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04/02/2010 | FRANCE | N°09/05735

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 7, 04 février 2010, 09/05735


Grosses délivrées aux parties le :



RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 7



ORDONNANCE DU 04 FEVRIER 2010



(n° 32 ,5 pages)







Numéro d'inscription au répertoire général : 09/05735



Décision déférée : ordonnance rendue le 30 Mai 2005 par le Juge des libertés et de la détention du Tribunal de Grande Instance de CRETEIL



Nature de la décision : contradictoire



Nous, Michel ROCHE, Conseiller

à la Cour d'appel de PARIS, délégué par le Premier Président de ladite Cour pour exercer les attributions résultant de l'article L16B du Livre des procédures fiscales, modifié par l'art...

Grosses délivrées aux parties le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 7

ORDONNANCE DU 04 FEVRIER 2010

(n° 32 ,5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 09/05735

Décision déférée : ordonnance rendue le 30 Mai 2005 par le Juge des libertés et de la détention du Tribunal de Grande Instance de CRETEIL

Nature de la décision : contradictoire

Nous, Michel ROCHE, Conseiller à la Cour d'appel de PARIS, délégué par le Premier Président de ladite Cour pour exercer les attributions résultant de l'article L16B du Livre des procédures fiscales, modifié par l'article 164 de la loi n°2008-776 du 04 août 2008 ;

assistée de Fatia HENNI, greffière présente lors des débats ;

Après avoir entendu à l'audience publique du 12 novembre 2009 :

- Société SWITCH SA, société en redressement judiciaire dont le Président est Monsieur [S] [P], représentée par son administrateur, maîtres [U] [Z] et son mandataire judiciaire Maître [U] [R]

[Adresse 2]

[Localité 15]

- Monsieur [S] [P]

Prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 5]

[Localité 8]

- Maître Gilles PELLIGRINI

[Adresse 4]

[Localité 10]

- Société CROISIERES CARAIBES, société en redessement judiciaire

ayant pour mandataire social Monsieur [X] [O], représentée par son administrateur, Maître [U] [Z] et son mandataire judiciaire Maître [U] [R]

Bassin tortue

[Adresse 12]

[Localité 13]

- Monsieur [X] [O],

[Adresse 14]

[Localité 7]

- Maître Gilles BARONNIE

[Adresse 3]

[Localité 11]

représentés par la SCP BERNABE - CHARDIN - CHEVILLER, avoués près la Cour

assistés de Maître Philippe CHARRON, avocat au barreau de PARIS, plaidant pour la SELARL CHARRON, toque L 0268

APPELANTS

et

- LE DIRECTEUR GENERAL DES FINANCES PUBLIQUES

DIRECTION NATIONALE DES ENQUETES FISCALES

Pris en la personne du chef des services fiscaux

[Adresse 6]

[Localité 9]

représenté par maître Dominique HEBRARD MINC, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMÉ

Et après avoir entendu publiquement, à notre audience du 12 novembre 2009, les avocats des appelants et l'avocate de l'intimé ;

Les débats ayant été clôturés avec l'indication que l'affaire était mise en délibéré au 28 Janvier 2010 par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

* * * * * *

Avons rendu l'ordonnance ci-après :

Vu l'ordonnance du 30 mars 2005 par laquelle le juge des libertés et de la détention près le TGI de créteil a autorisé des agents de l'administration des impôts à procéder à des opérations de visite domiciliaire à l'encontre des sociétés SWITCH et CROSIERES CARAIBES présumées avoir minorer le chiffre d'affaires en n'ayant pas déclaré l'importation de tous les navires dont elles étaient destinataires en Martinique et la société SWITCH avoir passé dans ses documents comptables des écritures relatives à des acquisitions de navires de plaisance sciemment majorées, fourni à l'administration des renseignements inexacts pour l'obtention du bénéfice d'aide fiscale en faveur des investissements productifs dans les départements d'outre mer et majoré indûment la base déductible de son résultat fiscal au titre de l'année 2003, et se soustraire ainsi à l'établissement et au paiement de l'impôt sur les sociétés et de la TVA, ladite décision ayant autorisé la visite des locaux sis [Adresse 1], susceptibles d'être occupés par les sociétés SWITCH, CROSIERES CARAIBES ou [V] [Y] ;

Vu le procès - verbal du 31 mars 2005 relatant les opérations considérées ;

Vu l'appel interjeté par la société SWITCH, Monsieur [P], la société CROISIERE CARAIBES ainsi que par Monsieur [O] et leurs conclusions enregistrées le 12 novembre 2009 et tendant à l'annulation de l'ordonnance susvisée ainsi qu' à la condamnation du ministre du budget représenté par la direction nationale d'enquête fiscale à lui verser 3000 euros au titre des frais hors dépens ;

Vu, enregistrées le 06 novembre 2009, les conclusions présentées par le directeur général des Finanes Publiques et tendant à la confirmation de l'ordonnance déférée et à la condamnation des appelants au versement de la somme de 1500 euros sur le fondement de l'articlee 700 du CPC ;

