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18/02/2010 | FRANCE | N°08/10510

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 5, 18 février 2010, 08/10510


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 5



ARRET DU 18 Février 2010

(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 08/10510



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 29 Mai 2006 par le conseil de prud'hommes de PARIS - Section Activités Diverses - RG n° 05/06949





APPELANT



Monsieur [E] [B]

[Adresse 5]

[Localité 6]

comparant en personne, assisté de Me Agnès CITTADINI, a

vocat au barreau de PARIS, toque : D.1173





INTIMEES



SAS VALIANCE FIDUCIAIRE

[Adresse 1]

[Localité 8]

représentée par Me Marianne FRANJOU, avocat au barreau de PARIS, toque : K.0...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 5

ARRET DU 18 Février 2010

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 08/10510

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 29 Mai 2006 par le conseil de prud'hommes de PARIS - Section Activités Diverses - RG n° 05/06949

APPELANT

Monsieur [E] [B]

[Adresse 5]

[Localité 6]

comparant en personne, assisté de Me Agnès CITTADINI, avocat au barreau de PARIS, toque : D.1173

INTIMEES

SAS VALIANCE FIDUCIAIRE

[Adresse 1]

[Localité 8]

représentée par Me Marianne FRANJOU, avocat au barreau de PARIS, toque : K.036 substitué par Me Charlotte PHELIZON, avocat au barreau de PARIS, toque : K036

Me [G] [O]

- Mandataire ad'hoc de la SAS VALIANCE FIDUCIAIRE

[Adresse 2]

[Localité 8]

représenté par Me Marianne FRANJOU, avocat au barreau de PARIS, toque : K.036 substitué par Me Charlotte PHELIZON, avocat au barreau de PARIS, toque : K036

Me [A] [K]

- Commissaire à l'exécution du plan de SAS VALIANCE FIDUCIAIRE

[Adresse 4]

[Localité 7]

représenté par Me Marianne FRANJOU, avocat au barreau de PARIS, toque : K.036 substitué par Me Charlotte PHELIZON, avocat au barreau de PARIS, toque : K036

Me [H] [U]

- Représentant des créanciers de SAS VALIANCE FIDUCIAIRE

[Adresse 3]

[Localité 9]

représenté par Me Safia BAZI, avocat au barreau de PARIS, toque : E 287 substitué par Me Françoise LEMIRE, avocat au barreau de PARIS, toque : E0217

Me [D] [J] [R]

- Représentant des créanciers de SAS VALIANCE FIDUCIAIRE

[Adresse 3]

[Localité 9]

représenté par Me Safia BAZI, avocat au barreau de PARIS, toque : E 287 substitué par Me Françoise LEMIRE, avocat au barreau de PARIS, toque : E0217

SOCIETE LOOMIS venant aux droits de la SOCIETE SECURITAS TRANSPORTS DE FONDS

[Adresse 10]

[Localité 13]

représentée par Me Thibault GUILLEMIN, avocat au barreau de PARIS, toque : D0133

AGS - CGEA - IDF - OUEST

[Adresse 11]

[Localité 12]

représenté par Me Hélène NEGRO-DUVAL, avocat au barreau de PARIS, toque : R.297 substitué par Me Maryse CAUSSIN ZANTE, avocat au barreau de PARIS, toque : R297

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Janvier 2010, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Françoise FROMENT, Présidente, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Françoise FROMENT, président

Mme Anne CARON DEGLISE, conseiller désigné par ordonnance en date du 31 décembre 2009 de Monsieur le Premier Président de la Cour d'appel de Paris, pour compléter la formation du Pôle 6, Chambre 5

Mme Marie-Ange LEPRINCE, conseiller

Greffier : Madame Pierrette BOISDEVOT, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau code de procédure civile.

- signé par Mme Françoise FROMENT, Président et par Madame Pierrette BOISDEVOT, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * *

*

[E] [B] a été engagé par la SA ARDIAL selon contrat à durée indéterminée à effet du 1er novembre 1995, qui faisait suite à un contrat de qualification pour la période du 2 mai 1994 au 31 octobre 1995, en qualité de convoyeur garde, niveau 2, coefficient 130, la relation contractuelle étant régie par la convention collective des entreprises de transports routiers et activités auxiliaires de transport relatives aux convoyeurs de fonds.

