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23/03/2010 | FRANCE | N°08/08728

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 10, 23 mars 2010, 08/08728


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 10



ARRÊT DU 23 Mars 2010



(n° 19 , 4 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : S 08/08728



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 25 Avril 2008 par le Conseil de Prud'hommes de PARIS - RG n° 07/10705



APPELANTE

S.A. EFFIA SERVICES

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Eric MANCA, avocat au barreau de PARIS, P 438





INTIMÉS

Monsieur [G] [E]

[Adresse 1]

[Localité 5]

comparant en personne, assisté de Me Violette ATTAL LEFI, avocate au barreau de PARIS, C 1010

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Tota...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 10

ARRÊT DU 23 Mars 2010

(n° 19 , 4 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 08/08728

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 25 Avril 2008 par le Conseil de Prud'hommes de PARIS - RG n° 07/10705

APPELANTE

S.A. EFFIA SERVICES

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Eric MANCA, avocat au barreau de PARIS, P 438

INTIMÉS

Monsieur [G] [E]

[Adresse 1]

[Localité 5]

comparant en personne, assisté de Me Violette ATTAL LEFI, avocate au barreau de PARIS, C 1010

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 08/052498 du 03/12/2008 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)

S.A.S. ENTREPRISE GUY CHALLANCIN

[Adresse 4]

[Localité 6]

représentée par Me David RAYMONDJEAN, avocat au barreau de la SEINE-SAINT-DENIS substitué par Me Andy LUCADOU, avocat au barreau de la SEINE-SAINT-DENIS,

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 Janvier 2010, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Florence BRUGIDOU, Conseillère, chargée d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Brigitte BOITAUD, Présidente

Monsieur Philippe LABRÉGÈRE, Conseiller

Madame Florence BRUGIDOU, Conseillère

GREFFIÈRE : Madame Corinne de SAINTE MARÉVILLE, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par Madame Brigitte BOITAUD, Présidente

- signé par Madame Brigitte BOITAUD, Présidente et par Madame Chantal HUTEAU, Greffière présente lors du prononcé.

Mr [E] a été engagé à compter du 14 mars 1982 par la société GEP en qualité de cariste attaché à la gestion des chariots à bagage sur le site SNCF gare de l'Est, suivant contrat à durée indéterminé transféré à six reprises dont pour la dernière fois le 1er juillet 2000 à la société CHALLANCIN, et moyennant un salaire brut mensuel s'élevant y compris les primes à 2 361,24 euros. Le 17 avril 2007, cette société l'informait de l'attribution du marché à la société EFFIA. Celle-ci refusait par lettre du 19 juin 2007 sa reprise dans les conditions du contrat de travail existant.

Saisi par Mr [E] d'une demande tendant à voir dire le contrat de travail transféré, à compter du 11 juin 2007, à la société EFFIA, le Conseil de prud'hommes de Paris a, par un jugement du 25 avril 2008, mis hors de cause le SAS GUY CHALLANCIN et prononcé la rupture du contrat de travail à la date du 19 juin 2007 aux torts de la SA EFFIA SERVICES. Il a condamné celle-ci à verser à l'appelant les sommes suivantes :

-5 061 euros à titre d'indemnité légale de licenciement

-16 544,16 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive outre la remise des documents sociaux et l'a débouté pour le surplus ainnsi que la société CHALLANCIN de ses demandes dirigées contre la société EFFIA.

La société EFFIA a relevé appel de cette décision.

Faisant valoir d'une part que la Convention collective des prestataires de services et non de la manutention ferroviaire s'applique à son activité d'autre part que ce marché qui porte notamment sur le recyclage de caddies ne relève pas, faute d'identité économique autonome, des dispositions de l'article L 1224-1 du Code du travail, elle ajoute que contrairement à ce qui est soutenu, elle n'a jamais accepté la reprise des contrats de travail des intéressés. Elle conclut à l'infirmation du jugement ainsi qu'à sa mise hors de cause.

De son côté, la société CHALLANCIN sollicite la confirmation du jugement ainsi que la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile. Elle souhaite que les sommes allouées soient minorées.

De même Mr [E] conclut à la confirmation du jugement mais forme un appel incident. Il demande, qu'en application de l'article 15 ter de la Convention collective du personnel des entreprises de manutention ferroviaire et travaux connexes et de l'article L 1224-1 du Code sus visé, il soit jugé que son contrat a été transféré à compter du 11 juin 2007 à la société EFFIA et à défaut que la responsabilité de la rupture incombe à la société CHALLANCIN. Il sollicite la condamnation de la société EFFIA à lui verser les sommes suivantes :

-899,52 € au titre des salaires du 11 au 19 juin 2007

-3 598,06 € au titre des congés payés

-4722,48 euros au titre du préavis

-787,08 € de congés payés pour juin et congés payés préavis

-2068,02 euros au titre de la prime de fin d'années 2006 et 2007

-8 264,34 € au titre de l'indemnité de licenciement

-110'000 € à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive

-15'000 € à titre de dommages-intérêts pour brusque rupture

-10'000 € à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral

-2000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile de première instance

-1500 € au titre de cet article en cause l'appel outre les intérêts au taux légal.

Il est expressément fait référence pour les prétentions et moyens des parties aux conclusions visées et soutenues le 15 janvier 2010.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur l'application de l'article L 1224-1 du Code du travail

La société EFFIA fait valoir que, contestant l'application en l'espèce de l'article L 1224-1 du Code sus visé qu'elle n'aurait pu éluder d'ailleurs, dans le cas contraire, s'agissant d'une disposition d'ordre public, elle n'a à aucun moment entendu procéder à la reprise des contrats de travail . Elle soutient que, ne relevant pas de la Convention collective ferroviaire, comme le prouve un jugement rendu le 17 février 2009 par le Tribunal de Grande Instance de Paris mais de celle des prestataires de services, son article 15 ter ne lui est par conséquent inapplicable. Elle indique par ailleurs qu'elle n'a fait que reprendre l'activité de recyclage de caddies de la société CHALLANCIN, la seule affectation de salariés à l'exécution d'un marché ne suffisant pas, faute de transfert concomitant de moyens d'exploitation corporels ou incorporels, à constituer une entité économique autonome. Elle relève que la société CHALLANCIN ne produit rien à cet égard.

Considérant que le maintien des contrats de travail en cours au jour de la modification de la situation juridique de l'employeur, prévu par l'article L 1224-1 du Code du travail, s'applique, même en l'absence d'un lien de droit entre les employeurs successifs, à tout transfert d'une entité économique laquelle suppose outre l'activité, des moyens propres corporels ou incorporels permettant de poursuivre cette activité ;

Qu'en l'espèce l'attribution à la société EFFIA du marché de la gestion du parc de chariots, au sein de la gare SNCF de l'Est, est intervenu, selon le contrat du 23 avril 2007, dans le cadre d'un marché regroupant l'ensemble des services proposé notamment aux usagers dans cette gare qui lui étaient dorénavant confiés ; qu' en effet selon son courrier du 19 juin 2007, la société EFFIA faisait valoir qu'elle avait en charge 'l'accompagnement des personnes handicapées, les transferts et portage de bagages groupes et individuels, la gestion des consignes et objets trouvés ainsi que la gestion du parc chariots mis à la disposition de la clientèle voyageur' ;

Considérant qu'au seul motif que l'activité portant sur les caddies n'est qu'un partie du marché ainsi convenu, la bénéficiaire ne peut s'exonérer unilatéralement des dispositions d'ordre public de l'article sus-visé alors que l'entitée économique, que constituait le recyclage des caddies antérieurement consenti au groupe CHALLANCIN portant sur le matériel, les prestations assurées ainsi que les salariés attachés à ce service, était parfaitement identifiable et qu'elle se trouvait maintenue au sein de la société EFFIA ; que le transfert de cette activité se trouve donc soumis aux dispositions précitées ; que le jugement sera confirmé sur ce point;

Sur les conséquences financières de la rupture

Considérant que sont sollicitées les sommes dues au titre de la rupture abusive du contrat de travail ; que celle-ci sont justifiées ; qu'il convient d'y faire droit à hauteur des montants réclamés, la société EFFIA devant supporter la totalité des salaires, soldes de congés payés et primes dues au titre des années 2007 et 2008 ainsi qu'au titre du préavis et l'indemnité de licenciement, outre les intérêts au taux légal ;

Considérant que s'agissant des conséquences de la non reprise par la société EFFIA de son contrat de travail, Mr [E] ne peut se voir opposer son refus légitime d'accepter le contrat proposé alors par cette société, lequel comportait des modifications essentielles de son contrat ; que la société EFFIA doit être en conséquence condamnée à indemniser ce salarié de l'ensemble des préjudices subis ;

Considérant qu'il est justifié de ce que Mr [E], dont l'ancienneté était de 25 ans, n'a pas retrouvé d'emploi ; que par ailleurs les circonstances de la rupture du contrat de travail, résultant du non respect par la société EFFIA de ses obligations légales, se sont avérées soudaines et inattendues, le laissant dans l'incertitude et dans en situation de précarité, faute de document sur la rupture de son contrat de travail, alors qu'il avait une famille à charge ; qu'au vu de ces éléments qui sont la cause d'un préjudice matériel et moral important, les dommages et intérêts seront appréciés à la somme globale de 40 000 euros ; que la décision du Conseil de prud'hommes sera réformée à cet égard ;

Sur la mise hors de cause de la société CHALLANCIN

Considérant que la mise hors de cause de la société CHALLANCIN justement prononcée par les premiers juges sera confirmée ; que ses demandes seront rejetées ;

Sur l'article 700 du Code de procédure civile

Considérant qu'il serait inéquitable que la totalité des frais irrépétibles demeure à la charge de Mr [E] ; qu'il sera fait droit à sa demande à ce titre pour la somme de 2500 euros comprennant tant les frais de 1er instance que d'appel ; que les demandes formées à ce titre par les autres parties seront rejetées ;

PAR CES MOTIFS

Réforme le jugement

Condamne la société EFFIA à verser à Mr [E] les sommes suivantes :

-899,52 € au titre des salaires du 11 au 19 juin 2007

-3 598,06 € au titre des congés payés

-4722,48 euros au titre du préavis

-787,08 € de congés payés pour juin et congés payés préavis

-2068,02 euros au titre de la prime de fin d'années 2006 et 2007

-8 264,34 euros au titre de l'indemnité de licenciement

augmentées des intérêts au taux légal,

Condamne la société EFFIA à verser à Mr [E] la somme de 40 000 euros à titre de dommages et intérêts toutes causes de préjudice confondues outre les intérêts au taux légal pour la rupture abusive de son contrat de travail,

Confirme pour le surplus,

Y ajoutant,

Condamne la société EFFIA à verser à Mr [E] la somme de 2500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

Rejette les autres demandes,

Condamne la société EFFIA aux dépens,

LE GREFFIER LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 10
Numéro d'arrêt : 08/08728
Date de la décision : 23/03/2010

Références :

Cour d'appel de Paris L1, arrêt n°08/08728 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-03-23;08.08728 ?
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