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20/01/2010 | FRANCE | N°09/11703

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 2, 20 janvier 2010, 09/11703


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS





Pôle 1 - Chambre 2





ARRÊT DU 20 JANVIER 2010





(n° 34 , 9 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : 09/11703



Décision déférée à la Cour : Ordonnance de référé du 07 Mai 2009 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2009017417





APPELANT



Monsieur [I] [J]

[Adresse 1]

[Localité

4]

représenté par la SCP GUIZARD, avoués à la Cour

assisté de Me Joseph HADDAD, avocat au barreau de PARIS, toque : C 933





INTIMÉE



Madame [G] [T]

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par la SCP DUBOSCQ - PELLER...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2

ARRÊT DU 20 JANVIER 2010

(n° 34 , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 09/11703

Décision déférée à la Cour : Ordonnance de référé du 07 Mai 2009 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2009017417

APPELANT

Monsieur [I] [J]

[Adresse 1]

[Localité 4]

représenté par la SCP GUIZARD, avoués à la Cour

assisté de Me Joseph HADDAD, avocat au barreau de PARIS, toque : C 933

INTIMÉE

Madame [G] [T]

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par la SCP DUBOSCQ - PELLERIN, avoués à la Cour

assistée de Me Mathieu MOUNDLIC, plaidant pour la SELARL GRAMOND ET ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS, toque L101

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 08 Décembre 2009, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Marcel FOULON, Président

Monsieur Renaud BLANQUART, Conseiller

Madame Michèle GRAFF-DAUDRET, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Madame Lydie GIRIER-DUFOURNIER

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Marcel FOULON, président et par Madame Lydie GIRIER-DUFOURNIER, greffier auquel la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

FAITS CONTANTS :

M. [I] [J] et Mme [G] [T] étaient co-associés des sociétés SMIE Holding et SMIE SYSTEM.

Lors d'une opération d'apport des actions détenues par eux dans le capital de la société SMIE Holding à la société SMIE SYSTEM, ils ont conclu un protocole d'accord, le 15 octobre 2008.

Ce protocole prévoyait la transmission universelle du patrimoine de SMIE Holding à SMIE SYSTEM et, au profit de Mme [T], un droit de retrait total du capital de SMIE SYSTEM, en cas de départ de cette dernière de la société, ou en cas de divergences importantes sur le fonctionnement de la société.

Le protocole stipulait : "Dans cette hypothèse, [I] [J] s'engage à racheter l'intégralité de la participation de [G] [T] ou à faire acquérir par la société ladite participation dans le cadre d'une réduction du capital de la société pour une valeur égale à la valeur de marché déterminée à dire d'expert sans prise en compte d'aucune décote de minorité ni de holding. A tout moment [G] [T] pourra renoncer à l'exercice de ce droit de retrait si les conditions, notamment de valorisation, ne lui convenaient pas".

Mme [T] ayant fait l'objet d'un licenciement pour motif économique, à effet du 22 décembre 2008, elle a informé, le 19 janvier suivant, M. [J] de son intention d'exercer son droit de retrait de la société SMIE SYSTEM.

Invoquant l'absence de réponse de la part de M. [J], et l'engagement pris par celui-ci dans le protocole d'accord, Mme [T] a assigné ce dernier, en demandant une expertise et une provision d'un montant de 105 000 euros.

Par ordonnance contradictoire du 7 mai 2009, le juge des référés du tribunal de commerce de Paris a :

Vu l'article 873, alinéa 2, du CPC,

- condamné M. [J] à payer à Mme [T], à titre de provision, la somme de 105 000 euros avec les intérêts au taux légal à compter du 19 janvier 2009,

- condamné M. [J] à payer à Mme [T] la somme de 700 euros au titre de l'article 700 du CPC, la déboutant pour le surplus,

- désigné M. [H] [V], [Adresse 3], en qualité d'expert avec pour mission de :

. déterminer la valeur de marché des actions de la société SMIE SYSTEM (société SMIE) sans prise en compte d'aucune décote de minorité ni de holding,

- fixé à 2 000 euros TTC, le montant de la provision à consigner par Mme [T] avant le 18 juin 2009 au Greffe du tribunal, par application des dispositions de l'article 269 du CPC,

- dit qu'à défaut de consignation dans le délai prescrit, il serait constaté que la désignation de l'expert est caduque (article 271 du CPC) et l'instance poursuivie,

