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25/11/2009 | FRANCE | N°07/18426

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 4, 25 novembre 2009, 07/18426


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 4



ARRET DU 25 NOVEMBRE 2009



(n° 267, 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 07/18426



Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Octobre 2007

Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2007000652





APPELANTE



Madame [G] [F] épouse [P]

[Adresse 4]

[Localité 3]



représe

ntée par la SCP CALARN-DELAUNAY, avoués à la Cour

assistée de Me HUE Matthieu, avocat au barreau de PARIS - toque K 19

plaidant pour la SCP CHAINTRIER, avocats







INTIMEE



S.A.R.L. CABINET VILLARD

agis...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 4

ARRET DU 25 NOVEMBRE 2009

(n° 267, 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 07/18426

Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Octobre 2007

Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2007000652

APPELANTE

Madame [G] [F] épouse [P]

[Adresse 4]

[Localité 3]

représentée par la SCP CALARN-DELAUNAY, avoués à la Cour

assistée de Me HUE Matthieu, avocat au barreau de PARIS - toque K 19

plaidant pour la SCP CHAINTRIER, avocats

INTIMEE

S.A.R.L. CABINET VILLARD

agissant poursuites et diligences de son gérant

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par la SCP BOLLING - DURAND - LALLEMENT, avoués à la Cour

assistée de Me MEDAKSIAN Catherine, avocat au barreau de PARIS - toque B 540

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 13 octobre 2009 en audience publique, après qu'il en ait été fait rapport par Monsieur ROCHE, conformément aux dispositions de l'article 785 du Code de procédure civile, devant la Cour composée de :

Monsieur LE FEVRE, président

Monsieur ROCHE, conseiller

Monsieur BIROLLEAU, conseiller

qui ont délibéré

Greffier lors des débats Madame CHOLLET

ARRET

- contradictoire

- prononcé publiquement par Monsieur LE FEVRE, président

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur LE FEVRE, président et Madame CHOLLET, greffier.

LA COUR,

Vu le jugement en date du 15 octobre 2007 par lequel le Tribunal de commerce de PARIS à condamné Mme [P] à payer à la société CABINET VILLARD la somme de 128 750 € TTC à titre de dommages et intérêts au taux légal à compter du 15 décembre 2006, outre celle de 3 000 € au titre des frais hors dépens ;

Vu l'appel interjeté par Mme [P] et ses conclusions enregistrées le 15 septembre 2009 et tendant à faire, notamment :

- dire qu'elle a valablement révoqué le mandat donné à la société CABINET VILLARD et que cette révocation a pris effet le 15 juillet 2006 ou, subsidiairement, le 17 juillet 2006 et, qu'en conséquence, elle n'a commis aucune faute en déclinant l'offre qui lui a été présentée le 21 juillet 2006 ;

subsidiairement,

- dire que l'intimée a manqué à son devoir de conseil, à son obligation d'exécution de bonne foi du mandat, justifiant ainsi son refus de l'offre susmentionnée ;

dans tous les cas,

- infirmer le jugement en toutes ses dispositions, et, statuant à nouveau, débouter la société CABINET VILLARD de l'ensemble de ses demandes et la condamner au paiement d'une indemnité de 4 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

Vu, enregistrées le 4 août 2009, les conclusions présentées par la société CABINET VILLARD et tendant à faire, notamment :

- confirmer le jugement entrepris,

y ajoutant,

- ordonner la capitalisation des intérêts au taux légal à compter du 15 décembre 2006 ;

