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19/11/2009 | FRANCE | N°08/02395

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 7, 19 novembre 2009, 08/02395


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 7



ARRET DU 19 Novembre 2009

(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 08/02395



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 10 Décembre 2007 par le conseil de prud'hommes de PARIS - RG n° 05/09584







APPELANTE



Madame [S] [T]

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Carlos RODRIGUEZ GONZALEZ, avocat au barreau de PAR

IS, toque : D1462







INTIMÉE



ASSOCIATION C.E.S.A.P

[Adresse 4]

[Localité 2]

représentée par Me François ASSEMAT, avocat au barreau de PARIS, toque : P.27







COMPOSITION DE LA COU...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 7

ARRET DU 19 Novembre 2009

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 08/02395

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 10 Décembre 2007 par le conseil de prud'hommes de PARIS - RG n° 05/09584

APPELANTE

Madame [S] [T]

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Carlos RODRIGUEZ GONZALEZ, avocat au barreau de PARIS, toque : D1462

INTIMÉE

ASSOCIATION C.E.S.A.P

[Adresse 4]

[Localité 2]

représentée par Me François ASSEMAT, avocat au barreau de PARIS, toque : P.27

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 21 Octobre 2009, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Bruno BLANC, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Michèle BRONGNIART, Président

Monsieur Thierry PERROT, Conseiller

Monsieur Bruno BLANC, Conseiller

Greffier : Madame Nadine LAVILLE, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

- signé par Madame Michèle BRONGNIART, Président et par Mme Nadine LAVILLE, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le CESAP est une association ayant pour objectif de répondre aux besoins d'enfants, d'adolescents et d'adultes polyhandicapés.

Le CESAP gère 24 établissements et services qui reçoivent des polyhandicapés, assurent des consultations décentralisées et des placements journaliers, ainsi qu'un centre de formation continue, un service de documentation et notamment, en l'espèce, une maison d'accueil spécialisée dite [6], située à [Localité 5].

La convention collective applicable aux relations contractuelles est la convention collective du 15 mars 996 relative au personnel des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées.

Par contrat à durée déterminée, le CESAP a engagé à compter du 28 septembre 2001, Madame [T] en remplacement de Madame [F] en congé sabbatique ; l'engagement initial prévoyait qu'il prendrait fin au retour de la salariée absente, soit le 5 juillet 2002.

Au-delà de la date du 5 juillet 2002 la relation de travail s'est prolongée :

- par avenant du 4 juillet 2002, remplacement de Madame [F] pour la période du 6 au 21 juillet 2002 à temps plein,

- par contrat à durée déterminée du 22 juillet 2002, signé pour un surplus de travail du à l'élaboration d'une situation comptable pour la période du 22 juillet au 26 août 2002, à temps plein,

- par contrat à durée déterminée du 27 août 2002 en remplacement de Madame [F], absente pour maladie, à temps plein,

- par contrat à durée déterminée du 9 septembre 2002, à temps partiel, en raison d'un surplus de travail du à l'élaboration d'une situation comptable pour la période du 9 septembre au 20 octobre 2002,

- par contrat à durée indéterminée du 9 septembre 2002, à temps partiel,

- par avenant du 5 décembre 2002 transformant le temps partiel en temps plein pour la période du 5 décembre 2002 au 4 juillet 2003,

- par contrat à durée indéterminée en date du 13 mars 2003 à temps plein, avec date d'effet fixée au 12 mars 2003.

Par courrier recommandé, avec accusé de réception, en date du 17 décembre 2004 Madame [S] [T] a été convoquée à un entretien préalable en vue d'un licenciement. L'entretien s'est déroulé le 6 janvier 2005.

Par lettre recommandée, avec accusé de réception, en date du 11 janvier 2005, le CESAP a notifié à la salariée de son licenciement pour cause réelle et sérieuse en raison d'une insuffisance professionnelle caractérisée et structurelle.

Le CESAP a dispensé la salariée d'effectuer son préavis lequel a été payé.