- dit que dans les deux mois à compter de sa désignation, l'expert indiquerait au greffe le montant de sa rémunération définitive prévisible sous forme d'un budget prévisionnel, afin que soit éventuellement ordonnée la consignation d'une provision complémentaire dans les conditions de l'article 280 du CPC, et qu'à défaut d'une telle indication, le tribunal pourrait être amené à considérer que le montant de la consignation initiale devra constituer la rémunération définitive de l'expert,

- dit que si les parties ne venaient pas à composition entre elles, le rapport de l'expert devrait être déposé au Greffe dans un délai de 4 mois à compter de la consignation de la provision fixée ci-dessus,

- dit que le magistrat chargé du contrôle des mesures d'instruction suivrait l'exécution de la présente expertise,

- dit qu'en cas de difficulté rencontrée par l'expert dans l'exécution de sa mission, il en serait référé au juge chargé du contrôle des mesures d'instruction,

- condamné M. [J] aux dépens.

M. [J] a interjeté appel de cette décision le 25 mai 2009.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 10 novembre 2009.

Par arrêt avant dire droit du 18 novembre 2009, la Cour, après avoir rappelé aux parties les termes des dispositions des articles 145 du CPC et 1843-4 du code civil, a :

- révoqué l'ordonnance de clôture,

- ordonné la réouverture des débats,

- invité les parties à répondre aux questions suivantes :

. quel juge a été saisi : le juge des référés ou le président statuant en la forme des référés (les parties produiront l'assignation introductive d'instance) '

. quel juge a statué : le juge des référés ou le président du tribunal statuant en la forme des référés '

. s'il s'agit du juge des référés, peut-il ordonner une expertise sur le fondement de l'article 1843-4 du code civil '

. s'il s'agit du juge statuant en la forme des référés, les conditions du texte précité sont-elles remplies '

. s'agit-il d'une question de compétence ou de recevabilité '

. cette question est-elle d'ordre public '

. dans l'affirmative, la Cour peut-elle, ou doit-elle, la soulever d'office '

- renvoyé l'affaire pour être plaidée à l'audience du 8 décembre 2009 à 14 heures, l'ordonnance de clôture devant être rendue le même jour.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 8 décembre 2009.

PRETENTIONS ET MOYENS DE M. [J] :

Par dernières conclusions du 4 décembre 2009, auxquelles il convient de se reporter, M. [J] fait valoir :

- "sur l'évidence", que son engagement consistait en un versement "en acompte, à titre de complément de prix sur la future cession des actions de [G] [T], de 105 000 euros", mais encore fallait-il que le processus de vente soit arrêté et que les parties soient d'accord sur le prix, qu'aucune mesure d'expertise n'a été ordonnée à l'amiable ou par voie de requête conjointe, et il était stipulé "qu'à tout moment, [G] [T] pourrait renoncer à son droit de retrait", et par conséquent, à la cession des actions, que cet engagement contrevient donc aux dispositions des articles 1170 et 1174 du code civil prohibant toute condition potestative, puisque la vente des actions est soumise à la seule volonté de Mme [G] [T], que la validité du protocole peut être remise en question dans son intégralité, puisque la promesse de cession ou de retrait est soumise à des conditions dépendant de la seule volonté d'une partie, qui est à même de refuser le prix déterminable par expertise, qu'une convention constitue un tout, et il ne saurait être isolé une disposition que contrarieraient les autres clauses, ainsi qu'il résulte de l'article 1161 du code civil, que dans la mesure où Mme [T] n'a jamais pris position sur le retrait ou la cession des actions qu'elle détient, et qu'elle peut refuser, son engagement n'a plus de cause, que la somme litigieuse, de 105 000 euros, n'est pas une prime mais un "bonus" sur la valeur des actions, en contrepartie des risques qu'elle a pris, et que si Mme [T] exerçait son droit de veto et refusait d'accepter le prix déterminé par l'expert, elle ne saurait conserver la somme de 105 000 euros, à titre d'acompte, puisqu'il n'y aurait pas de prix déterminé ni de cession, que le premier juge devait appliquer l'article 1162 du code civil, que l'ordonnance est muette sur cette analyse, et de surcroît, prononce sa condamnation avec des intérêts au taux légal remontant à une date antérieure (19 janvier 2009) à celle pour laquelle l'engagement était pris (15 février 2009 avec mise en demeure le 4 mars 2009),

