Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 2 - Chambre 1
ARRET DU 20 OCTOBRE 2009
(n° 282, 4 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 08/07651
Décision déférée à la Cour : Jugement du 17 Décembre 2007 -Tribunal de Grande Instance d'EVRY - RG n° 06/09020
APPELANTS
Monsieur [P] [V]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Madame [F] [S] épouse [V]
[Adresse 1]
[Localité 4]
représentés par la SCP MIRA - BETTAN, avoués à la Cour
assistés de Me OLLIVIER, avocat au barreau de PARIS, toque : D 1979
substituant Me PATRIMONIO, avocat au bareau de PARIS
INTIMEE
S.C.P. AULIBE-ISTIN-DEFALQUE prise en la personne de ses représentants légaux
[Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par la SCP ARNAUDY - BAECHLIN, avoués à la Cour
assistée de Me CAZELLES, avocat au barreau de PARIS, toque : P 133
SCP RAFFIN COURBE
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 22 juin 2009, en audience publique, le rapport entendu conformément à l'article 785 du code de procédure civile, devant la Cour composée de :
Monsieur Jean-Paul BETCH, Président
Mme Brigitte HORBETTE, Conseiller
Madame Dominique GUEGUEN, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier, lors des débats : Mme Noëlle KLEIN
ARRET :
- contradictoire
- rendu publiquement
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé, en l'empêchement du président, par Madame Brigitte HORBETTE conseiller ayant délibéré et par Mme Noëlle KLEIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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M. et Mme [V] reprochent à la SCP d'avocats AULIBE-ISTIN-DEFALQUE d'avoir laissé prescrire leur action en responsabilité contre la compagnie d'assurance AXA pour des dommages survenus à leur pavillon, prescription constatée par un jugement du tribunal de grande instance de Créteil du 8 juin 2004 confirmé par arrêt du 13 décembre 2005.
Plus particulièrement, ils exposent que les dégâts soumis à la prescription de l'article L. 114-1 du code des assurances sont survenus en 1992-93, que la SCP a introduit un référé-expertise qui a donné lieu à une ordonnance du 9 septembre 1999 mais intenté l'action au fond le 21 août 2003, que le jugement a considéré la prescription de deux ans acquise le 9 septembre 2001, l'arrêt la reportant au 4 juillet 2002 pour tenir compte d'un dire déposé par l'assureur dans lequel il admettait sa garantie.
Par jugement du 17 décembre 2007, le tribunal de grande instance d'Evry a retenu la faute de la SCP d'avocats et l'a condamnée, au vu du rapport d'expertise et en considération de la perte de chance, à payer à M. et Mme [V] les sommes de 10 546,67 € pour les travaux de reprise, 2 144,10 € de frais d'expertise, 1 000 € de condamnation à des frais irrépétibles prononcée par la cour d'appel et 3 000 € pour leur préjudice moral ainsi que 4 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.
CECI ÉTANT EXPOSÉ, LA COUR,
Vu l'appel de ce jugement par M. et Mme [V] en date du 16 avril 2008,
Vu leurs conclusions déposées le 4 septembre 2008 selon lesquelles ils poursuivent la confirmation du jugement en ce qu'il a retenu la faute de la SCP et l'a condamnée à leur payer 2 144,10 € pour les frais d'expertise et 1 000 € pour les frais irrépétibles liés à la procédure perdue mais son infirmation pour le surplus et sa condamnation à leur payer :
23 738,41 € pour la perte de chance de voir condamner la compagnie AXA à leur payer le montant des travaux de réparation intégrale des désordres, avec intérêts au taux légal à compter du 7 février 2006 et capitalisation annuelle des intérêts,
77 405,76 € pour la perte de chance de voir condamner la compagnie AXA à leur payer le montant des travaux destinés à empêcher la réitération des désordres, avec intérêts au taux légal à compter du 7 février 2006 et capitalisation annuelle des intérêts,
5 000 € pour la perte de chance de voir condamner la compagnie AXA à leur payer des dommages et intérêts pour le préjudice causé par l'absence de versement de toute indemnisation dans les délais de l'article L. 125-1 et suivants du code de l'assurance, avec intérêts au taux légal à compter du 7 février 2006 et capitalisation annuelle des intérêts,
2 144,10 € pour la perte de chance de voir condamner la compagnie AXA à leur payer le montant des travaux d'expertise, avec intérêts au taux légal à compter du 7 février 2006 et capitalisation annuelle des intérêts, (sic)
1 000 € correspondant au montant de la condamnation à des frais irrépétibles, (sic)
l'ensemble des dépens de première instance et d'appel engagés dans la procédure contre la compagnie AXA,
