Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 5
ARRET DU 3 MARS 2010
(n° , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 08/16349
Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Février 2008 -Tribunal de Grande Instance de BOBIGNY 6ème chambre 5ème section - RG n° 06/09582
APPELANTES ET INTIMEES
S.A. AXA FRANCE IARD, venant aux droits de la COMPAGNIE NATIONALE SUISSE ASSURANCES
agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux
ayant son siège [Adresse 4]
représentée par la SCP MOREAU, avoués à la Cour
assistée de Maître THELIVENEY (selarl FIZELLIER) avocat
SOCIETE CIVILE MACIF -MUTUELLE ASSURANCES DES COMMERCANTS & INDUSTRIELS DE FRANCE
représentée par son Président du conseil d'Administration
ayant son siège [Adresse 3]
représentée par la SCP GOIRAND, avoués à la Cour
assistée de Maître HILTZER HUTTEAU avocat
INTIMEES
S.C.I. JIMPHI
prise en la personne de son gérant
ayant son siège [Adresse 2]
représentée par Me Luc COUTURIER, avoué à la Cour
assistée de Maître GROSSMAN avocat
[Adresse 5]
Représenté par son syndic Monsieur [C] [N]
[Adresse 1]
ayant son siège [Adresse 5]
représenté par la SCP MIRA - BETTAN, avoués à la Cour
assisté de Maître MICHEL avocat
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 12 janvier 2010, en audience publique, devant la Cour composée de :
Monsieur Michel ZAVARO, président
Madame Marie-José THEVENOT, conseillère
Madame Dominique BEAUSSIER, conseillère
qui en ont délibéré.
rapport oral de Monsieur ZAVARO président conformément aux dispositions de l'article 785 du code de procédure civile
Greffier, lors des débats : Madame Marie-Hélène ROULLET
ARRET :
- contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile.
- signé par Monsieur ZAVARO, président et par Madame ROULLET, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire
Par jugement du 28 février 2008, le tribunal de grande instance de BOBIGNY a condamné la MACIF relevée et garantie par la société Nationale Suisse d'assurance, assureur du locataire, la SARL Etoile 3 à indemniser la SCI JIMPHI de la destruction de son immeuble à la suite de l'incendie survenu dans ses locaux le 3 décembre 2001.
La MACIF a relevé appel de ce jugement ; Dans ses conclusions du 3 novembre 2009, elle en sollicite l'infirmation :
1) en ce qu'il la condamne à payer une somme de 116.000 € correspondant aux agencements qui sont exclus de sa garantie
2) en ce qu'il la condamne à payer une somme de 340.000 € au titre de la reconstruction du clos et du couvert parce qu'il s'agit des parties communes d'une copropriété au sein de laquelle la SCI ne détient que 240/10.000 ème et que le quantum de la demande n'est pas établi.
Elle demande cependant qu'il soit confirmé en ce qu'il a condamné AXA France aux droits de la société Nationale Suisse d'assurance à la relever et garantir et sollicite la condamnation d'AXA à lui payer la somme de 36.880,52 € qu'elle a réglée à la SCI en exécution de deux ordonnances de référé et celle de 200.782 € qu'elle a réglée dans le cadre de l'exécution provisoire du jugement. Elle demande en outre la confirmation du jugement déféré qui lui a alloué 5.000 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile et l'allocation de 7.000 € pour les frais exposés en cause d'appel.
AXA France aux droits de la Cie Nationale Suisse d'assurance reprend les conclusions de la MACIF sur les demandes de la SCI concernant les agencements et le clos et le couvert. Elle rappelle que sa garantie est limitée à 304.898 € pour les risques locatifs et à 33.538,78 € pour le contenu des locaux sinistrés et demande la confirmation du jugement déféré qui ne retient sa garantie que dans les limites de la police. Elle ajoute qu'en laissant les lieux ouverts pendant près de 3 ans, la SCI a mis l'assureur dans l'impossibilité de démontrer que le sinistre n'était pas imputable à son locataire. Enfin, elle demande que le jugement déféré soit infirmé en ce qu'il la condamne à payer des frais de procédure. Elle sollicite elle même 5.000 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile.