SUR CE

Sur le moyen tiré de l'illisibilité des dates d'habilitations de deux des fonctionnaires des impôts autorisés à procéder aux saisies

Considérant que si les appelants soutiennent, tout d'abord, que les habilitations de Messieurs [T] et [W], si elles ont été produites au juge des libértés et de la détention 'comportent une date d'habilitation illisible qui ne permettait pas ainsi de vérifier la validité de l'habilitation ', il convient de relever que l'ordonnance déférée, sur ses pages 1 et 12, mentionne expréssement que les copies des habilitations nominatives de l'agent ayant formé la requête et de ceux désignés pour l'execution des opérations ont été présentées au juge ; que ce dernier, par l'indication de telles mentions, doit être regardé comme ayant satisfait aux exigences légales en la matière ; que les appelants ne sauraient utilement exciper des copies des habilitations qu'ils versent au dossier pour remettre en cause les constatations faites par le Premier Juge au moment où la requête lui a été présentée et qu'il a rappelé au dispositif de sa décision ;

Sur l'effectivité du contrôle exercé par le juge saisi

Considérant que les appelants prétendent à cet effet que 'l' ordonnance reprenant à l'identique la typologie de caractéres et la présentation de la requête de l'administration fiscale, il appartiendra à la Cour de s'interroger pour savoir si l'ordonnance n'a pas été prérédigée par les services fiscaux, cette pratique courante de l'administration fiscale ayant été dénoncée par les rapports parlementaires concernant la mise en oeuvre de la procédure de l'article L 16 B' ; que, toutefois, il sera rappelé que l'adoption des motifs du requérant, à la supposer avérée par la seule considération de l'identité typographique entre la requête et la décision de justice ne saurait permettre de présumer que le juge ait fait l'économie de l'examen de la cause et des pièces fournies ; que le nombre de pièces produites par l'administration fiscale à l'appui de sa requête n'est, en tout état de cause , pas de nature à laisser présumer que le juge se soit trouvé dans l'impossibilité de les examiner et d'en déduire l'existence de présomptions de fraude ; que, de même, l'article L 16 B du Livre des procédures fiscales ne prévoyant aucun délai entre la présentation de la requête et le prononcé de la décision d'autorisation, la circonstance que la décision soit rendue le même jour que celui de la présentation de la requête est sans incidence sur la régularité de la décision ;

Sur les présomptions soumises au juge des libertés et de la détention

En droit :

Considérant qu'en vertu de l'article L 16B du Livre des procédures ficales l'autorité judiciaire peut autoriser l'administration à effectuer une visite domiciliaire lorsqu'il existe des présomptions qu'un contribuable se soustrait à l'établissement ou au paiement de l'impôt sur le revenu ou les bénéfices ou de la TVA ; que l'autorisation ainsi donnée permet aux agents de l'administration des impôts de

rechercher la preuve des agissements présumés ; que le juge doit seulement apprécier l'existence de présomptions d'agissements justifiant la mesure autorisée sans être tenu d'établir l'existence de ces agissements ; qu'en effet le juge de l'autorisation n'est pas le juge de l'impôt et il ne lui appartient pas, dans le cadre de sa saisine, de statuer sur le bien- fondé de l'imposition dès lors que l'existence de présomptions justifie l'autorisation ; que la présomption doit être vérifiée au regard des modalités les plus habituelles de la fraude, à savoir l'achat ou la vente sans facture, la facture fictive, l'omission d'écriture comptable ; qu'autrement dit, la visite domiciliaire doit être une mesure juste ;

Que le 2 du même article invite le juge à procéder à un examen concret, c'est-à-dire à vérifier l'utilité réelle de la visite au regard des buts poursuivis par l'administration, et la proportionnalité de celle-ci, atteinte incontestable aux libértés individuelles, avec les intérêts en jeu ;

En l'espèce :

Considérant qu'il résulte des élements du dossier les faits suivants :

La société SWITCH créee en 1997, avait son siège à [Localité 15] ; son président et directeur général était [S] [P] ; elle exerçait une activité d'agence de voyage à partir du site internet 'partir pas cher.com'. A partir de ce site, elle proposait des croisières sur des bateaux don't elle était propriétaire, au nombre desquels figuraient des catamarans LAGOON 380, 410 et 570.

Elle disposait d'un établisssement secondaire au [Localité 13], en Martinique.

Sa filiale à 90%, la société CROISIERES CARAIBES créee en 2002, avait également son siège au [Localité 13] ; son gérant était [X] [O] et son activité la location d'autres biens domestiques.

La société SWITCH faisait l'obet d'une procédure de vérification de comptabilité dans le cadre de laquelle avaient été remises à la vérificatrice :

- une convention cadre de prestations de services à bord de catamarans Lagoon 410 confiant l'exploitation et la gestion en Martinique des navires dont elle était propriétaire à sa filiale CROISIERES CARAIBES,

- une convention de mise à disposition de catamarans 380 dont la société CROISIERES CARAIBES était propriétaire au profit exclusif des clients de la société SWITCH.

