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08/12/2009 | FRANCE | N°08/10040

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 3, 08 décembre 2009, 08/10040


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 3



ARRÊT DU 08 Décembre 2009



(n° , 7 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 08/10040



Décision déférée à la cour : jugement rendu le 14 mai 2008 par le conseil de prud'hommes de PARIS - section des activités diverses - RG n° 07/00997







APPELANTE



Mme [U] [B]

[Adresse 1]

[Localité 3]

comparant en personne, assist

ée de Me Joao VIEGAS, avocat au barreau de PARIS,

toque : E1778







INTIMÉE



RÉPUBLIQUE FÉDÉRATIVE DU BRESIL REPRESENTEE PAR SON AMBASSADE A PARIS

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par Me Jea...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 3

ARRÊT DU 08 Décembre 2009

(n° , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 08/10040

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 14 mai 2008 par le conseil de prud'hommes de PARIS - section des activités diverses - RG n° 07/00997

APPELANTE

Mme [U] [B]

[Adresse 1]

[Localité 3]

comparant en personne, assistée de Me Joao VIEGAS, avocat au barreau de PARIS,

toque : E1778

INTIMÉE

RÉPUBLIQUE FÉDÉRATIVE DU BRESIL REPRESENTEE PAR SON AMBASSADE A PARIS

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par Me Jean-Paul ROUBY, avocat au barreau de PARIS, toque : E.201

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 27 octobre 2009, en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Elisabeth PANTHOU-RENARD, présidente

Madame Michèle MARTINEZ, conseillère

Madame Marthe-Elisabeth OPPELT-REVENEAU, conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : Madame Nadine LAVILLE, lors des débats

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Elisabeth PANTHOU-RENARD, président et par M. Eddy VITALIS, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Faits et procédure

Mme [U] [B] a été engagée par la République fédérative du Brésil , en qualité d'auxiliaire administrative en poste à l'Ambassade du Brésil à Paris, le 1er septembre 1986.

La relation de travail a donné lieu à la signature d'un contrat de travail à durée indéterminée le 2 août 2006. Mme [L] est toujours en poste à ce jour.

Mme [L] a été affiliée au régime général de sécurité sociale, ainsi qu'au régime complémentaire de la CRE/ARRCO à compter du 1er septembre 2006.

Estimant subir un préjudice du fait de cette affiliation tardive, en raison de la perte consécutive de ses droits à la retraite, Mme [L] a saisi le conseil des Prud'Hommes de Paris d'une demande tendant en dernier lieu à voir constatée la faute de son employeur à l'origine de sa situation et à le condamner à lui réparer le préjudice en résultant, qu'elle évalue à 175 000 €, outre intérêts au taux légal, et avec exécution provisoire. Elle a réclamé, en outre, la somme de 3 000€ en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que la condamnation aux dépens de la République fédérative du Brésil.

La République fédérative du Brésil a conclu à l'irrecevabilité de la demande. Sur le fond, elle a reconnu le droit de Mme [L] de percevoir une pension de retraite et l'existence, à sa charge, de l'obligation morale d'indemniser Mme [L] de son préjudice qu'elle a situé entre un minimum de 43 260 € et un maximum de 82 400 €.

Par décision en date du 14 mai 2008, le conseil des Prud'Hommes a :

- pris acte de ce que la République Fédérative du Brésil reconnaît sa responsabilité dans la non affiliation de sa salariée au régime de base de l'assurance vieillesse

- condamné la République fédérative du Brésil à payer à Mme [L] la somme de 45 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi, outre intérêts au taux légal à compter du jour du jugement

- condamné la République fédérative du Brésil à payer à Mme [L] la somme de 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile

Le conseil des Prud'Hommes a débouté Mme [L] pour le surplus de ses demandes concernant son défaut d'affiliation au régime complémentaire et l'indemnisation du préjudice moral allégué. Il a condamné la République fédérative du Brésil aux dépens.

Mme [L] a fait appel de cette décision dont elle sollicite l'infirmation. Elle demande que la cour juge que son employeur a commis une faute en omettant de l'affilier aux régimes de l'assurance vieillesse relevant à la fois du régime général de la sécurité sociale et du régime complémentaire ARRCO.

A titre de réparation, elle sollicite la condamnation de son employeur à lui payer la somme de 195 000 € à titre de dommages et intérêts, avec les intérêts au taux légal, outre la somme de 4 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile et la condamnation aux dépens de la République fédérative du Brésil .

La République fédérative du Brésil qui conteste le caractère certain du préjudice allégué estime qu'une indemnisation au titre de la seule affiliation au régime général peut être envisagée à l'exclusion de toute considération afférente au régime complémentaire. Elle soutient, en effet que Mme [L] ne pouvait prétendre à cette affiliation, avant le 1er septembre 2006, date à laquelle elle y a été effectivement affiliée. la République fédérative du Brésil estime, en tout état de cause que Mme [L] a concouru à la réalisation de son préjudice à hauteur de 25%. Elle demande, en conséquence, qu'il lui soit donné acte de ce qu'elle accepte de verser à Mme [L] la somme de 57 600 € à titre d'indemnité, toutes causes de préjudice confondues. Pour le surplus, elle conclut au débouté de Mme [L] et à sa condamnation aux dépens de première instance et d'appel.

Par note en délibéré des 28 octobre 2009, autorisées par la cour, les parties ont chacune conclut sur la question de l'existence ou non d'un engagement unilatéral afférente à la souscription par la République fédérative du Brésil d'un contrat d'assurance groupe, au titre du régime complémentaire de sécurité sociale.

Motifs de la décision

- sur l'étendue de l'obligation de l'employeur en ce qui concerne l'affiliation de

Mme [L] aux régimes général français de sécurité sociale et complémentaire ARRCO

* sur l'obligation d'affiliation de Mme [L] au régime général français de sécurité sociale

Mme [L] fonde son droit à être affiliée au régime général, dès 1986, sur l'article L311-2 du code de la sécurité sociale, en vigueur à l'époque et qui doit, selon elle, recevoir application en l'espèce en vertu des engagements internationaux souscrits par l'Etat brésilien, en particulier le Code de Bustamante et la convention de Vienne sur les relations diplomatiques du 18 avril 1961, et aux dispositions de droit brésilien qui prescrivent que le droit de la sécurité sociale est d'application territoriale.

La République fédérative du Brésil qui conteste l'application de la convention de Vienne sur les relations diplomatiques, fait valoir qu'un vide juridique affectant la situation des personnels auxiliaires locaux de l'ambassade du Brésil à Paris, dont relève Mme [L], a empêché leur affiliation au régime local français jusqu'à une note du 19 août 1997 destinée notamment aux missions diplomatiques, qui a rappelé que les ressortissants étrangers ayant la qualité de résidents permanents, ainsi que les ressortissants français devaient être affiliés par leurs employeurs au régime français de sécurité sociale.

Elle précise que c'est donc dans ces conditions que l'affiliation au régime général français de sécurité sociale des auxiliaires locaux recrutés par l'Ambassade du Brésil à Paris est intervenue progressivement à compter du 1er janvier 1998, dans la mesure où leur situation personnelle l'y autorisait.

S'agissant particulièrement de Mme [L] , la République fédérative du Brésil explique que son affiliation n'a été possible qu'à compter du 1er septembre 2006, lorsque celle-ci a eu restitué sa carte spéciale de séjour, la loi et la pratique françaises s'opposant à l'affiliation des personnels recrutés localement et disposant de ce seul titre. Elle indique que, dans ces conditions, toutes ses tentatives de régulariser la situation de Mme [L] sont restées vaines, ce d'autant plus que l'article L115-6 du code de la sécurité sociale dans sa version survenue en 1993 subordonne l'affiliation au régime général de la sécurité sociale des personnes de nationalité étrangère à l'exigence qu'elles soient en situation régulière sur le territoire français, cette situation régulière ne pouvant être établie par la détention d'une carte de séjour spécial en application de l'article D 115-1 du même code.

La République fédérative du Brésil conclut qu'en l'état de l'évolution des textes et de la situation personnelle de Mme [L], elle ne s'oppose plus à l'affiliation de sa salariée au régime général français de sécurité sociale.

