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09/10/2008 | FRANCE | N°07/00218

France | France, Cour d'appel de Paris, Ct0135, 09 octobre 2008, 07/00218


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

21ème Chambre C

ARRET DU 09 Octobre 2008

(no , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 07/00218 - MPDL

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 10 Novembre 2006 par le conseil de prud'hommes de MEAUX section encadrement RG no 03/00539

APPELANT

1o - Monsieur Noël X...

...

94120 FONTENAY SOUS BOIS

représenté par Me Pascale TRAN, avocat au barreau de CRETEIL, toque : PC001 substitué par Me Bénédicte Y.

.., avocat au barreau de CRÉTEIL,

INTIMEE

2o - SA METIN

81, avenue du Président Roosevelt

77100 MEAUX

représentée par Me Anne-Françoi...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

21ème Chambre C

ARRET DU 09 Octobre 2008

(no , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 07/00218 - MPDL

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 10 Novembre 2006 par le conseil de prud'hommes de MEAUX section encadrement RG no 03/00539

APPELANT

1o - Monsieur Noël X...

...

94120 FONTENAY SOUS BOIS

représenté par Me Pascale TRAN, avocat au barreau de CRETEIL, toque : PC001 substitué par Me Bénédicte Y..., avocat au barreau de CRÉTEIL,

INTIMEE

2o - SA METIN

81, avenue du Président Roosevelt

77100 MEAUX

représentée par Me Anne-Françoise NAY, avocat au barreau de VAL DE MARNE, toque : PC256,

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 05 Septembre 2008, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Marie-Pierre DE LIEGE, Présidente, chargée d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Marie-Pierre DE LIEGE, président

Mme Irène LEBE, conseiller

Mme Hélène IMERGLIK, conseiller

Greffier : Mme Anne-Marie CHEVTZOFF, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile.

- signé par Mme Marie-Pierre DE LIEGE, présidente et par Mme Anne-Marie CHEVTZOFF, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LES FAITS ET LA PROCÉDURE :

M Noël X... a été engagé, par la SA METIN, le 6 novembre 2000 en qualité de chef après-vente, suivant contrat à durée déterminée, contrat renouvelé en contrat à durée indéterminée le 19 janvier 2001. M Noël X... était affecté à la concession METIN de A....

Par LRAR du 18 mars 2003 il était licencié pour faute grave. Il lui était reproché d'avoir fait réparer un véhicule, acheté à son employeur dans des conditions particulièrement avantageuses, dans un autre établissement de la SA METIN à un tarif qui ne correspondait pas aux tarifs préférentiels accordés aux salariés de cette société, fait qui avait été découvert à l'occasion d'un inventaire tournant effectué le 26 février 2003 dans l'établissement de B....

M Noël X... saisissait alors le conseil de prud'hommes de A... le 7 mai 2003 pour contester son licenciement et réclamer diverses indemnités en conséquence. Par décision du 24 juin 2004, le conseil de prud'hommes de A..., section encadrement, déboutait M Noël X... de l'ensemble de ses demandes.

Ce dernier a régulièrement fait appel de cette décision. Soutenant n'avoir pas fait quoi que ce soit pour dissimuler les faits, n'avoir enfreint aucun règlement ou procédure interne et n'avoir confié cette réparation au garage de B... que parce que celui-ci se trouvait en inactivité partielle, M Noël X... demande à la cour d'infirmer la décision du conseil de prud'hommes, pour dire son licenciement abusif et de condamner la société Métin à lui verser les sommes suivantes :

- 11.494,62 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, congés payés afférents en sus ;

- 1.817,43 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement ;

- 45.979 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- 3.500 euros pour frais irrépétibles.

Il demande en outre que lui soient délivrés des bulletins de paie, un certificat de travail et l'attestation ASSEDIC conformes à la décision à intervenir et, à titre subsidiaire, demande que le jugement du conseil de prud'hommes soit réformé en ce que M Noël X... a été condamné à payer 700euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

La SA METIN a formé appel incident. Elle soutient que la lettre de licenciement est parfaitement motivée et établit la faute grave de M. C... qui avait manqué à ses obligations contractuelles en s'étant octroyé, au mépris des règles de fonctionnement de la société, un taux horaire de facturation particulièrement avantageux de 34 euros au lieu de 57 euros HT alors que la remise prévue pour le personnel de la société est de 10%.

La société reproche à M Noël X... une sous-facturation des travaux de remise en état de son véhicule de 431,81 euros TTC, correspondant à une remise de 40,35% au lieu de 10% prévus et de ne pas avoir fait facturer les ingrédients de peinture correspondant à une somme de 270,71 euros TTC.