Il apparaissait ainsi des relations commerciales réciproques entre les deux sociétés, dans la gestion et l'exploitation des navires dont elles étaient propriétaires ;

Considérant que si les appelants indiquent, en premier lieu, que la présomption alléguée d'importation occulte de navires à destination de la Martinique articulée à l'encontre des sociétés SWITCH et CROISIERES CARAIBES est 'en elle - même invraisemblable ' s'agissant des 'premiers tours opérateurs français opérant par internet et dont les activités étaient dès lors facilement tracables et dont la commande avait été passée à l'un des premiers constructeurs en FRANCE de navires de plaisance ', il echet de souligner que ni la requête ni l'ordonnance entreprise ne font état d' 'importation occulte' ;

Qu'il était seulement indiqué que la société SWITCH n'avait pas déclaré d'importation de navire entre janvier 2002 et novembre 2004, et que la société CROISIERES CARAIBES a pu déclarer des importations en 2003 et 2004 pour un montant total supérieur aux factures établies à son nom, mais inférieur au total des facturations de bateaux fabriqués et livrés à l'une ou l'autre de ces deux sociétés par la société CNB ;

que ces faits étant établis par les élements issus de la communication d'information par le service des douanes et droits indirects il est ainsi permis de présumer que les bateaux effectivement exportés par la société CNB mais non déclarés à l'importation par l'une ou l'autre des deux sociétés destinataires, et présentement appelantes, auraient pu être livrés ailleurs qu'en Martinique ; que, par ailleurs, si c'est à l'exportateur de procéder à la déclaration d'exportation, il appartient, néanmoins, au destinataires situé dans un département d'outre-mer de faire en douane une déclaration de mise sur le marché, notamment pour le paiement de l'octroi de mer ; que, plus généralement, la circonstance sus rappellée que le total des navires déclarés importés par la société CROISIERES CARAIBES reste inférieur au total des exportations déclarées par la société CNB à destination de l'une ou l'autre des sociétés appelantes laisse présumer la passation d'écritures comptables irrégulières pouvant permettre une minoration de recettes ;

Considérant, également, que la société SWITCH apparaissait avoir passé dans ses documents comptables des écritures relatives à l'acquisition de navires de plaisance dont le montant avait été majoré et fourni à l'administration des renseignements inexacts pour l'obtention du bénéfice d'aide fiscale en faveur des investissements productifs dans les déparments d'outre-mer ; qu'en effet, cinq factures affférentes à l'acquisition de navires ont été annulées par factures d'avoirs datées des 10 et 14 octobre 2003, remplacées par des factures de mêmes dates au nom de SWITCH/ CROISIERES CARAIBES, à l'adresse du siège de CROISIERES CARAIBES en Martinique ( chaque ligne des factures étaient majorée de 6,25 %, soit un montant unitaire départ usine de 223.559 euros hors taxe) ; qu'hormis l'augmentation du prix, les factures initiales d'aooût 2003 et celles, définitives, du 30 octobre 2003, étaient strictement semblables et aucune indication, ni sur les avoirs, ni sur les factures, ne venait justifier la majoration de prix opérée ; que les appelants se bornent dans leurs écritures en cause d'appel à invoquer l'existence de 'nombreuses erreurs de facturation' sans apporter aucune autre explication ; qu'il ne s'agit pas d'imputer aux dits appelants la 'fourniture de renseignements inexacts' mais de relever la passation d'écritures qui pouvaient être présumées inexactes dès lors qu'elles concernaient des facturations majorées sans justification, lesquelles ont permis l'obtention d'une autorisation de déduction du résultat fiscal supérieure à ce qu'aurait du être ; que ces faits caractérisaient les agissements prévus par l'article L 16 B du livre des procédures fiscales de passation d'écritures inexactes ayant pour conséquencs une soustraction au paiement de l'impôt et qui pouvaient être présumés ; que c'est donc par une exacte analyse des éléments qui lui étaient soumis que le premier juge a accordé l'autorisation de mettre en oeuvre la procédure de visite domicilaire prévue par l'article L 16B du Livre des procédures fiscales ; qu'il y a lieu, en conséquence, de confirmer l'ordonnance déférée ;

PAR CES MOTIFS

- DECLARONS l'ordonnance entreprise règulière en la forme ;

- LA CONFIRMONS

- CONDAMNONS les appelants aux dépens d'appel ;

- DISONS que l'équité commande dans les circonstances de l'espèce de ne pas faire droit à la demande présentée par l'intimés sur le fondement de l'article 700 du CPC.

LE GREFFIER

Fatia HENNI

LE DELEGUE DU PREMIER PRESIDENT PRESIDENT

Michel ROCHE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 7
Numéro d'arrêt : 09/05735
Date de la décision : 04/02/2010

Références :

Cour d'appel de Paris I7, arrêt n°09/05735 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-02-04;09.05735 ?
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