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27/11/2008 | FRANCE | N°07/767

France | France, Cour d'appel de Paris, Ct0139, 27 novembre 2008, 07/767


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

22ème Chambre C

ARRET DU 27 novembre 2008

(no , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 07/00767 (E.G)

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 15 décembre 2006 par le conseil de prud'hommes de Paris (5o Ch) - section encadrement - RG no 05/01824

APPELANT

Monsieur Christian X...

...

75008 PARIS

comparant en personne, assisté de Me Thomas Y..., avocat au barreau de CHERBOURG

INTIMEE

S.A. B

ANQUE DE NEUFLIZE

3 avenue Hoche

75008 PARIS

représentée par Me Nicole TIBERI, avocat au barreau de PARIS, toque : A 369

COMPOSITION DE LA COU...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

22ème Chambre C

ARRET DU 27 novembre 2008

(no , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 07/00767 (E.G)

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 15 décembre 2006 par le conseil de prud'hommes de Paris (5o Ch) - section encadrement - RG no 05/01824

APPELANT

Monsieur Christian X...

...

75008 PARIS

comparant en personne, assisté de Me Thomas Y..., avocat au barreau de CHERBOURG

INTIMEE

S.A. BANQUE DE NEUFLIZE

3 avenue Hoche

75008 PARIS

représentée par Me Nicole TIBERI, avocat au barreau de PARIS, toque : A 369

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 09 octobre 2008, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Jean-Michel DEPOMMIER, Président

Madame Françoise CHANDELON, Conseiller

Madame Evelyne GIL, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier : Mme Francine ROBIN, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par Monsieur Jean-Michel DEPOMMIER, Président

- signé par Monsieur Jean-Michel DEPOMMIER, président et par Mme Francine ROBIN, greffier présent lors du prononcé.

Vu l'appel régulièrement formé par Christian X... contre un jugement du Conseil de prud'hommes de PARIS en date du 15 décembre 2006 ayant statué sur le litige qui l'oppose à son ancien employeur, la BANQUE de NEUFLIZE SA ;

Vu le jugement déféré ayant :

- débouté Christian X... de ses demandes,

- rejeté toutes autres demandes plus amples et contraires,

- laissé les dépens à la charge des parties qui les ont engagés ;

Vu les conclusions visées par le greffier et développées oralement à l'audience aux termes desquelles :

Christian X..., appelant, poursuit :

- l'infirmation du jugement entrepris,

- la condamnation de la société de NEUFLIZE OBC à lui verser les sommes de :

150 000 € sur le fondement de l'article L. 1226-14-4 du Code du travail,

5 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile en sus des entiers dépens.

La Banque NEUFLIZE OBP, intimée, conclut :

- à la confirmation du jugement déféré,

- à la condamnation de Christian X... à lui verser la somme de 5 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

FAITS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Suivant lettre valant contrat de travail en date du 26 février 1993, la Banque de Neuflize, Schlumberger, Mallet a engagé Christian X... en qualité de Cadre classe VII avec le titre de Fondé de Pouvoirs, les relations étant régies par la convention collective nationale de travail du personnel des banques.

Le salarié a été promu sous-directeur à compter du 1er avril 1995. Il exerçait les fonctions de "gérant de fortune Senior" dans le cadre de la banque de gestion privée et de gestion d'actifs.

Par lettre du 12 février 2003, la Banque de Neuflize, Schlumberger, Mallet, Demachy NSMD groupe ABN-AMRO lui a précisé que selon la nomenclature d'emplois définie par la convention collective, il était rattaché au métier repère de conseiller en patrimoine et à l'emploi type de banquier privé dont l'activité consiste à conseiller la clientèle sur le placement de sa fortune et développer son portefeuille de clients.

Christian X... était en effet chargé d'assurer la gestion d'un fonds de commerce et de développer ce fonds au moyen notamment d'ouvertures de comptes, d'apports de capitaux et de production d'assurance-vie. Il devait assurer également une prestation de conseil en matière de gestion de patrimoine (gestion financière) et entretenir l'image de la banque auprès des clients " hauts de gamme".

En son dernier état, son salaire mensuel s'élevait à 5 714,57 € dans le cadre d'un forfait annuel de 216 jours.

