La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

24/03/2010 | FRANCE | N°08/08498

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 6, 24 mars 2010, 08/08498


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6



ARRET DU 24 Mars 2010

(n° 1 , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 08/08498-AC



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 29 Mai 2008 par le conseil de prud'hommes de SENS section Commerce RG n° 07/00181





APPELANTE

SA MOREAU EXTINCTEURS

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 2]

représentée par Me Jean François LE METAYER, avoca

t au barreau d'ORLEANS substitué par Me Sonia PETIT, avocat au barreau d'ORLEANS







INTIMÉ

Monsieur [V] [N]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 1]

représenté par M. [T] [P] (Délég...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6

ARRET DU 24 Mars 2010

(n° 1 , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 08/08498-AC

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 29 Mai 2008 par le conseil de prud'hommes de SENS section Commerce RG n° 07/00181

APPELANTE

SA MOREAU EXTINCTEURS

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 2]

représentée par Me Jean François LE METAYER, avocat au barreau d'ORLEANS substitué par Me Sonia PETIT, avocat au barreau d'ORLEANS

INTIMÉ

Monsieur [V] [N]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 1]

représenté par M. [T] [P] (Délégué syndical dûment mandaté)

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 Février 2010, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Alain CHAUVET, Président, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Alain CHAUVET, Président

Madame Anne-Marie LEMARINIER, Conseillère

Madame Claudine ROYER, Conseillère

Greffier : Mme Evelyne MUDRY, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Alain CHAUVET, Président et par Evelyne MUDRY, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCEDURE ET MOYENS DES PARTIES

Par jugement du 20 décembre 2007 auquel la cour se réfère pour l'exposé des faits, de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, le conseil de prud'hommes de PARIS a :

-dit que la procédure initiée par Monsieur [V] [N] n'est pas abusive.

-dit que la rémunération du salarié ne peut résulter d'une modification unilatérale et arbitraire de l'employeur.

-dit que la rupture du contrat de travail incombe à l'employeur et que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse.

-fixé la moyenne des salaires et commissions des trois derniers mois de Monsieur [N] à la somme de 1411,85 euros.

-condamné la SA MOREAU EXTINCTEURS à payer à Monsieur [V] [N] les sommes suivantes :

-2590,65 euros à titre de rappel de salaire pour les mois d'avril à juillet 2007.

-259,06 euros à titre d'indemnité de congés payés afférents;

-1411,85 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis.

-141,18 euros à titre de congés payés afférents.

-1411,85 euros au titre d'indemnité de licenciement.

-1400 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice subi pour défaut de délivrance d'un document obligatoire dûment renseigné.

-500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

-débouté Monsieur [N] du surplus de ses demandes.

-rejeté les demandes reconventionnelles de la SA MOREAU EXTINCTEURS tant en ce qui concerne la procédure abusive que la demande concernant l'article 700 du Code de Procédure Civile.

-ordonné la rectification de l'attestation ASSEDIC et du certificat de travail.

-dit n'y avoir lieu à avec intérêts légaux.

La SA MOREAU EXTINCTEURS a relevé appel de ce jugement par déclaration reçue au greffe de la cour le 18 juin 2008.

Vu les conclusions régulièrement communiquées et oralement soutenues à l'audience du 10 février 2010, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé de ses moyens et arguments, aux termes desquelles la SA MOREAU EXTINCTEURS demande à la cour de :

-débouter Monsieur [N] de toutes ses demandes.

-infirmer le jugement.

-condamner Monsieur [N] au paiement des sommes suivantes :

-1 euro à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive.

-1500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

-4896,43 euros avec intérêts au taux légal à compter du 18 juin 2008 au titre du remboursement des sommes versées dans le cadre de l'exécution provisoire du jugement.

Vu les conclusions régulièrement communiquées et oralement soutenues à l'audience du 10 février 2010, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé de ses moyens et arguments, aux termes desquelles Monsieur [N] demande à la cour de :

-condamner la SA MOREAU au paiement des sommes suivantes :

-15 441,23 euros à titre de rappel de salaire.

-1544,13 euros au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés.

-2590,65 euros au titre du rappel de salaire pour les mois d'avril à juillet 2007.

-259,46 euros au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés;

-2162,17 euros au titre de l'indemnité de licenciement.

-7783,98 euros au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

-7783,98 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice subi sur la motivation de la rupture figurant dans l'attestation ASSEDIC.

-1500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

-avec intérêts au taux légal à compter de la saisine.

-ordonner la rectification de l'attestation ASSEDIC et du certificat de travail.

-confirmer la décision rendue par le conseil de prud'hommes de SENS.

MOTIFS

Sur la rupture du contrat de travail

Considérant que Monsieur [N] a travaillé pour le compte de la SA MOREAU EXTINCTEURS du 17 septembre 1993 au 22 janvier 2003 et du 22 avril 2003 au 27 juillet 2005, date à laquelle il a démissionné, puis du 20 octobre 2005 au 27 août 2007.

Considérant qu'aux termes de son dernier contrat Monsieur [N] a été engagé en qualité de vendeur salarié niveau 4 échelon 2 de la convention collective du commerce de gros et qu'il a été affecté sur un secteur d'activité comprenant les départements de l'Yonne et de l'Aube.

Considérant que selon l'article 7 du contrat, le salarié était libre d'organiser son activité selon un horaire de 35 heures par semaine, à charge pour lui de respecter le programme d'activité fixé et de rédiger un compte rendu journalier précis et détaillé.

Considérant que la rémunération de Monsieur [N] se composait d'un salaire fixe mensuel de 1000 euros brut auquel s'ajoutaient des commissions et primes sur chiffre d'affaires selon des modalités définies à l'article 8 du contrat.

Considérant que par lettre du 20 août 2007 Monsieur [N] a notifié à la SA MOREAU EXTINCTEURS la rupture de son contrat de travail à effet du 27 août 2007 du fait du non respect de ses obligations contractuelles.

Considérant que Monsieur [N] reproche à son employeur les manquements suivants :

-rémunération mensuelle contractuelle indiquée sur les feuilles de paie inférieure aux barèmes de la convention collective et au SMIC.

-calcul de sa rémunération depuis plusieurs mois à partir de la géolocalisation de son véhicule professionnel : pratique illégale et discriminatoire.

-non prise en compte des jours de fractionnement depuis toujours.

Considérant que la prise d'acte de la rupture par le salarié en raison de faits qu'il reproche à son employeur entraîne la cessation immédiate du contrat de travail.

Considérant qu'il appartient au juge de se prononcer sur la prise d'acte en prenant en considération l'ensemble des faits invoqués par le salarié, étant précisé que ceux ci doivent constituer des manquements suffisamment graves aux obligations de l'employeur pour justifier la rupture aux torts de ce dernier.

Considérant que dans un tel cas la prise d'acte de rupture produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que dans le cas contraire, la prise d'acte produit les effets d'une démission.

Considérant que les parties ne fournissent aucun élément ni moyen nouveau de nature à remettre en cause la décision des premiers juges qui ont fait une exacte appréciation des circonstances de la cause tant en droit qu'en fait par des motifs pertinents que la cour fait siens étant encore observé que :

-sur le montant de la rémunération par rapport aux minima et les jours de fractionnement

-en présence d'un système de rémunération mixte tel que celui appliqué à Monsieur [N], la comparaison entre le salaire minimum conventionnel ou le SMIC doit se faire en prenant en compte tous les éléments de rémunération, s'ils ne sont pas expressément exclus par la convention collective.

-la convention collective applicable en l'espèce ne prévoit que des minima mensuels sans aucun distinction ni référence à l'ancienneté.

-l'examen des bulletins de salaire de l'intimé montre qu'il a toujours perçu une rémunération supérieure au salaire conventionnel et au SMIC.

-le grief relatif au défaut de prise en compte des jours de fractionnement n'est pas explicité, le salarié n'ayant jusqu'alors jamais fait valoir ses droits à ce titre, ni ne précisant d'ailleurs les jours et périodes concernés et le nombre de jours de congés supplémentaires dont il aurait été privé.

-ce manquement à le supposer établi, ne présente pas un degré de gravité suffisant pour justifier la rupture du contrat aux torts de l'employeur.

-sur la licéité du système de géolocalisation des véhicules de service

-si un système de géolocalisation peut avoir pour finalité le suivi du temps de travail lorsque ce suivi ne peut être réalisé par d'autres moyens, son utilisation est par contre exclue lorsque comme en l'espèce le salarié est libre d'organiser son activité.

-le système mis en place par l'employeur avait pour but selon la notification qui en a été faite au salarié le 17 mai 2006, « de permettre l'amélioration du processus de production par une étude à posteriori de [ses] déplacements » et de permettre à la direction « d'analyser les temps nécessaires à [ses] déplacements pour une meilleure optimisation des visites effectuées. »

-en l'espèce le dispositif litigieux a en réalité été utilisé à d'autres fins, à savoir le contrôle le temps de travail de Monsieur [N] sur la base de relevés GPS du véhicule mis à sa disposition, sans que l'intéressé ait été expressément informé de cette situation ni d'ailleurs des modalités du contrôle et de ses conséquences pécuniaires, ce qui caractérise un détournement du système et de son objet déclaré et rend illégales les déductions opérées par l'employeur sur la rémunération du salarié.

