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17/12/2009 | FRANCE | N°08/15208

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 1, 17 décembre 2009, 08/15208


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 1 - Chambre 1



ARRET DU 17 DECEMBRE 2009





(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 08/15208





RECOURS EN ANNULATION d'une sentence arbitrale

rendue le 29 avril 2008 à Paris par M. Serge LEVEQUE, M. Romain DURAND

et M. François NEGRIER composant le Tribunal Arbitral







DEMANDERESSE et INTERVENANT

E VOLONTAIRE AU RECOURS EN ANNULATION :





La Société GOTHAER FINANZHOLDING AG

venant aux droits de la Société GOTHAER RUCKVERSISCHERUNG

ayant son siège : [Adresse 3]

[Adresse 3]

agissant...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 1

ARRET DU 17 DECEMBRE 2009

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 08/15208

RECOURS EN ANNULATION d'une sentence arbitrale

rendue le 29 avril 2008 à Paris par M. Serge LEVEQUE, M. Romain DURAND

et M. François NEGRIER composant le Tribunal Arbitral

DEMANDERESSE et INTERVENANTE VOLONTAIRE AU RECOURS EN ANNULATION :

La Société GOTHAER FINANZHOLDING AG

venant aux droits de la Société GOTHAER RUCKVERSISCHERUNG

ayant son siège : [Adresse 3]

[Adresse 3]

agissant en la personne de ses représentants légaux

représentée par la SCP TAZE-BERNARD - BELFAYOL-BROQUET, avoués à la Cour

assistée de Maître Reid FELDMAN,avocat plaidant

pour le cabinet KRAMER LEVIN Toque J 008

DEFENDERESSES AU RECOURS EN ANNULATION :

La S.C.P. [Z]

ayant son siège : [Adresse 1]

[Adresse 1]

prise en qualité de liquidateur de la société

COMPAGNIE INTERNATIONALE DE CAUTION POUR LE DEVELOPPEMENT ICD

La S.A. COMPAGNIE INTERNATIONALE DE CAUTION POUR LE DEVELOPPEMENT ICD

ayant son siège : [Adresse 2]

[Adresse 2]

prise en la personne de son liquidateur la SCP [Z] elle-même agissant en la personne de ses représentants légaux

représentées par la SCP PETIT LESENECHAL,

avoués à la Cour

assistées de Maître VEROUX,

avocat au barreau de Paris Toque L 232

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 19 novembre 2009,en audience publique

le rapport entendu, devant la Cour composée de :

Monsieur PÉRIÉ, président

Madame BOZZI, conseiller

Madame GUIHAL, conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme FALIGAND

ARRÊT :

- Contradictoire

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Jean-François PERIE, président et par Mme Raymonde FALIGAND, greffier présent lors du prononcé.

La société GOTHAER RÜCKVERSICHERUNG garantissait en application de traités de réassurance la COMPAGNIE INTERNATIONALE DE CAUTION POUR LE DÉVELOPPEMENT (ICD) pour son activité de caution pour laquelle elle avait obtenu l'agrément du ministre de l'économie.

Le retrait de cet agrément par la commission de contrôle des assurances a entraîné sa liquidation judiciaire et la nomination de Me [Z] en qualité de mandataire liquidateur.

Des difficultés étant nées relativement aux comptes de réassurance, ICD, représentée par son liquidateur, a introduit une procédure d'arbitrage pour chaque traité, tous comportant une clause compromissoire.

Par sentence à Paris du 29 avril 2008, le tribunal arbitral composé de Romain Durand, président, et de Serge Lévêque et François Négrier, arbitres, statuant en amiable compositeur, a établi les comptes et déterminé (tableaux pages 11 et 12 de la sentence) pour les traités litigieux le montant à la charge du réassureur au titre des créances admises définitivement ou provisoirement et des frais exposés pour la liquidation judiciaire.

Le 28 juillet 2008 GOTHAER FINANZHOLDING AG a formé un recours en annulation contre cette sentence aux motifs que la reconnaissance ou l'exécution sont contraires à l'ordre public international (article 1502-5° du CPC) et que les arbitres ne se sont pas conformés à la mission qui leur avait été conférée (article 1502-3° du CPC). Elle invoque en dernier lieu la partialité d'un arbitre entraînant l'irrégularité de la composition du tribunal arbitral.