- sur l'expertise, qu'il ne s'est pas opposé mais au contraire associé à la demande d'expertise, que, lors du premier rendez-vous, l'expert a proposé comme date de référence pour la valorisation des actions, la date du 19 janvier 2009, mais que compte tenu des explications qui précèdent, et de la faculté pour l'intimée de renoncer à son droit de retrait, c'est au moment où elle prend position qu'il faut se placer, qu'en conséquence, l'évaluation de la valeur des actions devra être faite au moment de l'expertise,

- sur la réouverture des débats, que c'est le président du tribunal qui a été saisi et qui a statué en la forme des référés, qu'il s'agit de la seule autorité apte à désigner un expert selon les termes de l'article 1843-4 du code civil, qu'il s'agit d'une question de recevabilité, "la compétence du président du tribunal de commerce, pour les sociétés commerciales, étant exclusive", que les dispositions de l'article 1843-4 du code civil étant d'ordre public, il entre dans les pouvoirs de la Cour de soulever l'applicabilité de cet article d'office, que cependant, il n'apparaît pas, en l'espèce, que ces dispositions puissent s'appliquer car la doctrine et la jurisprudence s'accordent pour n'admettre l'application de ce texte qu'en cas de contestation, que dans le cas d'espèce, il n'y a pas contestation sur le prix, puisque le prix était soumis à l'évaluation d'un tiers, faculté admise par l'article 1592 du code civil, que les parties n'ont, cependant, pas convenu de se référer précisément à ce dernier texte, "sans doute en raison du caractère arbitral de l'évaluation effectuée par un tiers, qui n'est pas forcément un expert, contrairement à la formulation du texte de l'article 1843-4", que c'est pour se maintenir à ce stade pré-contentieux et éviter l'application systématique de l'article 1843-4 qu'il s'était associé à l'expertise et, souhaitant que celle-ci ait un caractère préventif, s'était appuyé sur les dispositions de l'article 145 du CPC, d'autant plus qu'il s'agit d'une SAS, qui paraît être le seul type de société qui ne connaisse pas l'application impérative de l'article 1843-4 et qu'aux termes de l'article L. 227-18 du code de commerce, le recours à cette disposition est supplétif, le prix pouvant être déterminé par les statuts ou, comme en l'espèce, par le pacte d'actionnaires,

- que si toutefois, la Cour estimait que les circonstances de l'affaire justifiaient l'application de l'article 1843-4, elle ne pourrait qu'infirmer l'ordonnance, car l'expert est seul maître de la fixation du prix, que ni le juge ni les parties ne peuvent lui imposer, que pour apprécier la valeur des droits sociaux, cet expert doit se placer au moment où la société décide de les acquérir ou de les faire acquérir, soit au moment où l'expert effectue ses travaux, que l'évaluation de l'expert fait la loi entre les parties et l'application de l'article 1843-4 semble ôter toute possibilité d'exercer un droit de repentir à Mme [T], que le respect du contradictoire imposait que la société SMIE, partie au retrait, soit citée à l'instance, puisque l'une des possibilités offertes par la convention était le rachat par la société de ses propres actions, que le principe du "contradictoire" a été violé.

Il demande à la Cour :

- d'infirmer l'ordonnance entreprise, en ce qu'elle l'a condamné à payer à Mme [T] la somme de 105 000 euros avec intérêts au taux légal à compter du 19 janvier 2009, outre 700 euros au titre de l'article 700 du CPC,

- de dire n'y avoir lieu à référé pour ce qui concerne l'engagement souscrit par lui de payer un acompte de 105 000 euros,

- de renvoyer l'intimée à se pourvoir au fond si elle le souhaite,

- de confirmer l'ordonnance en ce qu'elle a désigné un expert avec mission de déterminer la valeur de marché des actions de la société SMIE,

- de dire que cette expertise sera ordonnée en application de l'article 145 du CPC,

- de dire que l'évaluation des actions de la société SMIE devra se faire à la date où l'expert a été saisi de sa mission et a convoqué les parties, soit en septembre 2009,

Et pour le cas où la Cour estimerait que l'évaluation des parts sociales ne peut être effectuée qu'au visa de l'article 1843-4 du code civil,