Le 30 novembre 2004, la Banque de NEUFLIZE l'a convoqué à se présenter le 8 décembre 2004 à un entretien préalable à une mesure de licenciement pour motif non disciplinaire en application des dispositions de l'article 26 de la convention collective de la banque.

Le 16 décembre 2004, elle lui a notifié son licenciement dans les termes suivants :

"... nous nous voyons contraints de vous notifier par la présente votre licenciement pour les motifs ci-après exposés, lequel prendra effet à compter de la première présentation de ce courrier.

Nous considérons en effet que l'insuffisance professionnelle grave dont vous faites preuve ne permet pas la poursuite de votre contrat de travail nous contraignant ainsi à pourvoir à votre remplacement définitif.

Ainsi, s'agissant de vos objectifs quantitatifs :

Depuis 2002, alors que vos objectifs en assurance-vie sont inchangés à hauteur de 5 millions d'Euros, nous relevons un manque évident d'investissement de votre part, lequel a des répercussions extrêmement graves sur votre chiffre d'affaires d'Assurance Vie très insuffisant par rapport auxdits objectifs quantitatifs.

Un constat objectif fait malheureusement ressortir les chiffres suivants en baisse constante :

ASSURANCE VIE

Objectifs (M€) Réalisés (M€)

2002 5 1.7

2003 5 1.2

2004 5 1 (à fin octobre)

OUVERTURES DE COMPTES

Objectifs (nombre de comptes)

2004 19 2 (à fin octobre)

COLLECTE NETTE

(Objectifs (M€)

2004 2 -1(à fin octobre)

Cet état de fait démontre qu'en termes d'actifs vous perdez plus de clients que vous n'ouvrez de nouveaux comptes.

Nous avions accepté d'adopter dans un premier temps à votre égard une attitude sans a priori vous laissant le bénéfice du doute malgré vos mauvais résultats lesquels avaient néanmoins fait l'objet de remarques verbales, escomptant que vous les mettriez à profit dans votre propre intérêt, indépendamment de celui de notre Entreprise.

Force est de constater que tel n'a pas été le cas puisque votre insuffisance perdure nous obligeant à en tirer désormais les conséquences qui s'imposent.

Ainsi, votre PNB est en régression permanente depuis 2000 :

Année PNB (M€)

2000 1.4

2001 1

2002 0.8

2003 0.9

De la même façon, compte tenu de votre faible niveau d'implication, dans le cadre de l'opération Neuflize Patrimoine, votre manager a été contraint de vous donner un objectif de 5 % de l'objectif global alors que les banquiers privés juniors ont eu un objectif de10 %.

De ce fait, nous ne pouvons que considérer que vous n'avez pas rempli vos responsabilités telles que prévues contractuellement, à savoir notamment :

Maintien et développement du portefeuille assurance-vie Maintien et développement des ouvertures de comptes

Maintien et développement des collectes

Parallèlement, s'agissant de vos objectifs

qualitatifs:

En termes d'initiative, d'intégration et d'exigence d'une excellente contribution de votre part avec vos collègues de travail et les autres services pour concourir à la bonne marche au développement et aux innovations de notre Société dans votre Secteur d'activité, vous ne vous êtes pas montré non plus en mesure, malgré votre statut de Cadre hors classe et votre rang de sous-Directeur de vous positionner positivement.

Il vous est ainsi reproché une attitude totalement passive aux réunions alors que vous étiez supposé disposer d'une force de proposition.

De la même manière, non seulement vous n'avez pu servir aucune exemplarité vis à vis des juniors mais plus encore vous avez adopté sans la moindre justification un comportement

critique systématique de la gestion financière, de la stratégie commerciale, et plus largement de

celle de notre Banque.

Sans aucune faculté de proposition, vous avez préféré une position défensive et de dénigrement

des actions entreprises tant au niveau de notre Banque que du Groupe de Banquiers privés auquel vous appartenez.

Y compris lors des campagnes commerciales, il a été relevé une absence totale d'implication de votre part vous contentant de réaliser le minimum et encore après moulte relance, comme à titre d'exemple, en Juin 2004, lors de la campagne sur le produit Neuflize Patrimoine.

