Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 2 - Chambre 1
ARRET DU 9 MARS 2010
(n° 85, pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 08/07920
Décision déférée à la Cour : Jugement du 27 Mars 2008 -Tribunal de Grande Instance de BOBIGNY - RG n° 05/149984
APPELANTE
Société ABDELLAHI OULD NOUEYGUED A.O.N. agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux
[Adresse 3]
[Localité 1] MAURITANIE
représentée par la SCP GRAPPOTTE BENETREAU JUMEL, avoués à la Cour
assistée de Me Gildas ROSTAIN, avocat au barreau de , toque : P 429
INTIMES
Maître [B] [T]
[Adresse 5]
[Localité 6]
représenté par la SCP ARNAUDY - BAECHLIN, avoués à la Cour
assisté de Me Barthélémy LACAN, avocat au barreau de PARIS, toque : E 435
Société MUTUELLES DU MANS ASSURANCES IARD
[Adresse 2]
[Localité 4]
représenté par la SCP ARNAUDY - BAECHLIN, avoués à la Cour
assistée de Me Barthélémy LACAN, avocat au barreau de PARIS, toque : E 435
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 11 Janvier 2010, en audience publique, le rapport entendu conformément à l'article 785 du code de procédure civile, devant la Cour composée de :
Monsieur François GRANDPIERRE, Président de chambre
Mme Brigitte HORBETTE, Conseiller
Madame Dominique GUEGUEN, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier, lors des débats : Mme Noëlle KLEIN
ARRET :
- contradictoire
- rendu publiquement
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur François GRANDPIERRE, Président et par Madame Noëlle KLEIN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
******************
La société Abdellahi Ould Noueygued, société de droit mauritanien dite 'AON', reproche à M. [T], notaire, d'avoir, le 22 janvier 2004 vendu un bien immobilier et versé au vendeur, la société VERBENA, l'intégralité du prix, sans tenir compte de l'hypothèque judiciaire provisoire qu'elle avait inscrite le 23 décembre 2003 sur cet immeuble en garantie de la créance de 351 769,20 USD (285 309,56 €) qu'elle détenait contre cette société, hypothèque qu'elle avait dénoncée à la débitrice le 30 décembre 2003.
Elle a donc réclamé au notaire le paiement de cette somme en réparation de ce préjudice en exposant qu'elle a obtenu du tribunal de commerce, par jugement du 9 mars 2005 assorti de l'exécution provisoire, la condamnation de la société VERBENA à lui régler la contre valeur en euros de la dite somme, avec intérêts au taux légal et capitalisation, outre 5 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement du 27 mars 2008, le tribunal de grande instance de Bobigny a débouté la société AON de ses demandes en considérant que, le jugement étant frappé d'appel, la créance n'est pas définitive et faute pour AON d'avoir pu effectuer la publicité définitive de la sûreté prévue à l'article 263 du décret du 31 juillet 1992.
CECI ÉTANT EXPOSÉ, LA COUR,
Vu l'appel de ce jugement par la société AON en date du 21 avril 2008,
Vu ses dernières conclusions déposées le 5 janvier 2010 selon lesquelles, poursuivant l'infirmation du jugement, elle demande la condamnation solidaire de M. [T] et de son assureur à lui verser les sommes allouées par un arrêt de la cour d'appel de Paris du 28 mars 2008, savoir : 214 408,23 € avec intérêts au taux légal à compter du 16 janvier 2004 et ce avec anatocisme, 4 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, 5 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile alloués par le tribunal de commerce, ainsi que leur condamnation solidaire à lui verser la somme de 10 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les entiers dépens,
Vu les dernières conclusions déposées le 31 décembre 2009 par lesquelles M. [T] et la société mutuelle du Mans Assurances IARD demandent de débouter la société AON qui n'a pas procédé utilement à la publicité définitive à la suite de l'arrêt du 28 mars 2008 constituant son titre exécutoire, en conséquence, constater la déchéance de l'inscription provisoire du 23 décembre 2003 et l'absence de lien de causalité entre la situation préjudiciable alléguée et le grief et la condamner à leur payer 4 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
SUR CE,
Considérant qu'au soutien de son appel, la société AON se prévaut désormais d'un arrêt du 28 mars 2008 qui, confirmant partiellement le jugement du tribunal de commerce, lui a accordé le montant de sa créance, outre des intérêts et des indemnités procédurales ; qu'elle soutient que la faute du notaire, incontestable, a été retenue par le jugement querellé ; qu'elle explique qu'elle n'a pu en obtenir l'exequatur au LIECHTENSTEIN, la société VERBENA, de droit luxembourgeois, ayant disparu du registre du commerce de la principauté ; qu'elle ne peut donc accomplir les formalités de l'article 263 du décret du 31juillet 1992, soulignant que seul le 3ème cas lui est applicable ; qu'elle a cependant 'dans un pur souci de formalisme' procédé à l'inscription définitive de son hypothèque le 21 juillet 2009 ;
Considérant qu'à rebours M. [T] et son assureur soutiennent que, le titre ayant constaté les droits de la société AON tenant à l'arrêt du 28 mars 2008, elle devait, ce dont elle s'est abstenue, opérer la publicité définitive de son titre dans les deux mois de cet arrêt, conformément à l'article 263 du décret du 31juillet 1992précité, alors qu'elle ne l'a fait que le 21 juillet 2009 ; que son inscription provisoire est donc caduque ; qu'il n'y a donc aucun lien de causalité entre la faute qui est imputée au notaire et le préjudice qui résulte de la carence de la société AON dont ils contestent l'interprétation qu'elle fait des termes de l'article 263 dudit décret ;
Considérant que, si la faute du notaire, qui a remis l'intégralité du prix à la société Verbena, venderesse, sans vérifier auparavant, par la réquisition d'un état hypothécaire sur formalités, l'existence de sûretés sur l'immeuble, et donc sans procéder à la consignation de la partie du prix qui pouvait revenir à la société créancière conformément à l'article 258 du décret susvisé, n'est pas discutée, encore faut-il que soit démontré que cette faute est à l'origine du préjudice allégué par la société AON ;
Considérant que cette société a obtenu la fixation définitive de sa créance par l'arrêt de la cour ci-avant évoqué du 28 mars 2008 ; que cette décision, qui a l'autorité de chose jugée, et ce, sans qu'il soit besoin de procéder à sa signification et donc son exequatur, fixe le point de départ du délai de deux mois prévu au 1° de l'article 263 du décret du 31 juillet 1992 précité ; qu'il est constant que la société AON n'a procédé à cette inscription définitive que le 21 juillet 2009, ce qui a pour conséquence que son inscription d'hypothèque judiciaire provisoire est devenue caduque au lieu que, accomplie dans les délais, l'inscription définitive se substitue, à sa date et son rang, à l'inscription provisoire ;
Qu'il en résulte que la société AON, par son abstention, se trouve dépourvue du droit d'être payée sur les fonds qui auraient dû être consignés et que, partant, la faute du notaire est sans lien avec son préjudice qui tient à sa carence à l'inscription définitive de son hypothèque dans les délais requis ;
Considérant que, pour ces motifs, le jugement, qui a débouté la société AON, sera confirmé ;
Considérant que l'équité ne commande pas, en l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ; qu'en considération de la faute commise par M. [T], il sera condamné aux entiers dépens de première instance et d'appel ;
PAR CES MOTIFS,
Confirme le jugement,
Condamne M. [T] aux entiers dépens de première instance et d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT