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17/12/2009 | FRANCE | N°08/22581

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 7, 17 décembre 2009, 08/22581


Grosses délivrées aux parties le :



RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 7





ORDONNANCE DU 17 DECEMBRE 2009



(n° 149 , 4 pages)







Numéro d'inscription au répertoire général : RG : 08/22581 et 09/05550 joint sous le seul et unique numéro 08/22581



Décision déférée : ordonnance rendue le 17 novembre 2008 par le Juge des libertés et de la détention du Tribunal de Grande Instance de PARIS.



Nature d

e la décision : contradictoire



Nous, Françoise CHANDELON, Conseillère à la Cour d'appel de PARIS, déléguée par le Premier Président de ladite Cour pour exercer les attributions...

Grosses délivrées aux parties le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 7

ORDONNANCE DU 17 DECEMBRE 2009

(n° 149 , 4 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : RG : 08/22581 et 09/05550 joint sous le seul et unique numéro 08/22581

Décision déférée : ordonnance rendue le 17 novembre 2008 par le Juge des libertés et de la détention du Tribunal de Grande Instance de PARIS.

Nature de la décision : contradictoire

Nous, Françoise CHANDELON, Conseillère à la Cour d'appel de PARIS, déléguée par le Premier Président de ladite Cour pour exercer les attributions résultant de l'article L16B du Livre des procédures fiscales, modifié par l'article 164 de la loi n°2008-776 du 04 août 2008 ;

assistée de Nathalie METIER, greffière en chef, présente lors des débats ;

Après avoir entendu à l'audience publique du 22 octobre 2009 :

- Monsieur [S] [X]

[Adresse 5]

[Localité 3]

représenté par la SCP FISSELIER - CHILOUX - BOULAY, avoués près la Cour

assisté de Maître Emmanuel DAOUD, avocat au barreau de PARIS, toque G190

APPELANT

et

- LE DIRECTEUR GENERAL DES FINANCES PUBLIQUES DIRECTION NATIONALE D'ENQUETES FISCALES

Pris en la personne du chef des services fiscaux,

[Adresse 2]

[Localité 6]

représentée par Maître Dominique HEBRARD MINC,

avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMÉ

Et après avoir entendu publiquement, à notre audience du 22 octobre 2009, la requérante et l'avocat du requérant, l'intimé et l'avocat de l'intimé ;

Les débats ayant été clôturés avec l'indication que l'affaire était mise en délibéré au 17 décembre 2009 par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

L'ordonnance est signée par Françoise CHANDELON, conseillère à la cour d'appel de Paris, déléguée par le Premier Président, et Fatia HENNI, greffière auquelle la minute a été remise par le magistrat.

* * * * * *

Avons rendu l'ordonnance ci-après :

Par ordonnance du 17 novembre 2008, rendue sur requête de l'administration fiscale, le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Paris (JLD) a autorisé les inspecteurs des impôts à procéder, conformément à l'article 16 B du Livre des procédures fiscales (LPF), aux visites et saisies nécessitées par la recherche de la preuve des agissements frauduleux des personnes morales et physique suivantes :

la SAS FCB,

la société de droit luxembourgeois EUROLORD TRADING,

la SARL DEG CONSEILS,

pouvant se trouver aux adresses suivantes:

locaux et dépendances du [Adresse 4], susceptibles d'être occupés par la SAS LABORATOIRES BIODIM, la SAS PHARMA OMNIUM INTERNATIONAL, la SAS UPHARM, la SARL LABORATOIRES DERMA OMNIUM,

locaux et dépendances du [Adresse 5], susceptibles d'être occupés par les époux [X] et l'EURL IRIS,

locaux et dépendances du [Adresse 1], susceptibles d'être occupés par un membre de la famille [D] et la société EURLORD TRADING.

Les opérations de visite se sont déroulées, au domicile des époux [X], le 18 novembre 2008.

Aucun document n'a été saisi.

En application de l'article 164-IV -1 de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008, qui a modifié l'article L 16 B du LPF et instauré une voie d'appel contre l'ordonnance autorisant les visites domiciliaires, Monsieur [S] [X] a saisi la Cour par déclaration au greffe le 28 novembre 2008.

Ce recours a fait l'objet d'un double enrôlement sous les numéros 08/22581 et 09/05550.

[S] [X] conclut à l'annulation de l'ordonnance rendue en ce qu'elle a autorisé la visite de son domicile aux motifs que :

- la réalité de la fraude pouvait être vérifiée par une simple analyse comptable et que la visite de son domicile personnel ne s'imposait pas au regard des éléments produits,

que l'administration fiscale a fait un amalgame entre les trois fraudes présumées dans sa requête alors qu'il n'est concerné que par l'une d'entre elles

- qu'il n'existait en l'espèce aucune présomption d'existence de fraude ;

En réponse, la Direction générale des finances publiques (direction nationale des enquêtes fiscales) fait valoir, notamment, que :

l'ordonnance a retenu l'existence de présomptions selon lesquelles la société FCB aurait minoré la plus value réalisée lors de la cession des titres de la société LABORATOIRES BIODIM à la SAS PHARMA OMNIUM,

la société EUROLORD TRADING de droit luxembourgeois, cessionnaire d'une partie des actions litigieuses aurait en réalité exercé son activité sociale sur le territoire français sans procéder aux déclarations afférentes,

la société DEG Conseils, qui détenait 50% de son capital n'a déclaré aucun boni lors de la dissolution volontaire de la société EUROLORD TRADING ni déposé de déclaration de résultat à l'impôt au titre des exercices 2004, 2005, 2006 et 2007,

il en résulterait l'existence d'un montage permettant de localiser au Luxembourg une partie des plus-values réalisées lors de la cession des titres BIODIM et de masquer les véritables bénéficiaires économiques d'EUROLORD TRADING

