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24/09/2009 | FRANCE | N°08/09008

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 2, 24 septembre 2009, 08/09008


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 2



ARRET DU 24 Septembre 2009



(n°3, 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 08/09008



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 02 Août 2007 par le Tribunal de Grande Instance de Paris RG n° 03/16156





APPELANT

Monsieur [L] [S]

[Adresse 1]

[Localité 4]

comparant en personne, assisté de la SCP BERNABE - CHARDIN - CHEVILLER, avoué

s à la Cour et de Me Jennifer HOLLEBECQUE, avocat au barreau de LILLE







INTIMÉE

UNION DES CAISSES NATIONALES DE SÉCURITÉ SOCIALE

[Adresse 3]

[Localité 5]

représentée par Me Loui...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 2

ARRET DU 24 Septembre 2009

(n°3, 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 08/09008

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 02 Août 2007 par le Tribunal de Grande Instance de Paris RG n° 03/16156

APPELANT

Monsieur [L] [S]

[Adresse 1]

[Localité 4]

comparant en personne, assisté de la SCP BERNABE - CHARDIN - CHEVILLER, avoués à la Cour et de Me Jennifer HOLLEBECQUE, avocat au barreau de LILLE

INTIMÉE

UNION DES CAISSES NATIONALES DE SÉCURITÉ SOCIALE

[Adresse 3]

[Localité 5]

représentée par Me Louis-Charles HUYGHE, avoué à la Cour,

assistée de Me Gérard BOSSU, avocat au barreau de PARIS, R 295

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 18 Juin 2009, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Catherine TAILLANDIER, Présidente, et Madame Martine CANTAT, Conseillère, chargées d'instruire l'affaire.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Catherine TAILLANDIER, Présidente

Madame Catherine BÉZIO, Conseillère

Madame Martine CANTAT, Conseillère

GREFFIÈRE : Mademoiselle Céline MASBOU, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- prononcé publiquement par Madame Catherine TAILLANDIER, Présidente

- signé par Madame Catherine TAILLANDIER, Présidente et par Mademoiselle Céline MASBOU, Greffière présente lors du prononcé.

LA COUR,

Statuant sur l'appel formé par Monsieur [L] [S] d'un jugement rendu le 2 août 2007 par le tribunal de grande instance de Paris qui a condamné l'UCANSS-UNION DES CAISSES NATIONALES DE SÉCURITÉ SOCIALE :

- à payer à Monsieur [L] [S] les sommes suivantes :

- 4.000 euros à titre de dommages et intérêts pour perte de chance,

- 1.500 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,

- 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- aux dépens, dont distraction au profit des avocats qui l'ont requise conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Vu les dernières conclusions, en date du 14 mai 2009, de Monsieur [L] [S], appelant, qui demande à la Cour d'infirmer le jugement en ce qui concerne le montant des sommes qui lui ont été allouées et de condamner l'UCANSS au paiement des sommes suivantes :

- 462.692 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice financier,

-50.000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,

ces sommes avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation,

- 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- des dépens, dont distraction au profit de la SCP BERNABE CHARDIN CHEVILLER, avoués.

Vu les dernières conclusions, en date du 29 avril 2009, de l'UCANSS, intimée, qui demande à la Cour d'infirmer le jugement, de débouter Monsieur [L] [S] de l'ensemble de ses demandes et de le condamner au paiement des sommes suivantes :

- 3.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- 7.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- des dépens, dont distraction au profit de Maître HUYGHE, avoué.

Vu les observations du Ministère Public.