Vous avez persisté à travailler en autonomie totale en refusant non seulement tout lien de subordination notamment en ne rendant jamais compte de votre activité mais également toute intégration dans nos équipes.

A titre d'exemple, dans les actions menées auprès des prospects, vous n'avez jamais fait appel aux Départements supports de notre Banque (tel l'Ingénierie patrimoniale par exemple). Vis à vis des prescripteurs, nous ne disposons d'aucune justification de dossiers en cours (pas de présentation, pas de convention passée).

Cet état de fait est particulièrement révélateur, de façon objective, d'une insuffisance de résultats qui procède d'une insuffisance professionnelle dans le cadre de votre activité commerciale.

Nous considérons que celle-ci est due à votre carence tenant à votre incapacité d'atteindre vos objectifs tant quantitatifs que qualitatifs lesquels correspondent à des normes sérieuses et raisonnables et cela se traduit par des éléments quantifiables.

Dans le dernier état, invité à la réunion de présentation du nouveau système d'objectifs et de rémunération variable (le 24 novembre dernier), vous avez unilatéralement décidé de ne pas y assister sans d'ailleurs vous faire excuser. De la même manière, invité par la DRH et votre Direction à participer à une formation commerciale résidentielle (Saint-Germain-en-Laye, les 1 et 2 Décembre) vous ne vous êtes pas présenté et ce sans prévenir ni la Banque, ni l'animateur ce qui a entraîné des frais de non résiliation en temps et en heure de la logistique d'hébergement (repas, chambre, petit-déjeuner).

Nous ne pouvons tolérer, dans le contexte ci-dessus évoqué, une telle attitude incompatible avec le maintien de votre contrat de travail.

Nous relevons d'ailleurs que .lors de votre entretien préalable, vous n'avez pas contesté d'ailleurs cette insuffisance professionnelle qualitative grave notamment en termes d'intégration.

Pour l'ensemble de ces raisons, et dans la mesure où vous n'avez jamais honoré, de façon importante et persistante, les obligations afférentes à votre contrat de travail, nous nous voyons contraints d'en tirer les conséquences en vous notifiant par la présente votre licenciement.

Votre préavis, d'une durée de trois mois, dont vous êtes dispensé, débutera à la date de présentation de la présente lettre de licenciement."

Christian X... soutient :

- que la convention collective impose à l'employeur qui envisage le licenciement non disciplinaire d'un salarié fondé sur un motif objectif et établi d'insuffisance professionnelle de rechercher, préalablement à l'engagement de la procédure, toute solution et notamment le moyen de lui confier un autre poste,

- que cette recherche n'a pas été effectuée avant son licenciement,

- que ce manquement est exclusif de toute cause réelle et sérieuse de licenciement,

- qu'il n'existait aucun objectif contractuel, les chiffres dont se prévaut l'employeur n'étant que des indicateurs de gestion mentionnés lors des réunions périodiques du groupe et du département concernés,

- que les données chiffrées comparatives mentionnées dans la lettre de licenciement sont limitées de façon spécieuse par l'employeur à de courtes périodes choisies par celui-ci,

- qu'ainsi, ses derniers résultats n'ont pas été mentionnés,

- que le document récapitulatif retraçant les résultats de 2003 à 2004, poste par poste, des membres du groupe Y2 auquel il appartenait montre que ses résultats étaient loin d'être inférieurs à ceux de ses collègues,

- que la diminution du PNB de 2000 à 2003 a affecté l'ensemble des activités bancaires et celles de la Banque de NEUFLIZE en particulier puisqu'elle a dû mettre en oeuvre à la fin de l'année 2003 un plan de sauvegarde de l'emploi ayant porté sur environ 20 % des effectifs,

- que cependant, au cours des années 2003 et 2004, il a réalisé une progression du PNB de 12 % nettement supérieure à la moyenne réalisée par le groupe,

- que l'insuffisance professionnelle reprochée n'est donc pas justifiée,

- que du fait de son licenciement sans cause réelle ni sérieuse, il a subi un préjudice très important puisqu'il est resté deux années sans emploi avant de commencer une activité d'administrateur de biens qui n'est pas encore bénéficiaire.

