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17/12/2009 | FRANCE | N°07/18790

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 5, 17 décembre 2009, 07/18790


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 5



ARRET DU 17 DÉCEMBRE 2009



(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 07/18790



Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 Juin 2007 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 06/07865





APPELANT



Monsieur [R] [L]

demeurant : [Adresse 3]



représenté par la SCP NARRAT - PEYT

AVI, avoués à la Cour

assisté de Me Jean LATRILLE, avocat au barreau de PARIS, toque : B 359,





INTIMES



SA SOCIETE ANTIQUITES [P] [D] prise en la personne de son représentant légal

ayant son si...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 5

ARRET DU 17 DÉCEMBRE 2009

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 07/18790

Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 Juin 2007 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 06/07865

APPELANT

Monsieur [R] [L]

demeurant : [Adresse 3]

représenté par la SCP NARRAT - PEYTAVI, avoués à la Cour

assisté de Me Jean LATRILLE, avocat au barreau de PARIS, toque : B 359,

INTIMES

SA SOCIETE ANTIQUITES [P] [D] prise en la personne de son représentant légal

ayant son siège : [Adresse 2]

représentée par la SCP LAMARCHE-BEQUET- REGNIER-AUBERT - REGNIER - MOISAN, avoués à la Cour

assistée de Me Denis GIRAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : D 1149,

Monsieur [P] [D]

demeurant : [Adresse 2]

représenté par la SCP LAMARCHE-BEQUET- REGNIER-AUBERT - REGNIER - MOISAN, avoués à la Cour

assisté de Me Denis GIRAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : D 1149,

SYNDICAT NATIONAL DES ANTIQUAIRES NEGOCIANTS EN OBJETS D'ART TABLEAUX ANCIENS ET MODERNES, prise en la personne de son Président.

ayant son siège : [Adresse 1]

représenté par la SCP LAGOURGUE - OLIVIER, avoués à la Cour

assisté de Me Michel BLUM, avocat au barreau de PARIS, toque : D 690,

COMPOSITION DE LA COUR :

Après le rapport oral de Madame Agnès MOUILLARD, Conseillère et conformément aux dispositions de l'article 785 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 18 Novembre 2009, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Hélène DEURBERGUE, Présidente

Madame Catherine LE BAIL, Conseillère

Madame Agnès MOUILLARD, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mademoiselle Anne BOISNARD

ARRET :

- contradictoire

- rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Hélène DEURBERGUE, président et par Mademoiselle Anne BOISNARD, greffier des services judiciaires auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

M. [P] [D], antiquaire à [Localité 4] et ancien secrétaire général du Syndicat national des antiquaires, négociants en objets d'art, tableaux anciens et modernes (ci-après le Syndicat national des antiquaires), a souhaité présenter à la Biennale des antiquaires de 2002, organisée par ce syndicat, une commode, dite 'commode de Joseph', qui a été refusée à l'exposition par la Commission d'Admission des Objets.

Reprochant au Syndicat national des antiquaires et à M. [R] [L], membre du syndicat et co-président de la Commission d'Admission, d'avoir fait état de cet événement dans la presse, en 2002 et en 2004, dans des conditions mensongères et dénigrantes, [P] [D] et la société qu'il dirige, la société Antiquités [P] [D], les ont assignés en responsabilité et en concurrence déloyale, en leur réclamant, outre des dommages et intérêts, la publication de la décision.

M. [L] a soulevé la nullité de l'assignation, faute par la société Antiquités [P] [D] de justifier de l'identité de son mandant, propriétaire de la commode en cause, et, de concert avec le Syndicat national des antiquaires, a conclu à l'irrecevabilité des demandes, pour défaut de qualité.

Par jugement du 29 juin 2007, le tribunal de grande instance de Paris a déclaré irrecevable l'exception de nullité de l'assignation, dit qu'en tenant des propos tels que ceux rapportés dans le 'Journal des Arts', n° 189, paru du 19 mars au 1er avril 2004, M. [L] a commis une faute au préjudice de la société [P] [D], en conséquence l'a condamné à payer à cette société une somme de 30 000 € à titre de dommages et intérêts, a autorisé la société [P] [D] à faire publier le dispositif de la décision dans un journal de son choix et aux frais de M. [L], sans que le coût total de cette insertion n'excède, à la charge de celui-ci, la somme de 3 500 € HT, a rejeté les autres demandes, enfin a condamné M. [L] à payer à la société [P] [D] une somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

LA COUR :

Vu l'appel de ce jugement interjeté par M. [L] le 8 novembre 2007 contre la société Antiquités [P] [D], M. [P] [D] et le Syndicat national des antiquaires ;

Vu les conclusions signifiées le 25 septembre 2009 par lesquelles l'appelant demande à la cour :

- à titre principal, de constater qu'en tant que membre du Syndicat national des antiquaires, il était lié par le règlement intérieur, que les reproches faits par la société Antiquités [P] [D] et par M. [P] [D] ne concernent que le soi-disant non respect, par lui, de son obligation de confidentialité découlant de ce règlement intérieur, obligation à caractère contractuel, de sorte que la demande fondée sur la concurrence déloyale ne peut être accueillie et que la société Antiquités [P] [D] et M. [P] [D] doivent être déboutés de leurs demandes, basées sur une soi-disant concurrence déloyale,

- à titre subsidiaire, de constater qu'il n'est poursuivi que pour les propos qu'il aurait tenus en qualité de membre du Syndicat national des antiquaires, membre du Conseil d'administration de ce syndicat, président de la commission d'organisation de la Biennale et co-Président d'une commission de contrôle, et non en qualité de commerçant, et qu'il ne pouvait donc être poursuivi et condamné pour concurrence déloyale, de débouter en conséquence la société Antiquités [P] [D] et M. [P] [D] de leurs demandes à son encontre,

- à titre plus subsidiaire, de constater que la société Antiquités [P] [D], en refusant de soumettre la commode litigieuse à la commission d'admission, préalablement à la réalisation du catalogue de la Biennale, a pris le risque de la voir refusée lors de l'ouverture et qu'elle se trouve donc à l'origine du préjudice dont elle fait état, de constater que lui-même n'a fait que défendre la déontologie des commissions d'admission et du Syndicat national des antiquaires face aux attaques de Mme [U], de débouter en conséquence la société Antiquités [P] [D] et M. [P] [D] de leurs demandes,

- à titre très subsidiaire, de confirmer le jugement en ce qu'il déboute M. [P] [D] et la société Antiquités [P] [D] de leur demande de dommages et intérêts basée sur sa responsabilité au tire du 'Journal des Arts' de mars/avril 2004 ;

- à titre extrêmement subsidiaire, de constater l'absence de préjudice et de débouter M. [P] [D] et la société du même nom de leurs demandes,

- de condamner [P] [D] et la société Antiquités [P] [D], in solidum, à lui payer 100 000 € pour procédure abusive et 20 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu les conclusions signifiées le 13 août 2009 par lesquelles la société Antiquités [P] [D] et M. [P] [D] poursuivent la confirmation du jugement en ce qu'il leur donne partiellement satisfaction mais son infirmation en ce qu'il limite la mesure de publication à 3 500 € HT par insertion et demandent à la cour de porter cette limite à 10 000 € HT par insertion, à la charge de M. [L] à qui ils réclament également, au titre de l'article 700 du code de procédure civile, une somme supplémentaire de 7 500 € chacun ;

Vu les conclusions signifiées le 5 novembre 2008 par lesquelles le Syndicat national des antiquaires demande sa mise hors de cause, aucune demande n'étant formée contre lui, et subsidiairement poursuit la confirmation du jugement en ce qu'il a rejeté les demandes formées contre lui ;

SUR CE :

Considérant qu'il y a lieu de mettre, sur sa demande, le Syndicat national des antiquaires hors de cause, aucune des parties ne formant de demande contre lui ;

Considérant qu'à l'occasion de la Biennale des antiquaires qui s'est tenue du 20 au 29 septembre 2002, les membres du Syndicat national des antiquaires avaient la possibilité d'occuper un emplacement assorti de la location d'un stand, à charge pour eux de souscrire une double page de publicité dans le catalogue de l'exposition, les objets photographiés devant être soumis à l'appréciation de la Commission d'Admission des Objets avant le 10 mai 2002 ; qu'il était précisé que ces objets pouvaient être admis sur photographie mais qu'ils pourraient être refusés par la suite si le contrôle d'admission, qui se tiendrait les 16 et 17 septembre 2002, révélait qu'ils ne répondaient pas aux critères d'authenticité, de conservation et de qualité attachés au prestige de cette manifestation ; qu'à cet égard, le 'règlement d'admission des objets' fournissait une liste de critères selon la nature des objets et leur origine, et énonçait notamment diverses exigences à propos des meubles, en particulier des bronzes dont ces derniers pouvaient être ornés ;

Considérant qu'il est constant que la commode de M. [D], qui figurait en pages 186 et 187 du catalogue, a été refusée avant l'exposition, la Commission ayant jugé ses bronzes non conformes aux critères d'authenticité requis ;

Considérant que les journalistes conviés au dîner de gala et au vernissage qui ont précédé l'ouverture de la Biennale se sont, naturellement, enquis de savoir pourquoi la commode, qui figurait au catalogue, n'était pas exposée sur le stand de la société Antiquités [P] [D], qu'ils l'ont appris et en ont fait état dans plusieurs articles consacrés à la Biennale ('Libération' et 'le Figaro') ;