- condamner Mme [P] à lui verser la somme de 5 000 € à titre de dommages et intérêts pour la résistance abusive outre la même somme sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que par mandat en date du 15 juin 2006, Mme [P], propriétaire d'une officine de pharmacie sise à [Adresse 5], avait confié à la société CABINET VILLARD, qui exerce l'activité d'intermédiaire en transmissions de pharmacies et de cabinets dentaires, la mission de rechercher un acheteur pour son officine; qu'elle a, cependant, par lettre recommandée avec accusé de réception expédiée le 12 juillet 2006 et reçue par la société CABINET VILLARD le 17 juillet suivant, dénoncé ledit mandat de recherche sus-mentionné ; que cette dernière a, néanmoins, transmis à Mme [P] le 22 juillet 2006 une 'offre ferme d'achat' émanant de deux acheteurs et correspondant au prix réclamé ; que l'appelante, se prévalant de la dénonciation du contrat et alléguant, en outre, du non-respect de certaines règles, telle l'absence de condition suspensive de prêt, s'est refusée à conclure la vente proposée et de régler la facture y afférente émise par la société CABINET VILLARD ; que cette dernière, estimant que la résiliation de l'engagement ne pouvait intervenir que sous réserve du respect d'un délai de préavis de quinze jours et considérant avoir rempli sa mission conformément aux stipulations du mandat a, par acte du 15 décembre 2006, assigné Mme [P] devant le Tribunal de Commerce de PARIS aux fins de la voir condamnée à lui payer la somme de 128 570 € avec intérêts de droit à compter de l'assignation, représentant le montant de la commission conventionnellement convenue ; que c'est dans ces conditions qu'est intervenu le jugement susvisé présentement entrepris ;

Sur la durée d'exécution du mandat

Considérant qu'il ressort de l'examen des pièces du dossier que la clause relative à la durée du mandat conféré à la société CABINET VILLARD stipulait dans sa version initiale préimprimée : 'le présent mandat est consenti avec exclusivité pour une période de trois mois à compter de ce jour. Passé ce délai, il se poursuivra sauf révocation, par tacite reconduction par période de trois mois. Cette tacite reconduction sera limitée à trois périodes consécutives. Toutefois, passé le délai de trois mois à compter de la signature des présentes, chacune des parties pourra, à tout moment, dénoncer le présent mandat par lettre recommandée avec avis de réception sous réserve d'un préavis de quinze jours': ; que, toutefois, par une mention manuscrite portée sur ce document lors de sa signature, la durée prévue a été réduite de 3 à 1 mois sans pour autant que cette modification ait conduit à une réécriture d'ensemble de la clause litigieuse ; qu'a été, ainsi, instaurée, outre une première période d'un mois sans résiliation possible, une période de deux mois durant laquelle la résiliation de l'engagement aurait été possible sans préavis, puis une période suivante où l'obligation du respect d'un préavis de quinze jours s'imposerait à toute partie voulant mettre fin à son engagement ; qu'aucune circonstance de fait ou de droit, si ce n'est une maladresse rédactionnelle générée par l'absence de coordination entre la modification manuscrite sus- rappelée et la logique initiale de la clause dont s'agit, ne justifie l'abandon pendant la période de deux mois sus-mentionnée de la garantie essentielle que représente pour tout contractant l'obligation d'un préavis préalable à la prise d'effet d'une résiliation décidée par l'autre partie que les articles 1156 et suivants du Code Civil imposent, au demeurant, de ne pas s'arrêter au sens littéral des termes d'un contrat mais de rechercher la commune intention des parties lesquelles sont présumées agir de façon cohérente et rationnelle et n'avoir pu, en l'occurrence, vouloir renoncer à l'exigence d'un délai de préavis pendant une période arbitrairement fixée à deux mois ; qu'ainsi, à la date du 15 juillet 2006, marquant la fin de la durée initiale du mandat, la sociétéCABINET VILLARD n'avait pas connaissance de la décision de Mme [P] de révoquer le mandat ; que celui-ci s'est donc tacitement poursuivi à compter de cette date et ne pouvait dès lors être révoqué que sous réserve, pour la partie prenant l'initiative de la rupture, de respecter un préavis de quinze jours, étant rappelé que la révocation d'un mandat n'est opposable au mandataire qu'au jour où celui-ci a eu connaissance de la volonté du mandat et non au jour où celle-ci s'est exprimée ;

Sur les conditions d'exécution du mandat

Considérant que, pour vaincre la résistance de Mme [P], les auteurs de l'offre d'achat de son officine lui ont fait délivrer, le 25 juillet 2006, une sommation l'invitant à comparaître, le 2 août 2006, à la signature d'un 'compromis' de vente ; que l'intéressée a refusé de déférer à cette sommation en exposant, dans une lettre du 27 juillet 2006, qu'elle ne régulariserait pas l'avant-contrat qui lui était proposé aux motifs qu'elle n'acceptait aucune condition suspensive d'obtention de prêt et qu'elle exigeait, le jour de la signature de la promesse, le versement d'une indemnité d'immobilisation égale à 10% du prix de vente ;

