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23/11/2009 | FRANCE | N°06/19663

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 3, 23 novembre 2009, 06/19663


REPUBLIQUE FRANCAISE

:AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 2 - Chambre 3



ARRÊT DU 23 NOVEMBRE 2009



(n° 204 , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 06/19663



Décision déférée à la Cour : Jugement du 05 Décembre 2005 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 02/18973





APPELANTS



Madame [D] [Y] veuve [Z], agissant tant en son nom personnel qu'en qualité de représentante légale de sa fille mineure [N] [Z] n

ée le [Date naissance 2]/1992

[Adresse 7]

[Localité 10]



Monsieur [K] [Z]

[Adresse 7]

[Localité 10]



représentés par la SCP FISSELIER - CHILOUX - BOULAY, avoués à la Cour...

REPUBLIQUE FRANCAISE

:AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 3

ARRÊT DU 23 NOVEMBRE 2009

(n° 204 , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 06/19663

Décision déférée à la Cour : Jugement du 05 Décembre 2005 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 02/18973

APPELANTS

Madame [D] [Y] veuve [Z], agissant tant en son nom personnel qu'en qualité de représentante légale de sa fille mineure [N] [Z] née le [Date naissance 2]/1992

[Adresse 7]

[Localité 10]

Monsieur [K] [Z]

[Adresse 7]

[Localité 10]

représentés par la SCP FISSELIER - CHILOUX - BOULAY, avoués à la Cour

assistés de Me Denis AMBROSINI, avocat au barreau de PARIS, toque : E 825

INTIMES

SA AXA FRANCE IARD ,prise en la personne de ses représentants légaux

Ayant son siège social [Adresse 5]

[Localité 9]

représentée par la SCP MIRA - BETTAN, avoués à la Cour

assistée de Me ARON, avocat au barreau de Paris, toque A383

FONDS DE SECURITE SOCIALE DE L'ASSEMBLEE NATIONALE

Ayant son siège social [Adresse 4]

[Localité 8]

représentée par la SCP BASKAL - CHALUT-NATAL, avoués à la Cour

assistée de Me Eve PORTIAS, avocat au barreau de Paris, toque: R130, substituant le CABINET FARTHOUAT

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 19 Octobre 2009, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Nathalie NEHER-SCHRAUB, Présidente

Madame Régine BERTRAND-ROYER, Conseillère, entendue en son rapport

M. Christian BYK, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Monsieur Daniel GAULIN

ARRET : CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Nathalie NEHER-SCHRAUB, présidente et par Monsieur Daniel GAULIN, greffier présent lors du prononcé.

*****

Le 26 décembre 2000, Monsieur [O] [Z] a été victime d'un accident de la circulation des suites duquel il est décédé le [Date décès 3] 2001.

La société AXA FRANCE IARD assureur du véhicule impliqué dans l'accident, ne conteste pas le droit à indemnisation des proches de la victime.

Par jugement du 5 décembre 2005, le tribunal de grande instance de Paris, saisi de demandes d'indemnisation par la veuve de la victime, Madame [D] [Y] agissant tant en son nom personnel qu'en qualité de représentante légale de ses deux enfants mineurs, [K] né le [Date naissance 6] 1990 et [N] née le [Date naissance 2] 1992, après avoir constaté que le Fonds de Sécurité Sociale de l'Assemblée Nationale (le Fonds) avait été régulièrement assigné, n'avait pas constitué avocat mais avait fait connaître les prestations versées à la suite du décès, a:

-dit la société AXA FRANCE IARD tenue de verser à:

1) Madame [D] [Y] veuve [Z]:

* la somme de 20.000€ au titre de son préjudice moral,

* la somme de 164.714,91€ en réparation de son préjudice économique,

* la somme de 2.000€ au titre de l'article 700 du NCPC,

2) [K] [Z]:

* la somme de 20.000€ au titre de son préjudice moral,

* la somme de 46.324,20€ en réparation de son préjudice économique,

3) [N] [Z]:

* la somme de 20.000€ au titre de son préjudice moral,

* la somme de 48.739,55€ en réparation de son préjudice économique,

Les sommes allouées au titre du préjudice économique avec intérêts au double du taux légal du 2 septembre 2001 au 23 décembre 2002 et, pour le surplus, avec intérêts au taux légal à compter du jugement,

- ordonné l'exécution du présent jugement à hauteur des deux tiers des indemnités allouées,

- dit la société AXA FRANCE IARD tenue aux entiers dépens.

