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22/10/2008 | FRANCE | N°07/18144

France | France, Cour d'appel de Paris, Ct0202, 22 octobre 2008, 07/18144


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

2ème Chambre - Section A

ARRÊT DU 22 OCTOBRE 2008

(no , 10 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 07/18144

Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 Septembre 2007 - Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG no 04/41655

APPELANTE

Madame Mechtild X...

née le 3 mars 1949 à LÜDINGHAUSEN (Allemagne)

de nationalité allemande

sans profession

demeurant ...

reprÃ

©sentée par Maître Gilbert THEVENIER, avoué à la Cour

assistée de Maître Jean Y..., avocat au barreau de VERSAILLES

INTIMÉ

Monsieur Wolfgang Z...

né...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

2ème Chambre - Section A

ARRÊT DU 22 OCTOBRE 2008

(no , 10 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 07/18144

Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 Septembre 2007 - Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG no 04/41655

APPELANTE

Madame Mechtild X...

née le 3 mars 1949 à LÜDINGHAUSEN (Allemagne)

de nationalité allemande

sans profession

demeurant ...

représentée par Maître Gilbert THEVENIER, avoué à la Cour

assistée de Maître Jean Y..., avocat au barreau de VERSAILLES

INTIMÉ

Monsieur Wolfgang Z...

né le 28 novembre 1941 à MUNICH

retraité

demeurant ... ci-devant

actuellement ...

représenté par la SCP MENARD - SCELLE-MILLET, avoués à la Cour

assisté de Maître Dominique A..., avocat au barreau de PARIS, toque : D 1233

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 16 septembre 2008, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Catherine DESLAUGIERS-WLACHE, présidente

Madame Isabelle LACABARATS, conseillère

Madame Dominique REYGNER, conseillère

qui en ont délibéré

Greffier :

lors des débats : Madame Marie-France B...

lors du prononcé de l'arrêt : Madame Christiane BOUDET

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Catherine DESLAUGIERS-WLACHE, présidente et par Madame Christiane BOUDET, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Mechtild X... et Wolfgang Z... se sont mariés le 10 avril 1980 à Paris 16 ème, sans contrat préalable. Deux enfants sont issus de leur union : Aïga née le 30 mai 1980 et Matthias né le 19 mai 1984.

Sur une assignation du 4 novembre 1996, leur divorce a été prononcé par jugement du tribunal de grande instance de Paris du 15 mai 2000 qui a ordonné la liquidation et le partage de leurs intérêts patrimoniaux.

Ce jugement a été confirmé par arrêt de la cour d'appel de Paris du 24 octobre 2001 et le pourvoi formé par Madame X... a été rejeté par arrêt de la cour de cassation du 28 octobre 2003.

Maître Frédéric François D..., notaire associé de la SCP Frédéric François D..., Dominique Charles D... et Stéphane ADLER, déléguée pour procéder aux opérations de liquidation et de partage de la communauté, a dressé le 6 juillet 2004 un procès-verbal de difficultés, Madame X... ayant fait défaut.

Les parties ont comparu le 3 novembre suivant devant le juge commissaire qui, en l'absence de conciliation, les a renvoyées à la mise en état.

La cour est saisie de l'appel du jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris le 13 septembre 2007, rectifié par jugement du 11 octobre sur les modalités de prise en charge des frais d'expertise, qui a, en substance :

- écarté les conclusions signifiées et les pièces produites par Madame X... le 20 mars 2007 comme tardives,

- débouté Madame X... de sa demande d'attribution préférentielle,

- débouté Monsieur Z... de sa demande de licitation de l'immeuble sis ... 16 ème,

- fixé à 1 960 euros par mois l'indemnité d'occupation dont Madame X... est redevable envers l'indivision du 1er septembre 1997 jusqu'au partage ou jusqu'à la libération des lieux,

- dit que Monsieur Z... est créancier de Madame X... d'une indemnité d'occupation pour la période du 1er septembre 1997 au 30 août 2007 de 117 600 euros,

- avant dire droit sur les autres demandes, ordonné une expertise et commis pour y procéder Madame BEDAUX-LOON E... avec mission de

* rechercher la consistance du patrimoine commun des époux

* donner tous éléments d'appréciation, permettant de chiffrer d'éventuelles récompenses dues à la communauté ou par celle-ci

* visiter, décrire et estimer l'appartement sis à Paris 16 ème, ..., et ses dépendances

* dresser un inventaire des biens mobiliers et objets meublants dépendant de la communauté après en avoir estimé la valeur

* procéder à l'établissement des comptes entre les parties,

* proposer un projet de partage,

- réservé les dépens.

Aux termes de ses dernières conclusions du 1er septembre 2008 Madame X..., appelante, demande à la cour de :

- réformer le jugement du 13 septembre 2007 excepté en ce qu'il a débouté Monsieur Z... de sa demande de licitation et le jugement rectificatif du 11 octobre 2007,

- débouter Monsieur Z... de sa demande visant la licitation de l'immeuble préalablement aux opérations de partage,

- débouter Monsieur Z... de sa demande tendant au paiement de la somme de 540 624 euros à titre d'indemnité d'occupation,

- le débouter de sa demande tendant au renvoi de l'affaire devant la juridiction de première instance,

- prendre acte de ce qu'elle demande l'attribution préférentielle et, le cas échéant, l'attribution en pleine propriété de l'appartement sis au ... 16 ème sur le fondement des articles 1476 et 832 du code civil, moyennant paiement d'une soulte s'il y a lieu,

- infirmer le jugement fixant l'indemnité d'occupation pour la période du 1er septembre 1997 au 31 août 2007 à 117 600 euros,

- annuler le jugement écartant les conclusions signifiées et pièces produites par elle le 20 mars 2007 comme tardives,

- annuler le jugement ordonnant une expertise et juger en conséquence sur pièces,

En conséquence

- ordonner qu'il soit procédé aux opérations de comptes, liquidation, partage de la communauté et l'indivision ayant existé ou existant entre les parties, avec les conséquences et selon les modalités d'usage,

D'ores et déjà

- ordonner la reprise de son mobilier propre à l'exception d'un secrétaire anglais,

- dire que l'actif de communauté se compose

* d'un appartement situé à Paris 16 ème, ..., d'une valeur estimée à 1 094 000 euros,

* du solde de son compte bancaire No 023.02.0000009959143 à la BNP au 4 novembre 1996 de 23 euros

* du solde créditeur du compte à la WEST-LB Agence de Paris, ..., No 476.919 ouvert au nom de Monsieur Z..., arrêté au 4 novembre 1996 à 5 841,40 euros

* d'une assurance-vie "COSMOS-Assurance" payée par l'employeur de Monsieur Z... soit 259 163 euros

* de produits d'épargne, comptes courants d'associés en parts de sociétés ou/et biens immobiliers, dividendes pour une valeur de 100 000 euros, estimés au minima

* d'une indemnité payée par l'employeur de Monsieur Z..., arrêtée au 4 novembre 1996, d'une valeur de 195 008 euros

* d'une indemnité payée par les caisses suivantes - CNAV, MMA, INIRS, SIRICA - arrêtée au 4 novembre 1996 d'une valeur de 44 105 euros,

- constater que l'actif de la communauté s'élève à 1 698 220 euros,

- constater que le passif de la communauté s'élève à 39 813,13 euros,

- constater qu'elle a droit à percevoir la somme de 284 440 euros au titre de paiement anticipé sur la valeur de l'appartement de 1 094 000 euros,

- dire et juger que Monsieur Z... doit récompense à la communauté de la somme de 1 158 098 euros qui se compose de son recel général à hauteur de 1 116 937 euros et de son recel en forme de dons à Madame F... pour 41 161 euros,

- dire et juger que Monsieur Z... lui doit personnellement récompense pour les sommes de 40 903 euros (Bureau Mazarin) et 362 708 euros (charges réglées),

- dire et juger que l'indivision post communautaire est débitrice de Monsieur Z... de 11 208 euros et d'elle pour 62 997 euros,