La cour statue sur l'appel interjeté le 27 mars 2008 par Madame [S] [T] du jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Paris le 10 décembre 2007, notifié le 27 février 2008, qui, après avoir requalifié son contrat de travail en contrat à durée indéterminée et avoir dit son licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse, a condamné son employeur l'association CESAP à lui payer les sommes suivantes :

* 2820,04 € à titre d'indemnité de requalification avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement,

* 4763,84 € à titre d'heures supplémentaires,

* 476,38 € au titre des congés payés y afférents

avec intérêts au taux légal à compter de la date de réception, par l'employeur, de sa convocation devant le conseil de prud'hommes,

* 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Vu les conclusions en date du 21 octobre 2009, au soutien de ses observations orales, par lesquelles Madame [S] [T] demande à la cour :

' de confirmer le jugement entrepris sauf en ce qu'il l'a déboutée des demandes tendant à voir condamner son employeur à lui payer les sommes suivantes :

* 6'243,34 € au titre du repos compensateur,

* 624,33 € au titre des congés payés y afférents,

* 40'000 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 1200 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Madame [S] [T] sollicite également que les condamnations portent intérêts au taux légal et que l'anatocisme soit ordonné.

Vu les conclusions en date du 21 octobre 2009, au soutien de ses observations orales, par lesquelles le Comité d'études, d'Education et de Soins Auprès des Personnes Polyhandicapés (CESAP) demande à la cour :

' de débouter Madame [T] dans l'ensemble de ses demandes,

' de condamner Madame [T] à lui payer une indemnité de 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

SUR CE :

Sur la demande de requalification du contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée :

Considérant que pour s'opposer à la demande de requalification du contrat en date du 22 août 2002 conclu en remplacement de Madame [F], sans terme précis, l'employeur excipe de l'absence d'intérêt à agir de la salariée, les parties ayant elle-même requalifiée la relation contractuelle en contrat à durée indéterminée ;

Considérant cependant, que le contrat de travail à durée déterminée de remplacement, en date du 27 août 2002, ne comporte pas de terme précis et sans qu'aucune période minimale ne soit prévue contrairement aux dispositions de l'article L 1242-7 du code du travail ; que ce n'est qu'à compter du contrat du 9 septembre 2002 que les parties ont qualifié la relation contractuelle en contrat à durée indéterminée ;

Qu'il s'en suit que le CESAP ne conteste pas le caractère irrégulier de son contrat en date du 27 août 2002 ; que dés lors la salariée est fondée à se prévaloir de la sanction civile prévue à l'article L 1245-2 du code du travail ; qu'il convient donc de confirmer le jugement déféré sur ce chef de demande ;

Sur les heures supplémentaires :

Considérant qu'en application de l'article L 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié et que c'est au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande que le juge forme sa conviction ;

Considérant que la salariée, pour établir l'existence des heures supplémentaires, produit des tableaux qui récapitulent le nombre d'heures supplémentaires ;

Qu'il résulte des propres écritures de l'employeur que celui ci, qui conteste le nombre d'heures supplémentaires, reconnaît cependant que Madame [T] a effectué des heures supplémentaires, puisque certaines apparaissent sur les bulletins de paie non contestés ;

Que par ailleurs le CESAP reconnaît également dans ses écritures qu'à suite du départ de la salariée et du litige les opposant sur des heures supplémentaires de novembre 2003, il a été amené à lui payer certaines heures supplémentaires qu'il a reconnu devoir; sans pour autant s'expliquer sur la façon dont il les a lui-même calculées; qu'en conséquence la réalité d'heures supplémentaires effectuées par la salariée étant acquise aux débats ; que faute pour l'employeur d'établir la réalité des horaires effectivement réalisés par la salariée, il convient d'accueillir la demande en paiement d'heures supplémentaires outre les congés payés et qu'il y lieu de confirmer le jugement déféré sur ce chef de demande ;

Sur le repos compensateur :

Considérant que, en application de l'article L 3121-26 du code du travail, les heures supplémentaires effectuées dans le cadre du contingent conventionnel sont récupérées à 50 % du temps de travail accompli au-delà de 41 heures par semaine et à 100 %, lorsque ces heures supplémentaires vont au-delà du contingent conventionnel ;

Que l'accord de branche du 1er avril 1999, dont il n'est pas contesté l'applicabilité et relatif à la réduction du temps de travail stipule, en son article 9, que le contingent d'heures supplémentaires annuelles est fixé à 110 heures ;

Qu'il résulte des tableaux produits par la salariée, que les heures supplémentaires ont été effectuées au-delà de 41 heures par semaine ;

Que l'employeur ne s'explique pas sur cette demande au-delà de la simple contestation du principe des heures supplémentaires déjà évoquée ;

Que, sur la base des décomptes produits par Madame [T], il est établi que celle-ci est fondée à obtenir 307,10 heures de repos compensateur pour les années 2000 à 2003, soit 6'243,34 € (307,10 heures x 32 heures) ; outre les congés payés ; qu'il convient donc d'infirmer le jugement sur ce chef de demande ;

Sur le licenciement :

Considérant que la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige, lie les parties et le juge qui ne peut examiner d'autres griefs que ceux qu'elle énonce ;

Qu'en l'espèce le licenciement est prononcé pour une cause réelle et sérieuse à savoir une insuffisance professionnelle caractérisée incompatible avec la bonne gestion d'un établissement ;

Considérant cependant que Madame [T] soutient qu'en application de l'article 33 de la convention collective applicable, il ne peut y avoir de licenciement, sauf faute grave, si le salarié n'a pas fait l'objet précédemment d'au moins deux sanctions prises dans le cadre de la procédure légale ;

Considérant que l'employeur soutient, à titre principal, qu'il n'avait pas à respecter la procédure disciplinaire préalable à la sanction et, à titre subsidiaire, que l'article 33 de la convention collective du 15 mars 1966 n'est pas applicable au licenciement pour insuffisance professionnelle dans la mesure où cet article ne trouve application qu'en matière de licenciement disciplinaire pour faute ;

Considérant que l'article 33 de la convention collective du 15 mars 1966 est ainsi rédigé :

« TITRE IV : exécution du contrat de travail. Conditions générales de discipline.

Les mesures disciplinaires applicables aux personnels des établissements ou services s'exercent sous les formes suivantes :

* l'observation,

* l'avertissement,

* la mise à pied avec ou sans salaire pour un maximum de trois jours,

* le licenciement,

L'observation, l'avertissement et la mise à pied dûment motivés par écrit sont prononcés conformément au règlement établi et déposé suivant les dispositions légales.

Toute sanction encourue par un salarié et non suivie d'une autre dans un délai maximal de deux ans sera annulée et il en sera conservé aucune trace.

Sauf en cas de faute grave, il ne pourra y avoir de mesure de licenciement à l'égard d'un salarié si ce dernier n'a pas fait l'objet précédemment d'au moins deux sanctions citées ci-dessus, prise dans le cadre de la procédure légale.

Pour la procédure de licenciement, les dispositions légales s'appliqueront aux établissements quel que soit le nombre de salariés » ;

Considérant que si l'insuffisance professionnelle n'est pas constitutive d'une faute, l'article 33 de la convention collective ci-dessus rappelée défini, sans qu'il soit distingué entre les différentes causes pour lesquelles il peut être prononcé, le licenciement comme une mesure disciplinaire applicable aux personnels des établissements ou services ;

Qu'en l'espèce, antérieurement au licenciement prononcé le 11 janvier 2005, le CESAP a prononcé le 16 janvier 2004 une observation écrite, le 25 juin 2004 une seconde observation, le 2 décembre 2004 un avertissement ;

Que l'article 33 ci-dessus rappelé, prévoit que ce type de sanctions doit avoir été pris dans le cadre de la procédure légale ;