10 000 € en réparation de leur préjudice moral avec intérêts au taux légal à compter du 7 février 2006 et capitalisation annuelle des intérêts, pour le préjudice subi par l'impossibilité d'obtenir, douze ans après, la réparation de leurs préjudices,
10 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,
Vu les conclusions déposées le 7 octobre 2008 par lesquelles la SCP AULIBE-ISTIN-DEFALQUE, ci-après 'l'avocat', formant appel incident, poursuit, à titre principal, la réformation du jugement entrepris, au motif que la preuve n'est pas rapportée d'une faute précise et caractérisée de sa part, ni d'un préjudice né, certain et actuel caractérisant une perte de chance indemnisable, ni d'un lien causal direct et exclusif entre les deux, et la condamnation solidaire de M. et Mme [V] à lui rembourser la somme perçue en exécution du jugement soit 16 690,77 € et, à titre subsidiaire, la confirmation du jugement outre la condamnation de M. et Mme [V] aux entiers dépens de première instance et d'appel et au paiement de la somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
SUR CE,
Considérant qu'il n'est pas contesté ni qu'un délai de deux ans pour introduire l'action au fond découlant du contrat d'assurance a commencé à courir le 9 septembre 1999, date de l'ordonnance de référé qui a désigné l'expert chargé d'étudier les dégâts occasionnés au pavillon de M. et Mme [V] et de chiffrer leur préjudice, et qu'il expirait donc normalement le 9 septembre 2001, ni que l'avocat s'est abstenu d'introduire l'action ;
Considérant que l'avocat conteste cependant le caractère fautif de cette abstention du fait des négociations en cours avec l'assureur, du fait que, par un dire du 4 juillet 2000, il avait reconnu le principe de l'existence de sa garantie, ce qui justifiait la non saisine de la juridiction et qui, nonobstant les décisions intervenues sur ce point, suspendait le cours de la prescription ; qu'il met en avant la mauvaise foi de l'assureur qui a laissé courir les délais en faisant croire à un règlement ;
Mais considérant que le tribunal, auquel ces mêmes arguments ont été avancés, y a répondu de manière complète et dans des termes que la cour reprend à son compte, de sorte que sa décision sera approuvée en ce qu'elle a retenu une faute de l'avocat qui n'a pas effectué d'acte interruptif de la prescription ;
Considérant, dès lors, que, par la faute de leur avocat, M. et Mme [V] ont perdu une chance de faire examiner par le tribunal l'indemnisation de leur préjudice, dont le jugement querellé a opportunément rappelé que son estimation, dans le cadre de la présente procédure, ne pouvait être égale à l'avantage que cette chance leur aurait procuré si elle s'était réalisée ;
Considérant à ce titre que, l'expert désigné n'ayant retenu au titre des désordres indemnisables que la somme de 10 546,67 € pour les travaux de reprise, somme que la compagnie d'assurances AXA avait d'ailleurs admis devoir au titre de sa garantie dans son dire, le tribunal, s'il avait été saisi, n'aurait certainement pas condamné cet assureur au payement d'une somme supérieure, ainsi que le fait justement observer l'avocat, M. et Mme [V] n'ayant, à l'époque, fourni aucune pièce de nature à contredire ce chiffre ; que dans ces conditions, le jugement, qui a retenu ce montant comme base de l'évaluation du préjudice subi en lien avec la faute de l'avocat, ne peut qu'être confirmé ;
Considérant, s'agissant des autres chefs de préjudice, que devant la cour M. et Mme [V] n'apportent aucun élément nouveau ou distinct de ceux sur lesquels les premiers juges ont eu à se prononcer et de nature à modifier leur appréciation sur ce point, la cour la faisant sienne ;
Qu'en revanche, y ajoutant, conformément à la demande, la cour fera produire des intérêts au taux légal à ces sommes à compter du 7 février 2006, date de l'assignation, et accordera le bénéfice de la capitalisation annuelle des intérêts, mais seulement à compter de la demande formulée en appel à ce titre, rien ne démontrant qu'elle l'ait été en première instance ;
Considérant que les circonstances légitiment l'octroi, à M. et Mme [V], d'indemnités procédurales dans la mesure précisée au dispositif ;
PAR CES MOTIFS,
Confirme le jugement en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Dit que les sommes auxquelles la SCP AULIBE-ISTIN-DEFALQUE a été condamnée envers M. et Mme [V] porteront intérêts au taux légal à compter du 7 février 2006 et ordonne leur capitalisation dans les conditions de l'article 1154 du code civil ;
Condamne la SCP AULIBE-ISTIN-DEFALQUE aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile et à payer à M. et Mme [V] la somme de 4 000 € (quatre mille euros) en application de l'article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIER /LE PRÉSIDENT