Madame [D] [Y] veuve [Z], agissant tant en son nom personnel qu'en qualité de représentante légale de ses deux enfants mineurs a relevé appel du jugement.

Dans leurs dernières conclusions signifiées le 8 juin 2009, Madame [D] [Y] en son nom personnel et ès qualités de représentante légale de sa fille mineure [N] ainsi que [K] [Z], devenu majeur et intervenu volontairement à l'instance, font valoir que les indemnités allouées sont insuffisantes et demandent, en réparation de leurs préjudices, la condamnation de la société AXA FRANCE IARD à leur payer les montants mentionnés dans le tableau ci-dessous, avec intérêts au double du taux légal du 2 septembre 2001 jusqu'à la décision à intervenir à défaut d'offre dont la société AXA FRANCE IARD puisse se prévaloir.

Le Fonds, par dernières conclusions du 1er septembre 2008 s'oppose à l'irrecevabilité de sa demande soulevée par la société AXA FRANCE IARD et demande la condamnation de cette dernière à lui rembourser les sommes qu'il a versées à la suite de l'accident soit:

- dépenses de santé (frais d'hospitalisations): 7.113,58€,

- au titre de la perte de revenus de Madame [Z]:

* capital décès: 134.157,13€,

* pension de réversion: 142.323,79€,

- au titre du préjudice économique des enfants:

* pension orphelin pour [K]: 25.171,10€,

* pension orphelin pour [N]: 28.167,37€,

- au titre de l'article 700 du CPC, la somme de 2.000€.

La société AXA FRANCE IARD, dans ses dernières écritures du 2 juillet 2009, soutient que la demande présentée par le Fonds, pour la première fois en cause d'appel est irrecevable, elle offre aux consorts [Z] les indemnités suivantes 'sous réserve de l'imputation du capital décès réglé par le Fonds d'un montant de 134.157,13€' et conclut au débouté de la demande de pénalité fondée sur les articles L.211-9 et L.211-13 du code des assurances s'agissant des préjudices moraux, en raison de son offre formulée le 3 juillet 2001, et à l'application de cette pénalité, s'agissant des préjudices économiques, que du 2 septembre 2001 au 23 décembre 2002 et sur les montants offerts lesquels n'étaient pas manifestement insuffisants, et non sur les indemnités allouées, compte tenu de l'offre qu'elle a faite le 23 décembre 2002.

DEMANDES

OFFRES

- Mme [Z]:

* préjudice économique:

600.655€

30.000€

* frais d'obsèques:

2.115,81€ somme que Mme [Z] reversera à la MATMUT, assureur de son mari qui lui en a fait l'avance

débouté

* préjudice moral:

25.000€

16.800€

* Art.700 du CPC:

5.000€

- [K] [Z]:

* préjudice économique:

179.822€

7.000€

* préjudice moral:

25.000€

12.200€

- [N] [Z]:

* préjudice économique:

208.378€

11.000€

* préjudice moral:

25.000€

12.200€

CELA ÉTANT EXPOSÉ, LA COUR :

Sur les préjudices:

- les préjudices moraux:

Monsieur [O] [Z] (né le [Date naissance 1] 1955) est décédé à l'âge de 45 ans. Il était marié depuis onze ans avec Madame [D] [Y] alors âgée de 41 ans et le couple avait deux enfants de 10 et 8 ans.

Compte tenu de ces éléments les indemnités demandées en réparation du préjudice moral de l'épouse et des enfants sont justifiées et chacun d'eux recevra la somme de 25.000€.

- les préjudices économiques:

Les consorts [Z] soutiennent que pour déterminer leurs préjudices économiques, il ne doit pas être tenu compte des salaires que Madame [Z] a perçus à compter du 10 septembre 2001 puisque c'est l'accident qui l'a contrainte à occuper un emploi, ce qu'elle n'envisageait pas de faire avant le décès de son mari, mais que doivent en revanche être pris en considération l'avantage en nature que constituait la mise à disposition d'un logement par l'employeur de Monsieur [O] [Z], l'évolution de carrière dont la victime aurait bénéficié, les placements que le couple aurait réalisés avec les économies qu'il aurait constituées ainsi que les pertes de droits à la retraite que le foyer subira du fait du décès.