Selon lettre du 26 juin 2003, il a été informé de ce que son contrat de travail était transféré à la société VALIANCE FIDUCIAIRE à compter du 15 juillet 2003.

Il exerçait par ailleurs des fonctions de membre du Comité d'entreprise.

Par jugement du 27 juillet 2004, le Tribunal de Commerce de Paris a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de la SAS VALIANCE FIDUCIAIRE, Me [K] étant désigné en qualité d'administrateur judiciaire et Mes [R] et [U] en qualité de représentants des créanciers.

Le 30 septembre 2004, le Tribunal de Commerce a arrêté un plan de cession totale de la SAS VALIANCE FIDUCIAIRE en retenant l'offre de la société SECURITAS TRANSPORT DE FONDS, devenue depuis lors la SAS LOOMIS FRANCE. Dans ce cadre, Me [K], désigné en qualité de commissaire à l'exécution du plan, a été autorisé à procéder au licenciement de 298 salariés.

L'agence de [Localité 17], au sein de laquelle [E] [B] exerçait ses fonctions devait par ailleurs au terme de ce jugement, cesser ses activités à compter du 1er octobre 2004.

Par courrier du 5 octobre 2004 , Maître [K], es-qualité de commissaire à l'exécution du plan, a informé [E] [B] de ce qu'il était, de ce fait, dispensé de toute activité dans l'attente du déroulement du plan de cession mais qu'il faisait toujours partie des effectifs et pouvait se rendre sur son lieu de travail s'il en éprouvait le besoin, étant précisé qu'il n'y aurait plus d'activité sur le site.

[E] [B] a été convoqué, par lettre du 11 octobre 2004, pour audition par le comité d'établissement dans le cadre du licenciement collectif autorisé par le Tribunal de Commerce.

Le 21 octobre 2004, le Comité d'établissement a émis majoritairement un avis défavorable au licenciement de [E] [B].

Par lettre du 22 octobre 2004, Maître [K] lui a confirmé qu'il était dispensé d'activité dans l'attente de la décision de l'inspection du travail.

Par lettre du 28 octobre 2004, Maître [K], es-qualité, a demandé l'autorisation de licencier [E] [B] pour motif économique.

Par décision du 13 décembre 2004, le directeur adjoint du travail des transports a, estimant que la mesure de licenciement projetée n'était pas sans lien avec le mandat de [E] [B] , refusé l'autorisation de le licencier.

Par lettre du 27 décembre 2004, Maître [K] a informé la société SECURITAS de ce refus et lui a demandé d'affecter ce salarié à un poste correspondant à sa qualification et à son emploi.

Maître [K], es-qualité de commissaire à l'exécution du plan de la SAS VALIANCE FIDUCIAIRE et [G] [O], son Président, ont, le 18 janvier 2005, exercé un recours hiérarchique devant le Ministre de l'Equipement, des Transports, de l'Aménagement du Territoire, du Tourisme et de la Mer. Ce courrier ayant été reçu le 21 janvier 2005 par ses services, il disposait d'un délai expirant le 21 mai 2005 pour statuer.

Par lettre du 7 mars 2005 [E] [B] a demandé à la société SECURITAS TRANSPORT DE FONDS sa réintégration, sur le fondement de l'article L122-12 du code du travail ,suite au refus d'autorisation du 13 décembre 2004 et ce sur les agences d'[Localité 14] ou de [Localité 15].

Par lettre du 13 avril 2005, Maître [K], es-qualité, a indiqué à la société SECURITAS TRANSPORT DE FONDS pour se réjouir de la campagne de recrutement de convoyeurs de fonds dont il avait été informé par des salariés et lui demander de lui confirmer qu'elle avait bien préalablement satisfait à son obligation de priorité de réembauche des anciens salariés de VALIANCE FIDUCIAIRE.

Par lettre du 19 avril 2005, le directeur adjoint des transports a écrit à Me [K] pour lui rappeler que le recours contre ses décisions d'autoriser le licenciement des salariés protégés n'était pas suspensif, que les salariés auraient dû être repris par Securitas et que le refus d'appliquer les décisions s'analysaient comme un délit d'entrave.

