La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/01/2010 | FRANCE | N°07/09879

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 5, 13 janvier 2010, 07/09879


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 4 - Chambre 5



ARRET DU 13 JANVIER 2010



(n° , 11 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 07/09879



Décision déférée à la Cour : Jugement du 26 Avril 2007 -Tribunal de Grande Instance D'EVRY 8ème chambre - RG n° 06/09192





APPELANTS ET INTIMES



Monsieur [T] [O]

demeurant [Adresse 3]



représenté

par la SCP GUIZARD, avoués à la Cour

assisté de Me LANGLET (SELARL CABINET LANGLET ET ASSOCIES) avocat au barreau du Val d'Oise



SOCIETE SOUSCRIPTEURS DU LLOYD'S DE LONDRES

agissant en la personne ...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 5

ARRET DU 13 JANVIER 2010

(n° , 11 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 07/09879

Décision déférée à la Cour : Jugement du 26 Avril 2007 -Tribunal de Grande Instance D'EVRY 8ème chambre - RG n° 06/09192

APPELANTS ET INTIMES

Monsieur [T] [O]

demeurant [Adresse 3]

représenté par la SCP GUIZARD, avoués à la Cour

assisté de Me LANGLET (SELARL CABINET LANGLET ET ASSOCIES) avocat au barreau du Val d'Oise

SOCIETE SOUSCRIPTEURS DU LLOYD'S DE LONDRES

agissant en la personne de leur mandataire général pour les opérations en France, la société LLOYD'S FRANCE

ayant son siège [Adresse 5]

agissant poursuites et diligences en la personne de son Président

représentée par Me Frédéric BURET, avoué à la Cour

assistée de Me MARIÉ (selarl VOVAN ET ASSOCIES) avocat

INTIMES AU PRINCIPAL

APPELANTS INCIDEMMENT

Monsieur [N] [B]

Madame [Y] [B] née [E]

demeurant tous deux [Adresse 8]

représentés par la SCP RIBAUT, avoués à la Cour

assistés de Me RADIGON (SELARL MERLE BONLARRON) avocat

SARL GBR

prise en la personne de son gérant

ayant son siège [Adresse 4]

représentée par la SCP FANET - SERRA, avoués à la Cour

assistée de Me LAMBERT avocat au barreau de Troyes

INTIMES

SA MAAF ASSURANCES

agissant poursuites et diligences en la personne de son Président du Conseil d'administration

ayant son siège [Adresse 7]

représentée par la SCP GOIRAND, avoués à la Cour

assistée de Me SIMONIELLO substituant la SCP HORNY MONGIN SERVILLAT au barreau de l'Essonne

Monsieur [S] [X]

exerçant sous l'enseigne 'PARTENAIRE RÉALISATION'

demeurant [Adresse 6]

représenté par la SCP HARDOUIN, avoués à la Cour

assisté de Me NOACHOVITCH (SCP LOQUET NOACHOVITCH) avocat au barreau de l'Essonne

SA AXA FRANCE IARD

pris en la personne de son Président du Conseil d'Administration

ayant son siège [Adresse 2]

représentée par la SCP GRAPPOTTE BENETREAU JUMEL, avoués à la Cour

assistée de Me PERFETTINI substituant Me BEN ZENOU Avocat

SOCIETE MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES

pris en la personne de son représentant légal

ayant son siège [Adresse 1]

représentée par la SCP ARNAUDY - BAECHLIN, avoués à la Cour

assistée de Me SIMONIELLO substituant la SCP HORNY MONGIN SERVILLAT au barreau de l'Essonne

SOCIÉTÉ CHARPENTES ESCALIERS CHATILLONNAIS - CEC

pris en la personne de ses représentants légaux

ayant son siège [Adresse 9]

représentée par la SCP KIEFFER-JOLY-BELLICHACH, avoués à la Cour

assistée de Me ROBIN avocat

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 3 novembre 2009, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Michel ZAVARO, président

Madame Marie-José THEVENOT, conseillère

Madame Dominique BEAUSSIER, conseillère

qui en ont délibéré.

rapport oral de Monsieur ZAVARO président conformément aux dispositions de l'article 785 du code de procédure civile

Greffier, lors des débats : Madame Marie-Hélène ROULLET

ARRET :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile.