La société AXA FRANCE IARD au contraire prétend que les pensions ainsi que les revenus professionnels que Madame [Z] a reçus lorsqu'elle a repris une activité professionnelle doivent venir en déduction du montant de la perte financière du foyer en précisant que cette reprise d'activité aurait eu lieu même en l'absence de l'accident et qu'elle n'a été qu'anticipée, ce pourquoi elle offre 30.000€. La société AXA FRANCE IARD conteste par ailleurs l'avantage en nature allégué ainsi que les calculs proposés par les consorts [Z] au motif qu'ils ne sont pas fondés sur des éléments certains.

Lors de l'accident Madame [Z] ne travaillait pas et il n'y a pas lieu de prendre en compte les revenus professionnels qu'elle a perçus à compter du 10 septembre 2001 puisque la société AXA FRANCE IARD ne démontre pas qu'elle devait contrairement à ce qu'elle affirme, reprendre un emploi qu'elle avait précédemment occupé. En effet, Madame [Z] était âgée de plus de quarante ans lors de l'accident, ses enfants étaient scolarisés et lui laissaient par conséquent une certaine disponibilité et il n'est pas justifié qu'elle ait exercé une activité professionnelle au cours des années précédant l'accident. Dès lors, les revenus de l'emploi qu'elle a occupé après le décès de son mari sont la conséquence de sa décision de travailler et des efforts qu'elle a déployés, et non de l'accident, ils ne doivent donc pas dispenser la société AXA FRANCE IARD en sa qualité d'assureur du responsable de l'accident, de réparer le préjudice subi.

En revanche, les pensions de réversion perçues par Madame [Z], dont le versement est en lien de causalité avec le décès de son mari et qui se substituent au moins partiellement au revenu professionnel de Monsieur [Z] perdu par le foyer, doivent être prises en compte pour déterminer la perte économique de ce foyer.

Les avantages professionnels dont Monsieur [O] [Z] bénéficiait, l'évolution de sa carrière ainsi que les pertes de droits à la retraite résultant de son décès, seront également pris en compte à la condition qu'ils soient certains.

Il ressort des bulletins de paie de Monsieur [O] [Z] établis pour l'année 2000 que la victime, employée par l'Assemblée Nationale, percevait un salaire mensuel net imposable de 4.805,60€ (cumul net imposable de 57.666,90€ figurant sur le bulletin de paie de décembre).

Pour justifier l'indemnisation qu'ils demandent, de la perte de l'avantage en nature que constitue la disposition d'un logement, avantage qu'ils estiment à 15.600€ par an, les consorts [Z] produisent une attestation délivrée le 28 septembre 2005 par Monsieur [V], directeur du service des Affaires Immobilières et du Patrimoine de l'Assemblée Nationale, selon laquelle Monsieur [O] [Z] était à la date de son décès, chef du département de Génie Climatique à l'Assemblée Nationale et les titulaires de cet emploi bénéficient 'traditionnellement' d'un logement de fonction au Palais-Bourbon, ce qui est le cas pour le successeur de Monsieur [O] [Z] et aurait également été le cas pour Monsieur [O] [Z] s'il n'était pas décédé. Cependant il convient de constater que Monsieur [O] [Z] ne bénéficiait pas d'un logement de fonction lors de son décès alors qu'il avait été nommé à son poste, en qualité de fonctionnaire, en août 2000 soit plus de quatre mois avant son décès. Il percevait en revanche, au vu de ses bulletins de paie, une indemnité de logement et il n'est produit aucun élément pour expliquer les raisons pour lesquelles l'avantage revendiqué ne lui était pas encore accordé ni pour établir qu'il devait cumuler cet avantage et une indemnité de logement. Les consorts [Z] ne justifient donc pas que le salaire de Monsieur [O] [Z] figurant sur ses bulletins de paie et comprenant cette indemnité de logement, doit être augmenté de la somme qu'ils proposent pour compenser une perte supplémentaire au titre d'un logement de fonction.

S'agissant des perspectives de carrière de la victime, les appelants produisent un document à l'en-tête du service du personnel de l'Assemblée Nationale indiquant que la date du 'prochain avancement prévu' est le 23 avril 2001. Toutefois ce texte, comme les autres documents communiqués, à savoir des listings et des grilles sans en-tête et modifiés de façon manuscrite, ainsi que des graphiques, ne permettent de déterminer ni les conditions requises pour bénéficier d'un avancement, au choix ou par ancienneté, ni le montant de l'augmentation résultant d'un avancement.

