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07/01/2010 | FRANCE | N°07/16212

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 6, 07 janvier 2010, 07/16212


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 6



ARRÊT DU 07 JANVIER 2010



(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 07/16212



Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Août 2007 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 03/02628





APPELANT:



Monsieur [T] [Y]

demeurant [Adresse 6]

[Localité 8]



représenté p

ar Maître Luc COUTURIER, avoué à la Cour

dépôt du dossier de Maître Nadège RINDERMANN, avocat au barreau de Paris, toque

C 1110



INTIMÉE:



S.A. CRÉDIT DU NORD

prise en la personne de ses représentants lé...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 6

ARRÊT DU 07 JANVIER 2010

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 07/16212

Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Août 2007 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 03/02628

APPELANT:

Monsieur [T] [Y]

demeurant [Adresse 6]

[Localité 8]

représenté par Maître Luc COUTURIER, avoué à la Cour

dépôt du dossier de Maître Nadège RINDERMANN, avocat au barreau de Paris, toque

C 1110

INTIMÉE:

S.A. CRÉDIT DU NORD

prise en la personne de ses représentants légaux

ayant son siège social [Adresse 4]

[Localité 7]

représentée par la SCP RIBAUT, avoué à la Cour

assistée par Maître Ali EL ASSAAD, avocat au barreau de Paris, toque D 289

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 06 Novembre 2009, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Marie-Claude APELLE, Président

Madame Françoise CHANDELON, Conseiller

Madame Caroline FEVRE, Conseiller

qui en ont délibéré

Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions prévues par l'article 785 du code de procédure civile

Greffier, lors des débats : Mademoiselle Guénaëlle PRIGENT

ARRÊT :

- contradictoire

- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Claude APELLE, Président et par Mademoiselle Guénaëlle PRIGENT, Greffier à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

***

M. [Y] a ouvert dans les livres du Crédit du Nord:

- Un compte d'instruments financiers n°[XXXXXXXXXX02] à partir duquel il effectuait des opérations de bourse sur RM (règlement mensuel) devenu SRD (Service Règlement Différé).

- un compte personnel n°[XXXXXXXXXX05].

- Un compte professionnel n°30076 2054 223830 002 00.

Les positions de M. [Y] sur le SRD ont engendré des pertes de 1.318.395,51 € en septembre 2001.

Pour les compenser, M. [Y] a obtenu une ouverture de crédit par découvert de son compte courant personnel le 5 octobre 2001 à hauteur de 1.320.000 F (201.232,70 €) pour une durée expirant le 30 septembre 2002, moyennant un intérêt de 7% l'an.

Cette ouverture de crédit a été isolée dans un sous compte n°[XXXXXXXXXX01] et garantie par un nantissement des titres de M. [Y] à concurrence de son montant, la valeur globale de son portefeuille étant alors de 1.810.000 F.

Les titres nantis ont été déposés sur un autre sous compte n°[XXXXXXXXXX03].

Par courrier du 5 octobre 2001, M. [Y] a encore pris l'engagement, d'une part de ne plus opérer sur le SRD, d'autre part d'affecter le produit des ventes de ses actions au comptant au remboursement de son découvert.

M. [Y] a cependant continué à opérer sur le SRD.

En septembre 2002 la baisse du cours de ses actions atteignait 70.000 €, montant que le solde du compte courant et le portefeuille titres de M. [Y] ne permettait plus de couvrir.

C'est dans ce contexte que par courrier recommandé du 20 septembre 2002, le Crédit du Nord a demandé à M. [Y] de reconstituer sa couverture lui rappelant que lorsqu'elle est assurée par des actions cotées, elle doit représenter 40% du montant des achats en cours.

Il lui a proposé soit de 'couper' (liquider) tout ou partie de ses positions, soit de débiter son compte courant en fin de mois de la totalité de ses opérations.

Par courriel du 24 septembre 2002, la banque a accepté de ne couper que 50% de sa position et de reporter les 50% restants à la liquidation de décembre suivant, se réservant cependant d'y procéder dès octobre 2002.

Les 18 novembre 2002, le Crédit du Nord a dénoncé ses relations de comptes avec M. [Y] au terme d'un préavis de 30 jours.

Le 20 décembre 2002 il l'a mis en demeure de régler, sous huitaine, la somme de 171.600,09 € restant due sur l'ouverture de crédit par découvert en compte (sous compte n°[XXXXXXXXXX01]), lui rappelant que le remboursement de cette créance était garanti par un nantissement de ses titres.

Fin décembre 2002, la banque a exécuté les ordres en cours.

Le 6 janvier 2003, constatant que la mise en demeure délivrée le 20 décembre était restée vaine, elle l'a informé de la réalisation du compte d'instruments financiers nanti à laquelle elle a procédé le 8 janvier 2003, opération qui a permis de ramener le solde débiteur du sous compte n°[XXXXXXXXXX01] à 21.169,89€.

Par un second courrier du même jour elle l'a mis en demeure de régler le solde débiteur de son compte courant, d'un montant de 49.207,32 € (compte principal n°[XXXXXXXXXX05]) sous huitaine.

Elle a présenté au juge de l'exécution de Paris, le 7 janvier 2003, une requête aux fins de saisie des titres restant disponibles, exposant que la réalisation du portefeuille nanti, évaluée à 156.052,03 €, ne solderait pas la créance de M. [Y] (171.600,09 € + 49.207,32 €)

Il a été fait droit à sa demande par ordonnance du même jour.

Par jugement du 22 avril 2003, confirmé par arrêt du 16 septembre 2004, le juge de l'exécution a rejeté la demande de main levée de cette saisie conservatoire.

Parallèlement, M. [Y] assignait le Crédit du Nord à jour fixe, par exploit du 11 février 2003, devant le tribunal de grande instance de Paris pour voir annuler la réalisation du compte d'instrument financier.

Par jugement du 30 avril 2003, confirmé par arrêt du 29 juin 2004, objet d'un pourvoi rejeté le 28 mars 2006, sa demande a été accueillie, la mise en demeure délivrée par la banque étant jugée nulle par application des dispositions de l'article L431-4 du code monétaire et financier.

Condamné à reconstituer le portefeuille titre existant à la date de sa réalisation, le Crédit du Nord s'est exécuté le 29 juin 2004.

Reprochant différentes fautes contractuelles au Crédit du Nord, M. [Y] l'a assigné en responsabilité devant le tribunal de grande instance de Paris par exploit du 27 janvier 2003.

Par jugement du 28 août 2007, assorti de l'exécution provisoire, le tribunal a :

- débouté M. [Y] de ses demandes,

- condamné M. [Y] à payer au Crédit du Nord la somme de 225.051,13 €, arrêtée au 15 septembre 2004, correspondant au débit de son compte nanti n°[XXXXXXXXXX01];

Par déclaration du 20 septembre 2007, M. [Y] a interjeté appel de cette décision.

Dans ses dernières écritures, au sens de l'article 954 du code de procédure civile, déposées le 25 janvier 2008, il demande à la Cour de:

- juger fautif le découvert alloué par la banque, à sa seule initiative alors que le montant du crédit de ses autres comptes lui permettait de solder le débit de son compte n°[XXXXXXXXXX02],

- constater que le Crédit du Nord a failli à ses devoirs de conseil et de mise en garde,

- dire le nantissement du compte titre n°[XXXXXXXXXX03] fautif et ordonner sa mainlevée,

- condamner le Crédit du Nord à rembourser 9.932,84 € au titre des intérêts et agios perçus d'octobre 2001 à décembre 2002 et dire qu'il ne pourra en exiger pour la période postérieure,

- condamner le Crédit du Nord à rembourser les frais de garde des titres nantis soit

667,96 € et dire qu'il ne pourra en réclamer pour la période postérieure,

- condamner le Crédit du Nord au paiement de 201.232 € correspondant à sa perte de chance d'apurer sa dette en cédant ses titres,

- condamner le Crédit du Nord au remboursement des frais perçus à hauteur de

42.111,13 € du fait des ordres postérieurs au mois d'octobre 2001 et de la perte subie, en août et septembre 2002, d'un montant de 49.418,57 €,

-condamner le Crédit du Nord au remboursement des frais des contrats internet, soit 302,80 € ainsi qu'à la somme de 15.755,71 € au titre de la perte de chance d'avoir pu reconstituer sa couverture si le report de ses positions avait été admis sur la totalité et non sur 50% des titres,

- condamner le Crédit du Nord à 10.000 € de dommages intérêts pour avoir abusé de sa position dominante, séquestré ses comptes et incité à souscrire une nouvelle convention de découvert,

- condamner le Crédit du Nord à le créditer de la somme de 136.977,50 € pour l'avoir dépossédé de ses comptes à partir du mois de janvier 2003, en séquestrant le compte titres libre et en réalisant le compte titre nanti,

- condamner le Crédit du Nord à lui verser 5.000 € pour ne pas lui avoir donné d'information sur ses comptes ni remis, pour les années 2002 et suivantes, les renseignements destinés à l'administration fiscale,

- ordonner la mainlevée de la saisie conservatoire du compte titre n°[XXXXXXXXXX02] reconstitué pour le transférer vers un autre établissement;

- condamner le Crédit du Nord à lui verser la somme de 10.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans ses dernières écritures, au sens de l'article 954 du code de procédure civile, déposées le 21 juillet 2000, le Crédit du Nord demande à la Cour de:

- confirmer le jugement déféré,

- y ajoutant, condamner M. [Y] au paiement de la somme de 53.856,96 €, arrêtée au 31 décembre 2002 et portant intérêts de droit à compter de cette date, montant du solde débiteur du compte n°[XXXXXXXXXX02]

- condamner M. [Y] à lui verser la somme de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

CELA ETANT EXPOSE,

LA COUR,

Sur la convention de trésorerie

Considérant que M. [Y] considère que le découvert lui a été accordé à l'initiative de M. [Z], son conseiller et sans la moindre demande de sa part;

Qu'il souligne n'avoir même pas signé le contrat afférent;

Considérant cependant que comme l'ont relevé les premiers juges, l'accord de

M. [Y] pour adopter cette solution résulte tant de la signature qu'il a portée en dernière page de l'acte concernant l'adhésion à l'assurance et comportant un formulaire de santé que de l'acte du nantissement sur lequel figure une mention de sa main rappelant le montant du concours garanti;

Considérant par ailleurs que M. [Y] ne saurait reprocher à la banque un manquement à son obligation de conseil ou de mise en garde sans démontrer que son conseiller lui a suggéré de recourir à un emprunt plutôt que de liquider son portefeuille boursier à un moment particulièrement défavorable;

Considérant qu'il ne rapporte pas cette preuve et que les pièces produites confortent la thèse de la banque selon laquelle M. [Y] a pris seul cette décision, croyant à une reprise de la bourse;

Qu'il apparaît ainsi que M. [Y], qui se présente, dans ses conclusions prises devant le tribunal le 7 septembre 2004, comme un investisseur averti, opérant depuis 1996 sur le SRD, a poursuivi ses opérations sur ce marché après le 5 octobre 2001 malgré l'engagement pris à cette date à la suite des pertes conséquentes subies le mois précédent;

Qu'il justifie ce choix dans un courrier du 23 septembre 2002 sollicitant le report de son engagement en fin d'année 2002, en dépit des conséquences qu'il rappelle, à savoir l'importance du découvert de son compte courant, en indiquant 'nul n'imagine que les marchés boursiers ne vont pas retrouver le chemin de la hausse, ne serait-ce que technique, avant la fin de l'année 2002" après avoir rappelé: 'qui pouvait anticiper le 11.09.2001, le scandale [I], la faillite de Worldcom, les intentions du Président Busch, l'affaire Mobilcom''

Que dans un courriel du lendemain, il a rappelé que le défaut de couverture qu'il lui était demandé de combler résultait d'une baisse de cours historique: les actions France Telecom et Alcatel ayant perdu, entre ses ordres d'achat exercés entre le 27 août et le 5 septembre 2002 et la clôture, le 23 septembre 2002, 43,94% et 57,40 % de leur valeur, avec pour conséquence, les actions de couverture subissant les mêmes baisses, de ne plus respecter les 40% exigés par la loi non pas au moment de la passation des ordres mais à celui de la liquidation;

Qu'il estimait cependant que 'si le cours des actions ne devait pas remonter dans 3 ou 6 mois, c'est tout le système capitalistique et bancaire qui serait remis en cause' avant d'ajouter qu'il souhaitait un nouveau découvert le temps que les cours retrouvent un niveau plus adéquat aux réalités économiques';

Qu'à la même date et pour vaincre les réticences manifestes de la banque de reporter ses positions au mois de décembre 2002, il déclarait consentir à nantir les autres titres de son portefeuille et obtenait par ces engagements, qui ne devaient pas être respectés, le report précité de sa position;

Qu'il précisait enfin, dans un courriel du 1er octobre 2002 que la chute de l'indice CAC 40 de 21,3% au cours des neuf séances du 12 et 24 septembre était exceptionnelle et devait suggérer, de la part de la banque, également victime de cette dépréciation, une 'réaction exceptionnelle';

Considérant au surplus que le choix opéré de souscrire un emprunt plutôt que de liquider un portefeuille, d'une valeur, en septembre 2001 de 1.800.000 F, n'a été désastreux que du fait de la non reprise de la bourse que la banque ne pouvait pas plus anticiper qu'un investisseur averti ce dont il était parfaitement conscient comme le révèlent ses courriers;

Considérant que M. [Y] ne saurait ainsi obtenir la mainlevée du nantissement du 5 octobre 2001 qu'il a accepté en toute connaissance de cause ni davantage le remboursement des frais qu'il a avancés, des intérêts de l'emprunt contracté ou des agios perçus;

Qu'il ne saurait davantage évoquer une perte de chance d'avoir vendu son portefeuille à une valeur non dépréciée;

Sur les ordres postérieurs au mois d'octobre 2001

Considérant que M. [Y] soutient n'avoir pu faire d'opération à compter de cette date sur le compte n°[XXXXXXXXXX02] alors que les titres y figurant n'étaient pas nantis;

Que la banque ne conteste pas ce blocage qu'elle impute à une défaillance de son système informatique;

Que M. [Y] estime que la banque a procédé ainsi sciemment, pour s'assurer du respect de l'engagement pris le 5 octobre 2001 de ne plus opérer sur le SRD;

Qu'en toute hypothèse il reconnaît avoir pu passer, par l'intermédiaire de M. [Z], 251 ordres de bourse, dont 154 au SRD entre octobre 2001 et septembre 2002 mais soutient que pendant la période de congés annuels de ce dernier, du 14 au 24 septembre 2002, il n'aurait pu suivre l'évolution de son compte ni passer aucun ordre, ce qui lui a été préjudiciable dans la mesure où l'imminence de la guerre d'Irak a entraîné une forte chute du CAC 40 qui a perdu 21% en 9 jours, atteignant son cours le plus bas le 23 septembre 2002;

Considérant qu'il indique que c'est dans ces circonstances qu'il a été avisé par la banque de ce que la couverture de 40% imposée dans ce type de transactions n'était plus assurée et que pour conserver 50% de sa position au SRD, la banque a opéré une saisie conservatoire sur ses derniers titres;

Considérant qu'il soutient encore que la liquidation de 50% de ses positions a entraîné une perte conséquente au regard de la hausse spectaculaire de certaines actions dès le 25 septembre 2002;

Considérant que M. [Y] ne contestant pas que M. [Z] s'est borné à transmettre ses ordres, il n'apparaît pas fondé à solliciter aussi bien les frais inhérents à leur exécution que la perte financière consécutive aux options qu'il a pris librement;

Que M. [Y] ne démontre pas l'impossibilité dans laquelle il s'est trouvé de passer des ordres pendant 10 jours du mois de septembre 2004 et ne peut sérieusement soutenir avoir été dans l'incapacité de suivre l'évolution de son portefeuille, dès lors qu'il en connaissait les caractéristiques et que les cours boursiers sont consultables dans la presse quotidienne comme sur le site Internet;

Considérant que la défaillance technique de l'outil informatique mis à sa disposition pour opérer sur 'Internet' est par contre reconnue et qu'il convient d'accueillir sa demande en remboursement de la somme de 302,80 €, représentant le coût de ce service;

Considérant qu'aux termes de l'article 517-12 du règlement général de l'Autorité des Marchés Financiers la couverture, calculée en pourcentage des positions et qui est de 40% pour les OSRD, est réajustée quotidiennement pour correspondre en permanence au minimum réglementaire requis; que le prestataire est tenu, d'une part de mettre en demeure par tous moyens son client de la compléter dans le délai d'un jour de marché, d'autre part de prendre toutes mesures pour que la position de son client soit à nouveau couverte, réduire sa position ou réaliser tout ou partie de la couverture;

Considérant ainsi qu'en liquidant 50% des positions de son client, la banque a respecté ces dispositions légales;

Que dès lors M. [Y] ne saurait solliciter la perte d'une chance de reconstituer sa couverture en reportant toutes ses positions de trois mois, une telle décision étant de nature à engager la responsabilité de l'établissement bancaire à qui la loi interdit l'exécution d'ordres non couverts;