SUR QUOI

Le délégué du Premier président

Attendu qu'il convient d'ordonner la jonction des procédures 08/22581 et 09/05550 ;

Attendu que la société FCB, anciennement dénommée FINANCIERE CEGEDIM, est une société holding qui détient majoritairement les parts d'une société CEGEDIM qui exerce une activité de marketing pour les laboratoires pharmaceutiques ;

Que Monsieur [X] en est le directeur général ;

Attendu que la société FCB a acquis 960 parts de la société BIODIM :

70 parts le 1er juillet 2005, pour un montant total de 6.137.326 €, soit 87.676 € l'unité,

410 parts le 18 janvier 2006, pour un montant total de 37.947.193 €, soit 92.554 € l'unité,

480 parts le 19 juin 2006, pour un montant total de 40.143.646 €, soit 83.632 € l'unité ;

Attendu qu'elle a vendu ces 960 actions, le 19 juin 2006, pour une somme globale de 85.827,636 € soit 89.403 € l'unité ;

Attendu que dans la décision critiquée, le JLD a accueilli le raisonnement de l'administration estimant que la cession, le 19 juin 2006, au prix de 89.403 € la part, de valeurs acquises 92.554 € le 18 janvier précédant s'analyserait comme un acte anormal de gestion alors encore que l'acquisition par la société BIODIM du médicament « temesta » le 26 janvier 2006 aurait valorisé sa cotation ; ce dont il a déduit une présomption, de la part de la société FCB, d'avoir minoré la plus value de cession et de n'avoir pas procédé à une passation régulière de la totalité de ses écritures comptables ;

Mais attendu que la revente, par la société FCB, moins d'une année après leur acquisition de 960 parts sociales acquises 84.228.165 € pour une somme de 85.827,636 € ne peut s'analyser comme un « acte anormal de gestion » dès lors que cette opération lui a permis de dégager une plus-value 1.599.471 € régulièrement déclarée à l'administration fiscale selon les termes de la requête présentée au JLD ;

Attendu dès lors que le juge ne pouvait, pour forger sa conviction, se borner à comparer le prix d'acquisition de l'action à la date du 18 janvier 2006, date à laquelle elle a atteint son niveau le plus haut, sans analyser l'économie globale de l'investissement réalisé, qui a généré un gain de l'ordre de 2% ;

Attendu encore qu'au soutien de sa démonstration, l'intimée a donné un renseignement inexact en faisant état de l'acquisition par le laboratoire BIODIM, le 26 janvier 2006, de l'autorisation de mise sur le marché (AMM) du produit TEMESTA, pour suggérer une nécessaire valorisation de ses actions ;

Que Monsieur [X] démontre qu'en réalité l'AMM avait été obtenue le 21 octobre 2005 et que la date du 26 janvier 2006 ne correspondait qu'à un enregistrement administratif ;

Attendu que l'article 8 de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l'Homme pose le principe de l'inviolabilité du domicile ; que si la nécessité de la lutte contre la fraude fiscale, qui répond, notamment, aux nécessitées imposées par le bien-être économique du pays légitime qu'une atteinte y soit portée, il appartient au juge de veiller à ce qu'elle reste exceptionnelle tout particulièrement lorsqu'un domicile purement privé est concerné et qu'aucun soupçon de fraude ne pèse sur son occupant comme en l'espèce ;

Attendu, outre que les présomptions produites étaient insuffisantes à justifier l'atteinte portée à la vie privée de Monsieur [X], que l'administration ne précise pas quels documents recherchés au domicile de ce dernier étaient de nature à corroborer la seule fraude présumée de la société FCB, une minoration de la valeur des actions BIOTIM à la date de leur cession alors qu'une telle valeur ne se détermine qu'à partir d'éléments purement comptables comme la valeur de l'actif net de la société, celle de productivité tirée de l'importance du bénéfice et du rendement ou encore sa capacité d'autofincancement qui permet d'évaluer ses perspectives d'avenir ;

Qu'en l'espèce, aucun de ces éléments ne pouvait ressortir de la visite opérée chez Monsieur [X], qui n'a d'ailleurs donné lieu à aucune saisie ;

Attendu que la requête ne démontre aucun autre lien entre les sociétés EUROLORD TRADING et FCB que les cessions des 70 et 410 parts de la société BIODIM intervenues les 1er juillet 2005 et 18 janvier 2006 et que cette opération commerciale unique ne justifiait pas, même si une ordonnance rendue ce jour a admis pour la société DEG CONSEILS, la visite domiciliaire entreprise en ses locaux, celle opérée chez l'appelant ;

PAR CES MOTIFS

Nous, Françoise Chandelon, Conseiller, délégué du Premier président,

ORDONNONS la jonction des procédures 08/22581 et 09/05550 ;

INFIRMONS, mais seulement en ce qu'elle a ordonné une visite au domicile des époux [X], l'ordonnance rendue par le juge des libertés du Tribunal de grande instance de Paris, le 17 novembre 2008 ;

ANNULONS l'opérations de visite des locaux sis [Adresse 5] du 18 novembre 2008 ;

CONDAMNONS la Direction générale des finances publiques (direction nationale des enquêtes fiscales) aux dépens.

LA GREFFIÈRE

Fatia HENNI

LA DÉLÉGUÉE DU PREMIER PRESIDENT

Françoise CHANDELON


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 7
Numéro d'arrêt : 08/22581
Date de la décision : 17/12/2009

Références :

Cour d'appel de Paris I7, arrêt n°08/22581 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2009-12-17;08.22581 ?
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