- fixer l'indemnité d'occupation mensuelle à 980 euros à partir du 6 novembre 2003, déduction faite de 490 euros mensuels à prendre en considération pour l'occupation du fils Matthias dans l'appartement du ... 16 ème, pour la période du 6 novembre 2003 au 31 août 2007, pour un montant total de 22 540 euros,

- dire et juger que la demande d'indemnité d'occupation est prescrite au-delà des 5 années précédant ladite demande en application de l'article 815-10 2 ème alinéa du code civil,

- fixer cette indemnité d'occupation mensuelle jusqu'au jour de l'attribution en pleine propriété à son profit,

- condamner Monsieur Z... à lui verser la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Dans ses dernières conclusions du 4 septembre 2008 Monsieur Z..., intimé et appelant incident, prie la cour de :

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté Madame X... de sa demande d'attribution préférentielle et en ce qu'il a fixé une indemnité d'occupation à la charge de Madame X... pour la période du 1er septembre 1997 jusqu'au partage ou la libération des lieux,

- l'infirmer sur le montant de l'indemnité d'occupation et fixer le montant de l'indemnité due par Madame X... du 1er septembre 1997 au 31 août 2008 à la somme de 540 624 euros,

- dire qu'il est créancier de Madame X... pour la moitié de cette somme soit 270 312 euros,

- dire et juger que l'indemnité d'occupation sera due jusqu'à la libération des lieux sur la base d'une valeur 2008 de 4 547 euros par mois, indexée sur la base de 2% l'an,

Pour le surplus

- débouter Madame X... de sa demande visant à ce que soit prononcée l'annulation des dispositions du jugement ordonnant une expertise,

- renvoyer l'affaire devant la juridiction de première instance,

Très subsidiairement, et pour le cas où la cour entendrait évoquer

- constater que les opérations de compte, liquidation et partage ont été ordonnées par le jugement du 15 mai 2000,

- constater que la SCP D..., D... et ADLER, notaires à Paris, a été déléguée par Monsieur le président de la Chambre Interdépartementale des notaires à l'effet d'y procéder,

- débouter en conséquence Madame X... de sa demande sur ce point,

Préalablement aux opérations de partage

- ordonner la vente sur licitation à la barre du tribunal des biens immobiliers situés à Paris 16 ème, ..., sur telle mise à prix que le tribunal ordonnera,

- dire et juger que l'appartement et ses dépendances devront être vendus libres de toute location ou occupation,

- en conséquence, dire que Madame X... devra avoir quitté les lieux trois mois avant la date prévue pour l'adjudication et à défaut, ordonner son expulsion avec les conséquences de droit,

D'ores et déjà

- déclarer Madame X... irrecevable et en tout cas mal fondée en ses demandes au titre des reprises en nature ou en numéraire, l'en débouter,

- le déclarer bien fondé à exercer la reprise en nature d'un secrétaire anglais et d'une table ronde en acajou lui appartenant en propre,

- déclarer Madame X... irrecevable et en tout cas mal fondée en ses demandes au titre des récompenses dues à la communauté ou à elle-même, l'en débouter,

- dire que l'actif de communauté se compose

* d'un appartement situé à Paris 16 ème,1 rue de l'Alboni, d'une valeur de 1 290 000 euros

* du solde du compte bancaire No 023.02.0000009959143 de Madame X... à la BNP arrêté au 4 novembre 1996, date de l'assignation, pour mémoire

* du solde du compte bancaire No 094.99.655.001 de Madame X... au CREDIT AGRICOLE arrêté au 4 novembre 1996, pour mémoire,

* du solde créditeur du compte au WEST-LB Agence de Paris,15 avenue de Friedland, No 476.919 ouvert à son nom arrêté au 4 novembre 1996 à 5 841,40 euros

* du mobilier garnissant le domicile ... 16 ème, assuré à la date du 9 mai 1996 pour une somme de 283 207,59 euros

* d'une action "PARTENAIRES LIVRES" d'une valeur de 6 euros,

- constater que l'actif de la communauté s'élève, sauf mémoire, à 1 579 054,99 euros,