Enfin, les consorts [Z] font état à tort, d'un préjudice qui résulterait de la perte du bénéfice des placements qu'ils n'ont pu réaliser en raison de la perte du revenu professionnel de Monsieur [O] [Z] dans la mesure où un tel bénéfice est incertain.

Dès lors, il ne peut être tenu compte que du seul salaire perçu par la victime lors de son décès ainsi que des pertes de droit à la retraite, dans les conditions suivantes:

Compte tenu du niveau de revenus dont bénéficiaient les époux [Z] et de la charge de deux enfants qui était la leur, la part consommée par chaque conjoint sera fixée à 20% du revenu familial, soit une perte annuelle pour le foyer après déduction de la part consommée par Monsieur [O] [Z], de 46.133,52€ (57.666,90€ - 20%).

Cette perte a toutefois été partiellement compensée par les pensions de réversion réglées d'une part, par l'ANEP, pour un montant annuel net de 1.782,43€ y compris une majoration pour enfants à charge, et d'autre part par le groupe MORNAY pour la somme nette de 3.819,94€ par an, soit une perte annuelle résiduelle de 40.531,15€ [46.133,52€ - (3.819,94€ + 1.782,43€ )].

Le préjudice viager sera capitalisé par l'emploi de l'€ de rente viagère, pour tenir compte des pertes de droits à la retraite que subira le foyer en raison du décès, pour un homme âgé de 45 ans, soit la somme de 811.798,40€ (40.531,15€ x 20,029).

La part réservée à chacun des enfants sera fixée, compte tenu des charges fixes du ménage que conserve la veuve, à 15% et conformément à la position commune des parties sur ce point, il sera considéré que les enfants subiront un préjudice économique jusqu'à l'âge de 25 ans.

Le préjudice économique de [K] [Z], âgé de 10 ans lors du décès de son père s'établit donc à la somme de 77.424,63€ [(40.531,15€ x 15%) x 12,735]

Le préjudice économique de [N] [Z], âgée de 8 ans lors du décès, se fixe à 81.187,95€ [(40.531,15€ x 15%) x 13,354]

Le préjudice économique de Madame [Z] est par conséquent de 653.185,82€ [811.798,40€ - ( 77.424,63€ +81.187,95€ )].

Ces préjudices ont été partiellement réparés par le Fonds qui sert, à chacun des membres du foyer, les prestations individualisées suivantes:

- pour Madame [Z] : une pension de réversion jusqu'au 60e anniversaire du défunt, pour une somme de 142.323,79€, et un capital décès de 134.157,13€,

- pour [K] [Z], une pension d'orphelin jusqu'à son 21e anniversaire, de 25.171,10€,

- pour [N] [Z] une pension d'orphelin jusqu'à son 21e anniversaire, de 28.167,37€.

Madame [Z] recevra donc en réparation de son préjudice économique, la somme de 376.704,90€ [653.185,82€ - (142.323,79€ +134.157,13€)] et ès qualités en indemnisation du préjudice économique de sa fille mineure [N], la somme de 53.020,58€ (81.187,95€ - 28.167,37€). Monsieur [K] [Z] recevra à ce titre la somme de 52.253,53€ (77.424,63€ -25.171,10€).

- les frais d'obsèques:

Madame [Z] justifie par facture avoir réglé des frais d'obsèques pour 1.296,40€ (8.503,82F). Cette somme lui sera allouée en deniers ou quittances, la société AXA FRANCE IARD ayant accepté, selon les écritures de Madame [Z], de prendre en charge ces frais.

Madame [Z] demande en outre au titre de frais de marbrerie, la somme de 819,41€ (5.375F) en indiquant que cette somme lui a été réglée par son propre assureur, la MATMUT, et qu'elle la lui remboursera. Toutefois, il appartient à la MATMUT subrogée dans les droits de Madame [Z], de réclamer cette somme à la société AXA FRANCE IARD ainsi d'ailleurs que le propose la MATMUT dans la lettre qu'elle a adressée au conseil des appelants le 21 février 2008.