Par lettre du 25 mai 2005, Maître [K] , es-qualité de commissaire à l'exécution du plan de la société VALLIANCE FIDUCIAIRE, a écrit à la société SECURITAS TRANSPORT DE FONDS pour lui indiquer qu'en l'absence de décision du ministre dans les 4 mois du recours qu'il avait exercé à la demande écrite de cette société, contre la décision refusant l'autorisation de licencier [E] [B], ce refus était implicitement confirmé , cette lettre indiquant que 'en application de la jurisprudence en la matière, la société SECURITAS TRANSPORT DE FONDS doit donc signifier de façon bien plus explicite qu'elle ne l'a fait jusqu'alors, le réintégration de ces personnels dans ses effectifs, rétroactivement depuis la date d'effet du jugement arrêtant le plan, aux postes de travail que vous avez dû leur attribuer dès la notification qui lui avait été faite de la décision de l'Inspecteur du travail de ne pas autoriser le licenciement des salariés concernés' et a proposé d'établir, une dernière fois, le bulletin de salaires du mois de mai et d'en assurer le paiement, la société VALIANCE FIDUCIAIRE payant les salariés depuis la cession.

Par lettre du 3 juin 2005, Maître [K] a à nouveau écrit à SECURITAS TRANSPORT DE FONDS car il avait été informé que certains salariés protégés n'avaient pas été repris , ce qui constituait un manquement grave à ses obligations et demandait une régularisation sans délai.

C'est dans ces conditions que [E] [B] a, le 7 juin 2005, saisi le Conseil de Prud'hommes de Paris de diverses demandes formées tant à l'encontre de la société VALLIANCE FIDUCIAIRE en présence des organes de la procédure et de l'AGS que de la société SECURITAS TRANSPORT DE FONDS.

Par lettre du 27 juin 2005, la société SECURITAS TRANSPORT DE FONDS a avisé [E] [B] de son 'reclassement à compter du 1er juin 2005" en qualité de convoyeur conducteur avec une ancienneté au 2 mai 1994, document que le salarié n'a pas signé, estimant qu'il avait été transféré de plein droit depuis le 15 octobre 2004, date du plan de cession et non reclassé au 1er juin 2005.

Il a, après de nombreux échanges, été licencié par lettre du 6 octobre 2006 pour ne pas avoir assisté au stage de perfectionnement prévu du 20 au 22 septembre 2006.

Le Conseil de Prud'hommes de Paris a, par jugement du 29 mai 2006, débouté [E] [B] de ses demandes, débouté la SASU SECURITAS TRANSPORT DE FONDS et la SAS VALIANCE FIDUCIAIRE de leur demande sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile et condamné [E] [B] aux dépens

Ce dernier a relevé appel le 20 décembre 2006 de cette décision.

Lors de l'audience du 2 octobre 2008, à laquelle les parties avaient été convoquées, l'affaire a été radiée, les parties n'étant pas en état par suite de communication de conclusions et de pièces tardives.

Sue réinscription au rôle, l'affaire a été fixée et plaidée lors de l'audience du 7 janvier 2010.

Lors de cette audience, le conseil de [E] [B] a développé oralement ses conclusions, visées le jour même par le greffier aux termes desquelles il sollicite l'infirmation de la décision déférée et entend voir :

-dire que sa date d'entrée au sein de la société SECURITAS TRANSPORT DE FONDS est le 15 octobre 2004 et ordonner la rectification de ses bulletins de salaires d'octobre 2004 à mai 2005 sous astreinte

-constater qu'en violation de l'article L1224-1 du code du travail , il n'a pas été transféré et n'a pu exercer ses fonctions de manière effective au sein de la société SECURITAS TRANSPORT DE FONDS, devenue LOOMIS, ce qui lui a causé un préjudice

-dire que ce préjudice sera supporté conjointement par la société LOOMIS et par la société VALIANCE FIDUCIAIRE

-condamner en conséquence la société LOOMIS et fixer solidairement sa créance au passif du redressement judiciaire de la société VALIANCE FIDUCIAIRE, ou en tout état de cause l'un à défaut de l'autre, à 30 000,00 € du fait de sa non intégration au sein de SECURITAS TRANSPORT DE FONDS

-dire son licenciement nul ou, à tout le mois, sans cause réelle et sérieuse

-condamner la SAS LOOMIS à lui payer 52 000,00 € d'indemnité sur le fondement de l'article L1235-3 du code du travail

-condamner la société LOOMIS à lui payer 1 544,13 € au titre d'heures supplémentaires et 154,41 € de congés payés afférents

-condamner la société LOOMIS à lui payer 3 000,00 € par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

-ordonner la capitalisation des intérêts

-dire la décision opposable à l'AGS CGEA IDF OUEST.

