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28/01/2010 | FRANCE | N°07/04275

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 5, 28 janvier 2010, 07/04275


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 5



ARRET DU 28 JANVIER 2010



(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 07/04275



Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 Décembre 2006 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2004064613





APPELANTE



S.A.S. LE 118 000 venant aux droits de SCOOT FRANCE anciennement NEW MEDIA 21 ST

ayant son siÃ

¨ge : [Adresse 1]



représentée par Me François TEYTAUD, avoué à la Cour

assistée de Me Olivier ITEANU, avocat au barreau de PARIS, toque : D 1380,







INTIMEE



S.A. FRANCE TELECOM ...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 5

ARRET DU 28 JANVIER 2010

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 07/04275

Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 Décembre 2006 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2004064613

APPELANTE

S.A.S. LE 118 000 venant aux droits de SCOOT FRANCE anciennement NEW MEDIA 21 ST

ayant son siège : [Adresse 1]

représentée par Me François TEYTAUD, avoué à la Cour

assistée de Me Olivier ITEANU, avocat au barreau de PARIS, toque : D 1380,

INTIMEE

S.A. FRANCE TELECOM

ayant son siège : [Adresse 2]

représentée par la SCP GRAPPOTTE BENETREAU JUMEL, avoués à la Cour

assistée de Me Myria SAARINEN plaidant pour la société d'avocats LATHAM & WATKINS, avocat au barreau de PARIS, toque : T 09,

COMPOSITION DE LA COUR :

Après le rapport oral de Madame Catherine LE BAIL, Conseillère et conformément aux dispositions de l'article 785 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 Décembre 2009, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Hélène DEURBERGUE, Présidente

Madame Catherine LE BAIL, Conseillère

Madame Agnès MOUILLARD, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mademoiselle Anne BOISNARD

ARRET :

- contradictoire

- rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Agnès MOUILLARD, Conseillère ; Madame Hélène DEURBERGUE, Présidente étant empêchée, et par Mademoiselle Anne BOISNARD, greffier des services judiciaires auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Vu l'appel interjeté par la société LE 118 000, venant aux droits de SCOOT FRANCE, anciennement NEW MEDIA 21 ST, du jugement prononcé le 22 décembre 2006 par le tribunal de commerce de Paris qui l'a déboutée de toutes ses demandes et l'a condamnée à payer à la société FRANCE TELECOM la somme de 15 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu les conclusions signifiées le 30 juillet 2009 par la société LE 118 000, qui demande à la Cour d'infirmer le jugement en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes, et statuant à nouveau, de dire que la société FRANCE TELECOM a engagé sa responsabilité par la promotion de son service de renseignement téléphonique au moyen de publicités apposées sur les cabines publiques téléphoniques qu'elle exploite sur l'ensemble du territoire national, de juillet 2003 à avril 2005, de la condamner à payer une provision de 1 500 000 €, de désigner un expert afin de fournir les éléments nécessaires à l'évaluation du préjudice, d'ordonner, en tant que de besoin, le retrait de tous les panneaux autocollants litigieux, sous astreinte de 1 500 € par infraction constatée, et de condamner la société FRANCE TELECOM au paiement de 15 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu les conclusions signifiées le 24 septembre 2007 par la société FRANCE TELECOM, qui demande la confirmation du jugement et la condamnation de la société LE 118 000 à lui payer une somme supplémentaire de 20 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

SUR CE :

Considérant que la réglementation de la numérotation des services de renseignement téléphoniques applicable notamment en 2003 et au début de l'année 2004 a été remise en cause par le Conseil d'Etat dans un arrêt du 25 juin 2004, rendu à la requête des fournisseurs des services de renseignements téléphoniques qui réclamaient l'attribution de numéros d'accès de même format pour l'ensemble des acteurs ;

Qu'antérieurement, les services de renseignements se répartissaient en deux catégories :

- les renseignements téléphoniques dits 'à valeur ajoutée', accessibles par un numéro court à 4 chiffres, de format '32PQ',

- les services de renseignements dits 'de base', fournis par les opérateurs de réseaux fixes et mobiles, accessibles en composant le '12", numéro affecté en partage à ces opérateurs ;

Considérant que FRANCE TELECOM, qui avait la charge du service universel de télécommunications, avait l'obligation de fournir un service de renseignements accessible à tous les utilisateurs, quel que soit leur opérateur de téléphonie, fixe ou mobile ; que ce service était accessible par le '12" ;