La SCI a conclu le 27 novembre 2009.Elle a repris les mêmes demandes dans des conclusions notifiées le 8 janvier 2010. AXA a déposé postérieurement des conclusions pour que les écritures du 8 janvier 2010 soient écartées des débats. Il n'y a pas lieu de faire droit à la demande, ces écritures n'apportant rien de nouveau de telle sorte qu'elle ne porte pas atteinte au contradictoire.
La SCI sollicite la confirmation du jugement en ce qu'il condamne la MACIF à lui payer 433.000 € à titre de dommages intérêts plus 4% au titre pour les honoraires de l'expert et 12 % pour les honoraires de l'architecte. Elle demande les intérêts de ces sommes à compter du sinistre.
La SCI demande en outre que AXA soit condamnée à lui payer la somme de 353.000 € au titre des dommages matériels, 46.303,35 € au titre des pertes de loyer, 15% au titre des honoraires d'experts et 12% au titre des honoraires d'architecte.
La SCI demande enfin condamnation solidaire d'AXA et de la MACIF à lui payer 50.000 € à titre de dommages intérêts et 10.000 € en application de l'article 700 outre la confirmation du jugement en ce qu'il lui alloue 7.000 € et les dépens y compris les frais d'expertise.
La copropriété '[Adresse 5]' appelée en la cause sans qu'il soit formé de demande à son encontre conclut qu'au cas où les demandes de la SCI portant sur les parties communes seraient rejetées, la somme de 340.000 € plus 12% d'honoraires d'architecte lui soit allouée. Elle demande 3.000 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile.
AXA et la MACIF concluent au rejet de cette demande qui est présentée pour la première fois en cause d'appel, AXA rappelant qu'elle a exécuté le jugement assorti de l'exécution provisoire, et qu'il appartiendrait le cas échéant à la copropriété de se retourner contre la SCI.
Sur ce
La SCI JIMPHI est propriétaire au sein du centre commercial de l'avenue Anatole France à Clichy sous bois de deux locaux commerciaux qu'elle a donnés en location le premier à la SARL Etoile 3 et le second à Monsieur [P] [E]. Ces locaux ont été détruits dans un incendie survenu le 3 décembre 2001dans les locaux de la société Etoile 3.
L'incendie n'a touché que les locaux de la SCI JIMPHI.
L'expert Monsieur [O] a été désigné le 12 septembre 2003. Il a déposé son rapport le 27 février 2005. Il a évalué les dommages:
- Pour le bar de la SARL ETOILE 3:
- Clos et couvert: 230.000 €
- Agencement: 68.000 €
- Mobilier matériel: 55.000 €
- Pertes de loyers 22.562 €
- Pour le local boulangerie de Monsieur [P]
- Clos couvert: 110.000 €
- Agencement: 48.000 €
- Mobilier Matériel: 24.000 €
- Pertes de loyers : 20.235 €
Sur la recevabilité de la SCI :
L'incendie n'a touché que les lots de la SCI. Les travaux de remise en état du clos et du couvert des fonds de commerce ont été effectués par la SCI. Il résulte d'une lettre du 1er juillet 2005 de Monsieur [N] que la SCI a procédé seule à la remise en état des deux lots et qu'elle a réglé seule les travaux ainsi que les honoraires de l'architecte.
Les assureurs soulèvent l'irrecevabilité de la SCI du chef des agencements qui seraient la propriété des locataires commerciaux. Il n'est cependant pas contesté que les baux ont été résiliés de plein droit après le sinistre ainsi que le rappelle le conseil de la SCI, citant la MACIF de telle sorte que la perte des agencements préjudicie à la SCI qui en serait devenue propriétaire en vertu des baux si elle ne l'était déjà et s'ils n'avaient pas été détruits.
La SCI est donc recevable à demander le remboursement des sommes exposées pour la reconstruction de ses lots et pour la perte des agencements. Il n'y a pas lieu de statuer sur la demande de la copropriété qui est formulée à titre subsidiaire.