Le conseil de la SAS VALLIANCE FIDUCIAIRE , de [G] [O], agissant en qualité de mandataire ad hoc de la SAS VALIANCE FIDUCIAIRE et de Maître [K], commissaire à l'exécution du plan de cession, a, lors de l'audience du 7 janvier 2010, développé oralement ses conclusions aux termes desquelles ils sollicitent la confirmation du jugement déféré, le rejet des demandes de [E] [B] et sa condamnation à payer à la société la somme de 3 000,00 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Le conseil de la SELAFA MJA, prise en la personne de Maître [U] et de Maître [R], représentant des créanciers de la SAS VALIANCE FIDUCIAIRE, a, lors de l'audience du 7 janvier 2010 développé oralement ses conclusions aux termes desquelles il sollicite la confirmation de la décision déférée, le rejet des demandes de [E] [B] et rappelle que le cours des intérêts a été arrêté le 27 juillet 2004, la décision à intervenir devant être déclarée opposable à l'AGS CGEA IDF OUEST.

Le conseil de l'UNEDIC DELEGATION REGIONALE AGS CGEA IDF OUEST a, lors de l'audience du 7 janvier 2010, développé oralement ses conclusions, visées le jour même par le greffier, aux termes desquelles elle rappelle les conditions de mise en oeuvre de sa garantie et ses limites et entend voir dire que les demandes de [E] [B] n'entrent pas dans le cadre de cette garantie, le jugement devant être confirmé en toutes ses dispositions.

Le conseil de la SAS LOOMIS FRANCE, qui vient aux droits de la société SECURITAS TRANSPORT DE FONDS, a, lors de l'audience du 7 janvier 2010, développé oralement ses conclusions, visées le jour même par le greffier, aux termes desquelles elle sollicite :

-à titre principal la confirmation de la décision déférée et le rejet de l'ensemble des demandes de [E] [B]

- à titre subsidiaire, la réduction des demandes de l'intéressé

-en tout état de cause la condamnation de [E] [B] à lui payer 2 000,00 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

MOTIFS ET DÉCISION DE LA COUR

Considérant, sur la date d'entrée de [E] [B] au sein de la société SECURITAS TRANSPORT DE FONDS, que la décision de refus d'autorisation du licenciement par le directeur adjoint du travail des transports en date du 13 décembre 2004 a eu pour effet, le recours contre une telle décision n'étant pas suspensif, d'entraîner, par application de l'article L1224-1 du Code du Travail auquel ne déroge pas sur ce point l'article L1224-2 qui n'a trait qu'aux obligations qui incombaient à l'ancien employeur, le transfert de plein droit de [E] [B] au sein de la SAS SECURITAS TRANSFERT DE FONDS ;

Considérant dès lors que c'est à la date du 13 décembre 2004, date du refus d'autorisation de son licenciement, qu'il y a lieu fixer sa date d'entrée au sein de la société LOOMIS, qui vient aux droits de la société SECURITAS TRANSPORT DE FONDS , cette société devant établir, sous astreinte, des bulletins de salaires conformes ;

Considérant, sur les manquements reprochés à Maître [K], es-qualité de commissaire à l'exécution du plan de la SAS VALIANCE FIDUCIAIRE, qu'il résulte des pièces versées aux débats que :

-ce dernier a parfaitement respecté la procédure afférente au licenciement des salariés protégés

- dès le 27 décembre 2004, il a écrit à la SAS SECURITAS TRANSPORTS DE FONDS pour lui faire part de ce que le licenciement de plusieurs salariés protégés, dont celui de [E] [B], avait été refusé et pour lui demander d'affecter à chacun de ces salariés un poste correspondant à sa qualification et à son emploi, Me [K] remerciant la société de lui faire part de toute impossibilité dans les meilleurs délais et de lui indiquer si elle souhaitait qu'un recours soit exercé contre les décisions de refus ;

-la seule réponse de la SAS SECURITAS TRANSPORTS DE FONDS, qui est muette quant à une éventuelle impossibilité de reclassement, a été le 5 janvier 2005 qu'elle souhaitait que le commissaire à l'exécution du plan exerce un recours à l'encontre de ces décisions