Sur l'abus de situation économique

Considérant que les comptes de M. [Y] (sous compte n°[XXXXXXXXXX01]) et compte personnel présentant, le 18 octobre 2002 les découverts respectifs de 179.663,69 € et 98.475,56€, la banque a proposé à son client un nouveau crédit par découvert d'un montant de 278.000 € à diverses conditions et notamment le nantissement des valeurs qui ne l'étaient pas encore et celui de son fonds de commerce, le 'Laboratoire Charles Michel';

Considérant que M. [Y] analyse cette proposition comme un 'abus de situation économique';

Mais considérant que la banque s'est bornée à proposer à un client, qu'elle savait, pour les raisons précitées, désireux de conserver sa position dans l'espoir d'une reprise de la bourse, un service que celui-ci était en droit de refuser, ce qu'il a d'ailleurs fait;

Que cette offre de prestation ne peut en conséquence s'analyser comme un 'abus de situation économique' ni davantage être constitutive d'un préjudice lui ouvrant droit à dommages intérêts;

Sur la dépossession disproportionnée alléguée

Considérant que la banque n'a pas 'séquestré' le compte-titres libre mais

pratiqué une saisie validée par le juge de l'exécution dont la décision a été confirmée en appel;

Que le fait pour M. [Y] de ne pas bénéficier des plus values qu'il évoque du chef des titres saisis étant une conséquence de cette mesure, M. [Y] ne saurait solliciter la condamnation de la banque de ce chef;

Qu'aucun élément nouveau ne justifie la mainlevée de la saisie conservatoire refusée par l'arrêt précité du 16 septembre 2004;

Considérant que la liquidation du compte titres nanti ayant été jugée irrégulière, le Crédit du Nord a reconstitué le portefeuille titres le 29 juin 2004 pour la même quantité qu'au jour de sa réalisation, 8 janvier 2003 à l'exception:

- des actions Genset, société radiée à la suite de l'acquisition dont elle a été l'objet de la part d'une société suisse le 16 juin 2003,

- des actions Fi System radiées à la suite d'un dépôt de bilan le 23 avril 2003,

Considérant que les actions Fi System ayant été restituées en valeur du jour de la réalisation du nantissement alors qu'elles n'en avaient plus aucune à compter du 23 avril 2003, M. [Y] ne saurait alléguer le moindre préjudice;

Considérant que les titres Genset ont été radiés à la suite de leur achat par une société suisse; que M. [Y] pourrait ainsi se prévaloir, les concernant, de la perte de chance de les avoir vendus à un prix supérieur à celui de 8,50 € obtenu par le Crédit du Nord dans le cadre de cette offre publique (OPA) d'achat amicale;

Mais considérant qu'il n'apporte aucune preuve du prix proposé dans le cadre de cette OPA, ni davantage du fait que cette action aurait atteint le prix de 10,30 € qu'il indique dans ses écritures; que sa pièce n° 48, un courriel du 18 avril 2003, se borne à préciser 'J'attends de savoir à quel prix Serono proposera de racheter les actions Genset';

Considérant que la courbe de valeur de l'action présentée par la banque démontre au contraire que son cours le plus haut a été atteint fin janvier 2003, qu'il y a eu ensuite une baisse constante jusqu'au 14 avril 2003, date de sa progression mais à un niveau qui n'a jamais atteint le prix de réalisation de 8,50 €;

Que la demande de M. [Y] ne peut être accueillie;

Considérant que France Telecom a émis, le 25 mars 2003, des bons de souscription gratuits (BSA);

Qu'il résulte des informations données par le site Internet 'Boursorama' que les BSA sont des valeurs mobilières cotés sur Euronext Paris permettant à leur détenteur de souscrire des actions nouvelles;

Que dans le cadre de son augmentation de capital, France Telecom offrait un BSA par action ancienne possédée, 20 BSA permettant de souscrire 19 actions au prix de 14,50 €;

Que la durée d'exercice des BSA était de 9 jours à partir de leur attribution;

Considérant que dans le compte titre nanti réalisé par la banque figuraient 2578 actions;

Considérant que la capture d'écran du site Boursorama sur la société France Telecom permet de constater que la valeur du BSA a oscillé entre 2,64 € le 25 mars, 2,41 € le 26 et 2.78 € le 27;

Qu'il en résulte que comme il le soutient, M. [Y] a perdu la chance de réaliser ses 2578 actions au cours moyen de 2,69 € pièce;

Qu'il est en conséquence bien fondé à réclamer à la banque la somme de 6.934,82 €

(2,69 x 2578);