Sur la demande de doublement des intérêts

Les consorts [Z] demandent la condamnation de la société AXA FRANCE IARD à leur régler les condamnations allouées avec intérêts au double du taux légal à compter du 2 septembre 2001 jusqu'à la décision à intervenir à défaut d'offre présentée par cet assureur en réparation de leurs préjudices économiques dans le délai de huit mois de l'accident, en précisant que l'offre faite le 3 juillet 2001 ne porte que sur les préjudices moraux, et que la société AXA FRANCE IARD ne peut se prévaloir de l'offre qu'elle leur a faite le 23 décembre 2002 en indemnisation de leurs préjudices économiques car celle-ci est 'anormalement sous-évaluée'.

La société AXA FRANCE IARD réplique qu'elle a fait une offre d'indemnisation des préjudices moraux le 3 juillet 2001, dans les délais légaux, et qu'elle a présenté une seconde offre relative aux préjudices économiques, le 23 décembre 2002. Elle soutient qu'en conséquence la pénalité n'est susceptible de s'appliquer que du 2 septembre 2001 au 23 décembre 2002 et sur les montants offerts, lesquels n'étaient pas manifestement insuffisants, et non sur les indemnités allouées.

En application des articles L. 211-9, celui-ci dans sa version antérieure au 1er août 2003 applicable en l'espèce, et R.211-30 du Code des assurances, l'assureur qui garantit la responsabilité civile du fait d'un véhicule terrestre à moteur est tenu de présenter en cas de décès de la victime ayant subi une atteinte à sa personne, dans le délai de huit mois de l'accident si la victime est décédée dans le mois suivant cet accident, une offre d'indemnité comprenant tous les éléments indemnisables du préjudice, à ses héritiers et s'il y a lieu à son conjoint. Une offre doit aussi être présentée aux autres victimes dans un délai de huit mois à compter de leur demande d'indemnisation.

A défaut d'offre dans les délais impartis par ces articles, le montant de l'indemnité offerte par l'assureur ou allouée par le juge, produit, en vertu de l'article L.211-13 du même code, des intérêts au double du taux légal à compter de l'expiration du délai et jusqu'au jour de l'offre ou du jugement devenu définitif.

En vertu de l'article L.211-14 du même code, si le juge qui fixe l'indemnité estime que l'offre proposée par l'assureur était manifestement insuffisante, il condamne d'office l'assureur à verser au Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages (FGAO), une somme au plus égale à 15% de l'indemnité allouée et en application de cet article, l'offre manifestement insuffisante équivaut à une absence d'offre.

En l'espèce, Monsieur [O] [Z] étant décédé dans le mois de l'accident, la société AXA FRANCE IARD devait présenter à son conjoint et à ses enfants ou pour eux, une offre comprenant tous les éléments indemnisables de leurs préjudices avant le 27 août 2001.

La société AXA FRANCE IARD justifie avoir fait aux consorts [Z], une offre d'indemnisation de leurs seuls préjudices moraux le 11 juillet 2001. Cette offre cependant n'est pas conforme aux exigences légales à défaut de comporter tous les postes de préjudices et notamment, les préjudices économiques.

La société AXA FRANCE IARD produit également l'offre qu'elle a faite à Madame [Z] par lettre du 23 décembre 2002 par laquelle elle propose, en réparation de leurs préjudices économiques à Madame [Z], pour elle-même, la somme de 189.482,42€, pour son fils [K], la somme de 14.173,57€, et pour sa fille [N] la somme de 21.993,24€.

Ces offres sont, comme le soutiennent les consorts [Z], manifestement insuffisantes, en effet, l'offre faite à Madame [Z] est sensiblement égale à la moitié de l'indemnité allouée et les offres faites au profit de ses enfants sont inférieures à la moitié des indemnités fixées par le présent arrêt. La société AXA FRANCE IARD a ensuite présenté par conclusions signifiées tant en première instance qu'au cours de la procédure d'appel, des propositions d'indemnisation d'un montant inférieur à celles formulées par son courrier du 23 décembre 2002.

Cet assureur sera donc condamné à payer d'une part, aux consorts [Z] les intérêts au double du taux légal à compter du 2 septembre 2001, conformément à la demande, jusqu'à la date du présent arrêt devenu définitif, sur l'intégralité des indemnités allouées, et d'autre part, au FGAO, la somme de 15.000€ en application de l'article L.211-14 précité.

