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30/03/2010 | FRANCE | N°09/10518

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 1, 30 mars 2010, 09/10518


Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 1



ARRET DU 30 MARS 2010



(n° 140, 4 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 09/10518



Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 Décembre 2008 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 05/11722





APPELANTE



Société BÜCHEL & CO.FAHRZEUGTEILEFABRIK représentée par son représentant légal

[Adresse 5

]

[Adresse 4]

[Localité 1]

représentée par la SCP Pascale NABOUDET-VOGEL - Caroline HATET-SAUVAL, avoués à la Cour

assistée de Me HUTTLINGER, avocat au barreau de PARIS, toque : E 273

...

Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 1

ARRET DU 30 MARS 2010

(n° 140, 4 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 09/10518

Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 Décembre 2008 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 05/11722

APPELANTE

Société BÜCHEL & CO.FAHRZEUGTEILEFABRIK représentée par son représentant légal

[Adresse 5]

[Adresse 4]

[Localité 1]

représentée par la SCP Pascale NABOUDET-VOGEL - Caroline HATET-SAUVAL, avoués à la Cour

assistée de Me HUTTLINGER, avocat au barreau de PARIS, toque : E 273

INTIMES

CABINET LOVELLS Partnership d'avocats (AUX DROITS DU CABINET SIMEON & ASSOCIES ) prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par la SCP BOMMART-FORSTER - FROMANTIN, avoués à la Cour

assistée de Me Jean-Louis BIGOT, avocat au barreau de PARIS, toque : P 458

SCP LYONNET BIGOT

Monsieur [W] [V] pris à titre personnel et en qualité d'associé du Cabinet d'avocats LOVELLS

[Adresse 2]

[Localité 3]

représenté par la SCP BOMMART-FORSTER - FROMANTIN, avoués à la Cour

assisté de Me Jean-Louis BIGOT, avocat au barreau de PARIS, toque : P 458

SCP LYONNET BIGOT

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 3 février 2010, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Monsieur François GRANDPIERRE, Président de chambre entendu en son rapport conformément à l'article 785 du code de procédure civle, en présence de Madame GUEGUEN, conseiller

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur François GRANDPIERRE, Président

Madame Brigitte HORBETTE, Conseiller

Madame Dominique GUEGUEN, Conseiller

Greffier, lors des débats : Madame Noëlle KLEIN

ARRET :

- contradictoire

- rendu publiquement

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur François GRANDPIERRE, président et par Madame Noëlle KLEIN , greffier à qui la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

**********

La Cour,

Considérant que la société Büchel & Co Fahrzeugteileffabrik , société de droit allemand, fabrique des pièces pour véhicules et cycles ; que, dans l'exercice de cette activité, elle a livré divers matériels pendant plusieurs années à la société Dangré Cycles qui a été placée en redressement judiciaire le 8 juin 1998 et en liquidation judiciaire le 27 juillet de la même année ;

Que, créancière d'une somme de 163.914,49 euros, elle a déclaré sa créance le 10 juin 1998 par l'intermédiaire du Cabinet Wessing, son conseil allemand, et que, le 16 juin 1998, par l'intermédiaire de la S.C.P. Siméon & associés, succédant au Cabinet Wessing elle a fait parvenir à l'administrateur judiciaire une revendication fondée sur une clause de réserve de propriété ; que, le 1er juillet 1998, l'administrateur a rejeté la demande tout en autorisant la requérante à enlever les matériels litigieux sous le contrôle d'un huissier de justice ; que, finalement, la société Büchel n'en récupérait qu'une partie ;

Que, dans ces circonstances, la société Büchel a déposé une requête aux fins de revendication devant le juge commissaire qui, par ordonnance du 22 octobre 1998, a rejeté la demande comme étant forclose ; que cette décision a été confirmée par jugement rendu le 16 novembre 1999 par le Tribunal de commerce de Valenciennes et lui-même confirmé par un arrêt rendu le 5 décembre 2002 par la Cour d'appel de Douai, cet arrêt étant devenu irrévocable à la suite du rejet du pourvoi prononcé le 28 septembre 2004 par la Cour de cassation ;

Que, pour statuer ainsi, ces juridictions ont estimé que la requérante ne bénéficiait pas de la prorogation des délais de procédure prévus au profit des personnes demeurant à l'étranger ;

Que, dans ces circonstances, la société Büchel a agi en recherche de responsabilité contre le Cabinet Lovells, intervenu à la suite du Cabinet Siméon & associés, et contre M. [W] [V], avocat, devant le Tribunal de grande instance de Paris qui, par jugement du 3 décembre 2008, l'a déboutée de ses demandes et condamnée à payer au Cabinet Lovells et à M. [V] la somme de 2.000 euros en vertu des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile et à supporter les dépens de l'instance ;