Elle demande à la cour de confirmer le jugement du conseil de prud'hommes sauf à condamner M Noël X... à lui régler 1.500 euros pour frais irrépétibles en application de l'article 700 du code de procédure civile.

L'entreprise compte plus de 11 salariés.

Le salaire brut moyen mensuel de M Noël X... est de 3.831,54 euros

La convention collective applicable est celle des services automobiles

LES MOTIFS DE LA COUR :

Vu le jugement du conseil de prud'hommes, les pièces régulièrement communiquées et les conclusions des parties, soutenues oralement à l'audience, auxquels il convient de se référer pour plus ample information sur les faits, les positions et prétentions des parties.

Sur la rupture du contrat de travail de M Noël X... :

M Noël X... ne conteste pas dans leur matérialité les faits qui sont visés dans la lettre de licenciement pour faute grave, en ce qui concerne ceux relatifs au taux horaire de facturation de la main-d'oeuvre. Il en conteste en revanche les circonstances ainsi que l'intention frauduleuse qui aurait été la sienne.

M Noël X... indique en effet qu'après avoir acheté à son employeur un véhicule Peugeot 206 qui avait subi des dégâts importants à la suite d'une explosion survenue dans le garage, il avait dû procéder sur ce véhicule à un certain nombre de réparations, auxquelles il s'était engagé vis-à-vis de son vendeur, son employeur, avant de remettre le véhicule en circulation.

Il indique qu'il avait tout d'abord pensé faire réaliser ces réparations par un petit garage extérieur au réseau METIN, mais que compte tenu de la sous-occupation dont souffrait, notamment, le garage METIN de B..., à ce moment-là, il avait en concertation avec son collègue responsable de cet établissement, M. D..., pensé plus judicieux de confier son véhicule à ce garage, pour en occuper les ouvriers. Il avait alors été convenu que le véhicule ne serait traité qu'en «bouche-trous» en cas d'absence de tâches confiées par des clients extérieurs, et que les travaux lui seraient facturés au même prix que ce qui lui était demandé par le garage extérieur dans une fourchette de 850 à 920 euros.

Entendu par procès-verbal à l'audience, le responsable de l'établissement de B..., M. D..., qui avait lui-même été sanctionné par trois jours de mise à pied, a indiqué après avoir prêté serment : «nous étions en manque d'activité car nous venions de perdre le client Macif qui représentait 30% du chiffre d'affaires, problème soulevé au sein de l'entreprise avec M. de Saint Mars. J'ai rencontré M. X... qui avait les mêmes difficultés à A... pour lui demander s'il avait du travail pour nous. Il m'a dit que non mais qu'il devait faire réparer un véhicule accidenté qu'il avait racheté à la société Métin, qu'il pensait faire réparer à un petit atelier pour un coût inférieur. Nous avons alors réfléchi et j'ai pensé que je pouvais lui proposer de lui faire un tarif identique pour occuper mes ouvriers à condition de réaliser ces travaux en « bouche-trous», ce qui s'est passé. Le forfait est pratiqué dans tous les établissements dans un certain nombre de cas pour arranger les clients quand une partie des travaux n'est pas prise en charge par la facturation prise en charge elle-même par l'assurance. Notamment en ce qui concerne les heures de peinture nous aurions parfaitement pu l'indiquer sous forme de forfait. La facture des pièces détachées qui n'a pas été jointe à la première facture n'est pas de la responsabilité de M. X... mais du magasinier, il a laissé le bon en attente".

Il a ainsi été expliqué à l'audience, que le tarif de 34 euros de l'heure avait été entré manuellement dans l'ordinateur par M D..., pour permettre de parvenir au chiffrage prévu, en fonction du nombre d'heures de travail opéré sur le véhicule.

M. E... de Saint Mars, également présent à l'audience a déclaré après avoir prêté serment : «je corrobore les dires de M. D... sur le recours aux forfaits mais je précise que ceux-ci ne sont applicables qu'aux clients extérieurs pour éviter les faveurs au sein de l'entreprise».

M Noël X..., également présent, a précisé que le forfait pouvait aller jusqu'à 50 % du prix tarif, ainsi qu'il l'avait indiqué dans la lettre en réponse à son entretien préalable datée du 12 mars 2003, point sur lequel il n'a pas été utilement contredit. Cette pratique visant à compenser, à tout le moins, les charges fixes de l'entreprise. Il a souligné par ailleurs que disposant lui-même dans son établissement de A... de 10 mécaniciens et 13 carrossiers il aurait, s'il voulait dissimuler l'opération, pu se débrouiller seul. Au lieu de cela la réparation avait été décidée en toute clarté avec son collègue de B..., et avait donné lieu, régulièrement à l'émission d'un ordre de réparation daté du 21 janvier 2003, d'un bon de sortie de pièces daté du 23 janvier 2003, et d'une facture datée du 14 février 2003, établis à son nom, documents qui ont d'ailleurs appelé l'attention de l'employeur lors de l'inventaire de fin février.