- de constater que la mission confiée à l'expert par le président du tribunal de commerce contrevient aux dispositions d'ordre public de cet article en ce qu'elle a défini une partie de sa mission, à savoir l'absence de prise en compte de décote de minorité ou de décote de holding,

- de constater, s'agissant d'un retrait, que la société SMIE n'a pas été citée,

En conséquence,

- d'infirmer la disposition de l'ordonnance qui a désigné un expert et délimité la mission de ce dernier,

- de condamner Mme [T] à lui payer la somme de 3 588 euros en application de l'article 700 du CPC pour les frais irrépétibles exposés en appel,

- de condamner Mme [T] aux dépens,

- de lui accorder le bénéfice des dispositions de l'article 699 du CPC.

PRETENTIONS ET MOYENS DE Mme [T] :

Par dernières conclusions du 8 décembre 2009, auxquelles il convient de se reporter, Mme [T] fait valoir :

- sur sa demande de provision, que celle-ci est parfaitement fondée, les termes du protocole d'accord conclu entre les parties étant clairs, que M. [J] devait lui payer la somme de 105 000 euros au plus tard le 15 février 2009, que M. [J] conteste l'évidence du montage qu'il a lui-même imaginé, afin de permettre à Mme [T] de sortir de la société dans ses conditions acceptables, qu'il a engagé de manière irrévocable des héritiers ou ayants-droits, que le terme d'"acompte" a été choisi à dessein, que le protocole précise très clairement que ce complément de prix correspond aux risques qu'elle a pris, et qui y sont énumérés, que cet acompte est donc parfaitement causé, que rien n'indique que l'engagement ne peut être exécuté que pour autant que la cession des actions puisse avoir lieu dans les conditions du protocole, que lors de la première réunion d'expertise, M. [J] a fait savoir qu'il "acceptait une surcote de 105 000 euros par rapport au prix final",

- sur les termes de la mission d'expertise, que M. [J] demande la confirmation de l'ordonnance en ce qu'elle a désigné un expert, que la date de valorisation des actions résulte de la teneur même de l'engagement souscrit par M. [J], qu'il s'agit de la date à laquelle elle a formellement exercé son droit de retrait, d'autant plus que le versement des 105 000 euros devait intervenir au plus tard le 15 février 2009,

- sur la réouverture des débats, que le président du tribunal de commerce a été saisi au titre des deux fonctions, de juge statuant en référé pour ce qui est de la demande de provision, et de juge statuant en la forme des référés pour ce qui est de la demande d'expertise, l'assignation distinguant bien les deux, que la demande d'expertise n'est d'ailleurs pas fondée sur l'article 145 du CPC, que ce sont ces deux juges qui ont statué, en la personne du président du tribunal de commerce, que l'expertise a été ordonnée par le président statuant en la forme des référés, que les conditions de l'article 1843-"3" du Code civil sont remplies, les parties étant en litige sur la valeur des actions détenues par elle, que l'article L. 227-18 du code de commerce n'est pas applicable, aucune des trois hypothèses prévues par ce texte n'étant concernée, qu'il s'agit d'une question de recevabilité, mais qu'au vu de ce qui a été dit, cette question est sans conséquence, puisqu'il n'y a pas conflit entre deux juridictions, que, s'agissant de la question relative au caractère d'ordre public ou de fin de non-recevoir tirée du défaut de pouvoir, la cour d'appel de Paris y a répondu par l'affirmative dans un arrêt du 15 octobre 2008.

Elle demande à la Cour :

- de débouter M. [J] de l'ensemble de ses fins, demandes et prétentions,

- de confirmer en toutes ses dispositions la décision entreprise,

- de dire que l'évaluation des actions de la société SMIE par M. [Y], expert judiciaire, devra se faire au 19 janvier 2009, date à laquelle elle a exercé son droit de retrait,

- de condamner M. [J] à supporter le coût de l'expertise,

- de condamner M. [J] à lui payer la somme de 8 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du CPC ainsi qu'aux entiers dépens,

- de condamner M. [J] aux dépens de première instance et d'appel, qui comprendront notamment les frais d'expertise avancés par elle,

- de lui accorder le bénéfice des dispositions de l'article 699 du CPC.

