Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 3
ARRET DU 09 MARS 2010
(n° 130 , 6 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 09/10618
Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 07 Avril 2009 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2009009357
APPELANTES
SA TSAF - OTC agissant poursuites et diligences de son représentant légal
[Adresse 1]
[Localité 3]
SA TRADITION SECURITIES AND FUTURES agissant poursuites et diligences de son représentant légal
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentées par la SCP FISSELIER - CHILOUX - BOULAY, avoués à la Cour
assistées de Maître Jean-Marc FEDIDA, avocat au barreau de PARIS, toque E 485
INTIME
Monsieur [M] [W]
[Adresse 2]
[Localité 4]
représenté par la SCP GARNIER, avoués à la Cour
assisté de Me Ariane SIC SIC, plaidant pour la SCP CHENEAU PUYBASSET, avocats au barreau de PARIS, toque : P 459
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 09 Février 2010, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Joëlle BOURQUARD, Président de chambre
Madame Claire DAVID, Conseiller
Madame Sylvie MAUNAND, Conseillère
qui en ont délibéré
sur le rapport de Madame Sylvie MAUNAND
Greffier, lors des débats : Mlle Véronique COUVET
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Jöelle BOURQUARD, président et par Mlle Véronique COUVET, greffier.
M [W] a déposé le 30 décembre 2008 une requête afin de nomination d'un huissier de justice pour assister aux assemblées générales des sociétés TSAF et TSAF OTC du 5 janvier 2009.
La SCP DUPARC DUPARC CRUSSARD a été désignée par ordonnance du Président du tribunal de commerce de Paris du 30 décembre 2008.
Les sociétés TSAF et TSAF OTC ont, par acte du 18 février 2009, fait assigner M [W] devant le Président du tribunal de commerce statuant comme en matière de référé afin d'obtenir la rétractation de l'ordonnance rendue le 30 décembre 2008. Elles ont sollicité, en outre, la condamnation de M [W] à leur payer des sommes à titre de dommages intérêts et au titre des frais irrépétibles.
Par ordonnance du 7 avril 2009, le Président du tribunal de commerce a maintenu l'ordonnance en toutes ses dispositions et condamné les deux sociétés au paiement d'une somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Les sociétés TSAF et TSAF OTC, appelantes, demandent à la cour aux termes de leurs conclusions déposées le 22 décembre 2009 de :
constater que M. [W] était à la date du 30 décembre 2008 dépourvu des qualités d'actionnaire, d'administrateur et de président du conseil d'administration des sociétés TSAF et TSAF OTC ;
infirmer, en conséquence, l'ordonnance entreprise ;
prononcer la rétractation de l'ordonnance sur requête rendue le 30 décembre 2008 ;
dire que M. [W] qui était dépourvu de toute qualité pour présenter cette requête, a commis une faute génératrice d'un préjudice pour les sociétés TSAF et TSAF OTC ;
le condamner à leur payer la somme de 5.000 euros à titre de dommages intérêts et celle de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
M. [W] souhaite, aux termes de ses écritures déposées le 19 janvier 2010, voir la cour :
surseoir à statuer dans l'attente de l'issue de la procédure pénale en cours, initiée par la plainte déposée le 5 mars 2009 par les sociétés TSAF et TSAF OTC ;
subsidiairement, infirmer l'ordonnance en ce qu'elle a déclaré recevables les demandes formées par les sociétés TSAF et TSAF OTC mais la confirmer en ce qu'elle les a rejetées ;
déclarer irrecevables l'ensemble des demandes des sociétés TSAF et TSAF OTC et les rejeter ;
en tout état de cause, confirmer l'ordonnance ;
condamner in solidum les sociétés TSAF et TSAF OTC à lui payer la somme de 8.000 euros au titre des frais irrépétibles et aux dépens.