Considérant que la société Büchel, qui poursuit l'infirmation du jugement, demande que le Cabinet Lovells et M. [V] soient condamnés solidairement à lui payer la somme de 105.754,70 euros à titre de dommages et intérêts, outre les intérêts au taux légal, en réparation du préjudice subi du fait de la perte de chance de reprendre possession des marchandises impayées ;

Qu'à cette fin, l'appelante expose d'abord que le Cabinet Lovells a traité le dossier à la suite de la S.C.P. Siméon & associés et facturé les diligences accomplies après le 1er septembre 2002 et que les deux cabinets ont fusionné en 2001 de sorte qu'elle est recevable à agir tant contre le Cabinet Lovells, que contre M. [V] ;

Qu'au fond, la société Büchel soutient que M. [V] a failli à ses obligations de prudence et de diligence, d'une part, en calculant le délai d'un mois prévu pour saisir le juge-commissaire de la demande en revendication des biens, non pas à compter du 1er juillet 1998, date du refus de l'administrateur, mais à compter de la réception de la demande et, d'autre part, en appliquant, à tort, à la requête en revendication l'allongement des délais accordé par l'article 643 du Code de procédure civile en faveur des personnes qui demeurent à l'étranger ; que l'appelante en déduit que ces deux fautes caractérisent les manquements du Cabinet Lovells et de M. [V] à leur obligation de respecter les délais pour agir, qui est, pour l'avocat, une obligation de résultat ;

Que la société Büchel fait encore valoir qu'ayant été déclarée forclose en son action, elle a perdu toute chance de reprendre possession des marchandises livrées ou de recouvrer sa créance ; que, soutenant que la clause de réserve de propriété insérée dans les contrats de vente et acceptée par la société Dangré était valable et que les biens revendiqués étaient identifiables, elle soutient que son préjudice s'élève à la somme de 105.754,70 euros correspondant au solde de sa créance ;

Qu'à titre subsidiaire, l'appelante demande que ses adversaires soient condamnés à lui verser une somme qui ne saurait être inférieure à 57.071 euros représentant la valeur des pièces détachées lui appartenant et qui ont été individualisées par l'huissier de justice commis à cet effet ;

Qu'enfin, la société Büchel demande que le Cabinet Lovells et M. [V] soient condamnés solidairement à lui payer la somme de 13.753,36 euros à raison des honoraires d'avocat supportés du seul fait de la faute du Cabinet Lovells ;

Considérant que M. [V] et le Cabinet Lovells concluent à la confirmation du jugement en soulevant d'abord, comme en première instance, l'irrecevabilité des demandes adverses ;

Qu'à l'appui de leurs prétentions, les intimés font valoir que la société Büchel demande que soient constatées «les fautes commises par le cabinet Lovells, venant aux droits du cabinet Siméon et associés, agissant par Maître [W] [V], dans l'exécution de ses obligations contractuelles» alors que, d'une part, le Cabinet Lovells ne vient pas aux droits de la S.C.P. Siméon & associés, et que, d'autre part, M. [V] a agi, non pas à titre personnel, mais, soit dans l'intérêt de la S.C.P. Siméon & associés, soit, ensuite, dans l'intérêt du Cabinet Lovells ;

Que, subsidiairement et au fond, les intimés soutiennent que le principe général de l'augmentation des délais en matière de procédures collectives était applicable à l'époque de l'action engagée par la société Büchel et ce, avant l'arrêt rendu en sens contraire le 28 septembre 2004 par la Cour de cassation ; qu'ils en déduisent que le Cabinet Lovells n'a commis aucune faute ;

Que, s'agissant du préjudice, les intimés reprochent à la société Büchel de réclamer le montant de la créance déclarée alors que la revendication ne pouvait porter que sur les biens individualisés, que la clause de réserve de propriété, qui n'a pas été acceptée, n'était pas valable, et que plusieurs créanciers revendiquaient les mêmes marchandises ; qu'ils estiment donc que la perte de chance alléguée n'est pas certaine ;

Sur les fins de non-recevoir soulevées par M. [V] et le Cabinet Lovells :

Considérant que, comme l'ont décidé les premiers juges, M. [V] est intervenu dans la procédure opposant la société Büchel à la société Dangré, non pas à titre personnel, mais en tant que membre de la S.C.P. Siméon & associés, puis du Cabinet Lovells ; que la société Büchel n'est donc pas recevable à agir contre lui personnellement ;

Considérant qu'il convient d'approuver pareillement les premiers juges en ce qu'ils ont décidé que la société Büchel était recevable à agir contre le Cabinet Lovells dès lors que, quel que soit le contenu de la convention conclue entre la S.C.P. Siméon & associés et le Cabinet Lovells, ce cabinet a repris le dossier et ce, en conservant l'argumentation juridique précédemment développée par le Cabinet Siméon ;