- constater que le passif commun s'élève à la somme de 376 977,22 euros,

- dire et juger qu'il a réglé pour le compte de l'indivision post-communautaire la somme de 567 461,26 euros dont la moitié doit être supportée par Madame X..., soit 283 730,63 euros,

- dire et juger que Madame X... a réglé pour le compte de l'indivision post-communautaire la somme de 42 760,95 euros dont il doit supporter la moitié soit 21 380,48 euros,

- dire en conséquence que Madame X... lui doit au titre du compte d'administration la somme de 262 350,15 euros,

- fixer l'indemnité d'occupation due par Madame X... à la communauté et à l'indivision post-communautaire pour la période du 1er septembre 1997 au 31 août 2008 à la somme de 540 624 euros,

- dire et juger qu'il est créancier de Madame X... au 31 août 2008 de la somme de 292 369,02 euros pour les sommes qu'il a réglées pour son compte et au titre de l'indemnité d'occupation,

- dire et juger que l'indemnité d'occupation sera due jusqu'à la libération des lieux, sur la base d'une valeur 2008 de 4 547 euros par mois, indexée sur la base de 2% l'an,

- débouter Madame X... de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- dire que les dépens seront employés en frais privilégiés de comptes, liquidation et partage.

Ces écritures sont expressément visées pour complet exposé des faits ainsi que des prétentions et moyens des parties.

SUR CE, LA COUR,

Sur la demande d'attribution préférentielle

Considérant que les époux ont acquis le 15 février 1983 un appartement avec dépendances dans un immeuble sis ... 16 ème, où ils ont établi le domicile conjugal ;

Que Madame X... demande l'attribution préférentielle de ce bien, soutenant qu'elle doit être considérée comme remplissant la condition d'occupation requise par l'article 832 du code civil dés lors que c'est pour se soustraire aux violences physiques et psychiques dont elle faisait l'objet de la part de son mari qu'elle s'est trouvée contrainte de quitter les lieux en 1996, qu'elle les a réintégrés en septembre 1997 en accord avec Monsieur Z... et qu'elle n'a pas été en mesure de faire valoir ses droits lors de l'ordonnance de conciliation, n'ayant pas été régulièrement convoquée ; qu'elle ajoute que bien que se trouvant dans une situation financière très difficile, elle est en mesure de régler une soulte s'il y a lieu, ayant vendu un bien propre en 2005 ;

Que Monsieur Z... dénie les allégations de Madame X... et s'oppose à sa demande d'attribution préférentielle, faisant valoir qu'elle ne remplit pas la condition d'habitation exigée, ayant quitté les lieux en mai 1996 pour ne s'y réinstaller qu'un an et demi plus tard sans autorisation, d'autant qu'elle ne dispose pas de liquidités lui permettant de régler la soulte importante qui lui reviendra compte tenu de ses droits dans la communauté et de ses créances à l'encontre de l'intéressée ;

Considérant qu'en application de l'article 832 du code civil dans sa rédaction antérieure à la loi no 2006-728 du 23 juin 2006 applicable en la cause auquel renvoie l'article 1476 du code civil, un époux peut demander l'attribution préférentielle d'un bien commun à usage d'habitation s'il y avait sa résidence effective à la date de l'assignation en divorce ;

Considérant qu'il ressort des pièces produites que Monsieur Z... a quitté le domicile conjugal le 15 janvier 1995 après que les époux aient signé un document aux termes duquel ils convenaient de procéder à une séparation de fait ; que Madame X... en est elle-même partie en mai 1996 pour s'installer à Dusseldorf (Allemagne) avec l'enfant commun Matthias, en déménageant une partie du mobilier ; que Monsieur Z... a alors déposé une requête en divorce devant le tribunal de grande instance de Paris ; que Madame X..., touchée à sa nouvelle adresse par l'assignation dont l'accusé de réception a été signé par Matthias, ne s'est pas présentée à l'audience de conciliation ; que par ordonnance de non conciliation du 25 septembre 1996, le juge aux affaires familiales a autorisé les époux à résider séparément, le mari à Paris 17 ème, 22 rue des Acacias, et la femme à une adresse de son choix ; que Monsieur X... a assigné son épouse en divorce par acte d'huissier du 4 novembre 1996 toujours à son adresse de Dusseldorf, qui a été refusé ; que Madame X... est rentrée en France en septembre 1997 et a réintégré le domicile conjugal, où elle réside depuis ; qu'il est ainsi établi et au demeurant non contesté qu'à la date du dépôt de la requête puis de l'assignation en divorce et encore de l'audience de conciliation, Madame X... n'avait plus sa résidence effective au ... 16 ème ;