- signé par Monsieur ZAVARO, président et par Madame ROULLET, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire

Les époux [B] ont confié à Monsieur [T] [O] la maîtrise d''uvre de la construction d'une maison à [Adresse 8]. Les travaux ont commencé en janvier 2003. En avril, les époux [B] ont fait appel à un décorateur, Monsieur [X], pour l'aménagement intérieur.

Par lettre du 14 octobre 2003, Monsieur [O] a notifié aux maîtres de l'ouvrage qu'il renonçait à la poursuite de sa mission en raison de l'immixtion de Monsieur [X] dans la maîtrise d''uvre.

Monsieur [H] a été désigné en qualité d'expert par ordonnance de référé du 6 février 2004. Celui ci a déposé le 13 juillet 2006 un rapport relevant un certain nombre de malfaçons. Les époux [B] ont saisi le juge des référés le 21 septembre 2006 de diverses demandes à l'encontre des constructeurs. Celui-ci a renvoyé l'affaire par application de l'article 811 du Code de procédure civile devant le tribunal de grande instance d'EVRY qui, par jugement du 26 avril 2007 a estimé que la rupture du contrat de maîtrise d''uvre était imputable à Monsieur [O] et a relevé divers désordres et non conformités.

Le tribunal a relevé que

l'immeuble avait été construit en zone inondable, 1,33 m sous la cote de crue centennale et que 202 mètres carrés de vide sanitaire avaient été transformés en sous-sol aménageable. Il a donc condamné Monsieur [O] à payer la suppression de l'accès au sous-sol et son cuvelage, soit les sommes de 64.146 € et de 4.579 €.

Le plancher haut du sous-sol avait été calculé avec des surcharges permanentes insuffisantes pour supporter le poids d'un plancher chauffant et de la cheminée. Il a condamné Monsieur [O] au paiement des travaux de renforcement évalués à la somme de 29.285 €.

Le plancher haut du rez-de-chaussée s'affaisse sous le poids des éléments structuraux ; la charpente de la toiture en bois anciens de récupération pèse sur le plancher haut du rez-de-chaussée et présente des insuffisances. Il a condamné in solidum à payer aux maîtres de l'ouvrage :

Monsieur [O], la société CEC (Charpente Escaliers Chatillonnais chargée des travaux de charpente) et GBR (lot gros 'uvre) 103.393 € pour le renfort du plancher haut du rez-de-chaussée et 12.762 € pour la reprise du mur d'encuvement du premier étage, la charge finale de la réparation étant partagée à raison de 80% pour le maître d''uvre, 10 % pour la société CEC et 10% pour la société GBR

Monsieur [O] et la société CEC, 204.215 € pour la reprise de la charpente, la charge finale de la réparation étant partagée entre Monsieur [O] (75%) et la société CEC (25%), le recours de cette dernière contre la société GBR étant admis à concurrence de 10%

l'arrêt du chantier étant imputable à Monsieur [O], celui ci devait supporter les frais de pose provisoire des menuiseries (4.000 €), les frais d'assistance technique (12.200 €, les frais de sapiteur (2.703 €) et rembourser les honoraires payés qui n'ont pas donné lieu à exécution des prestations correspondantes (7.422,55 €) ainsi que 153.293,08 € en réparation du trouble de jouissance correspondant notamment au retard apporté à l'achèvement des travaux.

Monsieur [O] était relevé et garanti par son assureur les souscripteurs du LLOYD'S de Londres, les assureurs des entreprises ainsi que l'assureur dommages ouvrage étant mis hors de cause.

Monsieur [O] a relevé appel de ce jugement. Il conclut au débouté des époux [B] de chacun des chefs de leurs demandes et demande à titre subsidiaire la garantie des souscripteurs du Lloyd's de Londres. Il conclut que la demande de son assureur tendant à la limitation de sa garantie au titre des garanties complémentaires dissociables est irrecevable comme demande nouvelle formée pour la première fois en cause d'appel et à titre plus subsidiaire encore que les désordres relèvent de la garantie décennale. Il demande que les entreprises, leurs assureurs et Monsieur [X] soient condamnés à le relever indemne de toute condamnation et il sollicite la condamnation de tout succombant à lui payer 1.000 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