SUR CE, LA COUR

Considérant qu'il est constant que Monsieur [L] [S] est né le [Date naissance 2] 1952 en Côte d'Ivoire et a acquis la nationalité française ;

Qu'il s'est présenté aux concours organisés, en 1992 et 1993, par l'UCANSS pour l'accès à la formation des inspecteurs de l'URSSAF, mais a échoué aux épreuves orales après avoir passé avec succès les épreuves écrites ;

Qu'il s'est de nouveau présenté au concours organisé en 1995 ; qu'il devait, en premier lieu, faire l'objet d'une présélection opérée par les directeurs des URSSAF ayant des postes à pourvoir, lesquels pouvaient y procéder, soit après un entretien, soit sur dossier ; qu'il a adressé son curriculum vitae à plusieurs URSSAF, afin d'obtenir des rendez-vous à des entretiens ; qu'il a été convoqué par l'URSSAF de [Localité 6], les autres URSSAF l'ayant informé, soit qu'elles n'avaient pas de poste à pourvoir, soit que les opérations de présélection étaient achevées, soit qu'elles présélectionnaient sur dossier ;

Qu'il a assigné l'UCANSS, le 26 août 2003, devant le tribunal de grande instance de Paris lequel, par jugement du 2 août 2007, a retenu, pour évaluer ses préjudices :

- que l'UCANSS avait commis une faute en organisant mal l'épreuve de présélection des candidats, consistant en des entretiens avec les directeurs des URSSAF ayant des postes à pourvoir,

- que le même traitement d'égalité n'avait pas été réservé à tous les candidats pour être admis à concourir et, qu'ainsi, il y avait eu discrimination notamment à l'égard de Monsieur [L] [S],

- que l'UCANSS n'était responsable que d'une perte de chance et ne devait réparation à Monsieur [L] [S] que pour la perte de chance d'avoir des entretiens avec un nombre plus important de directeurs de l'URSSAF, l'issue de ces entretiens étant incertaine ;

Sur les fautes commises dans l'organisation du concours d'inspecteur de l'URSSAF

Considérant que Monsieur [L] [S] a fait appel du jugement sur le fondement de l'article 1382 du code civil ; qu'il soutient que l'UCANSS a commis une faute dans l'organisation du concours d'inspecteur de l'URSSAF, en ne déterminant pas le mode d'organisation de la présélection, en n'informant les candidats de l'épreuve de présélection que postérieurement à leur inscription au concours, en ne définissant pas précisément l'objectif de l'entretien et en ne fixant pas de date limite de présélection ;

Qu'il ajoute que cette faute a entraîné une atteinte au principe d'égalité de traitement entre les candidats, a laissé le recrutement «au bon vouloir de ceux qui avaient en charge la présélection» et a «permis tous les abus et notamment des présélections sur pièces et arbitraires» ;

Qu'il conclut qu'il a ainsi été victime de «comportements discriminatoires» de la part des URSSAF, compte tenu du nom étranger qu'il porte lequel fait apparaître ses origines ethniques, alors qu'il avait toutes les chances de réussir ;

Qu'il demande, en réparation du préjudice qu'il a subi en raison de la perte d'une chance d'obtenir un emploi d'inspecteur de l'URSSAF, la condamnation de l'UCANSS au paiement des sommes de 462.692 euros pour préjudice financier et de 50.000 euros pour préjudice moral ;

Considérant que l'UCANSS répond qu'elle n'a commis aucune faute dans l'organisation du concours et, qu'en tout état de cause, Monsieur [L] [S] ne démontre pas l'existence de la discrimination qu'il allègue ; qu'elle ajoute que celui-ci, bien qu'ayant été convoqué par l'URSSAF de [Localité 6], le 13 juillet 1995, ne rapporte pas la preuve, ni d'une participation au dit entretien, ni des suites qui lui auraient été données dans l'hypothèse où il s'y serait rendu ;

Sur la discrimination fondée sur les origines

Considérant qu'aux termes des dispositions des articles :

- 1er de la loi du 27 mai 2008, portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, «constitue une discrimination directe la situation dans laquelle, sur le fondement de son appartenance ou de sa non appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie ou une race' une personne est traitée de manière moins favorable qu'une autre ne l'est, ne l'a été ou ne l'aura été dans une situation comparable» ;

-1131-1 du code du travail «Aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement' en raison de son origine' de son appartenance ou de sa non appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race' de son nom de famille' » ;