Que Madame X... ne rapporte pas la preuve que c'est pour échapper aux violences de son mari qu'elle aurait provisoirement abandonné le logement familial, les attestations versées aux débats émanant de personnes, Madame WESTRICK, Madame X... mère, Madame X... Agnès (soeur), Monsieur H..., Monsieur VON I..., Madame J..., Monsieur K..., qui n'ont pas personnellement assisté à des faits de violence verbale, physique ou morale concomitants au départ de Madame X..., étant observé que ni le jugement de divorce du 15 mai 2000, ni l'arrêt confirmatif du 24 octobre 2001 n'ont retenu un tel grief à l'égard de Monsieur Z... ;

Considérant qu'il s'ensuit que Madame X... ne remplissant pas la condition d'habitation exigée par l'article 832 du code civil, le jugement entrepris doit être confirmé en ce qu'il l'a déboutée de sa demande d'attribution préférentielle ;

Sur l'indemnité d'occupation

Considérant que Monsieur Z... sollicite sur le fondement de l'article 815-9 alinéa 3 du code civil la condamnation de Madame X... à lui payer une indemnité d'occupation pour la jouissance privative du bien commun à compter de son installation en septembre 1997, la prescription quinquennale ne pouvant lui être opposée, ce sur la base de 3 645 euros par mois en 1997 avec augmentation annuelle de 2 % soit 4 546 euros par mois en 2008, Madame X... ne pouvant selon lui se prévaloir du mauvais état des lieux alors qu'il lui appartenait de les entretenir ni faire diminuer le montant de l'indemnité au motif qu'elle aurait toujours eu Matthias à sa charge, ce qu'il conteste ;

Que Madame X... prétend que compte tenu de l'accord tacite entre les époux pour qu'elle réintègre le domicile conjugal en septembre 1997, de l'absence de jouissance privative et exclusive et de l'inopposabilité de l'ordonnance de non conciliation à son égard, Monsieur Z... n'est pas fondé à lui demander une indemnité d'occupation pour la période du 1er septembre 1997 au 6 novembre 2003, date à laquelle le jugement de divorce est devenu définitif ; qu'à compter de cette date le montant de l'indemnité ne saurait excéder 980 euros par mois eu égard au mauvais état de l'appartement et au caractère précaire de l'occupation, et doit être encore réduit de moitié en considération du fait que Matthias n'a jamais résidé chez son père, qu'il occupe sans contrepartie l'appartement indivis avec elle depuis mars 2004 et que c'est elle qui a assumé l'essentiel de ses frais d'entretien et d'éducation ; qu'elle se prévaut également de la prescription quinquennale de l'article 815-10 du code civil ;

Considérant qu'aux termes de l'article 815-9 alinéa 2 du code civil, l'indivisaire qui use ou jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, redevable d'une indemnité ; que l'article 815-10 précise qu'aucune recherche relative aux fruits et revenus, auxquels l'indemnité prévue à l'article 815-9 alinéa 2 est assimilée, ne sera toutefois recevable plus de cinq ans après la date à laquelle ils ont été perçus ou auraient pu l'être ;

Considérant d'abord que Monsieur Z... ne pouvant réclamer à Madame X... une indemnité au titre de l'occupation privative de l'appartement commun avant que la communauté ne soit dissoute, et donc à compter du jour où le jugement de divorce est passé en force de chose jugée, soit le 28 octobre 2003, date de l'arrêt de rejet de la cour de cassation, le délai de prescription n'a commencé à courir qu'à partir de cette date, et a été ensuite régulièrement interrompu par la demande que Monsieur Z... en a faite dans le procès-verbal de difficultés du 6 juillet 2004 puis dans toutes les conclusions qu'il a signifiées devant le tribunal puis la cour ;

Que l'indemnité étant néanmoins due à compter de la date à laquelle le jugement de divorce prend effet dans les rapports patrimoniaux entre époux, soit en l'espèce le 4 novembre 1996, date de l'assignation en divorce, Monsieur Z... est dés lors recevable à demander une indemnité d'occupation à compter du 1er septembre 1997, date à laquelle Madame X... a réintégré l'appartement commun ;

Considérant ensuite que si cette installation s'est faite avec l'accord de Monsieur Z..., Madame X... ne rapporte pas la preuve que les époux ont convenu de la gratuité de l'occupation ; que le fait que Monsieur Z... ait continué de se rendre occasionnellement dans l'appartement commun, même contre le gré de son épouse, ne caractérise pas un exercice concurrent avec celui de Madame X... de l'usage et de la jouissance des lieux, qu'elle exerçait et continue d'exercer privativement, alors qu'il est constant que Monsieur Z... a quitté le domicile conjugal le 15 janvier 2003 et qu'il n'est pas allégué que la vie commune a repris après le retour en France de son épouse ;

Que par ailleurs Madame X... ne saurait utilement mettre en cause aujourd'hui l'opposabilité de l'ordonnance de non conciliation à raison d'une prétendue violation des droits de la défense, ayant été assignée pour l'audience à sa nouvelle résidence et n'ayant pas exercé de recours contre cette décision ;

Considérant enfin qu'aucune circonstance ne justifie d'accorder à Madame X... la gratuité de l'occupation pour la période antérieure à la date à laquelle le divorce est devenu définitif et sa réduction pour la période postérieure à raison de l'hébergement et de l'entretien de l'enfant commun Matthias ;

Qu'en effet l'ordonnance de non conciliation du 25 septembre 1996 a fixé la résidence d'Aïga chez le père et celle de Matthias, que Madame X... avait emmené avec elle en Allemagne, chez la mère ; qu'après le retour en France de Madame X... le juge de la mise en état, par ordonnance du 7 juin 1999, a maintenu la résidence de Matthias chez sa mère, donné acte à Monsieur Z... de ce qu'il réglerait les factures afférentes aux deux enfants, dit qu'au vu des frais assumés par celui-ci à ce titre, notamment ceux liés à la scolarité de Matthias à L... Robert, il n'y avait pas lieu de fixer une pension alimentaire pour cet enfant à régler à la mère et fixé à 762,25 euros mensuels la pension alimentaire devant être réglée par Monsieur Z... à sa femme, selon l'offre qu'il en avait faite ; qu'il a en outre été donné acte à Monsieur Z... de ce qu'il poursuivrait le règlement des dépenses afférentes au domicile conjugal, à l'exception des frais de téléphone ; que le jugement de divorce du 15 mai 2000 a fixé la résidence de Matthias chez son père, disposition confirmée par l'arrêt du 24 octobre 2001 ;

Qu'il ressort de ces décisions et autres pièces versées aux débats que de septembre 1997 à juin 2002, Matthias était scolarisé en internat dans la région d'Angers, se rendant en alternance chez chacun de ses parents durant les fins de semaine et les vacances, que son père pourvoyait à l'essentiel des frais liés à son entretien et à son éducation, qu'en septembre 2002 Matthias, devenu majeur, s'est inscrit dans une école de management à Reims avec séjours en Allemagne ; qu'il a interrompu son cursus en mars 2004 et est venu s'installer chez sa mère ; qu'ainsi, jusqu'en 2004, Madame X... n'hébergeait Matthias qu'épisodiquement et assumait peu de frais ; que la situation actuelle de ce jeune homme de 24 ans, qui a vocation à vivre de façon indépendante à brève échéance, est temporaire et qu'il lui appartient d'agir contre son père s'il estime que celui-ci ne contribue pas suffisamment à ses besoins ; qu'en tout cas Madame X... n'établit pas que son fils, qui poursuit ses études dans le cadre d'une formation en alternance, donc partiellement rémunérée, a été et se trouve à sa charge exclusive ;