En l'absence de convention bilatérale de sécurité sociale entre la France et le Brésil, les traités ayant une valeur supérieure aux lois internes, la convention de Vienne du 18 avril 1961 (articles 33 et 37) s'applique, contrairement à ce que soutient la République fédérative du Brésil. Cette convention exempte des dispositions de sécurité sociale en vigueur dans l'Etat accréditaire (en l'espèce la France), le personnel des missions diplomatiques, tels que les personnels techniques et administratifs, catégorie dont relève Mme [L]. La convention prévoit que cette exemption 'n'exclut pas la participation volontaire au régime de sécurité sociale de l'Etat accréditaire pour autant qu'elle est admise par cet Etat'.

Il s'ensuit que l'obligation d'affiliation aux assurances du régime général français, invoquée par Mme [L] , ne s'impose pas d'emblée à la République fédérative du Brésil. Pour déterminer les obligations pesant en la matière sur le Brésil, il convient, conformément à la convention précitée, d'examiner la législation en vigueur au Brésil ainsi que celle de la France sur le régime social applicable aux ressortissants brésiliens travaillant à l'Ambassade du Brésil à Paris.

Le code de Casamante dont argue Mme [L] , est une convention internationale signée par le Brésil en 1928, avec les autres Etats des Amériques du Nord et du Sud, qui concerne le régime social applicable aux ressortissants de ces Etats travaillant dans un autre de ces Etats. La France n'est pas partie à cette convention qui ne peut donc recevoir application en l'espèce.

Il ressort, par ailleurs, de la législation en vigueur en République fédérative du Brésil, en particulier de la loi N.8.745 du 9 décembre 1993 et du décret N 1 570 du 21 juillet 1995, que les relations de travail et de prévoyance sont régies par la loi en vigueur dans le pays où le service est établi, sauf interdiction de la loi locale, auquel cas les agents concernés sont inscrits à la prévoyance sociale brésilienne.

La loi française, en l'occurrence, l'article L 311-2 du code de la sécurité sociale, n'interdit pas l'affiliation des travailleurs étrangers, notamment brésiliens, au régime français de sécurité sociale. Au contraire, elle prescrit cette affiliation. La note précitée du 19 août 1997 n'a donc rien ajouté à l'état du droit.

Il résulte de l'ensemble des textes précités que la relation de travail litigieuse est régie, s'agissant du régime social, par la loi française à compter de 1993.

En conséquence, la République fédérative du Brésil qui ne conteste pas l'application de la législation brésilienne à la présente espèce, ne saurait, par ailleurs, valablement arguer d'un vide juridique en droit français.

Elle ne saurait donc se prévaloir d'une pratique de l'administration française ayant fait obstacle à l'affiliation litigieuse, ladite pratique ne pouvant s'exercer en violation de la loi.

La République fédérative du Brésil le peut d'autant moins qu'elle n'est pas allée au bout de ses démarches à l'égard des administrations françaises, les interrogeant simplement sur la législation sociale applicable aux agents des représentations diplomatiques et consulaires brésiliens, sans susciter de leur part des décisions qui auraient pu, le cas échéant, être contestées devant les juridictions.

La République fédérative du Brésil ne peut pas non plus arguer d'une prétendue impossibilité tirée de l'entrée en vigueur en 1993 des dispositions des articles L 115-6 et D 115-1 du code de la sécurité sociale, subordonnant l'application du régime français de sécurité sociale aux seuls ressortissants étrangers en situation régulière sur le sol français. En effet, contrairement à ce que soutient la République fédérative du Brésil , la régularité du séjour sur le territoire français de Mme [L] , titulaire d'une carte spéciale délivrée par la République française elle-même, ne pouvait, par ce seul fait, à aucun moment être mise en doute.

Il se déduit donc de la combinaison de la convention de Vienne, des textes internes de droit brésilien et de droit français, qu'en sa qualité d'employeur, la République fédérative du Brésil avait l'obligation, d'affilier Mme [L] à l'un des régimes généraux de sécurité sociale brésilien ou français dès son embauche ; et à compter de 1993, à tout le moins, Mme [L] aurait du être affiliée au régime général français de sécurité sociale, la République fédérative du Brésil ne pouvant se prévaloir d'un prétendu vide juridique ou de difficultés rencontrées auprès de l'administration française pour prétendre s'exonérer de toute responsabilité dans la situation de Mme [L] aujourd'hui privée de ses droits à la retraite.

En ne se préoccupant pas de la situation de Mme [L] avant 1997, et en ne procédant pas à son affiliation à un régime de sécurité sociale, la République fédérative du Brésil a commis une faute dans l'exécution du contrat de travail.

* sur l'obligation d'affilier Mme [L] au régime de retraite complémentaire ARRCO

Mme [L] fonde l'obligation de son employeur à l'affilier au régime complémentaire vieillesse ARRCO d'une part, sur l'existence d'un engagement unilatéral tirée de la souscription par la République fédérative du Brésil d'un contrat d'assurance groupe et sur la délibération 12 B adoptée par cet organisme en ce qui concerne les personnels des ambassades et des consulats situés sur le sol français, d'autre part, sur le principe de l'égalité de traitement devant bénéficier à tous les salariés situés dans une situation comparable.

La République fédérative du Brésil conteste l'existence d'une telle obligation, subordonnée elle-même à l'affiliation des personnels en cause au régime général de sécurité sociale local, laquelle n'est intervenue pour la majorité des personnels diplomatiques exerçant à Paris le 1er janvier 1998 et pour Mme [L] en particulier à compter de septembre 2006. la République fédérative du Brésil conteste l'existence de l'engagement unilatéral allégué au motif qu'à la date de la souscription dudit contrat de groupe, en 1983 et jusqu'en 1998, seuls quelques auxiliaires locaux avaient été affiliés au régime complémentaire CRE..

Il ressort des débats que la République fédérative du Brésil a adhéré au régime complémentaire CRE/ARRCO depuis le 1er janvier 1983. Ce régime complémentaire bénéficie aux salariés de l'ambassade du Brésil affiliés au régime général de la sécurité sociale.

Il s'ensuit que cette adhésion qui procure aux salariés de l'ambassade du Brésil un avantage fixe, général et constant constitue un engagement unilatéral dont la République fédérative du Brésil ne peut exclure certains de ses salariés.

Il s'en déduit que dès 1993, alors que Mme [L] a réuni les conditions pour être affiliée au régime général de sécurité sociale français, elle avait également droit au bénéfice du régime complémentaire.

- sur le partage de responsabilité

Il résulte de ce qui précède qu'a commis une faute l'Ambassade du Brésil en ne procédant pas, en France, à l'affiliation de Mme [L] au régime général de sécurité sociale et au régime complémentaire ARRCO.

L'obligation d'affiliation relève de la responsabilité de l'employeur qui est seul en mesure d'y procéder. Dans ces conditions, il ne saurait être opposé à Mme [L] une quelconque faute de sa part, alors, de surcroît, que Mme [L] a réclamé, sans succès, à trois reprises (les 5 juillet 1991, 11 janvier 1996 et 6 janvier 2007), à son employeur le bénéfice des régimes de base et complémentaire de sécurité sociale.

Il s'ensuit qu'est imputable à l'Ambassade du Brésil une mauvaise exécution du contrat de travail. Contrairement à ce qu'elle soutient, la République fédérative du Brésil est seule à l'origine du dommage en résultant pour Mme [L] . Elle lui doit en conséquence entière réparation.

- sur le préjudice

Mme [L] sollicite, à titre de réparation, la somme de 169 454 € représentant la somme de la compensation CNAV évaluée à 91 380 € ajoutée à la compensation ARRCO évaluée à la somme de 78 074 €. Mme [L] ajoute que l'actuaire qui a procédé au calcul ainsi proposé a pris en considération l'âge de départ à la retraite fixé à 65ans, de la moyenne de l'espérance de vie, actuellement de près de 84ans pour une femme, sachant que Mme [L] est née en 1948. Il a appliqué en outre deux coefficients de rente défini l'un pour le régime de base et l'autre pour le régime complémentaire. Mme [L] réclame en outre l'indemnisation d'un préjudice moral qui porte l'ensemble de sa demande de réparation à la somme de 195 000 €.