La société GOTHAER FINANZHOLDING AG intervenant volontaire comme venant aux droits de la société GOTHAER RÜCKVERSICHERUNG (ci-après GOTHAER) prie donc la cour d'annuler la sentence pour contrariété à l'ordre public international pour absence de preuve des faits allégués par ICD, subsidiairement d'annuler les condamnations au titre des frais de justice également pour défaut de preuve, d'annuler la sentence pour manquement des arbitres à leur mission en raison de la jonction des arbitrages, subsidiairement pour avoir statué en équité pour le tout contrairement aux pouvoirs qu'ils tenaient des clauses compromissoires, très subsidiairement d'annuler les condamnations concernant les traités 20025 et 20086 pour les avoir confondues, d'annuler l'ensemble des procédures arbitrales menées par ICD à l'encontre de la concluante en raison de la composition irrégulière du tribunal arbitral, de rejeter les demandes d'ICD et de condamner Me [Z] ès qualités à lui payer 30.000€ par application de l'article 700 du CPC.

La SCP [Z] prise en la personne de Me [Z] ès qualités de mandataire judiciaire à liquidation judiciaire de ICD et ICD demandent à la cour de rejeter la demande d'annulation fondée sur la violation de l'ordre public international, de dire irrecevable en application de la règle de l'estoppel le moyen tiré du non respect de la mission en raison de la jonction des procédures, subsidiairement de rejeter le moyen, en conséquence de rejeter le recours et de condamner GOTHAER à lui payer ès qualités 100.000€ de dommages-intérêts pour procédure abusive et 15.000€ par application de l'article 700 du CPC.

SUR QUOI,

Sur le moyen d'annulation pris de la partialité de l'un des arbitres entraînant une composition irrégulière du tribunal arbitral (article 1502 2° du CPC) :

GOTHAER invoque à ce titre les conditions dans lesquelles a été rendue le 15 septembre 2009 une sentence rectificative à l'occasion d'un arbitrage concernant le litige opposant ICD à un autre réassureur, GLOBALE RE, à l'occasion de laquelle le secret du délibéré n'a pas été respecté par l'arbitre choisi par ICD qui a communiqué à celle-ci le contenu de la décision avant qu'elle soit rendue, ce qui démontre sa partialité et doit entraîner l'annulation de toutes les sentences rendues par le tribunal arbitral au profit d'ICD.

Mais considérant que GOTHAER ne peut utilement invoquer ce cas d'annulation dans la cadre de la sentence objet du présent recours qui n'est pas concernée par ces griefs qui visent une autre sentence arbitrale à laquelle elle n'est pas partie ; qu'au demeurant elle n'explique pas en quoi ces griefs postérieurs de plus d'un an à la sentence examinée ici la contamineraient ;

Que le moyen est rejeté ;

Sur le moyen d'annulation pris de la violation par le tribunal arbitral de l'ordre public international (article 1502-5° du CPC) :

GOTHAER dit que la sentence heurte l'ordre public international dès lors qu'elle l'a condamnée en violation de l'article 9 du CPC malgré l'absence totale de preuve de certains éléments nécessaires au succès des prétentions d'ICD. Elle fait valoir que le tribunal arbitral a constaté qu'ICD n'a pas fourni 'des documents nécessaires à la preuve'mais n'a pas tiré les conséquences impératives de ce constat, notamment en ce qui concerne pour chaque traité le montant devant être affecté aux comptes de réassurance au titre de primes, de sinistres payés ou à régler et de récupérations à effectuer.

Elle ajoute qu'il y a également absence de preuve et violation de l'ordre public international en ce qui concerne les frais de justice exposés par la liquidation judiciaire puisque le tribunal arbitral relève là encore que 'les dépenses invoquées par ICD ne sont justifiées ni pour la cellule liquidative, ni pour les frais de justice'. Elle souligne que la pièce n°16 communiquée dans le cadre de l'arbitrage n'est pas une preuve mais une présentation des prétentions.

Mais considérant que ce faisant GOTHAER ne démontre pas une violation flagrante, effective et concrète de l'ordre public procédural alors que le tribunal arbitral dont la mission était notamment de valider, évaluer ou rechercher la méthodologie permettant d'aboutir à une juste détermination des soldes des comptes de réassurance, n'a nullement dit que la carence du liquidateur dans l'administration de la preuve était totale mais seulement relevé que les comptes présentés pour l'année 2000 n'étaient ni certifiés ni totalement justifiés, qu'il existait des erreurs et des approximations dans de nombreux domaines et qu'il y avait lieu conformément à sa mission de reconstituer le solde des traités ;