- Maître [K], es-qualité, qui seul pouvait exercer ce recours, y a procédé

-dès que le délai dont disposait le ministre a expiré, il a rappelé le 25 mai 2005 à la société SECURITAS TRANSPORT DE FONDS ses obligations de réintégration

-il lui a également, par courrier du 30 mai 2005, rappelé ses obligations de formation pour les salariés titulaires d'un port d'armes

-il a également alerté la société SECURITAS sur la nécessité de mettre à la disposition des salariés protégés au titre d'un mandat syndical, des locaux appropriés et a mis lui-même une clef des anciens locaux à leur disposition, rien ne permettant de retenir qu'il ait donné son accord au propriétaire du photocopieur qui s'y trouvait pour le récupérer ;

Considérant qu'aucun manquement ne saurait, au vu des éléments produits de part et d'autre, être retenu à la charge de Maître [K], es-qualité, étant observé que, bien qu'il n'y soit pas légalement contraint, il a, dans le seul intérêt de [E] [B], versé à ce dernier ses salaires jusque la fin du mois de mai 2005, ce qui ne saurait lui être reproché, aucune ambiguïté n'existant quant à l'obligation de la société SECURITAS d'intégrer [E] [B] ;

Considérant que c'est donc à bon droit que ce dernier a été débouté de ses demandes en ce qu'elles sont dirigées contre la SAS VALIANCE FIDUCIAIRE, les problèmes, très ponctuels, soulevés par [E] [B] dans son courrier du 9 mai 2005, ayant été, selon ses propres dires, réglé le mois suivant ;

Considérant, sur les manquements de la société SECURITAS TRANSPORT DE FONDS aux droits de laquelle se trouve la SAS LOOMIS, que la SAS SECURITAS, bien qu'expressément informée par Maître [K] de la décision de rejet de l'autorisation de licenciement de [E] [B] et bien que le recours formé contre cette décision ne soit pas suspensif, ne justifie pas avoir fait, malgré plusieurs demandes en ce sens émanant en particulier de Maître [K], mais aussi de [E] [B] lui-même, en particulier de 7 mars 2005, et des recrutements, en avril 2005, de convoyeurs de fonds sur l'une de ses agences, une proposition concrète, personnelle et localisée d'intégration sur un quelconque poste avant le 27 juin 2005, avec effet rétroactif au 1er juin 2005 mais prise d'effet le 25 juillet 2005 ;

Considérant de plus que la réintégration n'a pas été effective à la date indiquée faute pour la société SECURITAS d'avoir notamment :

-organisé des séances de tir depuis la date à laquelle il était transféré alors qu'il avait l'obligation de suivre 4 séances par an

-sollicité immédiatement la délivrance d'un port d'armes au nom de la société

-remis une carte professionnelle ;

Considérant que les manquements commis tant par la société SECURITAS TRANSPORT DE FONDS que par la société LOOMIS sont donc caractérisés en l'espèce, d'autant que les clefs des locaux syndicaux au sein de la société SECURITAS n'avaient pas été mis à leur disposition avant juin 2005 et que, faute de réintégration au moment des élections représentatives du personnel les 24 mars et 14 avril 2005, [E] [B], qui ne figurait ni comme électeur, ni comme éligible, a perdu ses différents mandats électifs ;

Considérant que, contrairement à ce qu'a retenu la juridiction de première instance, cette situation d'instabilité qui a duré près de deux ans, et de violation caractérisée de ses droits, notamment en tant que représentant du personnel, et d'obstacle à la poursuite de cette dernière activité, a causé à [E] [B] un préjudice qu'il convient d'indemniser par l'octroi de la somme qu'il sollicite , peu important que pendant toute cette période son salaire lui ait été versé alors même qu'aucun travail ne lui était fourni pendant près de deux ans malgré l'obligation qui pesait sur l'employeur, étant observé que la proposition de reclassement qui lui avait été faite par la société VALLIANCE FIDUCIAIRE le 26 novembre 2004 est sans effet sur le présent litige dès lors que l'autorisation de le licencier a été ultérieurement refusée , ce qui entraînait de plein droit son transfert au sein de la société SECURITAS TRANSPORT DE FONDS ;