Sur la réparation des préjudices:
Le départ du feu se situe derrière le bar ETOILE 3. Ses causes sont restées indéterminées.
Axa, aux droits de la compagnie Nationale Suisse Assurances conclut que si elle n'est pas en mesure de démontrer une cause d'exonération de la responsabilité de son assuré la société ETOILE 3, la faute en incombe à la SCI qui a laissé les lieux ouverts à tous et a attendu un an et demi avant de solliciter la désignation d'un expert judiciaire. Elle ajoute qu'en application de l'article 1733 du Code civil la responsabilité de son assuré est limitée au titre des désordres affectant les parties communes au prorata des tantièmes occupés par l'assuré et au titre des désordres affectant les parties privatives aux dommages affectant le seul lot qui lui a été attribué.
Enfin, AXA et la MACIF assureur de la SCI contestent l'évaluation faite par l'expert des conséquences financières du sinistre.
Le travail de l'expert établit suffisamment le quantum du préjudice de la SCI. Le coût des travaux doit être augmenté du coût de la maîtrise d'oeuvre. La police de la MACIF prévoit un plafond de garantie au titre des honoraires d'experts (4% de 433.000 €). Il n'est pas justifié du montant des honoraires versés aux techniciens qu'elle a consultés en qualité d'experts pour la gestion de ce sinistre. La demande formée de ce chef sera donc traité comme frais irrépétibles de procédure.
La SCI a régulièrement fait sa déclaration de sinistre et n'a demandé la désignation d'un expert judiciaire qu'après que les assureurs ont refusé de se mettre d'accord sur les conséquences du sinistre. Il n'y a donc aucun préjudice pour AXA, dont les experts ont pu accéder aux lieux bien avant l'expert judiciaire, et aucune faute de la part de la SCI.
Enfin, il résulte des dispositions combinées des articles 1733 et 1734 du code civil que la société ETOILE 3 répond de l'incendie faute de prouver qu'il est arrivé par cas fortuit ou force majeure ou par le vice de construction et en répond seul bien qu'il y ait plusieurs locataires puisque l'incendie a commencé chez elle.
La demande de la SCI se limite aux travaux de remise en état du clos et du couvert ainsi que des agencements soit 456.000 € sous déduction de la provision de 23.000 € versée à la suite d'une ordonnance de référé du 12 septembre 2003. La SCI ne formule pas de demande concernant son préjudice locatif qui lui a été réglé par la MACIF à la suite d'une ordonnance de référé du 24 octobre 2005.
La SCI a pu exposer des frais de maîtrise d'oeuvre. Elle n'en justifie toutefois pas.
Les intérêts courent à compter de la décision à moins que le juge n'en décide autrement. Les réticences des compagnies d'assurance à couvrir ce sinistre justifient la décision des premiers juges de les faire courir à compter de l'assignation.
Sur la garantie des assureurs:
La SCI est garantie par la MACIF et la société ETOILE 3 par la compagnie nationale Suisse aux droits de laquelle se trouve AXA. La garantie de celle ci est plafonnée à 304.898 € pour les risques locatifs et 33.538,78 € pour le contenu des locaux sinistrés. C'est à juste titre que les premiers juges ont dit que sa garantie s'exercera dans les limites de sa garantie.
Il n'y a pas lieu d'appliquer les dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile dans les rapports des assureurs entre eux.
Par ces motifs, la cour :
Confirme le jugement déféré à l'exception de la condamnation de la MACIF à payer à la SCI JIMPHI 4% de 433.000 € au titre des honoraires d'experts et 12% de 433.000 € au titre des honoraires d'architecte,
Condamne in solidum la MACIF et AXA FRANCE IARD aux dépens dont distraction au profit des avoués en la cause ainsi qu'au payement à la SCI de 10.000 € au titre de ses frais non taxables de première instance et à la copropriété de 3.000 € au titre de ses frais non taxables de première instance,
Condamne AXA FRANCE IARD à relever et garantir la MACIF du chef des dépens et frais irrépétibles d'appel à proportion des sommes qui resteront définitivement à leur charge.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT