Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
2ème Chambre-Section A
ARRET DU 01 OCTOBRE 2008
(no, 7 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 06 / 15213
Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 novembre 2004 du Tribunal de grande instance de PARIS (R. G. no 04 / 10705 et 04 / 14514) sur arrêt d'annulation partielle du 20 juin 2006 par la Cour de cassation no1025 FS P + B d'un arrêt de réouverture des débats du 24 février 2005 et d'un arrêt mixte du 14 avril 2005 de la Cour d'appel de Paris- 2ème Chambre B (R. G. no 04 / 24633).
DEMANDERESSE À LA SAISINE :
APPELANTE :
Madame Sylvia X...épouse Y...
demeurant ...,
représentée par la SCP BERNABE-CHARDIN-CHEVILLER, avoués à la Cour,
assistée de Maître Claude Z...A..., avocat au barreau de PARIS, toque : C272.
DEFENDEUR À LA SAISINE :
INTIMÉ :
Monsieur Guy, Nathan, Michel Y...
demeurant 11 East ...,
représenté par la SCP FISSELIER-CHILOUX-BOULAY, avoués à la Cour,
assisté de Maître Emmanuel BROCHIER, de Maître Emilie C...et de Maître Jean-Michel DARROIS du Cabinet AARPI DARROIS VILLEY MAILLOT BROCHIER, avocat au barreau de PARIS, toque : R 170.
INTERVENANTS :
- Madame E...Stoupakova Y...
demeurant ...,
- Mademoiselle Diane Y...
demeurant ... 2G DUBAI (Emirats Arabes),
- Monsieur Alec, Daniel, Armand Y...
demeurant ...en haut 1752 VILLARS SUR GLANE (SUISSE),
représentés par la SCP FISSELIER-CHILOUX-BOULAY, avoués à la Cour,
assistés de Maître Emmanuel BROCHIER, de Maître Emilie C...et de Maître Jean-Michel DARROIS du Cabinet AARPI DARROIS VILLEY MAILLOT BROCHIER, avocat au barreau de PARIS, toque : R 170.
INTERVENANTE :
Maître Monique F...
ès-qualité d'administrateur provisoire de l'indivision postcommunautaire et successorale consécutive au décès de Daniel Y...,
demeurant 13 boulevard des Invalides 75007 PARIS,
représentée par la SCP PETIT LESENECHAL, avoués à la Cour
assistée de Maître Stéphane G..., avocat au barreau de PARIS, toque D062.
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 10 juin 2008, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame DESLAUGIERS WLACHE, président,
Madame LACABARATS, conseiller,
Madame REYGNER, conseiller.
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame BERTINO.
ARRET :
Contradictoire,
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
- signé par Madame DESLAUGIERS-WLACHE, président, et par Monsieur NGUYEN, greffier présent lors du prononcé.
Madame X...veuve Y...a, le 22 novembre 2001, renoncé à la succession de son mari Daniel Y...décédé le 23 octobre 2001 en laissant, outre sa veuve, avec laquelle il s'était marié en 1978, ses deux fils d'une première union : Alec Y...et Guy Y....
Par jugement du 29 novembre 2004 le tribunal de grande instance de Paris a rejeté la demande de Madame Y...de voir annuler sa renonciation à succession pour dol, erreur et abus de faiblesse.
Statuant sur l'appel relevé par Madame X...veuve Y...de cette décision, la cour, 2e chambre section B a, par arrêt du 14 avril 2005 :
- écarté des débats les notes en délibéré
-infirmé le jugement
-dit que Madame X...et Daniel Y...étaient mariés sous le régime légal français de la communauté réduite aux acquêts
-annulé la déclaration de succession du 23 avril 2002, les inventaires annexés et la renonciation de Madame X...à la succession de son mari
-ordonné l'ouverture des opérations de comptes liquidation et partage de la communauté ayant existé entre les époux et de la succession de Daniel Y...et commis à cette fin la SCP Houry-Lebaron-Narbey-Theze avec mission notamment d'établir un projet de partage tenant compte des meubles et immeubles tant en France qu'à l'étranger acquis par Daniel Y...et / ou Madame Y...à compter du 28 novembre 1978 et à toutes fins des biens qui se trouvaient dans le patrimoine commun au 13 octobre 2001
- désigné pour parvenir à ces opérations en qualité d'expert Monsieur I...avec mission précise
-dit que le legs verbal consenti à Madame Y...s'imputera sur sa part d'usufruit légal dans la limite de la quotité disponible
-débouté Madame X...de sa demande de conversion de son usufruit en capital
-dit Messieurs Y...tenus in solidum à verser à Mme X...une somme de 15. 000. 000 € à titre d'avance en capital sur ses droits dans le partage de l'indivision post-communautaire à intervenir et celle de 500. 000 € à valoir sur ses droits au titre de l'usufruit
-rejeté sa demande en réparation d'un dommage moral
-dit Messieurs Y...tenus in solidum de verser à Mme X...la somme de 80. 000 € par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile
-rejeté toute autre prétention.
Sur pourvoi formé par Messieurs Y...la cour de cassation, par arrêt du 20 juin 2006, a cassé cet arrêt partiellement en ce qu'il avait condamné Messieurs Y...à payer 500. 000 € a valoir sur les droits d'usufruit légal et en ce qu'il a inclus dans les opérations de partage les immeubles successoraux situés à l'étranger la règle française du conflit donnant compétence à la loi du lieu de situation de l'immeuble et a renvoyé les parties devant la cour de Paris autrement composée.
Demanderesse à la saisine de la cour de renvoi et appelante, Madame Y...demande, par dernières conclusions du 10 avril 2008, après visas :
- vu les principes d'unité du patrimoine et d'immutabilité du régime matrimonial
-vu les règles du conflit en matière successorale des immeubles dépendant des éléments d'actif de la communauté situés à l'étranger
-faire application des dispositions de la loi française en matière de liquidation partage du régime légal de la communauté réduite aux acquêts pour ce qui concerne les biens sis au Kénya et aux Iles Vierges
-faire application des dispositions des conventions fiscales des 31 aout 1994 et 24 novembre 1978 en ce qui concerne les biens situés aux USA, société Nineteen East Sixt-Fourth Corporation et société 740 Madison Corporation avenue
-statuer ce que de droit sur les dépens.
Elle rappelle l'obligation qui pèse sur chacun de concourir à la manifestation de la vérité et les sommations qu'elle a fait délivrer aux héritiers de Daniel Y...de communiquer tous titres de propriété afférents aux biens immobiliers dont elle prétend qu'ils dépendent de la communauté et / ou de la succession de son mari ; que s'agissant de la propriété des Iles Vierges et de celle du Kénya elle se prévaut des attestations de Madame J..., Monsieur K..., Madame L...et Madame de Villiers.
Elle invoque la règle de l'unicité du patrimoine faisant obstacle à toute distinction entre la nature et la situation des biens ainsi que la présomption de communauté, devant s'appliquer dès lors qu'il n'est pas prouvé que les biens avaient été acquis avant le mariage.
Quant aux immeubles qu'elle attribue au patrimoine propre de Daniel Y..., à savoir les immeubles détenus par les sociétés 19 East Sixty-Fourth Corporation et 740 Madison Mineteen Corporation Avenue, elle se prévaut essentiellement de conventions fiscales entre les Etats-Unis et la France des 31 août 1994 et 24 novembre 1978.
Par conclusions du 10 avril 2008 Madame Liouba Y..., Monsieur Alec Y...et Mademoiselle Diane Y...sont intervenus à l'instance en qualité d'héritiers d'Alec Y...décédé le 17 février 2008
Par dernières conclusions du 7 mai 2008 Monsieur Guy Y..., Madame Lioubov Y..., Monsieur Alec Y...et Mademoiselle Diane Y..., ci-après les consorts Y..., demandent :
- dire qu'il n'existe aucun immeuble dépendant de la succession de Daniel Y...situé à l'étranger
-à titre infiniment subsidiaire, si la cour retenait que les immeubles aux Iles Vierges et au Kénya ou aux USA relèvent de la succession, leur donner acte de ce qu'ils reconnaissent que la loi applicable est celle du lieu de situation des dits immeubles et non la loi française
-en tout état de cause, débouter Madame X...de toutes ses demandes
-la condamner à payer 50. 000 € pour frais irrépétibles
-la condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Ils contestent la valeur probante des éléments produits en vue de démontrer le caractère commun des propriétés des Iles Vierges et du Kénya et soutiennent que, s'agissant des sociétés new-yorkaises propriétaires de biens immobiliers, leur père n'en détenait aucune part au jour de son décès.
Ils ajoutent qu'en tout état de cause la production aux débats des lois du Kénya et des Iles Vierges établit que les biens situés sur ces territoires doivent être liquidés selon la loi de leur lieu de situation et que les conventions fiscales invoquées sont sans effet sur le litige.
Madame F..., administrateur judiciaire de la succession, par conclusions du 9 avril 2008, demande acte de ce qu'elle s'en rapporte à justice sur le mérite des demandes, de statuer ce que de droit sur les dépens et d'autoriser son avoué à en poursuivre le recouvrement dans les termes de l'article 699 du code de procédure civile.
Par arrêt avant dire droit du 17 octobre 2007 la cour a ordonné la communication de la procédure au ministère public aux fins de production des lois applicables dans les pays de situation des biens revendiqués.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Considérant qu'il sera donné acte à Madame Liouba Y..., à Mademoiselle Diane Y...et à Monsieur Alec Y...de leur intervention en leur qualité d'héritiers d'Alec Y...et à Madame F...de ce qu'elle s'en rapporte à justice sur le mérite des demandes ;
Considérant que sur renvoi de la cour de cassation, Madame Y...ne prétend plus à paiement d'une avance sur ses droits d'usufruit ; que le débat est alors circonscrit à la question de la loi applicable aux immeubles situés à l'étranger qui dépendraient de la communauté Y...et de ceux qui dépendraient de la succession de Daniel Y...;
Considérant alors qu'il convient d'une part d'identifier les biens immobiliers concernés, puis de rechercher s'il convient d'appliquer la loi du lieu de leur situation ou la loi française ;
Considérant que Madame Y...soutient que son mari avait acquis postérieurement à leur mariage, lequel a été célébré le 28 novembre 1978, une propriété aux Iles Vierges britanniques et une propriété au Kénya, que compte tenu de la période d'acquisition ces biens bénéficient de la présomption de communauté édictée par l'article 1402 du code civil et, en outre, qu'il avait des droits sur des immeubles familiaux à New-York détenus par des sociétés ;
Considérant toutefois que dans l'instance aboutissant à un arrêt du même jour la cour a considéré qu'aucune preuve suffisante n'était rapportée de ce qu'il dépendait des patrimoines commun ou propre de Daniel Y...des biens immobiliers situés à l'étranger ou des parts sociales ;
Considérant au surplus que suite à la communication de la procédure, il a été produit les lois applicables aux règlements successoraux desquelles il résulte que dans les lois kényanne, britannique et de l'Etat de New-York la liquidation des biens immobiliers après décès est régie par la loi du lieu de situation de l'immeuble ;
Considérant en conséquence que Madame Y...doit être déboutée de ses demandes de voir appliquer la loi française à la liquidation des immeubles ;
Considérant que l'équité ne commande pas qu'il soit fait application aux consorts Y...des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Considérant que les dépens seront employés en frais de partage ;
PAR CES MOTIFS,
Donne acte à Madame E...veuve Y..., à Mademoiselle Diane Y...et à Monsieur Alec Y...de leur intervention
Statuant dans les limites de la cassation et de la saisine de la cour sur renvoi
Donne acte à Madame F..., administrateur judiciaire de la succession de Daniel Y...de ce qu'elle s'en rapporte à justice sur le mérite des demandes
Déboute Madame Y...de ses demandes de voir appliquer la loi française à la liquidation d'immeubles
Déboute les consorts Y...de leur demande au titre des frais irrépétibles
Ordonne l'emploi des dépens en frais de partage.
Le greffier, Le Président,