Considérant, sur la demande au titre des heures supplémentaires, qu'il résulte du bulletin de salaires de juin 2006 que le temps de travail de [E] [B] a été indiqué comme étant de 1741 heures , soit 129 heures au-delà du forfait annuel de 1600 heures ; que la société appelante, qui a elle-même indiqué cette information, ne justifie pas avoir réglé ce dépassement ; que, dès lors, elle en doit bien le paiement ; qu'il sera donc fait droit à cette demande, nouvelle en appel, les intérêts au taux légal courant à compter du 7 janvier 2010, date où elle a été formée ;

Considérant que la SAS LOOMIS FRANCE devra, dans les deux mois de la notification de la présente décision, adresser à [E] [B] un bulletin de salaires indiquant ces heures supplémentaires et les congés payés afférents, sous astreinte de 30,00 € par jour pendant 3 mois, la Cour se réservant la liquidation éventuelle de l'astreinte ;

Considérant, sur les demandes au titre de la rupture du contrat de travail, que , par une lettre en date du 6 octobre 2006, à en-tête de la SASU SECURITAS TRANSPORT DE FONDS, signée par [F] [X], Directeur d'agence, [E] [B] a été licencié en ces termes :

'Lors de notre entretien en vue d'un éventuel licenciement du lundi 16 octobre 2006, au cours duquel vous étiez accompagné par Monsieur [T] [Y], nous vous avons fait part des griefs que nous étions amenés à formuler à votre encontre.

Le 12/09/2006, était présenté à votre domicile un un courrier que nous avions établi le 05/09/2006, où il vous était précisé les termes de votre inscription au stage de perfectionnement se déroulant du 20 au 22 septembre 2006.

Le 14/09/2006 était présenté à votre domicile un deuxième courrier où vous étaient notamment transmis vos billets de train.

Entre-temps, vous aviez communiqué par téléphone avec l'agence de [Localité 16] et vous aviez eu connaissance de votre participation à ce stage de perfectionnement.

Or, vous n'êtes pas sans savoir que ce stage est obligatoire et indispensable dans l'exercice de vos fonctions.

En ne participant pas à ce stage, vous n'avez pas respecté les règles élémentaires spécifiques à notre profession et avez par là même rendu impossible votre maintien dans l'entreprise.

Aussi, avons nous décidé de vous licencier pour cause réelle et sérieuse ...' ;

Considérant que [E] [B], se prévalant des dispositions de l'article L227-6 du Code de Commerce soutient que la le signataire de la lettre de licenciement n'avait pas qualité pour ce faire, ce qui entraînerait la nullité du licenciement ; que la SASU LOOMIS réplique qu'aucune disposition légale n'exige que la délégation du pouvoir de licencier soit donnée par écrit et qu'une éventuelle irrégularité n'est pas de nature à rendre le licenciement sans cause réelle et sérieuse, les deux contrats de travail qu'elle a produits à la barre n'étant que la réponse à des conclusions qui lui avaient été adressées la veille de l'audience ;

Considérant que [E] [B] n'a pas expressément demandé le rejet des deux pièces communiquées à la barre sur lesquelles il s'est expliqué ;

Considérant, ceci étant, que l'article L227-6 du code de commerce, régissant le fonctionnement des sociétés par actions simplifiées, énonce que :

'La société est représentée à l'égard des tiers par un président désigné dans les conditions prévues par les statuts. Le président est investi des pouvoirs les plus étendus pour agir en toute circonstance au nom de la société dans la limite de l'objet social.

Dans les rapports avec les tiers, la société est engagée même par les actes du président qui ne relèvent pas de l'objet social, à moins qu'elle ne prouve que le tiers savait que l'acte dépassait cet objet ou qu'il ne pouvait l'ignorer compte-tenu des circonstances, étant exclu que la seule publication des statuts suffise à constituer cette preuve.

Les statuts peuvent prévoir les conditions dans lesquelles une ou plusieurs personnes autres que le président, portant le titre de directeur général ou de directeur général délégué, peuvent exercer les pouvoirs confiés à ce dernier par le présent article.

Les dispositions statutaires limitant les pouvoirs du président sont inopposables aux tiers.'