Son assureur, les souscripteurs du LLOYD'S de Londres, conclut de même à l'exception de deux points. Il sollicite la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a dit qu'il ne garantissait pas le remboursement des honoraires indus ; il rappelle qu'il ne garantit Monsieur [O] au titre des garanties complémentaires dissociables communes qu'à concurrence de 304.898 € par sinistre et par an et demande la condamnation de son assuré et des maîtres de l'ouvrage à lui rembourser la somme de 296.430,18 € trop versée au regard de ses obligations contractuelles. Il demande en outre la condamnation des autres constructeurs et de leurs assureurs ainsi que de Monsieur [X] à la relever indemne des condamnations qui seraient prononcées à son encontre ainsi que 1.000 € en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

La société CEC conclut qu'elle n'était intervenue que pour la réalisation des travaux de charpente et de solivage. En conséquence, elle demande l'infirmation du jugement en ce qu'il la condamne solidairement avec Monsieur [O] et la société GBR à réparer les dommages affectant le plancher haut du rez-de-chaussée. Elle conclut néanmoins à sa mise hors de cause et subsidiairement à la limitation de sa responsabilité à 10% du coût du sinistre et à la condamnation des autres constructeurs et de leurs assureurs à la relever indemne. Elle demande enfin la condamnation de tout succombant à lui payer 2.000 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

Son assureur, la société AXA France IARD conclut à la confirmation du jugement en ce qu'il l'a mise hors de cause. A titre subsidiaire, elle conclut au débouté des époux [B] et à titre plus subsidiaire invoque ses franchises et son plafond de garantie et demande la condamnation des autres constructeurs et de leurs assureurs à la relever et garantir. Elle demande enfin la condamnation de tout succombant à lui payer 5.000 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

La société GBR a limité son appel incident au partage des responsabilités avec Monsieur [O] qu'elle considère comme seul responsable et à la condamnation à relever et garantir la société CEC d'une partie des condamnations prononcées à son encontre. Elle demande la condamnation de son assureur à la relever et garantir ainsi que l'allocation de 2.000 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

Son assureur, la compagnie MAAF Assurances, conclut à la confirmation du jugement déféré qui l'a mise hors de cause et sollicite 5.000 € en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

Monsieur [S] [X] sollicite la confirmation du jugement déféré et la condamnation de Monsieur [O] à lui payer 2.000 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

L'assureur dommages ouvrage, (les MMA IARD), maintenu en cause d'appel alors qu'aucune demande n'est formée à son encontre, sollicite sa mise hors de cause et subsidiairement conclut au rejet des demandes qui seraient formées en cause d'appel soit en raison de leur nouveauté, soit en raison de la prescription acquise depuis le refus de garantie notifié aux maîtres de l'ouvrage le 26 mai 2004. Il demande la condamnation de son assuré et subsidiairement de Monsieur [O] et de son assureur à lui payer 3.500 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

Les époux [B] ont relevé appel incident pour obtenir le remboursement de la somme de 74.225,50€ qu'ils estiment avoir indûment versée à Monsieur [O]. Ils demandent en sus des causes du jugement déférée :

344.214 € au titre des pénalités de retard omises

64.281,70 € au titre de l'actualisation des travaux restant à exécuter

87.481,06 € au titre des travaux supplémentaires de reprise des malfaçons

16.374,92 € au titre des travaux d'aménagement du pavillon dans lequel ils ont vécu d'avril 2004 à juillet 2008

19.951,26 € au titre des frais de déménagement et de garde meubles

255.000 € au titre du préjudice de jouissance

1.500 € en remboursement d'un acompte versé à l'entreprise [P]

A titre subsidiaire, ils sollicitent une expertise complémentaire et en tout état de cause 62.000 € au titre des frais irrépétibles de procédure.

Sur la rupture du contrat de maîtrise d''uvre :

Il est constant que Monsieur [O] a renoncé à la poursuite de sa mission le 14 octobre 2003, que les maîtres de l'ouvrage ont désigné le cabinet ABAC à l'effet d'évaluer les travaux exécutés et que les entreprises GBR et CEC ont quitté le chantier alors que la couverture de l'immeuble était en cours de pose.