SUR CE, LA COUR
Considérant que les sociétés TSAF et TSAF OTC soutiennent que M [W] ne pouvait pas obtenir la désignation d'un huissier pour assister aux assemblées générales des deux sociétés dès lors qu'il n'était ni actionnaire, ni administrateur ni président du conseil d'administration desdites sociétés ; qu'il ne détenait aucune action des sociétés et n'avait pas régularisé cette situation devenu administrateur ; que , de plus, il a été révoqué de ses fonctions de président du conseil d'administration le 15 décembre 2008 ; que le président du tribunal de commerce n'était pas saisi de la validité des décisions antérieures des organes sociaux, que la loi du 4 août 2008 ne pouvait avoir aucun effet rétroactif sur la qualité de M [W] ;
Considérant qu'elles ajoutent être recevables à demander la rétractation de l'ordonnance sur le fondement de l'article 496 du code de procédure civile ; qu'elles rappellent que M [W] s'est vu confier des responsabilités opérationnelles au sein du groupe sans avoir été désigné président de la structure ; qu'il a été licencié pour faute lourde ;
Considérant que M. [W] sollicite le sursis à statuer dans l'attente de l'issue de la procédure pénale initée par ses adversaires dès lors que celle-ci a nécessairement une influence sur la procédure civile ; qu'à l'appui de sa demande de sursis à statuer, il se borne à produire une convocation le concernant devant les services de police relative à des faits d'escroquerie au jugement sans autre précision pour laquelle il lui est demandé de produire les originaux des procès-verbaux des conseils d'administration du 15 décembre 2008 des sociétés TASAF et TSAF OTC et tous documents utiles dans le litige l'opposant aux dirigeants de ces sociétés ; qu'il s'ensuit qu'en l'absence de précision sur la plainte déposée par lM.BEC, directeur général de TSAF, l'influence de la procédure pénale sur l'issue de la présente procédure n'est pas démontrée et la demande de sursis à statuer est rejetée ;
Considérant que M [W] soutient que les deux sociétés n'ont aucun intérêt à agir dès lors que la requête avait pour but de désigner un huissier pour assister aux assemblées générales sans en empêcher la tenue ; que l'huissier y a d'ailleurs assisté ; qu'il ajoute que l'intérêt des sociétés ne doit pas se confondre avec celui de certains de ses actionnaires et dirigeants ; qu'il estime que les deux sociétés sont donc irrecevables à agir dans la présente instance ;
Considérant que s'il est exact que la requête présentée par M.[W] n'avait pour but que de permettre à un huissier d'assister aux assemblées générales des sociétés TSAF et TSAF OTC, ces sociétés ont néanmoins un intérêt à agir en rétractation de l'ordonnance donnant cette autorisation dès lors qu'elles contestaient la qualité de celui qui l'avait présentée et que sa participation avec un huissier à ces assemblées s'il était tiers pouvait lui permettre d'obtenir des informations confidentielles ;
Considérant que le fait que l'huissier ait désormais assisté aux assemblées générales n'empêche pas lesdites sociétés si la rétractation intervenait, de solliciter des dommages intérêts pour le préjudice éventuellement subi du fait de cette présence ;
Qu'il s'ensuit qu'il convient de déclarer les sociétés TSAF et TSAF OTC recevables à agir en rétractation de l'ordonnance du 30 décembre 2008 ;
Considérant qu'il expose avoir toujours la qualité de président du conseil d'administration de chacune des sociétés au jour du dépôt de la requête dès lors que la révocation intervenue le 15 décembre 2008 est irrégulière ; qu'il était aussi administrateur dès lors que la loi du 4 août 2008 était applicable et qu'il avait continué à exercer ses fonctions d'administrateur après son entrée en vigueur ; qu'au surplus, il avait été convoqué aux deux assemblées générales ce qui suffit à lui conférer qualité à agir ;
Considérant que la qualité d'actionnaire, d'administrateur ou de président du conseil d'administration autorisant M.[W] à présenter la requête en désignation d'huissier est contestée ; que cette qualité doit être appréciée au jour où la requête a été présentée soit le 30 décembre 2008 ;
Considérant qu'il résulte d'un constat d'huissier en date du 22 décembre 2008 que M.[W] n'était propriétaire d'aucune action des sociétés TSAF et TSAF OTC ce qu'il ne conteste pas ;
Considérant que les sociétés TSAF et TSAF OTC soutiennent qu'il n'était plus président du conseil d'administration depuis le 15 décembre 2008, date à laquelle il avait été mis fin à ses fonctions ;