Sur la demande du Fonds:

Le Fonds admet qu'il a été assigné en première instance et a été défaillant mais indique qu'il entend demander devant la cour la condamnation de la société AXA FRANCE IARD à lui rembourser les sommes qu'il a versées à la suite de l'accident en faisant valoir:

-qu'ayant fait connaître sa créance au tribunal, il peut en application des articles 565 et suivants du CPC expliciter en appel, la demande qui était virtuellement faite devant le premier juge,

- qu'en tout état de cause sa demande tend aux mêmes fins que celles soumises au premier juge par les consorts [Z] dans les droits desquels il est subrogé,

- que sa demande est également le complément des demandes de ces derniers,

- qu'ayant été assigné en déclaration d'arrêt commun, sa demande doit être considérée comme une demande reconventionnelle laquelle est recevable en application de l'art. 567 du CPC puisque par sa nature subrogatoire, elle se rattache à la demande des consorts [Z] par un lien suffisant.

Cependant, aucune prétention n'ayant été élevée à l'encontre du Fonds, la demande de celui-ci en cause d'appel n'est pas reconventionnelle et il ne peut se prévaloir utilement des dispositions de l'article 567 du CPC.

Le Fonds ne peut davantage voir accueillir sa demande sur le fondement des articles 565 et suivants du CPC car ayant été appelé en déclaration de jugement commun en première instance, il était partie à l'instance, et ne peut dès lors expliciter ses prétentions virtuellement comprises dans des demandes ou défenses qu'il n'avait pas formulées, ou leur ajouter.

La demande du Fonds est donc irrecevable.

Sur l'article 700 du CPC:

Il serait inéquitable de laisser à la charge de Madame [Z] l'intégralité des frais et honoraires exposés par elle et non compris dans les dépens. La somme fixée de ce chef par le premier juge sera confirmée et il lui sera alloué en cause d'appel, la somme complémentaire de 4.000€.

PAR CES MOTIFS

Dit irrecevables les demandes du Fonds de Sécurité Sociale de l'Assemblée Nationale;

Infirme le jugement à l'exception de ses dispositions relatives à l'article 700 du CPC et aux dépens ;

Et statuant à nouveau, dans cette limite :

Condamne la société AXA FRANCE IARD à verser, en deniers ou quittances, provisions et sommes versées en vertu de l'exécution provisoire non déduites, à :

- Madame [D] [Y] veuve [Z]:

* la somme de 25.000€ (vingt cinq mille euros) en réparation de son préjudice moral;

* la somme de 1.296,40€ (mille deux cent quatre vingt seize euros et quarante centimes) en remboursement des frais d'obsèques;

* la somme de 376.704,90€ (trois cent soixante seize mille sept cent quatre euros et quatre vingt dix centimes) en indemnisation de son préjudice économique;

* la somme de 4.000€ (quatre mille euros) sur le fondement de l'article 700 du CPC;

- Madame [D] [Y] veuve [Z] en sa qualité de représentante légale de sa fille mineure [N] [Z]:

* la somme de 25.000€ (vingt cinq mille euros) au titre du préjudice moral de l'enfant;

* la somme de 53.020,58€ (cinquante trois mille vingt euros et cinquante huit centimes) en réparation du préjudice économique de l'enfant;

- Monsieur [K] [Z],

* la somme de 25.000€ (vingt cinq mille euros) en réparation de son préjudice moral;

* la somme de 52.253,53€ (cinquante deux mille deux cent cinquante trois euros et cinquante trois centimes) au titre de son préjudice économique;

Condamne la société AXA FRANCE IARD à verser à Madame [D] [Y] veuve [Z] en son nom personnel et ès qualités, ainsi qu'à Monsieur [K] [Z] les intérêts au double du taux légal à compter du 2 septembre 2001et jusqu'à ce que l'arrêt devienne définitif, sur les indemnités allouées par le présent arrêt;

Condamne la société AXA FRANCE IARD à payer au Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages (FGAO), la somme de 15.000€ sur le fondement de l'article L.211-14 du code des assurances;

Dit qu'une copie de la présente décision sera adressée par le greffe au FGAO;

Déboute les parties du surplus de leurs demandes;

Condamne la société AXA FRANCE IARD aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du CPC.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 06/19663
Date de la décision : 23/11/2009

Références :

Cour d'appel de Paris C3, arrêt n°06/19663 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2009-11-23;06.19663 ?
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