Il est par ailleurs constant, que ces contrôles ont été opérés alors que le véhicule de M Noël X... ne lui avait pas encore été restitué. M Noël X... a précisé sans être contesté qu'il avait réglé sa facture le jour même de la remise du véhicule.

De l'ensemble de ces éléments il ressort que l'intention fautive de M Noël X... n'est pas établie, que par ailleurs, l'employeur n'établit pas qu'il a, compte tenu des circonstances, et de la pratique de forfait reconnue et laissée à la libre appréciation des responsables de concession, subi de préjudice particulier à l'occasion de cette opération, quand bien même cette réparation a été réalisée au profit d'un membre du personnel et a entraîné une remise plus importante que celle octroyée généralement aux employés de la société.

En outre, les faits reprochés à M Noël X... dans la lettre recommandée : «vous vous êtes permis de vous octroyer sans aucune autorisation de votre propre initiative un avantage spécifique...», n'ont pas en réalité été «opérés» par M Noël X... lui-même, étant relevé qu'il n'avait aucun pouvoir hiérarchique sur l'établissement de B..., mais par M. D..., responsable de B..., ainsi que par le magasinier, en ce qui concerne la facturation tardive de la peinture, comme l'a soulevé M. D... lui-même.

En conséquence, s'agissant d'un salarié justifiant de deux ans et demi d'ancienneté, qui n'avait jusqu'à présent fait l'objet d'aucun reproche, ces circonstances qui auraient pu faire l'objet d'un rappel à l'ordre voire d'une facturation complémentaire, ne justifiaient pas un licenciement.

La cour infirmera donc la décision du conseil de prud'hommes en ce qu'il a dit le licenciement pour faute grave fondé.

Compte tenu des circonstances de l'espèce, de l'ancienneté dans son emploi du salarié, de son âge lors du licenciement et du préjudice qu'il établit avoir subi à la suite de celui-ci la cour fixe à 25.000euros la somme due en application de l'article L.1235-3 du code du travail.

Sur l'indemnité de préavis et les congés payés afférents :

Le licenciement de M Noël X... étant dépourvu de cause réelle et sérieuse, il sera fait droit, à sa demande relative à l'indemnité de préavis et de congés payés afférents ainsi qu'à l'indemnité de licenciement, dont les quantum ne sont pas contestés.

L'employeur devra remettre à M Noël X... des bulletins de paie et une attestation ASSEDIC conformes à la présente décision.

Sur la demande de dommages et intérêts au titre de l'article 700 du Code de procédure civile :

La Cour considère que, compte tenu des circonstances de l'espèce, il apparaît inéquitable de faire supporter par M Noël X... la totalité des frais de procédure qu'il a été contraint d'exposer. Il sera donc alloué une somme de 2.000 euros, à ce titre pour l'ensemble de la procédure.

PAR CES MOTIFS,

En conséquence, la Cour Infirme la décision du Conseil de prud'hommes dans toutes ces dispositions,

et statuant à nouveau :

Dit le licenciement de M Noël X... dépourvu de cause réelle et sérieuse,

Condamne la SA METIN à payer à M Noël X... les sommes suivantes :

- 25.000 euros à titre d'indemnité pour licenciement abusif en application de l'article L.1235-3 du code du travail, avec intérêts de droit à compter de la présente décision,

- 11.494,62 euros à titre de préavis et 1.149,46 euros pour congés payés afférents,

- 1.817,43 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

avec intérêts de droit à compter de la date de réception par l'employeur de la convocation devant le conseil de prud'hommes,

Ordonne à l'employeur de remettre à M Noël X... des bulletins de paie et une attestation ASSEDIC conformes à la présente décision,

Déboute M Noël X... du surplus de ses demandes,

Déboute la SA METIN de ses demandes reconventionnelles,

Condamne la SA METIN à régler à M Noël X... la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile pour l'ensemble de la procédure,

La condamne aux entiers dépens de l'instance.

LE GREFFIER, LA PRESIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Ct0135
Numéro d'arrêt : 07/00218
Date de la décision : 09/10/2008

Références :

ARRET du 24 mars 2010, Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 24 mars 2010, 08-45.322, Inédit

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Meaux, 10 novembre 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2008-10-09;07.00218 ?
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