Pour justifier sa décision, Monsieur [O] expose que Monsieur [X] est intervenu dans la conception de la partie de l'ouvrage qui ne le concernait pas et que les maîtres de l'ouvrage ont pris son parti lorsqu'il s'en est plaint. Il considère que l'attitude du maître de l'ouvrage caractérise une perte de confiance justifiant conformément au contrat, sa résiliation ; il critique par ailleurs le rapport de l'expert qui stigmatise son travail en relevant l'inimitié qui s'est instaurée entre eux.

Monsieur [X] réplique qu'il n'est intervenu dans le chantier qu'en qualité de décorateur d'intérieur et qu'il s'est contenté d'interroger le maître d''uvre et les entreprises sur les modalités de la réalisation en cours pour tenter d'établir le projet qui relevait de sa mission. C'est dans ces conditions qu'il a relevé les malfaçons qui ont été ensuite reprises par l'expert. Il rappelle enfin que si les époux [B] ont voulu lui confier la poursuite de la maîtrise d''uvre de l'opération, il ne l'a pas acceptée parce qu'il n'avait pas les compétences nécessaires.

Les époux [B] contestent également l'immixtion de leur décorateur et reprennent les conclusions de l'expert judiciaire Monsieur [H] qui stigmatise les modalités d'exécution par Monsieur [O] de sa mission.

L'expert judiciaire intervient pour éclairer la juridiction sur des aspects techniques qui requièrent les lumières d'un spécialiste. Son avis est de nature à déplaire à l'une des parties au moins. Ce fait, en dehors de toute autre considération, ne saurait caractériser une raison d'écarter les conclusions de l'expert. En l'espèce, Monsieur [O] ne justifie l'inimitié alléguée que par le fait que l'expert ne partage pas son point de vue.

Il apparaît, tant du rapport de l'expert que des pièces produites, contrairement aux prétentions de Monsieur [O] que le dossier de consultation des entreprises contient des agrandissements des plans à peine modifiés de permis de construire signés par l'architecte, Monsieur [M] alors que le parti pris architectural, reposant en partie sur l'utilisation de matériaux de récupération, supposait une précision et une vigilance technique particulière qui a fait défaut.

Monsieur [O] a abandonné le chantier lorsque les interrogations de Monsieur [X] ont commencé à mettre en lumière des difficultés techniques qui ont ensuite été caractérisées tant par le cabinet ABAC que par l'expert. Il ne justifie pas d'un juste motif d'abandon du chantier.

Sur la réception de l'ouvrage inachevé :

Monsieur [O] soutient que ses ouvrages ont été réceptionnés le 5 décembre 2003 au cours de la réunion de chantier organisée à la suite de son abandon du chantier et considère que le rapport établi par Monsieur [F], ingénieur du cabinet ABAC vaut procès-verbal de réception.

Le maître de l'ouvrage le conteste. Ce document daté du 22 décembre 2003 intitulé « rapport d'expertise '(établi à la demande des propriétaires) dresse le bilan de la construction en cours et soulève les problèmes qui seront traités ensuite par l'expert. Il ne contient aucun élément permettant de caractériser la volonté du maître de l'ouvrage de recevoir l'ouvrage en l'état dans lequel il se trouve. Il convient donc de confirmer le jugement déféré en ce qu'il traite les désordres comme survenus dans un chantier non réceptionné.

Sur le sous-sol :

L'expert retient que le sous-sol a été implanté en dessous du niveau des crues centennales de la Seine en violation des prescriptions du PPRI du 20 octobre 2003 applicable par anticipation depuis le 8 novembre 2000 donc a une date antérieure à celle du permis de construire. Il ajoute que le plan de permis de construire prévoyait un sous-sol de 254 mètres carrés dont 52 mètres carrés de caves et 202 mètres carrés de vides sanitaires qui ont été transformés en sous-sol brut avec murs et sol.

Il préconise pour la reprise de ces deux désordres, la création d'un cuvelage avec constitution d'un radier, suppression de l'escalier dans l'entrée et rétablissement de l'escalier initialement prévu, création de regards de décompression et rebouchage de la trémie d'entrée vers le sous-sol. Il évalue l'ensemble de ses travaux aux sommes de 64.146 € et 4.579 €, valeur juin 2005. Les premiers juges ont condamné Monsieur [O] au paiement de ces sommes.

Monsieur [O] soutient que le pavillon des époux [B] ne se trouve pas dans la zone inondable et, dans le cas contraire, que la référence est le plancher haut et non pas le sous-sol qui n'a pas à être étanché. Il ajoute que la transformation du vide sanitaire en sous-sol procède de la volonté des maîtres de l'ouvrage qui ont choisi de ne pas respecter le permis de construire en connaissance de cause et qu'elle ne contrevient pas aux dispositions de l'article R 112-2 du Code de l'urbanisme.

La hauteur du sous-sol et son aménagement ne permettent pas de l'exclure de la surface de la construction. Monsieur [O] ne justifie pas avoir mis en garde les époux [B] des conséquences de la violation du permis de construire. Il doit en réparation du manquement à son devoir de conseil et d'information les conséquences financières de la condamnation du sous-sol.

Il résulte tant du rapport d'expertise que du rapport de ABAC et des divers plans d'inondation et d'implantation que le pavillon des époux [B] se trouve en zone inondable et son sous-sol 1,33 mètre en dessous des prescriptions du PPRI de 2003 applicables par anticipation à ce permis de construire de telle sorte qu'il convient d'étancher la chaufferie. Le contrôle des devis sur lesquels l'expert s'est basé pour estimer le coût des travaux ainsi qu'il l'a fait montre que les travaux prévus ne portent pas sur le vide sanitaire mais sur une surface qui correspond à la chaufferie. Il convient donc de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné Monsieur [O] à payer aux époux [B] le coût de ces travaux.

Sur le plancher haut du sous-sol :

Il résulte du rapport de l'expert que la résistance du plancher haut du sous sol ne tient pas compte de la surcharge liée à la décision, en début de chantier d'installer un plancher chauffant et à l'installation d'une cheminée monumentale. Monsieur [O] conteste toute responsabilité de ce chef. Il a cependant accepté l'installation d'un plancher chauffant et d'une cheminée particulièrement lourde sans émettre de réserves ni faire vérifier la compatibilité des calculs avec ces nouvelles surcharges. Le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il le condamne à payer aux époux [B] la somme de 29.285 € de ce chef.

Sur le plancher haut du rez-de-chaussée et la charpente:

Le plancher haut du rez-de-chaussée est constitué d'une structure horizontale porteuse par poutres maîtresses et solives en bois conçue par CEC et d'un plancher en béton conçu par GBR. Il résulte du rapport de l'expert que le plancher haut du rez-de-chaussée s'est affaissé sous son seul poids et que la recherche des aciers montre que le chaînage périphérique présente des solutions de continuité.

Il en résulte également que la charpente présente divers désordres liés à l'insuffisance ou à la mauvaise qualité des bois de récupération utilisés et à un appui inacceptable sur le plancher haut du rez-de-chaussée déjà fragilisé.

Les premiers juges ont, conformément aux conclusions de l'expert condamné in solidum Monsieur [O] et les sociétés CEC et GBR à la reprise du plancher haut puis Monsieur [O] et la société CEC à la reprise de la charpente avec démolition et reconstruction de l'ouvrage, solution technique que Monsieur [O] et la société CEC estiment excessive.

Monsieur [O] conclut que le calcul de la résistance du plancher n'était pas à sa charge, mais à celle de l'entreprise GBR qui a d'ailleurs facturé une étude béton pour la somme de 1.200 € et de l'entreprise CEC pour la partie bois. Il affirme à propos de GBR que le descriptif prévoyait l'incorporation du chauffage dans le plancher. Il ajoute que les renforts nécessités par le poids de la cheminée étaient dus par l'entreprise GBR et que la charpente ne présentait que des défauts d'exécution engageant la responsabilité de l'entreprise CEC.

Enfin, Monsieur [O] conteste que les désordres concernant les chaînages soient établis et ajoute que dans le cas contraire, ils relèveraient de la responsabilité des entreprises et non du maître d''uvre.

La société GBR considère que les désordres qui lui sont imputés relèvent de la responsabilité exclusive de Monsieur [O].

La société CEC conclut qu'elle ne doit pas les notes de calcul et que la surcharge du plancher ne lui est pas imputable puisqu'elle avait posé la charpente du plancher haut du rez-de-chaussée avant que ne soit prise la décision d'installer un plancher chauffant. Elle conteste par ailleurs que la charpente ne présente pas la résistance voulue et ajoute que sa dépose n'est préconisée qu'en raison de l'insuffisance de la résistance du plancher haut du rez-de-chaussée et du chaînage

Les constatations de l'expert suffisent à établir la réalité des désordres et notamment de l'insuffisance des chaînages pour le seul qui soit véritablement contesté sans qu'il soit nécessaire de procéder à des investigations complémentaires, les moyens mis en 'uvre suffisant à établir la réalité des solutions de continuité du ferraillage.

Il existait peut-être des moyens moins onéreux de réparer les désordres relevés, mais compte tenu de leur importance et du fait que les entreprises contactées refusaient des réparations partielles, on ne peut pas reprocher à l'expert d'avoir prévu la solution maximaliste de la démolition et de la reconstruction de l'ouvrage. Il importe peu que la société CEC ait été prête à mettre en 'uvre des solutions partielles dès l'instant où, ayant renoncé à la poursuite des travaux, le maître de l'ouvrage a le choix des entreprises qu'il entend charger de leur achèvement. Il en résulte que c'est à juste titre que les premiers juges ont retenu les évaluations de l'expert.

Les désordres proviennent pour l'essentiel d'une défaillance de la conception qui met en cause au premier chef la responsabilité de Monsieur [O] et ensuite, celle des entreprises.

Monsieur [O] n'a pas effectué les calculs de résistance nécessaires à la réalisation de l'ouvrage ; il prétend que ces calculs incombaient aux entreprises, ce que CEC conteste pour sa part. Il ne démontre d'abord pas que CEC devait les calculs de résistance ; il n'établit pas ensuite qu'il les ait vérifiés et actualisés

CEC a réalisé sa charpente avec des bois de récupération sans aucune référence aux charges susceptibles d'être supportées par le plancher. L'entreprise a tenté de justifier après coup de la résistance de son ouvrage ; il lui appartenait de s'en soucier avant sans qu'elle puisse se réfugier derrière l'insuffisance de la conception du maître d''uvre. Ces considérations caractérisent sa faute.

Les premiers juges ont exactement apprécié la part de responsabilité des entreprises et du maître d''uvre en mettant

pour le sinistre affectant le plancher haut, 80% de la responsabilité à la charge de Monsieur [O], 10% à la charge de la société CEC et autant à la charge de la société GBR..

et pour le sinistre affectant la charpente 75% à la charge de Monsieur [O] et 25% à la charge de la société CEC, celle ci étant relevée et garantie à concurrence de 10% par la société GBR.

Il n'est justifié d'aucune faute à l'encontre de monsieur [X].

Sur la sous-évaluation des travaux de reprise :

Les époux [B] demandent le payement de 87.481,06 € correspondant à des imprévus et à des travaux supplémentaires qu'ils entendent justifier par la production d'une note de Monsieur [F] qui avait dirigé les travaux de reprise. Ils sollicitent à titre subsidiaire une nouvelle expertise. L'expert a procédé à des évaluations réalistes sur la base de devis des entreprises. Rien ne justifie que ces évaluations aient été dépassées. Il n'y a donc lieu ni à l'allocation des sommes demandées ni à la mise en 'uvre d'une nouvelle expertise pour justifier leur bien fondé.

Sur la réparation du préjudice consécutif au retard :

Les premiers juges ont alloué de ce chef pour un retard de 42 mois, la somme de 153.293,08 €. Les époux [B] exposent que le retard réel a été de 54 mois. Ils demandent que cette somme soit augmentée de 344.214 € au titre des pénalités de retard que Monsieur [O] a omis de prévoir dans les marchés, de 64.281,70 € au titre de l'actualisation des travaux restant à exécuter, de 16.374,92 € au titre des frais d'aménagement du pavillon dans lequel ils ont vécu d'avril 2004 à juillet 2008, de 19.951,26 € au titre des frais de déménagement et de garde meuble et de 255.000 € au titre du préjudice de jouissance.

Le fait de ne pas prévoir de pénalités forfaitaires de retard ne constitue pas nécessairement une faute du maître d''uvre, les maîtres de l'ouvrage pouvant préférer demander l'indemnisation du préjudice réellement subi comme les époux [B] le font actuellement.

L'actualisation du prix des travaux doit être effectuée au jour du jugement, les intérêts courant sur les sommes ainsi fixées à compter de sa notification. Il n'y a pas lieu à actualisation complémentaire.

La somme allouée du chef de l'indemnisation des retards représente près de 3.000 € par mois de retard, ce qui constitue une exacte indemnisation du préjudice de jouissance résultant directement du retard apporté à l'exécution des travaux.

Monsieur [O] est principalement responsable de ce retard du fait de l'absence de conception et de l'abandon du chantier. Cette responsabilité est toutefois partagée par les sociétés GBR et CEC en raison de leurs malfaçons qui en supporteront chacune 10% sur l'appel en garantie du maître d''uvre.

Sur les autres demandes formées contre Monsieur [O] :

Les époux [B] n'expliquent pas en quoi Monsieur [O] est responsable du versement indu à Monsieur [K] [P] de la somme de 1.500 € pour la fourniture d'un escalier en pierre. Monsieur [O] indique par ailleurs que la demande est présentée pour la première fois en cause d'appel mais ne tire aucune conclusion de cette constatation.

Les époux [B] ont traité avec Monsieur [O] aux conditions qu'il a plu aux parties d'arrêter. Ils ne sauraient revenir sur cette convention en demandant la restitution de l'intégralité des honoraires payés jusqu'à l'abandon du chantier. Les premiers juges ont évalué à la somme de 7.422 € les honoraires correspondant à des missions incomplètement exécutées. Il apparaît en réalité que ces missions, notamment de consultation des entreprises ont été exécutées mais mal exécutées. La réparation est comprise dans le coût de la procédure et des reprises qui comprennent une part de maîtrise d''uvre. Il n'y a pas lieu d'ordonner une restitution supplémentaire. Le jugement déféré sera donc infirmé en conséquence.

Sur la garantie des assureurs :

Il n'est rien demandé à l'encontre des MMA, assureur dommages ouvrage dont on ne sait pourquoi appel a été relevé à leur encontre.

AXA et la MAAF respectivement assureurs de la société CEC et de la société GBR ne couvrent pas les dommages affectant l'ouvrage en dehors de la garantie décennale qui n'est pas acquise faute de réception. La garantie effondrement souscrite auprès de la MAAF n'est susceptible de s'appliquer qu'en cas d'effondrement ou de risque imminent d'effondrement dont la réalité n'est pas établie.

Les souscripteurs du Lloyd's de Londres, assureur de Monsieur [O], invoquent la police limitant la garantie due en dehors de l'assurance obligatoire à la somme de 304.898 € par sinistre et par an et demandent que Monsieur [O] et les époux [B] soient condamnés à leur rembourser in solidum 296.430,18 € au titre du trop payé en exécution du jugement déféré.

Les époux [B] soutiennent, en confondant garantie obligatoire et garantie facultative, que le plafond de garantie ne leur est pas opposable. Les dommages n'étant pas décennaux, seule la garantie facultative s'applique.

Monsieur [O] soulève l'irrecevabilité de la demande de non garantie des Lloyd's présentée pour la première fois en cause d'appel, invoque les dispositions de l'article L 113-17 du Code des assurances pour conclure que les Lloyd's avaient renoncé à se prévaloir du plafond de garantie et leur reproche un défaut d'information qui l'a conduit à leur abandonner la défense de ses intérêts notamment en cours d'expertise.

L'invocation du plafond de garantie n'est qu'un moyen de défense opposé par les lloyd's à l'action directe des époux [B] et à l'appel en garantie de Monsieur [O]. Il est donc recevable en cause d'appel. Il n'est pas contesté que les Lloyd's ont assuré la direction du procès. Toutefois, cette circonstance n'implique pas renonciation par l'assureur à se prévaloir du plafond de garantie, l'article L 113-17 ne concernant que les exclusions de garantie qui ne sont pas en cause dans la présente procédure.

Monsieur [O] a abandonné la défense de ses intérêts aux Lloyd's. Il ne démontre pas qu'il en est résulté un quelconque préjudice ni qu'une erreur du conseil choisi par son assureur lui ait fait perdre une chance d'imposer son point de vue. Il convient donc de condamner les souscripteurs des Lloyd's de Londres in solidum avec Monsieur [O] à concurrence du plafond de garantie de 304.898 €.

Les époux [B] ne soutiennent pas, pour s'opposer à la demande de remboursement de l'assureur, que Monsieur [O] soit le seul bénéficiaire du paiement indu par les souscripteurs du Lloyd's, au delà de leur plafond de garantie. En conséquence, rien ne s'oppose à ce que l'obligation de remboursement résultant de plein droit du présent arrêt dont la notification fera courir les intérêts, prenne effet.

Sur les frais irrépétibles :

Les frais d'assistance technique (12.200 €) constituent des frais irrépétibles. Les frais de sapiteur (2.703 €) payés par les époux [B] auraient du être intégrés aux dépens au même titre que les frais d'expertise. Le premier juge a évalué les frais irrépétibles de 1ère instance à 3.500 €. Il est demandé en cause d'appel 62.000 € Il convient d'allouer aux époux [B] 15.556 € pour l'assistance technique et 30.000 € pour l'assistance juridique tant en première instance qu'en cause d'appel, y compris l'intervention d'un huissier soit 45.556 € . Monsieur [O] et son assureur seront relevés et garantis ensemble à raison de 10% par chacune des sociétés CEC et GBR pour en supporter 80%.

Il n'est pas inéquitable de laisser ces deux sociétés supporter leurs frais irrépétibles de procédure.

Par ces motifs

Condamne Monsieur [T] [O] à payer aux époux [N] [B] les sommes de :

64.146 € et 4.579 € au titre des travaux de reprise du sous sol

4.000 € au titre de la pose et de la dépose en reprise des menuiseries

153.293,08 € au titre du préjudice immatériel

Condamne in solidum Monsieur [T] [O] et la société CEC à payer aux époux [B] la somme de 204.215 € au titre des travaux de reprise de la charpente,

Condamne Monsieur [T] [O] in solidum avec les sociétés CEC et GBR à payer aux époux [B] les sommes de 103.393 € et 12.762 € au titre des travaux de reprise du plancher haut du rez-de-chaussée,

Ordonne l'indexation de ces sommes par référence à l'indice BT 01 en vigueur en juin 2005 sur l'indice en vigueur au jour du jugement pour porter intérêts à compter de sa notification,

Condamne les souscripteurs du Lloyd's de Londres in solidum avec Monsieur [O] à concurrence de 304.898 €,

Rappelle que l'infirmation de ce chef du jugement déféré constitue le titre de remboursement des souscripteurs du Lloyd's de Londres, leur créance portant intérêts à compter de la notification du jugement,

Confirme la répartition des responsabilités opérées par les premiers juges pour le plancher haut du rez-de-chaussée et la charpente et les condamnations à relever et garantir qui en sont la suite,

L'infirme pour la réparation du préjudice immatériel et condamne de ce chef CEC et GBR à relever et garantir Monsieur [O] et son assureur chacune à concurrence du dixième de la condamnation prononcée de ce chef à leur encontre,

Dit que les frais de sapiteur relèvent des dépens au même titre que les frais d'expertise

Condamne in solidum Monsieur [O] et les souscripteurs des Lloyd's de Londres à payer en application de l'article 700 du code de procédure civile pour l'ensemble de la procédure

aux époux [B] 45.556 €

à Monsieur [X], aux MMA IARD, à AXA France et à la MAAF 2.000 € chacun,

Condamne in solidum Monsieur [O] et les souscripteurs du Lloyd's de Londres, la société GBR et la société CEC aux entiers dépens y compris de première instance, d'expertise et de sapiteur,

Condamne les sociétés GBR et CEC à relever et garantir Monsieur [O] et les souscripteurs du Lloyd's de Londres chacune à concurrence de 10% des dépens et frais non compris dans les dépens,

Accorde le bénéfice de distraction aux avoués en la cause.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 07/09879
Date de la décision : 13/01/2010

Références :

Cour d'appel de Paris G5, arrêt n°07/09879 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-01-13;07.09879 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award