Considérant que le tribunal a estimé, par une décision dont les intimés demandent la confirmation, que le fait que cette information, qui aurait dû demeurer confidentielle dans la mesure où les membres du syndicat sont soumis à une obligation de discrétion, ait été divulguée, n'était imputable ni au Syndicat national des antiquaires, ni à M. [L], mais au travail d'investigation des journalistes, conviés à l'événement ; que les premiers juges ont retenu en revanche la responsabilité de M. [L] pour avoir, dans un article du 'Journal des Arts', n° 189, paru en 2004, confirmé indirectement que la commode dite 'de [V]' avait été retirée de l'exposition en considération de ce que les bronzes auraient été refaits, tout en précisant qu'il en résultait une influence sur le prix de vente ; que les juges ont estimé qu'en s'affranchissant ainsi de son obligation de discrétion, M. [L], qui exerce lui-même une activité de vente d'antiquités également tournée vers les pièces de mobilier du XVIIIème siècle français, a jeté le discrédit sur le sérieux, voire l'honnêteté de la société [D], et a commis une faute constitutive de concurrence déloyale ;

Mais considérant qu'il résulte du texte même de cet article de presse que M. [L], qui était alors délégué à la communication du Syndicat national des antiquaires, était pris à partie sur l'objectivité des contrôles effectués à l'occasion de la Biennale ; que la journaliste, après avoir utilisé à cet égard le terme de 'copain-coquin', lui faisait part, en guise d'illustration, de ce que 'des observateurs murmuraient que la commode de [V], dont les bronzes auraient été refaits, n'aurait pas été retirée de la dernière Biennale si elle avait figuré sur le stand d'un des caciques de marché parisien plutôt que sur celui de [P] [D]' et lui demandait si la Commission aurait été plus 'magnanime' envers M. [D] si ce dernier avait accepté de modifier son 'cartel' ; qu'en répondant par la négative, au motif que le prix d'une 'commode de [V]' n'est pas le même avec de vrais ou de faux bronzes, M. [L], non seulement n'a rien révélé qui ne fût déjà dans le domaine public -par suite de l'imprudence de M. [D] qui avait choisi de ne pas soumettre sa commode au contrôle avant que sa photographie ne soit insérée au catalogue et pris ainsi le risque d'un retrait remarqué- mais encore s'est borné à faire état d'un constat de bon sens, propre à écarter des allégations mettant en cause l'intégrité des membres de la Commission et partant, la réputation de qualité de la Biennale ; qu'il ne saurait être considéré dans ses conditions que sa réponse, pour dérangeante qu'elle fût pour M. [D], fût-il son concurrent sur le même segment de marché, aurait été donnée fautivement, à seule fin de porter le discrédit sur ce dernier et de mettre en cause la qualité de son activité professionnelle ; qu'il suit de là que le jugement, qui en a décidé autrement, doit être infirmé et que M. [D] et la société [P] [D] doivent être déboutés de leurs demandes ;

Considérant que M. [D] et la société Antiquités [P] [D] n'ont pas fait de leur droit d'agir en justice un usage fautif qui aurait causé un préjudice à M. [L] ; que celui-ci doit être débouté de sa demande de dommages et intérêts de ce chef ;

Et considérant que M. [L] a dû exposer des frais non compris dans les dépens qu'il serait inéquitable de laisser en totalité à sa charge ; qu'il y a donc lieu de lui accorder le bénéfice des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, dans la mesure qui sera précisée au dispositif, et de rejeter la demande présentée par les intimés à ce titre ;

PAR CES MOTIFS

Met hors de cause le Syndicat national des antiquaires,

INFIRME le jugement en toutes ses dispositions,

Et statuant à nouveau,

Dit que M. [L] n'a pas commis de faute constitutive de concurrence déloyale au préjudice de M. [P] [D] et de la société Antiquités [P] [D] en répondant à un journaliste dans un article paru dans le 'Journal des Arts' n° 189 paru en 2004,

Déboute en conséquence M. [D] et la société Antiquités [P] [D] de leurs demandes contre M. [L],

Condamne M. [D] et la société Antiquités [P] [D] à payer à M. [L] la somme de 6 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile et rejette leur demande formée à ce titre,

Condamne M. [D] et la société Antiquités [P] [D] aux dépens de première instance et d'appel et dit que ces derniers pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier

A.BOISNARD

La Présidente

H. DEURBERGUE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 07/18790
Date de la décision : 17/12/2009

Références :

Cour d'appel de Paris I5, arrêt n°07/18790 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2009-12-17;07.18790 ?
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