvenues à un accord sur les modalités d'exercice de ces fonctions ;

Qu'en conséquence, Aventis CropScience, par son inaction, a, de nouveau, retardé pendant plus de quatre mois (1er juin au 8 octobre 2001) la mise en oeuvre de la procédure de licenciement ;

Considérant que la demande d'autorisation de licencier n'a été faite que par courrier daté du vendredi 18 janvier 2002, réceptionné par l'Inspection du travail le jeudi 24 suivant (courrier du 6 mars 2002 de l'Inspection du travail et autorisation de licenciement du 14 mars 2002) ;

Que Aventis CropScience invoque vainement une offre faite le 23 octobre 2001 qui portait sur un autre poste de 'Global Regulatory Manager', département CPPM, à [Localité 5]' dès lors que le délai de 6 mois entre les deux dernières offres est manifestement excessif ;

Qu'en conséquence, le retard constaté entre le 8 octobre 2001 et le 18 janvier 2002 est imputable à Aventis CropScience ;

Considérant qu'il est ainsi établi qu'il n'existe pas de motifs justifiant des retards accumulés à tout le moins à hauteur de 10 mois, à compter du 9 novembre 2000, pour procéder au licenciement qui est intervenu le 29 mars 2002, soit le lendemain de l'expiration de la période de protection ;

Qu'en conséquence, M. [J] est fondé à reprocher à Aventis CropScience d'avoir eu un comportement déloyal en le plaçant en dispense pour recherche d'emploi et en retardant son licenciement, retard qui l'a privé à compter de sa sortie des effectifs de Aventis CropScience soit du 2 juillet 2002 du bénéfice d'une préretraite rente ;

. sur le préjudice matériel

Considérant que Bayer CropScience doit réparer l'intégralité du préjudice financier subi par M. [J] ; que M. [J] est fondé à demander l'indemnisation du préjudice subi au titre de la perte financière jusqu'à 65 ans, date à partir de laquelle il a pu bénéficier d'une retraite à taux plein ; que le décompte présenté par lui est conforme aux modalités fixées au paragraphe 4.2, 6ème partie, du plan social ;

Qu'il sera ajouté qu'aucune disposition du plan social ne prévoit que le paiement de la préretraite rente cessait à la date de départ à la retraite mentionnée par le relevé de carrière de la CNAV initialement fourni par le salarié alors même que postérieurement à la rupture du contrat de travail, l'ouverture des droits à la retraite se trouverait différée ;

Sur la discrimination syndicale

Considérant que M. [J] soutient que ce comportement de l'employeur consistant à retarder son licenciement est constitutif d'une discrimination liée à ses fonctions de délégué syndical ; qu'en outre, il a été sciemment évincé de tout processus social (absence de convocation aux élections professionnelles) et de gratification interne telle que l'octroi de la médaille du travail ; que Bayer CropScience conteste l'existence de toute discrimination syndicale ;

Considérant que s'il appartient au salarié syndicaliste qui se prétend lésé par une mesure discriminatoire de soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser une atteinte au principe d'égalité de traitement, il ne lui incombe pas de rapporter la preuve de la discrimination syndicale mais à l'employeur d'établir que cette disparité est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination fondée sur l'appartenance syndicale ;

Considérant qu'il est établi que le retard apporté au licenciement de M. [J] est la conséquence directe d'une application déloyale du plan social ; qu'en outre, l'employeur ne donne aucun autre cas de salarié âgé de 57 ans, placé comme M. [J] en dispense pour recherche d'emploi ou de salarié ayant connu les mêmes délais à tous les stades de la procédure ayant abouti à son licenciement que M. [J] ;

Qu'il n'est pas contesté par l'employeur que M. [J] n'a pas été convoqué aux élections professionnelles alors qu'il était candidat au collège cadres comme membre du CE et comme DP ; que Bayer CropScience verse le courrier par lequel elle avait indiqué à l'inspecteur du travail que M. [J] n'avait effectivement pas reçu le matériel de vote par correspondance mais qu'il s'agissait d'un oubli qui avait touché l'ensemble des salariés du site de [Localité 7] ; Mais considérant que cette affirmation n'est étayée par aucun élément objectif tel que la liste de tous les salariés de ce site votant par correspondance, le protocole préélectoral fixant les modalités du vote par correspondance, le traitement de cet 'oubli' ;

Qu'en conséquence, M. [J] est fondé à soutenir qu'il a été victime d'une inégalité de traitement lié à son appartenance syndicale ;

Que le préjudice qu'il a subi est constitué d'une part du préjudice matériel déjà réparé, d'autre part, d'un préjudice moral qui sera intégralement réparé par l'allocation d'une somme de 30000 € ;

Sur le rappel de salaire

Considérant que M. [J] demande paiement de la partie variable de sa rémunération fixée à 30% pour les cadres relevant du niveau 3 ;

Considérant qu'il est constant que M. [J] a perçu la part variable de la rémunération d'un cadre de niveau 5 et non pas 3 ; que pour prétendre qu'il relèverait du niveau 3 et non pas 5, il indique que la nouvelle direction avait remplacé l'ancienne grille de classification résultant de la convention collective des industries chimiques mais ne verse ni la nouvelle grille ni aucun élément pour établir que son poste relevait effectivement du niveau 3 ;

Que la demande faite au titre de l'indemnité de véhicule est elle aussi liée à sur un classement en niveau 3 ;

Que la demande de complément d'indemnité de licenciement est la conséquence de l'incidence de la partie variable de rémunération accordée à un cadre de niveau 3 et non pas 5 ;

Que le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il l'a débouté de ces demandes ;

Sur les frais irrépétibles

Considérant que l'équité et la situation économique respective des parties justifient qu'il soit fait application de l'article 700 du code de procédure civile dans la mesure énoncée au dispositif ;

PAR CES MOTIFS,

INFIRME le jugement entrepris sauf en ce qu'il a débouté M. [J] de sa demande de rappel de salaire, de complément d'indemnité de licenciement et d'indemnité de véhicule,

et statuant à nouveau

DIT que le bénéfice de la préretraite rente prévue au paragraphe 4 de la 6ème partie du plan social était dû sans application d'aucun délai de carence,

DIT que l'employeur a fait une application déloyale du plan social de juin 2000,

DIT que M. [J] a été victime d'une inégalité de traitement fondé sur son appartenance syndical,

CONDAMNE la société Bayer CropScience France à payer à M. [J], avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,

. 72642,65 € en réparation de son préjudice financier,

. 30000 € à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,

CONDAMNE la société Bayer CropScience France à payer à M. [J] 2000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la société Bayer CropScience France aux entiers dépens de première instance et d'appel,

LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 7
Numéro d'arrêt : 07/08668
Date de la décision : 08/04/2010

Références :

Cour d'appel de Paris K7, arrêt n°07/08668 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-04-08;07.08668 ?
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