Considérant en revanche que les parties sont totalement contraires sur la valeur locative du bien commun, d'une superficie loi Carrez de 196,64 m2 et situé dans l'un des quartiers les plus recherchés de Paris, Madame X..., qui affirme que l'état actuel de l'appartement ne permettrait pas sa location, produisant un courrier d'un agent immobilier de mars 2006 évaluant la valeur locative de 10 à 12 euros/ m2 après rénovation, soit environ 2 000 euros par mois, tandis que Monsieur Z... verse notamment aux débats une évaluation de Monsieur M..., expert immobilier, de mai 2004 retenant une valeur locative de 250 euros annuels, soit 4 200 euros par mois ;

Que la cour estimant ne pas disposer d'éléments suffisants pour déterminer le montant de l'indemnité d'occupation dont Madame X... est redevable envers l'indivision post-communautaire, il convient de réformer le jugement entrepris en ce qu'il a fixé cette indemnité à 1 960 euros par mois et dit que Monsieur Z... est créancier de son ex-épouse d'une indemnité d'occupation pour la période du 1er septembre 1997 au 30 août 2007 de 117 600 euros, et de confier à l'expert commis, comme il sera vu ci-après, mission complémentaire de donner son avis sur ce point ;

Sur la demande d'annulation du jugement ordonnant une expertise et d'évocation

Considérant que Madame X... demande à la cour d'annuler le jugement en ce qu'il a ordonné une expertise et de juger sur pièces l'ensemble du litige en application de l'article 568 du code de procédure civile, ce à quoi Monsieur Z... s'oppose ;

Considérant que Madame X... n'explicite pas clairement la cause de nullité invoquée ; que la cour déduit de ses écritures qu'elle se prévaut d'une violation des droits de la défense et plus particulièrement du rejet par le premier juge des conclusions signifiées et pièces produites par elle le 20 mars 2007 comme tardives ; que Madame X... ayant pu devant la cour produire toutes pièces utiles et conclure de façon complète, il n'y a pas lieu à annulation du jugement ;

Considérant que la complexité des nombreuses contestations élevées portant notamment sur la détermination de l'actif et du passif de communauté et sur les récompenses et reprises, nécessitant des investigations comptables approfondies, rend nécessaire la mesure d'expertise ordonnée avant dire droit par le tribunal ; que la demande d'évocation sera en conséquence rejetée et le jugement confirmé de ce chef, les parties devant revenir devant le premier juge pour faire juger les points non encore tranchés après dépôt du rapport d'expertise ;

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Considérant qu'il n'y a pas lieu, en équité, à application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Que les dépens seront employés en frais privilégiés de partage.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement du 13 septembre 2007 sauf sur le montant de l'indemnité d'occupation et la somme dont Monsieur Z... est créancier à ce titre,

Réformant de ces chefs et statuant à nouveau,

Avant dire droit sur le montant de l'indemnité d'occupation dont Madame X... est redevable envers l'indivision du 1er septembre 1997 jusqu'au partage ou jusqu'à la libération des lieux et la créance de Monsieur Z... à ce titre, donne mission complémentaire à l'expert désigné par le jugement du 13 septembre 2007 de donner tous éléments d'appréciation sur la valeur locative de l'appartement depuis septembre 1997 jusqu'au jour le plus proche du dépôt de son rapport et sur le montant de l'indemnité d'occupation,

Confirme le jugement rectificatif du 11 octobre 2007,

Rejette toutes autres demandes,

Dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de partage.

La greffière, la Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Ct0202
Numéro d'arrêt : 07/18144
Date de la décision : 22/10/2008

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Paris, 13 septembre 2007


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2008-10-22;07.18144 ?
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