Qu'il se déduit de ces dispositions qu'est interdite et susceptible d'être civilement sanctionnée, la discrimination directe consistant à écarter une personne d'une procédure de recrutement en considération de l'un des éléments sus-mentionnés, sans qu'il y ait à démontrer l'existence d'une faute distincte de l'acte discriminatoire lui-même ;

Considérant, qu'en l'espèce, Monsieur [L] [S] n'apporte aux débats aucun document établissant le moindre élément de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte, répondant aux définitions légales sus-rappelées et imputable à l'UCANSS, étant observé que les seuls faits qu'il allègue auraient été commis par les directeurs des URSSAF lors de la présélection qui ne relevait que de leur compétence exclusive et que les URSSAF ne sont pas dans la cause ;

Sur la faute dans l'organisation des épreuves du concours

Considérant que les dispositions de l'article 1382 du code civil prévoient que «tout fait quelconque qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer» ;

Considérant que l'UCANSS verse aux débats la lettre circulaire, du 9 mai 1995, relative à l'organisation du concours 1995 d'accès à la formation des inspecteurs du recouvrement de l'URSSAF qu'elle a envoyée aux directeurs d'organismes et aux médecins-conseils régionaux ; que ce document, qui mentionne toute l'organisation du concours, précise son ouverture aux candidats extérieurs à l'institution à raison de 30% de l'effectif, ainsi que, pour ceux-ci, une opération de présélection devant être opérée par les directeurs d'URSSAF concernés, sur la base de 3 ou 4 candidats pour un poste vacant ; que la date limite pour le dépôt des candidatures était fixée au 30 juin 1995 ;

Considérant que le fait de prévoir des opérations de présélection pour les candidats externes à la charge exclusive des directeurs des URSSAF, en les laissant libre d'organiser, en fonction de leurs disponibilités et de leurs contraintes, une sélection, soit sur dossier, soit après un entretien, ne peut en aucun cas être considéré comme une faute dans l'organisation du concours, ces directeurs ayant nécessairement les compétences requises, dans la mesure où ils ont une grande connaissance du métier d'inspecteur de recouvrement de l'URSSAF et où ils sont les seuls à même de vérifier l'adéquation des candidatures avec le profil précis des postes qu'ils ont à pourvoir ;

Considérant qu'il résulte des autres pièces versées aux débats que Monsieur [L] [S] a, conformément aux modalités d'organisation du concours préalablement fixées par la lettre circulaire sus-mentionnée, et comme tous les candidats externes, pu disposer en temps utile d'un dossier de candidature précisant les modalités du concours, dont celles de la présélection, et a pu adresser des demandes de convocation à des entretiens de présélection aux URSSAF qu'il avait sélectionnées ; qu'il a, notamment, reçu une convocation, en date du 5 juillet 1995, pour passer un entretien le 13 juillet 1995 à l'URSSAF de [Localité 6], l'informant que l'entretien serait conduit par le responsable du service contrôle, qu'il devait se munir de son curriculum vitae ainsi que de toutes les pièces lui paraissant nécessaires de présenter et qu'il pouvait demander une autre date de rendez-vous avant le 25 juillet, si celle du 13 juillet ne lui convenait pas ;

Considérant, qu'ainsi, Monsieur [L] [S] n'apporte aux débats aucun élément démontrant une quelconque faute dans l'organisation du concours ;

* * *

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, qu'il y a lieu de débouter Monsieur [L] [S] de l'ensemble de ses demandes de dommages et intérêts pour préjudice financier et pour préjudice moral, tant sur le fondement d'une discrimination, que sur celui d'une faute, et d'infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Sur les frais irrépétibles

Considérant que l'équité commande que Monsieur [L] [S] ne soit pas condamné sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

INFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions,

STATUANT à nouveau,

REJETTE toutes les demandes,

DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de procédure civile,

CONDAMNE Monsieur [L] [S] aux dépens qui seront recouvrés par Maître HUYGHE, avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 08/09008
Date de la décision : 24/09/2009

Références :

Cour d'appel de Paris K2, arrêt n°08/09008 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2009-09-24;08.09008 ?
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