Considérant que les salariés sont, nonobstant leur participation au fonctionnement de la société, juridiquement des tiers par rapport à cette dernière ;

Considérant que la lettre de licenciement devait, pour que le licenciement soit valable, émaner, soit du président de la SASU, soit de la personne autorisée par les statuts à recevoir délégation pour exercer le pouvoir de licencier, détenu par le seul président et ce, d'ailleurs, conformément au régime légal des sociétés par actions simplifiées qui, contrairement à celui des autres formes de sociétés commerciales, concentre dans les mains du seul président, la totalité des pouvoirs, traditionnellement répartis entre divers organes, et renvoie, pour d'éventuelles autres dispositions, au statut ;

Considérant par ailleurs que cette délégation de pouvoir ne peut être implicite alors que l'article 15 10° du décret du 30 mai 1984 relatif au registre du commerce dispose que 'doivent être déclarés, pour figurer à ce registre, notamment les noms, prénoms...des associés et tiers ayant le pouvoir d'engager la société' ;

Considérant qu'en l'espèce force est de constater que si la SAS LOOMIS verse aux débats le contrat de travail d'[F] [X], le signataire de la lettre de licenciement, dont il résulte que :

-ce dernier a été engagé le 14 mai 2007 en qualité de directeur d'agence

-sa mission consistait notamment à assumer la responsabilité de l'administration et de la gestion du centre de profit et celle de la gestion du personnel

il n'en demeure pas moins que :

-les statuts de la SAS ne sont pas versés aux débats, ce qui ne permet pas de vérifier que la délégation de pouvoirs y était prévue

-ce contrat lui-même avait été signé par [L] [I], Directeur Régional, dont le contrat de travail n'est pas produit et dont rien ne permet de retenir qu'il aurait reçu une quelconque délégation

-aucune sub-délégation n'est au demeurant produite ;

Considérant que la preuve de ce que la lettre de licenciement ait été signée par une personne statutairement habilitée à la signer n'étant pas en l'espèce rapportée, il s'ensuit que le licenciement dont [E] [B] a fait l'objet était nul, le défaut de pouvoir du signataire de la lettre constituant une irrégularité de fond qui affecte la validité même du licenciement ;

Considérant qu'il y a donc lieu d'allouer à [E] [B] des dommages-intérêts qu'il convient de fixer, au regard notamment de son ancienneté et de la rémunération qui était la sienne au moment de la rupture et de la période de chômage dont il justifie à la somme de 35 000,00 € ;

Considérant qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de [E] [B] l'intégralité des frais irrépétibles qu'il a dû exposer pour faire valoir ses droits ; qu'il y a lieu de lui allouer la somme de 3 000,00 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

Considérant que, succombant, la SAS LOOMIS FRANCE supportera ses frais irrépétibles et les dépens de première instance et d'appel ;

PAR CES MOTIFS

Infirme la décision attaquée sauf en ce qu'elle a débouté [E] [B] de ses demandes en ce qu'elles sont dirigées à l'encontre de la SAS VALIANCE FIDUCIAIRE,

Statuant à nouveau pour le surplus et y ajoutant,

Condamne la SAS LOOMIS FRANCE à payer à [E] [B] :

-1 544,13 € au titre des heures supplémentaires et 1154,41 € au titre des congés payés afférents

ces sommes avec intérêts au taux légal à compter du 7 janvier 2010 et capitalisation des intérêts dès lors qu'ils seront dus pour une année entière

-30 000,00 € de dommages-intérêts pour défaut d'application pendant près de deux ans des dispositions de l'article L1224-1 du code du travail

-35 000 € de dommages-intérêts pour licenciement nul

ces sommes avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision et capitalisation des intérêts dès lors qu'ils seront dus pour une année entière

- 3 000,00 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

Dit que la date d'entrée de [E] [B] au sein de la société SECURITAS TRANSPORT DE FONDS devenue LOOMIS FRANCE est le 13 décembre 2004,

Condamne la SAS LOOMIS FRANCE à établir, dans les deux mois de la notification de la présente décision, des bulletins de salaires au nom de la société pour la période du 13 décembre 2004 au 31 mai 2005, ainsi qu'un bulletin de salaires pour les 141 heures supplémentaires dont le paiement est ordonné, et ce, sous astreinte de 30,00 € par document et par jour de retard pendant 3 mois, la Cour se réservant la liquidation éventuelle de l'astreinte,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes,

Déclare la présente décision opposable à L'AGS CGEA IDF OUEST,

Condamne la SAS LOOMIS FRANCE aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 08/10510
Date de la décision : 18/02/2010

Références :

Cour d'appel de Paris K5, arrêt n°08/10510 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-02-18;08.10510 ?
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