Considérant qu'il échet de relever que le contrat du 15 juin 2006 ne prévoit ni les modalités de paiement du prix de l'officine ni les conditions dans lesquelles l'accord préalable à la vente doit être formalisé ; que, toutefois, selon les dispositions de l'article 1160 du Code civil, il convient de suppléer dans le mandat les clauses qui y sont d'usage quoiqu'elles n'y soient pas exprimées; qu' il est ainsi habituel que l'acquéreur d'un fond de commerce finance une partie de l'acquisition au moyen d'un emprunt bancaire et que l'obtention de celui-ci constitue une condition suspensive de son engagement d'achat ; que, de même, les usages en matière de ventes de fonds de commerce prévoient le versement, par l'acquéreur, d'une indemnité d'immobilisation au moment de la signature de l'avant-contrat ; que, dès lors, à défaut de stipulation expresse contraire insérée dans le contrat de mandat litigieux, Mme [P] ne pouvait invoquer la condition suspensive sus-mentionnée pour refuser de procéder à la signature du contrat avec les acquéreurs potentiels présentés par la société CABINET VILLARD ni inférer de leur silence un quelconque refus de lui verser une indemnisation d'immobilisation ; que, par suite, Mme [P] n'était aucunement fondée à rejeter l'offre ferme d'achat qui lui avait été proposée ni à imputer à la société CABINET VILLARD une quelconque faute dans l'exécution de la mission qu'elle lui avait confiée ;

Sur le préjudice invoqué par l'intimée

Considérant que si la société CABINET VILLARD sollicite, sur le fondement de l'article 1147 du Code civil, la condamnation de Mme [P] au paiement d'une indemnité d'un montant égal à la commission à laquelle elle était en droit de prétendre si la vente litigieuse était intervenue et si le contrat de mandat conclu entre les parties prévoyait effectivement, au titre de la rémunération qu' 'en cas de réalisation de l'opération avec un acheteur présenté par le mandataire, ce dernier aura droit à une rémunération fixée à cinq pour cent du prix de vente, plus la TVA au taux de 19,60 %', il est constant qu'aucune vente n'a eu lieu entre Mme [P] et l'acquéreur présenté par l'intimée ; que, dès lors, la commission contractuellement prévue ne saurait, en tout état de cause, être octroyée à l'intimée ; qu'en revanche les agissements fautifs sus-analysés commis par Mme [P] ont causé un préjudice à cette dernière constitué par la perte de chance de voir conclu le contrat de vente de l'officine de pharmacie alors qu'elle avait trouvé des acquéreurs qui en proposait le prix fixé par le mandant ; que toutefois, la réparation d'une perte de chance ne saurait être égale à l'avantage qu'aurait procuré cette chance si celle-ci s'était réalisée mais doit être mesurée à la chance perdue; qu'en l'espèce, compte tenu de l'ensemble des circonstances du litige et, notamment, de la rémunération convenue la Cour dispose des éléments d'appréciation suffisants pour évaluer à 100 000 € le montant de ce chef de préjudice ;

Considérant, enfin, que la société CABINET VILLARD qui ne démontre ni le caractère 'abusif' de la procédure engagée à son endroit par Mme [P] ni le préjudice spécifique qui en serait résulté pour elle et qui serait distinct de celui ci-dessus indemnisé, sera déboutée de sa demande en dommages et intérêts formée à ce titre ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède qu'il y a lieu de confirmer le jugement en toutes ses dispositions et de débouter les parties du surplus de leurs prétentions respectives ;

Sur l'application de l'article 700 du Code Procédure Civile

Considérant que l'équité commande, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'appelante à verser à la société CABINET VILLARD la somme de 2 000 € sur le fondement de l'article susvisé ;

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement en toutes ses dispositions.

Déboute les parties du surplus de leurs demandes respectives.

Condamne Mme [P] aux dépens d'appel avec recouvrement dans les conditions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.

La condamne aussi à payer à la société CABINET VILLARD la somme de 2 000 € au titre des frais hors dépens.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 07/18426
Date de la décision : 25/11/2009

Références :

Cour d'appel de Paris I4, arrêt n°07/18426 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2009-11-25;07.18426 ?
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