-l'utilisation illicite du système de géolocalisation et les retenues arbitraires de salaire constituent de la part de l'employeur des manquements suffisamment graves pour entraîner la rupture du contrat de travail aux torts de ce dernier.

Sur les demandes de Monsieur [N]

-rappel de salaire de février 2002 à mars 2007 et congés payés afférents

Considérant que pour les motifs exposés plus haut, la réclamation de Monsieur [N] doit être rejetée et le jugement confirmé de ce chef.

-rappel de salaire d'avril à juillet 2007 et congés payés afférents

Considérant que les retenues de salaire pratiquées pendant cette période étant illégales, c'est à bon droit que les premiers juges ont accordé au salarié les sommes qu'il réclame à ce titre soit 2590,65 euros et 259,67 euros.

-indemnité compensatrice de préavis et indemnité de licenciement

Considérant que le dernier contrat de travail signé le 20 octobre 2005 prévoit l'engagement du demandeur à compter de cette date et stipule en son article premier que « l'ancienneté du salarié est reprise en compte à partir du premier jour de travail dans la société. »

Considérant que les conventions doivent s'interpréter en fonction de l'intention présumée des parties.

Considérant en l'espèce que la clause susmentionnée n'a de sens que par rapport aux précédents contrats conclus entre les parties.

Qu'il en résulte que, contrairement à qu'ont énoncé les premiers juges, l'ancienneté de Monsieur [N] dans l'entreprise doit se calculer en totalisant toutes ses périodes de travail successives pour le compte de la société MOREAU EXTINCTEURS.

Considérant qu'il revient à l'intimé selon ses calculs non contestés les sommes suivantes :

-2594,66 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis (deux mois de salaire) et 259,46 euros au titre des congés payés afférents.

-2162,17 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement (sur la base d'une ancienneté de 14 ans).

Considérant que le jugement sera infirmé en ce sens.

-dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

Considérant que la prise d'acte de la rupture du contrat produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Considérant qu'il y a lieu à application de l'article L.1235-3 du Code du Travail, le demandeur ayant plus de deux d'ancienneté et la société défenderesse employant habituellement au moins onze salariés, ce qui ouvre droit pour le salarié à une indemnité équivalente au minimum à six mois de salaires.

Considérant qu'eu égard à ces constatations et aux justificatifs produits, rien ne s'oppose à ce qu'il soit alloué à Monsieur [N] la somme qu'il réclame de ce chef, soit 7783,98 euros.

Que le jugement sera infirmé sur ce point.

-dommages et intérêts pour motif inexact sur l'attestation ASSEDIC

Considérant que la somme de 1400 euros accordée en première instance répare justement le préjudice invoqué à ce titre.

-rectification de l'attestation ASSEDIC et du certificat de travail

Considérant que ces documents devront être rectifiés conformément au présent arrêt.

Considérant que la SA MOREAU EXTINCTEURS qui succombe supportera les dépens et indemnisera Monsieur [N] des frais exposés en appel à concurrence de la somme de 1000 euros.

-remboursement des indemnités de chômage versées au salarié

Considérant qu'en application de l'article L.1235-4 du Code du Travail il y a lieu à remboursement aux organismes concernés des indemnités de chômage versées au salarié dans la limite de six mois d'indemnités.

Considérant que l'appelante doit être déboutée de ses demandes reconventionnelles comme totalement infondées.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement et contradictoirement

Infirmant partiellement le jugement déféré,

Condamne la SA MOREAU EXTINCTEURS à payer à Monsieur [V] [N] les sommes suivantes :

-2594,66 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis.

-259,46 euros au titre des congés payés afférents.

-2162,17 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement.

-7783,98 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Ordonne la rectification de l'attestation ASSEDIC et du certificat de travail en conformité avec le présent arrêt.

Confirme le jugement en ses autres dispositions non contraires aux présentes.

Ajoutant au jugement,

Condamne la SA MOREAU EXTINCTEURS à payer à Monsieur [V] [N] la somme de 1000 euros en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Ordonne le remboursement aux organismes concernés des indemnités de chômage versées au salarié dans la limite de six mois d'indemnités.

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Condamne la SA MOREAU EXTINCTEURS aux dépens d'appel.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 08/08498
Date de la décision : 24/03/2010

Références :

Cour d'appel de Paris K6, arrêt n°08/08498 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-03-24;08.08498 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award