La République fédérative du Brésil se reconnaît une simple obligation morale d'indemniser Mme [L] . Selon elle , Mme [L] ne peut tout au plus que se prévaloir d'un préjudice résultant de la perte d'une chance. Elle conteste le montant réclamé par Mme [L] qu'elle juge excessif et erroné en ce qu'il ne tient compte ni d'une durée précise d'espérance de vie ni du fait que Mme [L] n'ayant pas atteint l'âge de la retraite, elle n'a, à l'heure actuelle, pas le droit de percevoir une pension de retraite à taux plein. la République fédérative du Brésil ajoute avoir fait procéder , de son côté, aux calculs de reconstitution de retraite de Mme [L] aux termes desquels la perte au titre du régime général s'élèverait à 115 200 € et au titre du régime complémentaire à 72 000 €. S'agissant d'une simple perte de chance la République fédérative du Brésil offre d'indemniser Mme [L] à hauteur de 57 600 €. Elle conteste l'existence d'un quelconque préjudice moral.

La faute commise par la République fédérative du Brésil a eu pour effet de priver Mme [L] de l'acquisition de tous droits à la retraite et, en conséquence, de toute garantie à percevoir la pension correspondante. Contrairement à ce que prétend la République fédérative du Brésil , ce préjudice est présent et certain, peu important que Mme [L] n'ait pas encore atteint l'âge de la retraite, alors, de surcroît, qu'âgée de plus de 60ans, elle devrait être en droit, selon la loi française, de solliciter la liquidation de sa retraite.

Mme [L] , née en 1948 est toujours en poste et n'atteindra l'âge de la retraite qu'en 2013, date à laquelle elle aura 65ans. Mme [L] ne bénéficie aujourd'hui d'aucun droit ouvert à percevoir une pension de retraite. Pour autant, aucun élément produit aux débats ne permet, à priori, de douter que Mme [L] atteindra l'âge de la retraite puis l'âge moyen de 84ans, voire même le dépasser.

Il y a certes, en l'espèce, un aléa pesant sur la durée de la vie de Mme [L] et, en conséquence, sur le montant total de la pension de retraite qui lui aurait été versé si elle avait été correctement affiliée.

En tout état de cause, cet aléa, ne saurait, compte tenu de la faute commise par la République fédérative du Brésil , être supporté par Mme [L] .

Au vu de l'ensemble de ces éléments, les calculs présentés par chacune des parties, constituent des éléments de fait dont il convient de tenir compte dans l'évaluation du préjudice subi. Ni l'un ni l'autre ne fournit cependant une exacte évaluation du préjudice subi par Mme [L] .

Compte tenu de l'ensemble des éléments qui précèdent, ainsi que de la durée d'exercice de Mme [L] auprès de l'Ambassade du Brésil, soit 16ans sur la période couverte par l'obligation d'affiliation, et du niveau de rémunération perçu par Mme [B] au long de sa carrière, il convient d'évaluer le préjudice économique subi par Mme [L] à la somme de 160 000 €.

En outre, les demandes répétées de Mme [L] (en 1991, 1996 et 2007) pour être affiliée à un régime de retraite français ou brésilien témoignent de l'inquiétude de celle-ci et de sa conscience de la précarité menaçant ses vieux jours. Il s'ensuit qu'en privant Mme [L] de tous droits à percevoir une pension de retraite, et en ne réglant pas efficacement la situation de Mme [L] , la République fédérative du Brésil a généré chez Mme [L] une légitime inquiétude sur de nombreuses années qui caractérise l'existence d'un préjudice moral qu'il y a lieu d'évaluer à la somme de 30 000 €.

Le jugement déféré est, en conséquence, infirmé.

Par ces motifs, la cour,

- infirme le jugement déféré

Statuant à nouveau :

- condamne la République fédérative du Brésil à payer à Mme [U] [B] la somme de 160 000 € à titre du préjudice matériel subi et 30 000 € au titre du préjudice moral, outre intérêts au taux légal à compter de la présente décision ;

- la condamne aux dépens.

Vu l'article 700 du code de procédure civile,

- condamne la République fédérative du Brésil à payer à Mme [B] la somme de 4 000 €

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 08/10040
Date de la décision : 08/12/2009

Références :

Cour d'appel de Paris K3, arrêt n°08/10040 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2009-12-08;08.10040 ?
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