Considérant que M. [Y] produit encore l'ordre donné de vendre les BSA attachés aux 1172 titres France Telecom compris dans la saisie conservatoire opérée dans les conditions précitées;

Considérant que le Crédit du Nord ne donne aucune explication pour expliquer sa carence ou justifier de l'exécution de l'ordre;

Que dans ces conditions, il convient d'accueillir la demande de l'appelant, la saisie opérée ne privant pas M. [Y] des droits attachés aux valeurs dont il restait propriétaire;

Considérant par contre qu'il ne saurait se prévaloir des BSA afférentes aux actions comprises dans les positions liquidées pour reconstituer sa couverture et qu'il ne justifie ni d'une dernière augmentation de capital de la société France Telecom le 31 août 2005 ni de l'ordre qu'il aurait donné le 14 septembre 2005 qu'il évoque dans ses conclusions;

Considérant en ce qui concerne les titres Nokia, retirés du marché Euronext le 13 octobre 2004, qu'il résulte des pièces produites que le Crédit du Nord s'est rapproché de

M. [Y] par courrier recommandé du 10 septembre 2004 pour qu'il précise sa position;

Que le 14 septembre 2004, il a donné un ordre de vente pour les 800 titres du compte nanti et les 950 titres figurant sur le compte saisi;

Que le produit de la vente lui ayant été crédité, il ne saurait réclamer à la banque la valeur de ces actions;

Considérant que la société V Con Telecom a été dissoute le 17 août 2005 et ses actions retirées du marché sans indemnisation pour les actionnaires;

Que M. [Y] qui possédait des titres de cette entreprise tant sur le compte nanti que sur le compte saisi ne justifie pas avoir donné d'ordre de vente avant leur disparition du marché; qu'il ne saurait en conséquence faire supporter la perte subie à la banque;

Considérant que la même observation s'impose pour les titres Highwave Optical et Astra Technological Investment, la première ayant déposé son bilan le 10 octobre 2005 et la seconde ayant été mise en liquidation judiciaire par jugement du 5 décembre 2003;

Sur le défaut d'information

Considérant que M. [Y] reproche encore à la banque de ne pas lui avoir adresser de relevés de comptes courants comportant détachement des coupons et versement de dividendes ni davantage les imprimés fiscaux à joindre à la déclaration annuelle de revenus;

Mais considérant qu'il ne justifie pas de cette allégation , contestée par la banque, et ne démontre pas davantage qu'il en serait résulté un préjudice qu'il évalue à 5.000 €;

Sur la demande de la banque

Considérant que la banque expose n'avoir sollicité des premiers juges, à la suite d'une erreur de plume dans ses dernières conclusions, que le montant du débit du compte n°[XXXXXXXXXX01], somme due sur le découvert bancaire, alors qu'elle était également créancière du montant débiteur du compte personnel de M. [Y], soit 53.856,96 €, solde arrêté au 31 décembre 2002 qui figurait dans son exploit introductif d'instance;

Considérant que ces montants sont justifiés par les pièces produites sauf en ce qui concerne les intérêts contractuels sollicités au titre du solde du compte courant;

Que le Crédit du Nord n'en précise pas le montant, qui ne résulte pas des documents produits;

Qu'en conséquence cette créance produira intérêts au taux légal;

Sur l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

Considérant qu'il n'apparaît pas inéquitable de laisser à chaque partie la charge des frais irrépétibles exposés en cause d'appel;

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement entrepris du chef de la condamnation prononcée;

L'infirme en ce qu'il a rejeté toutes les demandes reconventionnelles de

M. [Y];

Statuant à nouveau;

Condamne le Crédit du Nord à verser à M. [T] [Y]:

- 302,80 € au titre du remboursement des frais payés au titre des contrats Internet,

- 6.934,82 € et 3.152,68 pour l'indemnisation de la perte de chance de réalisation des valeurs BSA France Telecom;

Condamne M. [T] [Y] à payer au Crédit du Nord la somme de 53.856,96 €, portant intérêts au taux légal à compter du 31 décembre 2002;

Ordonne la compensation entre ces créances;

Rejette les autres demandes;

Dit que chaque partie conservera la charge de ses propres dépens avec distraction au profit des avoués concernés dans les conditions de l'article 699 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 07/16212
Date de la décision : 07/01/2010

Références :

Cour d'appel de Paris I6, arrêt n°07/16212 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-01-07;07.16212 ?
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