Que de même s'agissant des frais de justice exposés par la liquidation judiciaire le tribunal arbitral estimant au vu du relevé communiqué par Me [Z] que 'la nature de la gestion, du fait de la liquidation et du suivi plus complexe des sinistres, a généré une charge importante d'honoraires dont a profité pour partie le réassureur' n'a pas statué en l'absence de tout élément de preuve ;

Qu'en réalité GOTHAER invite la cour à rechercher si les éléments produits pouvaient être reçus à titre de preuve et partant à réviser au fond la sentence ce qui est interdit au juge de l'annulation ;

Que le moyen est rejeté ;

Sur le dernier moyen d'annulation : le tribunal arbitral ne s'est pas conformé à la mission qui lui avait été conférée (article 1502-3° du CPC):

GOTHAER fait valoir qu'un arbitrage distinct avait été introduit par ICD pour chacun des traités de réassurance litigieux et qu'il devait être répondu par des sentences distinctes. Elle dit qu'elle s'est opposée à toute jonction, notamment lors de l'audience des plaidoiries ainsi qu'il en est témoigné par ses conseils et qu'on ne peut donc lui opposer la règle de l'estoppel.

Elle dit encore que les arbitres ont statué pour tous les traités en amiables compositeurs alors que pour le traité 20113 ils n'en avaient pas le pouvoir.

Elle reproche enfin aux arbitres d'avoir prononcé une condamnation unique pour les traités n°20025 et n°20086.

Mais considérant que GOTHAER a présenté spontanément des écritures en défense communes à tous les traités et ne rapporte pas la preuve qu'elle aurait protesté contre une jonction à l'audience des plaidoiries ;

Qu'à cet égard c'est bien vainement que GOTHAER excipe des attestations de ses conseils; qu'en effet comme l'oppose à bon droit Me [Z] il résulte des termes de l'article 199 du CPC que la preuve testimoniale, en l'espèce l'attestation, doit émaner d'un tiers ce qui n'est pas le cas des conseils de GOTHAER qui la représentaient lors de la procédure d'arbitrage en vertu du mandat ad litem ; que ces attestations sont écartées ;

Qu'ainsi faute d'établir qu'elle a protesté GOTHAER ne peut plus en vertu de la règle de l'estoppel soulever à l'occasion du contentieux de l'annulation le moyen tiré de la méconnaissance par les arbitres de leur mission en ce qu'ils ont procédé à une jonction ;

Que cette branche du moyen est rejetée ;

Considérant par ailleurs qu'en prononçant une seule condamnation au titre des traités n°20025 et n°20086, les arbitres n'ont pas méconnu leur mission puisqu'ils ont expressément demandé à ICD de ventiler les sommes dues par GOTHAER et qu'en exécution de cette demande une note leur a été adressée le 10 avril 2008, ainsi qu'au conseil de GOTHAER, qui leur a permis de statuer sur des demandes individualisées sur lesquelles GOTHAER pouvait faire toutes observations utiles ;

Que cette branche du moyen est rejetée ;

Considérant, en revanche qu'il résulte des termes de la sentence que le tribunal arbitral a statué en amiable compositeur non seulement pour les traités 20025, 20086, 20081 et 20135 comme le lui commandaient les clauses compromissoires mais également pour le traité 20113 alors que la clause compromissoire qu'il contient ne prévoit pas qu'il sera statué en équité ; que ce faisant les arbitres n'ont pas respecté leur mission en ce qui concerne ce traité et la sentence mérite l'annulation mais seulement en ce qu'elle a statué le concernant ;

Sur la demande de dommages-intérêts pour procédure abusive:

Considérant que Me [Z] ès qualités n'établit pas que GOTHAER ait formé son recours, auquel il est d'ailleurs partiellement fait droit, par malice, intention de nuire ou erreur équipollente au dol ;

Que sa demande est rejetée;

Sur les demandes au titre de l'article 700 du CPC:

Considérant que l'équité ne commande pas de faire droit à ces demandes;

PAR CES MOTIFS:

ANNULE la sentence du 29 avril 2008 en ce qu'elle a statué sur le traité de réassurance 20113;

REJETTE le recours en annulation pour le surplus ;

REJETTE toute autre demande ;

CONDAMNE la société GOTHAER FINANZHOLDING AG aux dépens et admet la SCP Petit Lesénéchal, avoué, au bénéfice de l'article 699 du CPC.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT

R. FALIGAND J.F. PERIE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 08/15208
Date de la décision : 17/12/2009

Références :

Cour d'appel de Paris A1, arrêt n°08/15208 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2009-12-17;08.15208 ?
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