Qu'il y a donc lieu de confirmer le jugement sur ces deux points ;

Au fond :

Considérant que, le 24 juin 1998, M. [V] a écrit à M. [N], administrateur judiciaire de la société Dangré, que le Cabinet Lovells était le conseil de la société Büchel et qu'il lui ferait parvenir une demande de revendication de divers matériels ; que, le 1er juillet 1998, M. [N] faisait connaître au Cabinet Siméon qu'il refusait d'acquiescer à la demande présentée le 16 juin de la même année par le Cabinet Wessing et reçue le 18 juin ; qu'il appartenait donc à la S.C.P. Siméon & associés puis au Cabinet Lovells de suivre la procédure aux fins de revendication dans les délais prescrits ;

Considérant qu'aux termes de l'article 85-1 du décret du 27 décembre 1985, la demande de revendication d'un bien est adressée dans le délai de l'article 115 de la loi du 25 janvier 1985 par lettre recommandée avec demande d'avis de réception au mandataire de justice... ; qu'à défaut d'acquiescement du mandataire dans le délai d'un mois à compter de la réception de la demande, le demandeur doit, sous peine de forclusion, saisir le juge commissaire dans un délai identique à compter de l'expiration du délai de réponse du mandataire ;

Qu'en application de ce texte, l'avocat de la société Büchel devait normalement saisir le juge commissaire avant le 18 août 1998 dès lors qu'à cette époque, le Cabinet Lovells ne pouvait pas connaître la jurisprudence de la Cour de cassation qui, par un arrêt du 2 novembre 2005, a décidé qu'en cas de rejet par l'administrateur de la demande amiable en revendication, le délai d'action du revendiquant court du jour de ce rejet qui s'analyse en un défaut d'acquiescement ;

Considérant que, toutefois, la société Büchel ayant son siège social en Allemagne, il y lieu de rechercher si, pour saisir le juge commissaire, elle bénéficiait de s dispositions de l'article 643 du Code de procédure civile en vertu desquelles, lorsque la demande est portée devant une juridiction qui a son siège en France métropolitaine, les délais de comparution, d'appel, d'opposition, de recours en révision et de pourvoi en cassation sont augmentés de deux mois pour les personnes qui demeurent à l'étranger ;

Que la question n'a été tranchée par la négative que par l'arrêt rendu le 28 septembre 2004 par la Cour de cassation alors que, par un arrêt prononcé le 26 février 1997, elle avait estimé, certes à l'occasion d'une opposition, que les augmentations de délais s'appliquent dans tous les cas où il n'y est pas expressément dérogé et qu'aucune disposition de la loi du 25 janvier 1985 et du décret du 27 décembre 1985 n'exclut l'application des règles générales de l'article 643 du Code de procédure civile ;

Qu'il suit de là qu'en faisant partir le délai, non pas du 1er août 1998, mais du 18 août de la même année, et en appliquant l'augmentation du délai, c'est-à-dire en présentant la demande, conformément à la jurisprudence, avant le 18 octobre 1998, le Cabinet Lovells, qui a effectivement saisi le juge commissaire le 8 octobre 1998, n'a commis aucune faute susceptible d'engager sa responsabilité ;

Que, par voie de conséquence et sans qu'il y ait lieu d'examiner la réalité des préjudices allégués, il convient de confirmer le jugement frappé d'appel ;

Sur l'application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile :

Considérant que chacune des parties sollicite une indemnité en invoquant les dispositions susvisées ; que, succombant en ses prétentions et supportant les dépens, la société Büchel sera déboutée de sa réclamation ; qu'en revanche, elle sera condamnée à verser à M. [V] et au Cabinet Lovells les frais qui, non compris dans les dépens d'appel, seront arrêtés, en équité, à la somme de 1.500 euros ;

PAR CES MOTIFS,

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Confirme, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 3 décembre 2008 par le Tribunal de grande instance de Paris au profit du Cabinet Lovells et de M. [W] [V] ;

Déboute la société Büchel & Co Fahrzeugteileffabrik de sa demande d'indemnité fondée sur les dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile et la condamne, par application de ce texte, à payer au Cabinet Lovells et à M. [V], chacun la somme de 1.500 euros ;

Condamne la société Büchel aux entiers dépens d'appel qui seront recouvrés par la S.C.P. Bommart-Forster & Fromantin, avoué du Cabinet Lovells et de M. [V], conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 09/10518
Date de la décision : 30/03/2010

Références :

Cour d'appel de Paris C1, arrêt n°09/10518 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-03-30;09.10518 ?
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