Qu'en effet, l'article L 1332-2 du code du travail impose à l'employeur, lorsqu'il envisage de prendre une sanction, de convoquer le salarié en lui indiquant l'objet de la convocation, sauf si la sanction envisagée est un avertissement ou une sanction de même nature qui n'a pas d'incidence, immédiat ou non, sur la présence du salarié dans l'entreprise ;

Que cependant, la convention collective imposait à l'employeur des règles procédurales plus contraignantes que celles prévues par la loi ; que la violation de la règle de l'entretien préalable, non contestée par l'employeur s'agissant des observations prononcées les 16 janvier 2004 et 25 juin 2004 constitue une violation des garanties accordées conventionnellement à la salariée et que dès lors le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

Considérant, en conséquence, il convient d'infirmer le jugement déféré sur ce chef de demande ;

Considérant que compte tenu de l'effectif du personnel de l'entreprise (plus de 10 salariés), de l'ancienneté (moins de 4 ans) et de l'âge de la salariée (née en août 1950) ainsi que des conséquences matérielles et morales du licenciement à son égard, telles qu'elles résultent des pièces produites et des débats, il lui sera alloué, en application de l'article L.122-14-4 du Code du travail ancien devenu L 1235-3,une somme de 18000 € à titre de dommages-intérêts ;

Considérant qu'en vertu l'article L 122-14-4 alinéa 2 du code du travail ancien (devenu L 1235-4) dont les conditions sont réunies en l'espèce, le remboursement des indemnités de chômage par le CESAP, employeur fautif, est de droit ; que ce remboursement sera ordonné ;

Considérant que les seules conditions apportées par l'article 1154 du Code civil pour que les intérêts échus des capitaux produisent des intérêts sont que la demande en ait été judiciairement formée et qu'il s'agisse d'intérêts dus au moins pour une année entière, qu'en conséquence, la capitalisation des intérêts sera accordée ;

Considérant que l'équité et la situation économique respective des parties justifient qu'il soit fait application de l'article 700 du code de procédure civile dans la mesure énoncée au dispositif ;

PAR CES MOTIFS,

CONFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a :

- requalifié le contrat de travail de Madame [S] [T] en contrat de travail à durée indéterminée,

- condamné l'association CESAP à payer à Madame [S] [T] la somme de 2820,04 €

à titre d'indemnité de requalification avec intérêts de droit à compter du prononcé du jugement,

- condamné l'association CESAP à payer à Madame [S] [T] la somme de 4763,84 €

à titre d'heures supplémentaires, la somme de 476,38 € au titre des congés payés y afférents avec intérêts au taux légal à compter de la date de convocation de l'employeur devant le bureau de jugement, ainsi qu'une indemnité de 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

INFIRME le jugement déféré pour le surplus,

et statuant à nouveau

CONDAMNE l'association CESAP à payer à Madame [S] [T] la somme de 6'243,34 € au titre du repos compensateur, outre la somme de 624,33 € au titre des congés payés y afférents,

DÉCLARE le licenciement de Madame [S] [T] dépourvu de cause réelle et sérieuse,

CONDAMNE l'association CESAP à payer à Madame [S] [T] 18000  € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, avec intérêts au taux légal à compter à compter de la notification du présent arrêt,

ORDONNE la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 du Code Civil,

CONDAMNE l'association CESAP à payer à Madame [S] [T] 1200 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

DÉBOUTE les parties du surplus de ses demandes,

ORDONNE, dans les limites de l'article L 122-14-4 alinéa 2, ancien devenu L 1235-4 du code du travail, le remboursement par l'association CESAP à l'organisme social concerné des indemnités de chômage payées à Madame [S] [T],

CONDAMNE l'association CESAP aux entiers dépens d'appel,

LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 7
Numéro d'arrêt : 08/02395
Date de la décision : 19/11/2009

Références :

Cour d'appel de Paris K7, arrêt n°08/02395 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2009-11-19;08.02395 ?
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