La Banque NEUFLIZE OBC fait valoir :

- que l'article 26 de la convention collective de la banque ne trouve pas application au cas d'espèce, compte tenu du poste de niveau élevé et à fortes responsabilités occupé par Christian X...,

- que celui-ci n'ignorait pas les objectifs qui lui étaient fixés comme ils étaient fixés à tous les collaborateurs exerçant une fonction identique,

- que ses résultats en ce qui concerne l'assurance-vie, les ouvertures de comptes et la collecte nette sont insuffisants et en constante diminution ainsi que le montrent les tableaux figurant dans la lettre de licenciement,

- que depuis 2002, l'appelant a manifesté un manque de motivation,

- que la conjoncture économique défavorable qu'il invoque n'a pas empêché ses collègues d'obtenir de meilleurs résultats,

- que par ailleurs, son comportement était incompatible avec sa fonction et le niveau de ses responsabilités,

- qu'il a adopté en effet une désinvolture professionnelle et un comportement individualiste,

- que son licenciement est bien fondé sur son insuffisance professionnelle,

- qu'en tout état de cause, il ne fournit aucun document justifiant le préjudice allégué.

SUR CE

- Sur le licenciement et ses conséquences

Aux termes de la lettre du 16 décembre 2004, le licenciement de Christian X... est motivé par son insuffisance professionnelle caractérisée par le non-respect des objectifs fixés.

Il entre dans le cadre de l'article 26 de la convention collective nationale de la banque mentionné dans la lettre de convocation à l'entretien préalable. Cet article énonce notamment sous le chapitre V de la convention intitulé "Rupture du contrat de travail. Licenciement pour motif non disciplinaire" :

"Avant d'engager la procédure de licenciement, l'employeur doit avoir considéré toutes solutions envisageables, notamment recherché le moyen de confier au salarié un autre poste lorsque l'insuffisance résulte d'une mauvaise adaptation de l'intéressé à ses fonctions.

Le licenciement pour motif non disciplinaire est fondé sur un motif objectif et établi d'insuffisance professionnelle."

En l'espèce, la banque de NEUFLIZE OBC ne justifie, ni même n'allègue avoir recherché une " solution envisageable" avant d'engager la procédure de licenciement de Christian X....

L'obligation conventionnelle faite à l'employeur de rechercher préalablement au licenciement toutes solutions envisageables ne comporte pas d'exception et n'exclut pas la situation du salarié occupant un poste hors classe.

Dès lors, le manquement à cette obligation rend le licenciement de Christian X... dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Sur la demande d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

Compte tenu de l'ancienneté de Christian X..., de son âge et de la période de privation d'emploi qu'il justifie avoir subie du 24 mars 2005 au 31 août 2006, la réparation de son préjudice sera fixée à 60 000 €.

- Sur les demandes d'indemnité au titre de l'article 700 du Code de procédure civile

Au vu des circonstances de la cause, il paraît inéquitable de laisser à la charge de Christian X... les frais non taxables qu'il a exposés à l'occasion de la présente procédure prud'homale. Il convient de lui accorder à ce titre une indemnité de 2000 € et de rejeter la demande de la banque de NEUFLIZE OBC formulée sur le même fondement.

- Sur l'application d'office de l'article L. 1235-4 du Code du travail en faveur de l'ASSEDIC

Christian X... ayant plus de deux années d'ancienneté et la Banque de NEUFLIZE OBC occupant habituellement au moins onze salarié, il convient d'ordonner le remboursement par l'employeur fautif des indemnités de chômage payées au salarié licencié du jour de son licenciement dans la limite de six mois en application de l'article L. 1235-4 du Code du travail.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Infirme le jugement déféré ;

Condamne la Banque de NEUFLIZE OBC à payer à Christian X... les sommes de :

60 000 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse,

2 000 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

La condamne à rembourser à l'ASSEDIC les indemnités de chômage payées au salarié licencié à compter du jour de son licenciement et dans la limite de six mois ;

La condamne aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER : LE PRÉSIDENT :


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Ct0139
Numéro d'arrêt : 07/767
Date de la décision : 27/11/2008

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Paris, 15 décembre 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2008-11-27;07.767 ?
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