Considérant que NEW MEDIA 21, qui vient aux droits de LE 118 000, était une société française, proposant un service d'accès à un annuaire, l'annuaire Scoot, dont elle avait racheté les droits à VIVENDI UNIVERSAL en mars 2003 ; que ce service était accessible par le numéro court '3200" ;

Considérant qu'au cours du premier semestre 2003, l'attention de NEW MEDIA 21 a été attirée par le fait que la société FRANCE TELECOM développait une campagne de publicité pour son service de renseignements téléphoniques de l'époque, le 12 ; que la particularité de cette campagne publicitaire tenait au fait que les panneaux de publicité étaient collés sur des cabines publiques téléphoniques confiées en exploitation à FRANCE TELECOM par le législateur dans le cadre du service universel ;

Que, par courrier du 25 mai 2004, NEW MEDIA 21 a mis en demeure FRANCE TELECOM de faire cesser cette 'distorsion de concurrence' consistant à utiliser les cabines publiques sur un espace public pour faire la promotion d'un service concurrentiel, le 12 ;

Que, le 3 juin 2004, FRANCE TELECOM 'dans un souci d'apaisement', répondait : '...je vous informe que FRANCE TELECOM va retirer les informations relatives au 12 figurant dans ces cabines. Compte tenu du nombre de cabines sur le territoire français, vous comprendrez aisément que cette dépose ne puisse intervenir que dans un délai qui ne peut être inférieur à six mois' ;

Considérant que, par courrier du 9 juin 2004, NEW MEDIA 21 prenait acte de la décision de FRANCE TELECOM pour le présent et l'avenir, et sollicitait la réparation de son préjudice présent et passé ;

Que, le 15 juin 2004, FRANCE TELECOM opposait une fin de non-recevoir à cette demande ;

Considérant que, par acte du 24/08/2004 et conclusions subséquentes, LE 118 000 a demandé au tribunal de commerce de Paris de :

- dire et juger que FRANCE TELECOM, par la promotion de son service de renseignement téléphonique au moyen de publicités apposées sur les cabines publiques téléphoniques qu'elle exploite sur l'ensemble du territoire national, entre juillet 2003 et avril 2005, a commis une faute qui engage sa responsabilité,

- la condamner en conséquence à lui payer, à titre de provision sur dommages et intérêts, la somme de 1 500 000 €,

- désigner tel expert en gestion qu'il plaira au tribunal, avec mission de :

- décrire dans le temps et l'espace l'étendue de la publicité en litige, telle qu'exploitée par FRANCE TELECOM,

- recenser le nombre d'appels opérés à partir des cabines téléphoniques exploitées par FRANCE TELECOM vers un service de renseignement téléphonique offrant le service d'annuaire en 2002, 2003 et 2004 et déterminer le chiffre d'affaires réalisé par FRANCE TELECOM durant la période en litige,

- donner son avis sur le préjudice allégué par elle,

- ordonner le retrait par FRANCE TELECOM de tous les panneaux autocollants litigieux, sur toutes les cabines téléphoniques publiques du domaine public, sous astreinte de 1 500 € par infraction constatée ;

Considérant que LE 118 000 a fait valoir, à l'appui de sa demande, que :

* Il existe une situation de concurrence entre elle-même et FRANCE TELECOM, les deux sociétés offrant chacune un service de renseignement téléphonique accessible par numéro court :

- par le 12, à l'époque des faits, pour FRANCE TELECOM,

- par le 3200, à l'époque des faits, pour LE 118 000 ;

Les deux services téléphoniques payants et payés par l'appelant portent sur l'annuaire des abonnés au téléphone fixe ;

Ces deux services téléphoniques s'adressent à la même clientèle, soit la clientèle des particuliers et des entreprises désireuses d'obtenir les coordonnées d'un correspondant ;

* La faute de FRANCE TELECOM est de ne pas avoir exercé sa mission de service universel dans le respect des règles de la concurrence, par l'utilisation (reconnue par cette société elle-même) des cabines téléphoniques publiques, en vue de promouvoir son service de renseignements téléphoniques ;

S'il n'est pas contesté que FRANCE TELECOM doit mettre à disposition des usagers l'information concernant le service universel 'dans toutes les agences commerciales et tous ses points de contact', le respect des règles de la concurrence implique nécessairement que l'information relative au service universel, ou à l'une de ses composantes, soit neutre et ait un caractère non-attractif ;