Considérant toutefois que les circonstances de cette révocation sont sujettes à caution ; que M. [W] a régulièrement convoqué un conseil d'administration de chacune des deux sociétés pour le 15 décembre à 15 et 16 heures ; qu'il s'y est présenté accompagné d'un huissier, que d'autres membres du conseil en ont fait de même ; qu'il résulte du procès-verbal de Maître [V] dressé à la demande de M.[W], que les parties ne s'étant pas accordées sur la présence des huissiers, la réunion a été ajournée et une nouvelle convocation devait intervenir ; que le procès-verbal de Maître [X] dressé à la demande d'autres membres du conseil, fait état d'un désaccord, de la sortie de M.[W] et des huissiers puis dans la mesure où ledit huissier étant resté présent dans la société, de la demande des autres membres du conseil d'administration de le voir assister à la suite du conseil ; qu'il existe donc une contradiction entre les deux procès-verbaux quant à la décision d'ajournement ; que, de plus, il est versé aux débats deux procès-verbaux de réunions du conseil d'administration contraires rédigés manifestement par chacune des parties ; qu'un des participants représentant les salariés a toutefois exposé avoir été rappelé après l'ajournement de la réunion pour participer à une seconde réunion en présence de l'huissier ; que la régularité de la révocation de M.[W] en qualité de Président du conseil d'administration n'est pas certaine dès lors que les conditions de la tenue de la réunion après le départ de M.[W] sont discutables ;
Considérant, qu'au demeurant, M. [W] a, en cette qualité, convoqué une nouvelle réunion du conseil d'administration de ces sociétés pour le 22 décembre 2008 ; que celle-ci, à laquelle un huissier désigné pour y assister à la demande de M. [W] par ordonnance du président du tribunal de commerce de Paris du 22 décembre 2008 ne s'est pas, après de longues discussions entre les parties relatées par l'huissier, tenue dès lors que la qualité de président du conseil d'administration de M. [W] était contestée par certains membres du conseil invoquant la révocation prononcée lors de la précédente réunion ;
Considérant que, s'agissant de la qualité d'administrateur de M. [W] également contestée par les deux sociétés aux motifs que celui-ci aurait été démissionnaire d'office à compter du 27 mai 2007 faute d'être titulaire d'actions des sociétés conformément aux statuts en vertu de l'article L225-25 du code de commerce dans sa rédaction du 15 mai 2001, il convient de relever que M. [W], désigné le 27 février 2007, en qualité d'administrateur, n'a jamais été mis en demeure de régulariser sa situation et les deux sociétés l'ont laissé poursuivre ses activités en leur sein sans aucune observation de ce chef ; qu'à aucun moment, il n'a été constaté cette démission d'office et le remplacement de l'intéressé en qualité d'administrateur ; que cette argumentation si elle devait être suivie laisserait donc supposer que toutes les décisions prises par l'intéressé depuis le 27 mai 2007 sont sujettes à annulation, qu'il n'a pas pu valablement convoquer le conseil d'administration du 15 décembre 2008 au cours duquel il a été révoqué de ses fonctions de président du conseild 'administration ; qu'elle ne saurait donc prospérer alors même que lesdites sociétés dans leur procès-verbal de réunion du 15 décembre 2008 mentionnent que le conseil d'administration décide à l'unanimité de convoquer une assemblée générale pour le lundi 5 janvier 2009 sur l'ordre du jour suivant « révocation du mandat d'administrateur de M.[W] »; qu'il résulte de cette énonciation qu'elles ne considéraient pas l'intéressé comme démissionnaire à cette date ;
Considérant que, de plus, l'article 57 de la loi du 4 août 2008 modifiant l'article précité énonce que « les statuts peuvent imposer que chaque administrateur soit propriétaire d'un nombre d'actions de la société qu'ils déterminent, que, si, au jour de sa nomination, un administrateur n'est pas propriétaire du nombre d'actions requis ou si, en cours de mandat, il cesse d'en être propriétaire, il est réputé démissionnaire d'office s'il n'a pas régularisé sa situation dans le délai de six mois » ; que ce délai de six mois n'a pu, en l'espèce, commencé à courir qu'à compter de l'entrée en vigueur de la loi et au jour où l'ordonnance a été prononcée, le délai pour régulariser n'était pas expiré ; que M.[W] pouvait donc revendiquer la qualité d'administrateur des deux sociétés TSAF et TSAF OTC au jour du prononcé de l'ordonnance du 30 décembre 2008 ;
Considérant, en conséquence, que M.[W] avait encore qualité et intérêt pour présenter sa requête et solliciter la désignation d'un huissier pour assister à l'assemblée générale du 5 janvier 2009 ; que l'ordonnance du 7 avril 2009 qui a rejeté la demande de rétractation de l'ordonnance du 30 décembre 2008 , doit donc être confirmée;
Considérant dès lors qu'il n'y a pas lieu d'examiner la demande de dommages intérêts présentée par les sociétés TSAF et TSAF OTC à l'encontre de M.[W] ;
Considérant qu'il convient de condamner les appelantes à verser une indemnité complémentaire de 5.000 euros à M.[W] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Considérant que, succombant, les sociétés TSAF et TSAF OTC ne sauraient prétendre à l'allocation d'une somme au titre des frais irrépétibles et doivent supporter les dépens d'appel ;
PAR CES MOTIFS :
Rejette la demande de sursis à statuer présentée par M.[W] ;
Déclare les sociétés TSAF et TSAF OTC recevables en leurs demandes ;
Confirme en toutes ses dispositions l'ordonnance du 7 avril 2009 rendue par le président du tribunal de commerce de Paris ;
Rejette la demande des sociétés TSAF et TSAF OTC présentée au titre des frais irrépétibles ;
Condamne les sociétés TSAF et TSAF OTC à payer la somme complémentaire de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne les sociétés TSAF et TSAF OTC aux dépens qui seront recouvrés par la SCP MIREILLE GARNIER, avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIERLE PRESIDENT