SUR QUOI, LA COUR

Sur le juge saisi :

Considérant que l'assignation introductive d'instance, du 9 avril 2009, est intitulée "assignation en référé provision et désignation d'expert devant Monsieur le président du tribunal de commerce de Paris" ;

Que la demanderesse a, ainsi, clairement saisi le juge des référés, à la fois d'une demande de provision, sur le fondement de l'article 873, alinéa 2, du CPC, et d'une demande d'expertise, dont elle n'a pas précisé le fondement ;

Considérant qu'un même juge n'a pas le pouvoir de statuer, d'une part, au provisoire (le juge des référés), d'autre part et en même temps, au fond (le juge statuant en la forme des référés) ;

Sur la provision :

Considérant qu'en vertu de l'article 873, alinéa 2, du CPC, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le juge des référés peut accorder une provision au créancier ;

Considérant que le protocole d'accord du 15 octobre 2008, stipule : "[I] [J] s'engage à verser à [G] [T] un acompte, à titre de complément de prix de 105 000 euros, sur la future cession des actions de [G] [T]. Ce complément de prix correspond aux prises de risque successives de [G] [T], en tant qu'actionnaire, à savoir,

- le 15 février 2008 : risque d'avoir augmenté sa participation au capital de 70 000 euros et de rester associée à l'actionnaire sortant si le protocole du 15 02 2008 ne se réalisait pas,

- le 11 avril 2008 : risque de créer la société SMIE SYSTEM en versant 35 000 euros en détenant plus de 92% du capital et, par là même, plus de 92 % d'une dette bancaire de 1 300 000 euros,

- le 30 04 2008 : risque de signer le nantissement de ses titres détenus dans SMIE HOLDING jusqu'à extinction totale de la dette bancaire à hauteur de 1 000 000 euros nécessitant la signature obligatoire de son conjoint".

"Cet acompte à titre de complément de prix de 105 000 euros sera versé le 15 02 2009 au plus tard et il engage de façon irrévocable les héritiers ou ayants droits de [I] [J], qu'ils soient mineurs ou incapables, qui seront tenus de réaliser ce versement à la date ci-dessus mentionnée".

"Dans le cadre de l'accord au paragraphe 1.1 ci-dessus, et avec le versement effectif des 105 000 euros au plus tard le 15 02 2009, [I] [J] et [G] [T] sont d'accord pour réaliser les opérations d'augmentation de capital décidée par l'Assemblée Générale du 15 10 2008".

"Dans le cadre de l'accord au paragraphe 1.1 ci-dessus, et avec le versement effectif des 105 000 euros au plus tard le 15 02 2009, [I] [J] et [G] [T] sont d'accord pour réaliser la Transmission Universelle du Patrimoine de SMIE HOLDING à SMIE SYSTEM décidée par l'Assemblée du 15 10 2008" ;

Que ce protocole d'accord prévoyait encore un droit de retrait, au bénéfice de Mme [T], lui permettant de sortir du capital de la société en cas de départ de cette dernière ou de divergences importantes sur le fonctionnement de la société ;

Qu'il était stipulé que "dans cette hypothèse, [I] [J] s'engage à racheter l'intégralité de la participation de [G] [T] ou à faire acquérir par la société ladite participation, dans le cadre d'une réduction du capital de la société pour une valeur égale à la valeur de marché déterminée à dire d'expert sans prise en compte d'aucune décote de minorité ni de holding. A tout moment [G] [T] pourra renoncer à l'exercice de ce droit de retrait si les conditions, notamment de valorisation, ne lui convenaient pas" ;

Considérant qu'il résulte des stipulations claires de ce protocole que M. [J] s'est engagé à verser à Mme [T] la somme de 105 000 euros, le 15 février 2009, au plus tard, en contrepartie des risques pris par cette dernière dans la société, expressément énumérés ; que cet engagement est, donc, parfaitement causé ;

Que le fait qu'il soit qualifié d'"acompte sur la future cession des actions de [G] [T]", et que cette cession, pour laquelle aucune date n'était fixée, ne soit pas encore intervenue, faute d'accord sur la valeur des actions détenues par l'intimée, ne rend pas l'engagement de M. [J], stipulé "irrévocable", et comportant un terme, potestatif ; que ledit engagement n'est pas subordonné à la conclusion de la cession, étant encore observé qu'un vendeur reste toujours libre de céder ou ne pas céder en cas d'absence d'accord sur le prix -sauf promesse unilatérale de vente, non intervenue ;