Seule l'information située à côté du combiné de téléphone peut répondre à la nécessité d'informer l'usager du service universel. En l'espèce, les panneaux auto-collants litigieux, compte tenu de leur position sur les parois vitrées des cabines téléphoniques publiques, ne sauraient répondre aux exigences combinées de l'information des usagers du service universel et du respect des règles de la concurrence ;

Considérant que FRANCE TELECOM a conclu au débouté de l'intégralité des demandes de la société LE 118 000 , et sollicité la condamnation de cette société à lui payer 30 000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive, et 20 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Qu'à l'appui de ses conclusions, FRANCE TELECOM a fait valoir que :

* le service de renseignement téléphonique accessible par le '12" était un service de renseignement universel ;

* Au contraire, aux termes de la décision n° 03-228 de l'ART, le numéro court '3200" a été attribué à NEW MEDIA 21 (LE 118 000) pour la fourniture d'un service de renseignements téléphoniques professionnel ;

* Ainsi, contrairement à ce qui est prétendu, les services accessibles par le '12" et par le '3200" n'étaient pas substituables ;

* FRANCE TELECOM avait l'obligation de fournir au public un certain nombre de services, au nombre desquels figuraient :

- un service universel de renseignements téléphoniques, accessibles par le '12",

- l'accès à un certain nombre de cabines publiques installées sur le territoire national, sans qu'il y ait de monopole légal sur ces activités, les cabines publiques étant et restant la propriété de FRANCE TELECOM,

- FRANCE TELECOM avait en outre l'obligation de mettre à la disposition du public 'une information relative à ses offres de service universel' ;

***

Considérant que la société LE 118 000 poursuit l'infirmation du jugement rendu le 22 décembre 2006 en ce qu'il a dit que FRANCE TELECOM n'avait commis aucune faute et l'a déboutée de toutes ses demandes ; qu'elle reprend devant la Cour tant les demandes que les arguments déjà présentés en première instance, mais ne produit aucune pièce, ne développe aucun moyen susceptible de remettre en cause la décision des premiers juges qui ont pertinemment relevé que :

- Les cabines téléphoniques publiques de FRANCE TELECOM ne sont pas des 'facilités essentielles' auxquelles LE 118 000 aurait dû avoir accès pour pouvoir informer le public sur son propre service de renseignements téléphoniques accessible par le '3200", puisque le service de renseignement peut être atteint (majoritairement) de tout poste téléphonique, et que les cabines ne sont qu'un moyen additionnel d'accès au téléphone ;

- FRANCE TELECOM avait l'obligation d'informer le public sur son offre de service universel de renseignements, alors accessible par le '12" ; elle avait la possibilité de procéder à cette information par voie d'affichage sur l'habitacle des cabines publiques qui lui appartenaient ;

- les auto-collants bifaces apposés par FRANCE TELECOM en juillet 2003 sur un certain nombre de ses cabines publiques n'étaient que la traduction de la nécessité et même de l'obligation de donner une information sans laquelle l'utilisateur, par ignorance, aurait été dans l'impossibilité d'accéder au service universel ;

- contrairement aux dires de la société LE 118 000, les termes employés sur les autocollants litigieux n'avaient pas pour but la promotion du service de renseignement par le '12", mais la stricte information nécessaire à l'usager du service universel ;

- FRANCE TELECOM n'a donc pas commis de faute en appliquant des vitrophanies indiquant le numéro d'appel du service universel de renseignement, à savoir le '12" ;

Que le jugement sera en conséquence confirmé ;

Considérant qu'il est inéquitable de laisser à la charge de FRANCE TELECOM l'intégralité des frais non compris dans les dépens que cette société a dû exposer ; qu'il lui sera en conséquence alloué, en appel, une somme de  20 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; que LE 118 000 sera débouté de sa demande à ce titre ;

Considérant que LE 118 000, qui succombe en toutes ses prétentions, supportera les dépens de première instance et d'appel ;

PAR CES MOTIFS

Déclare l'appel recevable,

Confirme le jugement,

Condamne la société LE 118 000 à payer à la société FRANCE TELECOM la somme de 20 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société LE 118 000 aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier

A. BOISNARD

La Conseillère faisant fonction de Présidente

A. MOUILLARD


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 07/04275
Date de la décision : 28/01/2010

Références :

Cour d'appel de Paris I5, arrêt n°07/04275 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-01-28;07.04275 ?
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