Qu'en conséquence, l'obligation de M. [J] n'étant pas sérieusement contestable, il convient de confirmer l'ordonnance, en ce qu'elle a accordé la provision sollicitée, sauf en ce qui concerne le point de départ des intérêts au taux légal, qui doit être fixé à la date de la mise en demeure, du 4 mars 2009, et non à celle de l'exercice du droit de retrait, antérieur au terme de l'engagement de M. [J] ;

Sur l'expertise :

Considérant que si le premier juge n'a pas précisé le fondement juridique de l'expertise, il n'a pu statuer qu'en sa qualité de juge des référés et donc sur le fondement de l'article 145 du Code de procédure civile ;

Considérant qu'il apparaît clairement que les parties étaient en désaccord sur la valeur des actions détenues par Mme [T], qui souhaitait mettre en oeuvre son droit de retrait, prévu au protocole d'accord les liant ; qu'elle a, en effet, mis en oeuvre ce droit, par lettre recommandée avec avis de réception du 19 janvier 2009, proposant de retenir comme valeur des 30 993 actions qu'elle possédait dans la société SMIE SYSTEM la somme de 366 860 euros, M. [J] n'ayant pas répondu à cette proposition ;

Que dès lors, les conditions de l'article 1843-4 du code civil, lequel s'applique aux sociétés par actions simplifiées (SAS), étaient remplies ;

Considérant que selon ce texte, dans tous les cas où sont prévus la cession des droits sociaux d'un associé, ou le rachat de ceux-ci par la société, la valeur de ces droits est déterminée, en cas de contestation, par un expert (en réalité, un tiers évaluateur) désigné, soit par les parties, soit à défaut d'accord entre elles, par ordonnance du président du tribunal statuant en la forme des référés et sans recours possible ;

Considérant que saisi "en référé" (et non pas en la forme des référés), le premier juge ne pouvait statuer qu'en cette qualité ; qu'en désignant un "expert", avec pour mission "de déterminer la valeur de marché des actions de la société SMIE SYSTEM sans prise en compte d'aucune décote de minorité ni de holding", une telle mission relevant des attributions d'un tiers évaluateur et non d'un expert "in futurum", il a excédé ses pouvoirs ;

Qu'il s'agit là d'une question de recevabilité, et non de compétence, que cette question est d'ordre public, et qu'il incombe à la Cour de relever d'office la fin de non-recevoir tirée du défaut de pouvoir de la juridiction des référés ;

Qu'en conséquence, l'ordonnance sera infirmée, en toutes ses dispositions portant sur l'expertise et la demande de Mme [T], à cette fin, déclarée irrecevable ;

Sur les autres demandes :

Considérant qu'il n'y a lieu à d'autres constatations que celles figurant au présent arrêt ;

Considérant qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de Mme [T] les frais irrépétibles qu'elle a exposés pour la présente instance ;

Considérant que M. [J], qui succombe, pour l'essentiel, devra supporter les dépens de première instance -à l'exception des frais de l'expertise, celle-ci ayant été demandée par Mme [T], et d'appel, lesquels pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du CPC ;

PAR CES MOTIFS :

Confirme l'ordonnance entreprise, en ce qu'elle a :

- condamné M. [I] [J] à payer à Mme [G] [T], à titre de provision, la somme de 105 000 euros,

- condamné M. [I] [J] à payer à Mme [G] [T] la somme de 700 euros au titre de l'article 700 du CPC,

- condamné M. [I] [J] aux dépens,

L'infirme en ses autres dispositions,

Statuant à nouveau,

Dit que le point de départ des intérêts au taux légal sur la somme de 105 000 euros est la date de la mise en demeure, 4 mars 2009,

Déclare irrecevable la demande d'expertise (en réalité, de désignation d'un tiers évaluateur),

Condamne Mme [G] [T] au paiement des frais d'expertise déjà engagés,

Y ajoutant,

Condamne M. [I] [J] à payer à Mme [G] [T] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du CPC,

Condamne M. [I] [J] aux dépens d'appel, pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du CPC.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 09/11703
Date de la décision : 20/01/2010

Références :

Cour d'appel de Paris A2, arrêt n°09/11703 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-01-20;09.11703 ?
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